25 janvier 2016

Ça s’est passé à Rome (1960) de Mauro Bolognini

Titre original : « La giornata balorda »

Ça s'est passé à RomeDavid Saraceno est un jeune chômeur d’un quartier populaire qui cherche un emploi stable pour pouvoir épouser une jeune fille avec laquelle il vient d’avoir un enfant. Il se rend dans le centre de Rome et va rencontrer des personnes de divers milieux au cours d’une journée particulièrement chargée… Ça s’est passé à Rome est un film assez rare de Mauro Bolognini. Tiré des Nouvelles Romaines d’Alberto Moravia, le scénario a été écrit par Pier Paolo Pasolini (*). Ça s’est passé à Rome est ainsi dans le même esprit que Les Garçons (1959) : le film est ancré dans le néo-réalisme mais avec une certaine recherche esthétique et une approche similaire à celle de la Nouvelle Vague. La caméra est mobile, tournant le plus souvent en décors naturels, et nous suivons les déambulations de ce jeune romain, avec pour accompagnement la musique jazz de Piero Piccioni. A la différence des héros du film Les Garçons, le jeune David désire trouver un vrai travail honnête et durable mais, balloté entre les bureaux et les vagues promesses, il va découvrir la corruption de la société et même une certaine injustice. Lui-même oscille encore entre l’insouciance de la jeunesse avec ses quêtes amoureuses et le sentiment de responsabilité de père d’un nouveau-né. C’est le français Jean Sorel qui incarne avec une belle présence ce jeune aspirant à une vie meilleure. Le film fut mutilé et interdit en Italie, officiellement pour « amoralité » mais surtout parce qu’il était contraire aux valeurs que le gouvernement italien cherchait à insuffler.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jean Sorel, Lea Massari, Jeanne Valérie
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Remarque :
* La scène d’ouverture du film est absolument superbe : il s’agit un lent traveling-avant en contre-plongée (quasi-verticale) entre deux rangées d’immeubles populaires reliées par des passerelles à chaque étage et le linge à sécher, avec les gens qui s’interpellent, certains habitants regardant la caméra depuis les passerelles, le tout sur la musique de Piero Piccioni. L’image est à la fois imposante et fascinante… un spectacle impressionnant. Magistral.

(*) Pasolini a écrit pour Bolognini pour quatre films entre 1958 et 60 : Les Jeunes Maris, Les Garçons, Ça s’est passé à Rome et Le Bel Antonio. Il est ici assisté de Marco Visconti (aucune relation de parenté avec le réalisateur Luchino Visconti).

Ca s'est passé à Rome
Jeanne Valérie et Jean Sorel dans Ça s’est passé à Rome de Mauro Bolognini

Ca s'est passé à Rome
Jean Sorel (ci-dessus) a de quoi troubler Lea Massari (ci-dessous) dans Ça s’est passé à Rome de Mauro Bolognini…
Ca s'est passé à Rome

21 janvier 2016

Plein soleil (1960) de René Clément

Plein soleilLe jeune Tom Ripley est payé par un milliardaire américain pour convaincre son fils, qui mène une vie oisive et dépensière en Italie, de rentrer chez lui. Il devient son ami et accepte apparemment de subir ses sautes d’humeur et ses humiliations. En réalité, il envie sa vie facile, sa fiancée, son argent…
Plein soleil est adapté d’un roman de Patricia Highsmith Monsieur Ripley. Pour en écrire l’adaptation, René Clément travaille avec Paul Gégauff, très lié à la Nouvelle Vague dont l’influence est assez nette sur le film, ne serait-ce que dans les scènes extérieures, souvent tournées in-situ. L’histoire s’attarde d’ailleurs autant sur la langueur des personnages et les corps bronzés par le soleil que sur l’intrigue policière elle-même. Plein soleil Les images d’Henri Decae sont très belles, magnifiées par le décor naturel de l’île d’Ischia (au large de Naples). Alain Delon, alors âgé de 24 ans à peine, y fait une remarquable prestation, son charme naturel rendant son personnage complexe : d’haïssable, il devient séduisant et l’histoire devient ainsi assez troublante. Le film va vraiment lancer sa carrière. Plein soleil est un très beau film de René Clément mais il ne fait pas l’unanimité : ses détracteurs lui reprochent d’être trop accès sur le magnétisme des comédiens et une mise en retrait de l’intrigue. Le film me semble plutôt à considérer comme un ensemble, un très bel ensemble.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Alain Delon, Maurice Ronet, Marie Laforêt
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Remarques :
* Romy Schneider fait une petite apparition au début du film. L’actrice (déjà très célèbre) a ainsi une courte scène avec son fiancé, Alain Delon.
* Autre adaptation :
Le Talentueux Mr Ripley (The Talented Mr. Ripley) d’Anthony Minghella (1999)

