17 juillet 2016

Buffet froid (1979) de Bertrand Blier

Buffet froidDans un couloir de métro, Alphonse (Gérard Depardieu) trouve un homme affalé qu’il avait rencontré quelques minutes auparavant sur le quai désert. L’homme a un couteau dans le ventre, son propre couteau! Quand il rentre dans la tour déserte où il vit seul avec sa femme, Alphonse fait la connaissance de Morvandiau (Bernard Blier), un bien étrange inspecteur de police… Tel est le point de départ de Buffet froid, cinquième long métrage de Bertrand Blier qui en a écrit le scénario. Il s’agit d’une comédie noire dotée d’un bel humour absurde où personne ne se comporte comme il le devrait. La façon d’enchaîner des situations où la logique cède la place à l’inattendu évoque Buñuel (notamment Le Fantôme de la liberté) à ceci près qu’il n’y a pas ici d’allégorie politique : le propos de Bertrand Blier est plus l’incommunicabilité et la difficulté de maitriser les évènements. Dans cet univers déshumanisé, où les repères forts ont disparu (à commencer par l’élémentaire réprobation du meurtre), ses personnages tentent de dominer des situations qui leur échappent constamment. Les dialogues sont particulièrement brillants, jubilatoires même, et on se prend souvent à ressentir l’envie de retourner en arrière pour les réécouter une seconde fois. Ils n’ont en tous cas plus cette vulgarité (et une certaine misogynie) que certains reprochaient aux films précédents de Blier. Il faut des acteurs de premier plan pour mettre ce genre de dialogues en valeur est c’est le cas ici avec le superbe trio Depardieu/Blier/Carmet. Malgré un bon accueil critique, le film a été un échec commercial à sa sortie, déconcertant le public.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Gérard Depardieu, Bernard Blier, Jean Carmet, Carole Bouquet, Geneviève Page, Jean Benguigui, Michel Serrault
Voir la fiche du film et la filmographie de Bertrand Blier sur le site IMDB.

Voir les autres films de Bertrand Blier chroniqués sur ce blog…

Buffet froid
Gérard Depardieu et Bernard Blier dans Buffet froid de Bertrand Blier.

Remarques :
* Quidam jusqu’au bout, Michel Serrault n’est pas crédité au générique !
* Buffet froid est le deuxième long métrage de Carole Bouquet après Cet Obscur objet du désir (1977), dernier film de Luis Buñuel.
* Bertrand Blier dit avoir écrit le scénario en 15 jours, de façon si précise qu’il l’a ensuite tourné sans en changer une ligne.
* Les tours désertes sont celles de La Défense alors toujours en phase de construction.
* La scène finale se déroule sur le pont de Brion (20 kms au sud de Grenoble), puis en contrebas sur l’Ebron. Voir ce superbe lieu

Buffet froid
Etonnant plan de la scène finale où la barque semble suspendue, de façon irréelle : Gérard Depardieu et Carole Bouquet dans Buffet froid de Bertrand Blier.

15 juillet 2016

La Femme aux maléfices (1950) de Nicholas Ray

Titre original : « Born to Be Bad »

Born to be BadDonna (Joan Leslie) accueille de bon coeur sa cousine Christabel (Joan Fontaine) sous son toit sans savoir qu’elle va s’arranger pour attirer l’attention de tous les hommes que Donna fréquente, à commencer par son riche fiancé… Born to Be Bad fait partie des premiers films de Nicholas Ray. Ce mélodrame paraît nettement moins remarquable que ses autres réalisations. L’intrigue est finalement assez conventionnelle et donc prévisible, avec une dimension psychanalytique sous-jacente qui reste hélas non développée. L’ensemble est sauvé par une belle interprétation, y compris dans les seconds rôles. Joan Fontaine casse ici son image habituelle de jeune femme parfaite et irréprochable. Le directeur de la photographie est le très expérimenté (et talentueux) Nicholas Musucara. On remarquera de nombreux très beaux plans et la prédilection de Nicholas Ray pour les escaliers… Le talent et l’inventivité de Ray pour la mise en scène sont patents dans la scène d’ouverture qui introduit un à un les principaux protagonistes en un vaste ballet de personnages sur un simple palier.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Joan Fontaine, Robert Ryan, Zachary Scott, Joan Leslie, Mel Ferrer
Voir la fiche du film et la filmographie de Nicholas Ray sur le site IMDB.