Plein soleil
Maurice Ronet, Marie Laforêt et Alain Delon dans Plein soleil de René Clément.

11 janvier 2016

Psychose (1960) de Alfred Hitchcock

Titre original : « Psycho »

PsychoseMarion Crane est insatisfaite de son sort : elle a un amant avec lequel elle ne peut vivre faute d’argent. Elle agit impulsivement lorsqu’elle a l’occasion de voler une très grosse somme d’argent à son patron : elle s’en empare et s’enfuit en voiture… Psychose est le film le plus connu d’Alfred Hitchcock et pourtant il a été conçu comme un film presque expérimental, avec un budget proche d’un téléfilm. L’histoire en elle-même, tirée d’un roman de Robert Bloch inspiré d’un fait divers, n’est pas des plus passionnantes qui soient ; si elle a attiré Hitchcock, c’est parce qu’il y voyait un beau support pour jouer avec le spectateur qu’il entraîne constamment sur de fausses pistes. La mise en place laisse prévoir un certain type de film et au moment où l’on croit deviner la suite, Hitchcock surprend tout le monde par une scène aussi inattendue que contraire aux règles narratives classiques. Devenue la plus célèbre du cinéma, elle n’a plus évidemment l’effet de surprise qu’elle produisait à sa sortie sur les spectateurs et c’est un peu dommage, mais même lorsque que l’on connait le film, on peut admirer le talent d’Hitchcock pour nous induire en erreur, nous dérouter jusqu’à nous terrifier. Tout est calculé dans ce but, il détourne notre attention avec un détail pour mieux nous tromper sur l’essentiel. Sur ce point, il est bien le maitre absolu. Et comme il le dit lui-même, ce n’est pas grâce à son contenu ou à son interprétation que Psychose est un film si remarquable, c’est la façon de construire cette histoire et de la raconter qui a amené le public à réagir de façon émotionnelle.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Anthony Perkins, Janet Leigh, Vera Miles, John Gavin, Martin Balsam
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Remarques :
* Le budget de Psychose a été de 800 000 dollars soit l’équivalent de trois épisodes moyens de télévision, financé en grande partie par Hitchcock lui-même car personne n’y croyait. La Paramount refusa même de prêter ses studios et Hitchcock le tournera dans les studios Revue chez Universal.
* La scène de la douche compte 70 plans en 45 secondes, ce qui est totalement inhabituel chez Hitchcock qui excelle dans les plans longs. Il semble que Saul Bass ait (fortement ?) contribué à sa conception.
* Dans ses entretiens avec Truffaut, Hitchcock détaille comment, dans la scène où Bates descend sa mère à la cave, il parvient à placer la caméra très haut, ayant attiré notre attention sur le dialogue. Aussi efficace qu’étonnant.
* Hitchcock cameo : À la 6e minute, lorsque Marion Crane arrive à son bureau, on le voit de trois-quarts se tenir dehors sur le trottoir, coiffé d’un chapeau de cow-boy.