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Voir les livres sur Nicholas Ray

Remarques :
* Born to Be Bad fait partie des quelques films dont Nicholas Ray refusait de parler.
* La scène de fin en happy end sur le tarmac de l’aérodrome a été ajoutée à la demande d’Howard Hugues (qui venait de racheter RKO Pictures). Cette scène fait sourire tant elle paraît peu crédible. Il est d’ailleurs peu probable qu’elle ait été tournée par Nicholas Ray. Le simple fait de voir soudainement Zachary Scott aux commandes d’un avion surprend… sauf si on se rappelle qu’Howard Hugues est un grand fan d’aviation !
* Le film n’est sorti en France qu’en 1985.

* Homonyme (sans aucun rapport) :
Born to Be Bad de Lowell Sherman (1934) avec Loretta Young et Cary Grant, film de la 20th Century Fox qui n’est, semble t-il, jamais sorti en France.

Born to be bad
Zachary Scott, Joan Fontaine et Mel Ferrer dans Born to be Bad de Nicholas Ray.

Born to be bad
Harold Vermilyea, Joan Leslie et Robert Ryan dans Born to be Bad de Nicholas Ray.

13 juillet 2016

Mata Hari, agent H21 (1964) de Jean-Louis Richard

Mata Hari, agent H21En 1917, la danseuse « javanaise » Mata Hari séduit le public du cabaret parisien où elle se produit. C’est aussi une espionne qui travaille pour l’Allemagne et qui utilise ses charmes pour obtenir des renseignements… Mata Hari, agent H21 est un film plutôt rare et méconnu. Son géniteur est Jean-Louis Richard, scénariste de François Truffaut. La situation est ici inversée puisque Truffaut est scénariste-dialoguiste du film. Les deux compères utilisent le mythe de l’espionne Mata Hari (rappelons que si la femme a bien existé, on ne sait toujours pas avec certitude aujourd’hui si elle était réellement une espionne) pour mettre en valeur Jeanne Moreau, actrice qu’ils portent tous deux dans leur coeur. Les invraisemblances n’ont donc que peu d’importance, on se situe même à la limite de la fantaisie, du divertissement plaisant. Malgré un budget certainement limité, la reconstitution est soignée et réussie avec une agréable atmosphère Belle-époque. La photographie de Michel Kelber est assez superbe et les dialogues souvent brillants. La musique de Georges Delerue est très présente, peut-être un peu trop, parfois. L’ensemble est assez élégant. Sans être un film majeur, Mata Hari, agent H21 est un bel écrin pour Jeanne Moreau qui succède ainsi joliment à Greta Garbo…
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jeanne Moreau, Jean-Louis Trintignant, Claude Rich, Henri Garcin, Frank Villard
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean-Louis Richard sur le site IMDB.

Voir les livres sur Jeanne Moreau

Remarques :
* On remarquera les petites apparitions d’autres acteurs de l’univers Truffaut : Jean-Pierre Léaud (le fils un peu illuminé), Marie Dubois (la jeune fille à la gare), Charles Denner (un soldat), Albert Rémy (le père) ou encore Nicole Desailly, la femme de Jean Desailly (en Charlotte, servante de Mata Hari).
* Jean-Louis Richard a ensuite été plus souvent acteur que réalisateur.
* Jeanne Moreau et Jean-Louis Richard ont été brièvement mariés (1949-1951), ils ont eu un fils ensemble, Jérôme Richard qui a fait un peu de figuration (il a un petit rôle dans Céline et Julie vont en bateau de Rivette).

* Autres films inspirés de la vie de Mata Hari :
Mata Hari (1921) film allemand de Ludwig Wolff avec la star danoise Asta Nielsen (film perdu)
Mata Hari, die rote Tänzerin (1927) film allemand de Friedrich Feher avec sa femme Magda Sonja dans le rôle principal (film perdu)
Mata Hari (1931) de George Fitzmaurice avec Greta Garbo
Mata Hari (1985) variation pseudo érotique avec Sylvia Kristel.
Mata Hari (2017?) film de David Carradine avec sa fille Calista Carradine dans le rôle principal (film en production)
+ plusieurs téléfilms dont un récent (2003) avec Maruschka Detmers.