Psychose
Janet Leigh en route vers le Bates Motel dans Psychose de Alfred Hitchcock

9 janvier 2016

La Vengeance aux deux visages (1961) de Marlon Brando

Titre original : « One-Eyed Jacks »

La Vengeance aux deux visagesAprès avoir dévalisé une banque au Mexique, Kid Rio (Marlon Brando) est abandonné lâchement par son complice et ami Dad Longworth (Karl Malden). Lorsqu’il parvient à s’évader du bagne cinq ans plus tard, Rio n’a qu’une idée en tête : retrouver son ancien acolyte pour se venger… One-Eyed Jacks est l’unique réalisation de l’acteur Marlon Brando. Initialement confié à Stanley Kubrick, le film connut une production tumultueuse mais le résultat est un western très personnel, franchement superbe. Les extérieurs sont splendides et le fait qu’une bonne partie se déroule au bord de la mer californienne tumultueuse lui donne un cachet assez unique. Mais c’est surtout les rapports entre les deux personnages principaux qui font toute la richesse du film, des rapports que l’on peut qualifier de multiples façons, oedipiens, avec un symbolique père et fils (les personnages ne sont pas nommés Kid et Dad pour rien), masochistes, etc. Le jeu de Marlon Brandon est joliment complexe, parvenant à faire passer une multitude de sentiments. Bien que le film ne comporte que peu de scènes d’action, la tension reste forte tout au long des quelque 2 heures 20. One-Eyed Jacks est ainsi un western unique en son genre, une réalisation très personnelle de Brando dont on peut regretter qu’il n’ait pas poursuivi en ce sens. Le film fut (et il est toujours) diversement apprécié.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Marlon Brando, Karl Malden, Katy Jurado, Ben Johnson, Slim Pickens
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Remarques :
* Le scénario est l’adaptation d’un roman de Charles Neider, The Authentic Death of Henry Jones, qui s’inspirait lui même de The Authentic Life of Billy le Kid écrit par le shérif Pat Garrett. Rod Serling en débuta l’écriture, suivi par Sam Peckinpah. Lorsque Stanley Kubrick arriva sur le projet, il écarta ce dernier pour le remplacer par Calder Willingham avec lequel il avait travaillé pour Les Sentiers de la Gloire. Le producteur Frank Rosenberg finit par imposer Guy Trosper.

* Prévu pour durer 6 semaines, le tournage dura en réalité 6 mois. Le budget fut triple de ce qui était prévu. Le perfectionnisme de Marlon Brando est le principal responsable de ces dépassements, même si son inexpérience a du également multiplier les prises. On a raconté qu’il pouvait rester des heures assis face à la mer à attendre que les vagues aient la vigueur qu’il souhaitait.

* Le montage fait par Marlon Brando donnait un film de 4h 45. Paramount le réduisit exactement à la moitié.

One-Eyed Jacks
Karl Malden et Marlon Brando dans La Vengeance aux deux visages de Marlon Brando.

One-Eyed Jacks
Marlon Brando et Pina Pellicer dans La Vengeance aux deux visages de Marlon Brando.

11 décembre 2015

À cheval sur le tigre (1961) de Luigi Comencini

Titre original : « A cavallo della tigre »

À cheval sur le tigreGiacinto est un brave type pas très malin qui tente de simuler une agression pour voler son patron. En prison, alors qu’il a presque purgé sa peine, il tombe sous la coupe de trois criminels plus endurcis et se retrouve forcé de s’évader avec eux… À cheval sur le tigre fait partie des quelques films de Comencini coécrits avec Age et Scarpelli, auxquels il faut ajouter ici Monicelli. Leur ambition était de trouver un juste équilibre entre la comédie et la critique sociale. Cet équilibre subtil que Monicelli avait trouvé dans Le Pigeon ou que Comencini trouvera si magnifiquement dans L’argent de la vieille est ici absent. Bien-sûr, son héros est un éternel exploité, inoffensif et sans défense mais le film est surtout une comédie policière tiraillée entre plusieurs genres. Le début comporte les meilleurs moments car l’enchaînement des évènements paraît ensuite un peu trop alambiqué et même les meilleurs gags (comme la petite fille en otage) paraissent plaqués, ils ne sont pas vraiment intégrés à l’histoire. Belle interprétation toutefois de Nino Manfredi.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Nino Manfredi, Mario Adorf, Gian Maria Volontè, Raymond Bussières
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Remarques :
Le titre vient d’une expression chinoise : être « à cheval sur le tigre » signifie être dans une position dangereuse dont on ne peut s’extraire. Descendre du tigre serait en effet encore plus dangereux car on serait alors dévoré par le tigre.

A cheval sur le tigre
Gian Maria Volontè, Mario Adorf et Nino Manfredi dans À cheval sur le tigre de Luigi Comencini

4 novembre 2015

Le Héros (1966) de Satyajit Ray

Titre original : « Nayak »

Le HérosAu sommet de la gloire, un acteur bengali doit se rendre à Delhi pour y recevoir un prix. Dans le train, il fait plusieurs rencontres qui l’amènent à s’interroger sur sa vie… Ecrit et réalisé par Satyajit Ray, Le Héros démarre par un tableau assez idyllique de cet acteur sûr de lui et de son succès. Cette assurance va se fissurer au cours du voyage grâce à la présence d’une jeune femme qui affiche un apparent désintérêt pour son personnage public. Des flashbacks et des scènes de rêves viennent se mêler à celles du voyage pour former un ensemble riche, d’une belle profondeur. Satyajit Ray n’affirme pas que les choix que cet acteur a fait dans sa vie sont mauvais mais il nous laisse entrevoir qu’ils ne sont pas forcément les bons. Ray utilise les personnages secondaires pour élargir le propos et brosser un portrait de la société indienne : un vieux passéiste, un homme d’affaires moderne, un arriviste prêt à jeter sa femme dans les bras d’un client potentiel, et d’autres. Le Héros est un film très fluide, une réussite de plus dans la filmographie de ce passionnant réalisateur indien.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Uttam Kumar, Sharmila Tagore
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Le Héros
Sharmila Tagore et Uttam Kumar dans Le Héros de Satyajit Ray.

Remarques :
* A la simple lecture du synopsis, on ne peut que penser aux Fraises sauvages de Bergman. Si l’on ajoute qu’il y a des séquences de rêves, la ressemblance n’en paraît que plus forte. Satyajit Ray a toutefois affirmé que la ressemblance était accidentelle et qu’il avait vu Les Fraises sauvages après avoir fait Le Héros (Entretien avec Henri Micciollo, Satyajit Ray, Editions L’Âge d’Homme, 1981, page 298).

* Uttam Kumar qui interprète l’acteur était lui-même un acteur très populaire (il était alors âgé de 40 ans). Il a tourné dans plus de 200 films entre 1948 et 1987.

12 octobre 2015

Contes cruels de la jeunesse (1960) de Nagisa Ôshima

Titre original : « Seishun zankoku monogatari »

Contes cruels de la jeunesseLa jeune Makoto rencontre l’étudiant Kiyoshi lorsqu’il la sauve des griffes d’un homme qui tentait d’abuser d’elle. Kiyoshi en profite pour dépouiller l’homme. L’épisode leur donne l’idée de répéter le scénario pour racketter des hommes d’âge mûr… Découvert très tardivement en France (1), Contes cruels de la jeunesse fait partie des premiers films de la Nouvelle Vague japonaise. Il fut par exemple tourné au moment-même où Godard réalisait A bout de souffle. Nagisa Ôshima n’a alors que 28 ans et sort des sentiers battus et du cinéma codifié non seulement par son sujet, montrer le malaise de sa génération au travers des errances criminelles d’un très jeune couple, mais aussi par sa façon de le traiter : il filme en décors naturels dans la rue en utilisant, chose rarissime pour du format Scope à l’époque, une caméra à l’épaule. Ses parti-pris esthétiques sont assez radicaux, refusant la couleur verte qui « apaise et affadit les sentiments », préférant des couleurs assez saturées, et usant largement de gros plans, de décadrages. Les intérieurs sont assez oppressant et l’atmosphère générale est plutôt dérangeante, traduction du désenchantement de ses deux personnages principaux. Les aspects novateurs de Contes cruels de la jeunesse le rendent vraiment remarquable, même un demi-siècle plus tard.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Miyuki Kuwano, Yûsuke Kawazu
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Contes cruels de la jeunesse
Yûsuke Kawazu et Miyuki Kuwano dans Contes cruels de la jeunesse de Nagisa Ôshima.