Mata Hari
Jean-Louis Trintignant et Jeanne Moreau dans Mata Hari, agent H21 de Jean-Louis Richard.

Mata Hari
Jeanne Moreau, photo publicitaire pour Mata Hari, agent H21 de Jean-Louis Richard.

11 juillet 2016

Under 18 (1931) de Archie Mayo

Under 18Dans l’Amérique de 1930, la jeune Marge Evans travaille comme couturière. Elle vit avec sa mère qu’elle a à charge mais est amoureuse de Jimmy, chauffeur d’un camion d’épicerie. Elle envie ses collègues mannequins qui reçoivent de beaux cadeaux de clients fortunés. Parallèlement, elle assiste au naufrage du mariage de sa soeur ainée… Under 18 fait partie de ces films sociaux de la Warner qui, en pleine Dépression, proposaient des lignes de conduite au public. Le présenter uniquement comme un film « pré-code » sous prétexte d’une ou deux scènes où Marian Marsh est en petite tenue est faire fausse route car le propos est très moral : « il ne faut pas céder aux sirènes de l’argent facile et il faut savoir attendre le moment propice où l’on pourra saisir sa chance ». Pour l’argent facile, l’histoire montre un monde de riches oisifs où tout paraît facile, mais où la chute peut être terrible ; le contact avec ce monde ne peut être que nocif. Le récit fustige également les métiers faciles et artificiels (le mari de la soeur est un joueur de billard, beau parleur mais incapable de subvenir aux besoins de sa famille sur le long terme). La fin en happy-end est bizarrement équilibrée mais vient prouver qu’un comportement vertueux est toujours récompensé. Marian Marsh, effectivement âgée d’à peine 18 ans, est au centre du film, exprimant une belle ingénuité. L’actrice qui avait très remarquée l’année précédente dans Svengali du même Archie Mayo, est à la fois photogénique et dotée d’une belle présence. Il est assez étrange qu’elle n’ait pas fait une plus belle carrière. Les décors Art-déco, notamment ceux du penthouse du séducteur fortuné, sont superbes.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Marian Marsh, Anita Page, Regis Toomey, Warren William
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Remarques :
On parle beaucoup d’argent dans le film, voici les sommes actualisées :
Marge gagne $ 85 par mois (= $ 1 200 actuels) comme couturière.
Elle dépense $ 30 par mois (= $ 450 actuels) pour se nourrir, elle et sa mère, et paye autant pour son loyer.
Elle cherche $200 (= $ 3 000 actuels) pour payer l’avocat.
Son fiancé a économisé $ 800 (= $ 12 500 actuels) pour pouvoir démarrer son affaire.
Dans le monde des riches, les prix sont étonnamment élevés :
le bouquet d’orchidées est évalué à $100 ($1 500 actuels !), le beau manteau de fourrure est vendu $ 16 000 ($ 250 000 actuels).

Under 18
Marian Marsh dans Under 18 d’Archie Mayo.

9 juillet 2016

The Doorway to Hell (1930) de Archie Mayo

Titre français parfois utilisé : « Au seuil de l’enfer »
Autre titre (U.K.) : « A Handful of Clouds »

Au Seuil de l'EnferPar ses méthodes brutales, Lou Ricarno parvient à imposer sa loi aux différents gangs de Chicago qui cessent alors de s’entretuer. C’est alors qu’il désire se marier et se retirer des affaires… Tourné fin 1930, The Doorway to Hell fait partie de ces films où le style du film de gangsters de la Warner commence nettement à se dessiner (rappelons que la décennie des années trente est celle du film de gangsters tout comme celle des années quarante est celle du film noir). Nous sommes là quelques mois avant la sortie de Little Caesar et de Public Enemy qui marqueront le genre. L’histoire est librement inspirée de celle du véritable gangster Johnny Torrio, prédécesseur d’Al Capone. Tous les éléments du genre sont là depuis le fait de faire parler les mitraillettes transportées dans des étuis à violons pour s’imposer jusqu’à la représentation de chefs mafieux comme des personnages originaux. La force du film est bridée par des dialogues assez ternes et aussi par l’interprétation : Lew Ayres (21 ans) est plus un beau gosse qu’un malfrat qui impose sa loi à des individus à la mine patibulaire. Heureusement, son lieutenant est interprété par James Cagney qui montre une belle présence pour son deuxième long métrage. Bien entendu, on peut se dire avec le recul que le film aurait certainement été tout autre si la distribution avait été inversée. The Doorway to Hell témoigne joliment de l’émergence du style Warner dans le genre du film de gangsters.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Lew Ayres, Dorothy Mathews, Robert Elliott, James Cagney, Dwight Frye
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Remarque :
Archie Mayo fait partie des ces réalisateurs que l’on qualifie avec le recul plutôt d’exécutants de que de créateurs ; ils sont parfois péjorativement appelés les Yes Man. Ils sont toutefois loin d’être négligeables et ce sont eux qui montrent le mieux le style d’un studio.  Archie Mayo a signé plusieurs des films de gangsters de la Warner dans les années trente, notamment certains avec Humphrey Bogart (dont La Forêt pétrifiée). Archie Mayo n’était pas aimé des acteurs, surtout à partir de la fin des années trente, car il se comportait comme un tyran sur le plateau.