Remarque :
Yûsuke Kawazu était également l’un des acteurs principaux du très beau film Bon à rien (Rokudenashi) de Yoshishige Yoshida (1960), film de la Nouvelle Vague qui sortit sur les écrans à quelques semaines d’intervalle.

(1) Le film n’est sorti en France qu’en 1986. Il a été récemment redécouvert à Cannes en 2014 dans une version restaurée.

17 septembre 2015

Une vierge sur canapé (1964) de Richard Quine

Titre original : « Sex and the Single Girl »

Une vierge sur canapéLe magazine à scandales Stop vient de ridiculiser la jeune doctoresse sexologue Helen Brown (Natalie Wood), auteur d’un livre à succès de conseils aux femmes célibataires. Le journaliste phallocrate Bob Weston (Tony Curtis) veut aller plus loin : il est prêt à toutes les bassesses pour prouver qu’elle n’a aucune expérience et qu’elle est encore vierge. Il va la consulter en se faisant passer pour son voisin (Henry Fonda) qui a une relation tumultueuse avec sa femme (Lauren Bacall)… Bien qu’il en ait gardé le titre, le film de Richard Quine Sex and the Single Girl n’est aucunement l’adaptation du best-seller planétaire d’Helen Gurley Brown qui a joué un rôle certain dans la révolution sexuelle des années soixante (1). Il s’agit d’une variation autour du succès du livre, une comédie qui tente de retrouver la brillance des comédies américaines screwball sans y parvenir. Le scénario est sans originalité, les dialogues sont assez plats, quelques remarques polissonnes ont juste été glissées ici et là pour pimenter l’ensemble. L’humour reste assez mou sauf dans les dix dernières minutes où le film change brutalement (et sans raison) de registre pour jouer sur l’humour nonsense avec une poursuite automobile assez délirante (2). En réalité, le principal atout du film réside dans le charme de ses deux acteurs principaux ; Tony Curtis est ici dans un rôle qui lui va comme un gant (3)(4). Créée pour surfer sur la naissante libéralisation des moeurs, Une vierge sur canapé est une comédie sans éclat. Le film a connu un certain succès public et aussi, ce qui est plus étonnant, critique.
Elle:
Lui : 1 étoiles

Acteurs: Tony Curtis, Natalie Wood, Henry Fonda, Lauren Bacall, Mel Ferrer, Edward Everett Horton
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Une vierge sur canapé
A défaut d’être crédible en psychologue, Natalie Wood fait montre de ses charmes dans Une vierge sur canapé de Richard Quine.

(1) Helen Gurley Brown, future rédactrice en chef du magazine Cosmopolitan, a écrit en 1962 un livre Sex and the Single Girl (= « La femme seule et l’amour », le titre anglais n’est pas si scabreux qu’il ne paraît à nos yeux français), rempli de conseils aux jeunes femmes pour prendre en main leur vie amoureuse. Il s’en est vendu deux millions dans les trois premières semaines et a été édité dans 35 pays. Warner Bros en a acheté les droits pour une petite fortune.

(2) On doit sans doute l’insertion de cette poursuite finale au grand succès du film de Stanley Kramer It’s a Mad, Mad, Mad, Mad World (1963) qui jouait sur l’humour nonsense.

(3) On peut, en revanche, se demander pourquoi Henry Fonda est venu se perdre dans cette galère. L’acteur a déclaré plus tard que c’était le film qu’il aimait le moins de toute sa carrière. Même question pour Lauren Bacall et Mel Ferrer…

(4) A propos de Tony Curtis, on ne peut que remarquer les clins d’oeil lourdement appuyés à Certains l’aiment chaud (Some like it hot). On mesure à cette occasion le fossé énorme qui sépare les deux films.