The doorway to hell
Lew Ayres, Dorothy Mathews et James Cagney, photo publicitaire pour Au Seuil de l’Enfer de Archie Mayo.

The Doorway to Hell
Lew Ayres (dans la cellule) , Robert Elliott et  James Cagney (le gardien de prison est un figurant non identifié) dans Au Seuil de l’Enfer de Archie Mayo.

7 juillet 2016

L’Extravagant Mr Deeds (1936) de Frank Capra

Titre original : « Mr. Deeds Goes to Town »

L'extravagant Mr DeedsDans sa petite ville du Vermont, Longfellow Deeds est un homme simple. Soudainement héritier d’une immense fortune, il est la cible de profiteurs et de journalistes peu scrupuleux dès son arrivée à New York… L’Extravagant Mr Deeds (1936) forme avec Mr. Smith au sénat (1939) et L’homme de la rue (1941) une trilogie humaniste de Frank Capra. Le réalisateur a une indéfectible confiance en la nature humaine, il a cette vision un peu idéaliste où l’égoïsme, la jalousie, la cupidité doivent céder face à des sentiments plus nobles. Peu importe que le bien triomphe grâce à un retournement de situation aussi improbable qu’inespéré, le message d’optimisme est affirmé avec la force de la simplicité. On peut également déceler une dose de populisme dans l’exaltation du sens commun de l’homme ordinaire face aux prétendus savoirs des élites. Il faut replacer tout ce propos dans son contexte : le pays est alors en plein New Deal de Roosevelt qui va bouleverser en profondeur l’économie américaine. Gary Cooper, que Capra voulait absolument (le tournage fut retardé de six mois pour attendre que l’acteur soit libre), est superbe. Les seconds rôles sont également bien définis comme en témoigne la scène du procès. La mise en scène de Capra montre de belles trouvailles et l’ensemble allie joliment puissance et légèreté. Le film connut un très grand succès.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gary Cooper, Jean Arthur, George Bancroft, Lionel Stander, Douglass Dumbrille
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Remarques :
* Comme on peut le voir sur l’affiche ci-dessus, Harry Cohn (patron de la Columbia) a pour la première fois autorisé un metteur en scène à mettre son nom au dessus du titre (du fait de l’immense succès de son film It Happened One Night deux ans auparavant).

* Une suite a été envisagée avec les mêmes acteurs Mr. Deeds Goes to Washington mais le projet évolua pour donner Mr. Smith Goes to Washington (1939) avec James Stewart à la place de Gary Cooper.

* Frank Capra reçut son second Oscar du meilleur réalisateur (au cours de sa carrière, il en aura 3 pour It Happened One Night (1934), Mr. Deeds Goes to Town (1936) et You Can’t Take It with You (1938)).

* Le terme to doodle (= griffonner sur une feuille en pensant à autre chose) inventé par le scénariste de Capra, Robert Riskin, est passé dans le langage courant.

Mr Deeds goes to town
Gary Cooper et Jean Arthur dans L’Extravagant Mr Deeds de Frank Capra.

* Remake (peu réussi) :
Les aventures de Mister Deeds (Mr. Deeds) de Steven Brill (2002) avec Adam Sandler, Winona Ryder, et John Turturro.