12 septembre 2015

La Guerre des cerveaux (1968) de Byron Haskin

Titre original : « The Power »

La Guerre des cerveauxDans un futur proche, un petit groupe de chercheurs étudient la résistance à la douleur et son influence éventuelle sur le cerveau. Lorsque l’un d’eux pointe du doigt que l’un des chercheurs a des capacités mentales très développées, il est mystérieusement assassiné… A la base, le film de science-fiction La Guerre des cerveaux soulève une question intéressante : si les capacités du cerveau humain évoluent, peut-on envisager qu’il parviendra un jour à influencer celui de ses congénères pour le soumettre à ses volontés ? Quelles seraient les implications de ce type de pouvoir ? Comment se comporterait dans notre monde d’aujourd’hui un humain qui aurait sauté des centaines de générations ? Hélas, Byron Haskin délaisse la pure prospective pour développer essentiellement un film à suspense où le héro ne fait que rechercher le coupable au péril de sa vie, un film dans un esprit assez hitchcockien. Le réalisateur semble d’ailleurs assumer cette filiation puisqu’il fait un hommage assez voyant au réalisateur anglais avec une scène dans un manège de chevaux de bois devenu incontrôlable. Certains critiques ont vu en cette histoire une manifestation de la paranoïa anticommuniste américaine ; pourquoi pas, tous les films sur le contrôle des esprits peuvent être vus ainsi mais cela ne me semble pas être le but premier ici. La Guerre des cerveaux se regarde sans ennui car la réalisation est soignée et le déroulement de l’histoire bien rythmé. On notera la musique de Miklós Rózsa avec une présence originale de son cymbalum.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: George Hamilton, Suzanne Pleshette, Richard Carlson, Yvonne De Carlo, Michael Rennie

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The Power
George Hamilton et Suzanne Pleshette dans La Guerre des cerveaux de Byron Haskin

Remarques :
* The Power est l’adaptation d’un roman de Frank M. Robinson qui est également connu pour avoir écrit La Tour infernale (à ma connaissance, aucun lien de parenté avec l’écrivain de science-fiction Kim Stanley Robinson).
* Byron Haskin est un réalisateur connu pour L’île au trésor (1950) et La Guerre des mondes (1953).
* La Guerre des cerveaux est produit par George Pal.

10 septembre 2015

Messaline (1960) de Vittorio Cottafavi

Titre original : « Messalina Venere imperatrice »

MessalineA Rome, en l’an 38 après J.-C., la jeune et ambitieuse vestale romaine (1) Valeria Messalina rencontre le centurion Lucius Maximus la veille de ses noces avec l’empereur Claude. Le jeune Lucius Maximus n’en sait rien puisqu’il est aussitôt envoyé livrer bataille dans une lointaine contrée. Parvenue au pouvoir, Messaline ne cesse de comploter pour assouvir ses désirs… Le personnage de Messaline, impératrice cruelle et débauchée, a toujours excité les imaginations par son mélange explosif de pouvoir, violence et sexualité. Réalisé en pleine période de surproduction de péplum italiens, le film de Cottafavi ne cherche pas, on s’en doute, la vérité historique mais plutôt à créer un spectacle à la sensualité épanchée. L’histoire se déroule, nous prévient-on en exergue, « à une période où la vie humaine n’avait aucune valeur » (diantre, on en frémit d’avance)… C’est l’anglaise Belinda Lee qui est chargée de minauder et de rouler des yeux devant la caméra mais elle ne parvient pas à donner une réelle dimension à son personnage. La réalisation est toutefois soignée ce qui écarte tout ennui à la vision du film. Messaline n’est pas le péplum de Cottafavi le plus remarquable : on pourra probablement lui préférer Les Légions de Cléopâtre tourné l’année précédente.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Belinda Lee, Spiros Focás
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Messaline
Belinda Lee dans Messaline de Vittorio Cottafavi

(1) Les vestales étaient des prêtresses de la déesse Vesta, des jeunes filles vouées à la chasteté et éduquées de façon très stricte.

Autres films centrés sur le personnage de Messaline :
Woman de Maurice Tourneur (1918) avec Flora Revalles
Messaline (Messalina) de Carmine Gallone (1951) avec María Félix et Georges Marchal
Messaline , impératrice et putain (Messalina, Messalina!) de Sergio Corbucci (1977) avec Anneka Di Lorenzo
Caligula et Messaline de Bruno Mattei (1981) avec Betty Roland