5 juillet 2016

The Immigrant (2013) de James Gray

The ImmigrantEn 1921, Ewa et sa soeur Magda ont fui leur Pologne natale pour rejoindre leur tante à New York. A leur arrivée à Ellis Island, Magda est placée en quarantaine car elle est atteinte de tuberculose. Ewa tombe entre les mains d’un souteneur mais elle va tout faire pour sauver sa soeur… The Immigrant est le premier film de James Gray à se situer dans le passé. En revanche, nous restons à New York et le réalisateur garde son acteur fétiche Joaquin Phoenix qui est, une fois de plus, excellent. La surprise vient de Marion Cotillard qui, sous la direction de James Gray, révèle des talents insoupçonnés pour la tragédie, sobre dans son interprétation, avec une réelle puissance de jeu. La déception vient de l’étonnante faiblesse du scénario, avec des scènes étirées, notamment d’interminables numéros de cabaret minable totalement inutiles. Et surtout, James Gray n’a su éviter le piège de l’académisme ; la reconstitution est trop appliquée, les effets de filtre sépia beaucoup trop marqués, tous les lieux sont trop travaillés. Bien qu’il soit brillant, tout ce travail sur la forme engendre une impression d’artificialité qui nous laisse à distance d’un récit dont on finit par se désintéresser.
Elle: 2 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Marion Cotillard, Joaquin Phoenix, Jeremy Renner
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The immigrant
Joaquin Phoenix et Marion Cotillard dans The Immigrant de James Gray.

Homonyme :
The Immigrant de Charles Chaplin (1917)

4 juillet 2016

Guêpier pour trois abeilles (1967) de Joseph L. Mankiewicz

Titre original : « The Honey Pot »

Guêpier pour trois abeillesHomme cultivé et amateur de théâtre, Cecil Fox engage dans son palais vénitien un acteur américain pour l’aider à se livrer à une farce semblable à celle de la pièce Volpone de Ben Jonson : prétendant qu’il est sur le point de mourir, il invite trois femmes qui l’ont aimé en leur laissant croire qu’elles vont hériter de sa fortune… Après l’épisode difficile Cléopâtre, Joseph L. Mankiewicz n’a plus le même enthousiasme pour tourner et c’est en dehors des studios hollywoodiens qu’il finit par mettre en scène en Italie cette version modernisée de Volpone. Il transforme cette farce moralisatrice en intrigue à tiroirs, sur le thème de la cupidité et surtout de la tromperie et de la manipulation. Il est indéniable que Mankiewicz a soigné ses dialogues, souvent assez littéraires, mais le film est trop long, paraissant ressasser les mêmes scènes. Certes The Honey Pot ne manque pas de charme, l’interprétation de Rex Harrison en est un, mais il nous laisse sur un sentiment mitigé. Le réalisateur reprendra avec plus de bonheur le thème de la tromperie dans ses deux films suivants (et ultimes) : Le Reptile et le magnifique Le Limier.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Rex Harrison, Susan Hayward, Cliff Robertson, Maggie Smith, Adolfo Celi
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Remarques :
* Volpone ou Le Renard est une comédie du dramaturge anglais Ben Jonson, représentée pour la première fois à Londres en 1606.

* Autre adaptation de la pièce de Ben Jonson :
Volpone ou l’amour de l’or de Maurice Tourneur avec Louis Jouvet et Harry Baur

The honey pot
Rex Harrison dans Guêpier pour trois abeilles de Joseph L. Mankiewicz.

The honey pot
Cliff Robertson et Maggie Smith dans Guêpier pour trois abeilles de Joseph L. Mankiewicz.

3 juillet 2016

Cría cuervos (1976) de Carlos Saura

Cría cuervosDans une vaste demeure madrilène, une petite fille Ana entend son père décéder dans la pièce voisine. Une femme en sort précipitamment. Bizarrement, la fillette entre dans la pièce, regarde son père et prend un verre de lait qu’elle va laver dans la cuisine… Ecrit et réalisé par Carlos Saura dans la dernière année de dictature franquiste, Cria Cuervos est une admirable réflexion sur le deuil, sur le monde de l’enfance, sur les souvenirs qui ne veulent s’effacer. Le récit débute de façon un peu mystérieuse pour dévoiler ensuite peu à peu l’univers de cette fillette seule avec ses deux soeurs : profondément marquée par la mort (ou plutôt par l’absence), elle parvient à se bâtir un monde à part où le rêve se mêle à la réalité, malgré la totale incompréhension du monde des adultes. Mais, comme on le sait, tous les films de Carlos Saura sont également une métaphore politique de son pays sous la chape de plomb du franquisme. Cette grande demeure coupée de l’extérieur représente ainsi l’Espagne, le père (et les hommes en général) le franquisme finissant, la mère est la république réduite au silence, la grand-mère la vie d’avant la dictature, la tante la bourgeoisie qui s’accommode des militaires. Les trois fillettes symbolisent l’avenir de l’Espagne et, en ce sens, le film de Saura est profondément optimiste. Âgée de neuf ans, Ana Torrent est assez inoubliable avec ses grands yeux noirs. Une fois de plus, Carlos Saura signe un film très fort avec sa façon assez unique de mêler inextricablement rêve, réalité, fantasmes et souvenirs.
Elle: 5 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Geraldine Chaplin, Ana Torrent, Mónica Randall, Florinda Chico
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Remarques :
* Le titre vient d’un proverbe espagnol « Cría cuervos y te sacarán los ojos » qui signifie « Nourrissez des corbeaux et ils vous arracheront les yeux », maxime volontiers utilisée par les adultes pour se plaindre de l’ingratitude des enfants qui est donc détournée ici pour prendre un sens politique et prophétiser que la jeune génération balaiera le franquisme.

* La chanson Porque te vas (Parce que tu pars) a connu un succès international la même année, notamment en France où ce fut le tube de l’été 1976. Les paroles de cette chanson sont sur le thème de l’absence de l’être aimé et du souvenir qu’il laisse.

* Franco est mort à peine deux mois avant la sortie du film (donc après le tournage).

* Carlos Saura avait découvert la jeune Ana Torrent dans le beau film de Victor Erice L’esprit de la ruche (1973).

Cria Cuervos
Géraldine Chaplin et Ana Torrent dans Cría cuervos de Carlos Saura.

2 juillet 2016

Les Douze Salopards (1967) de Robert Aldrich

Titre original : « The Dirty Dozen »

Les douze salopardsPendant la Seconde Guerre mondiale, peu avant le Débarquement de Normandie, un major un peu rebelle se voit confier une mission très particulière : prendre douze criminels condamnés à des peines très lourdes et les entrainer en vue d’une mission suicide en échange d’une amnistie. Il s’agit d’aller attaquer un château en Bretagne où se réunissent de nombreux généraux allemands et d’en tuer le plus possible… Les Douze Salopards est adapté d’un roman d’E.M. Nathanson paru en 1965. Aucun élément ne permet d’avancer qu’une telle mission ait pu exister même si l’on pense plus ou moins certain que les armées ont utilisé des délinquants militaires pour des missions suicide. Le propos de Robert Aldrich est de montrer le vrai visage de la guerre, que la guerre ne peut être propre. Les Douze Salopards est donc un film profondément antimilitariste (rappelons que le film a été tourné en pleine période de la guerre du Vietnam), ce qui ne l’a pas empêché Aldrich d’être accusé d’avoir fait un film fasciste et hyper-violent. Assez paradoxalement, c’est la conséquence de la réalisation très efficace d’Aldrich : le film peut effectivement être perçu au premier degré, c’est à dire comme un film de guerre classique, malgré le cynisme du commandement, malgré les scènes censées provoquer le rejet, malgré la cruauté affichée. Il paraît même certain que ce fut le plus souvent le cas. Sur la forme, Aldrich prend son temps, décrivant assez longuement tout le processus de conditionnement mais il est servi par un remarquable plateau d’acteurs, d’où se détachent nettement Lee Marvin, John Cassavetes, Charles Bronson et Donald Sutherland. Le film connut un très grand succès.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Lee Marvin, Ernest Borgnine, Charles Bronson, Jim Brown, John Cassavetes, Richard Jaeckel, George Kennedy, Ralph Meeker, Robert Ryan, Telly Savalas, Donald Sutherland
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Remarques :
* The Dirty Dozen parait assez proche de The Secret Invasion de Roger Corman (1964).
* The Dirty Dozen a connu trois suites sous forme de téléfilms.
* Un remake serait en cours.

The Dirty Dozen
Lee Marvin dans Les douze salopards de Robert Aldrich.