21 juillet 2022

Le Colosse de Rhodes (1961) de Sergio Leone

Titre original : « Il colosso di Rodi »

Le Colosse de Rhodes (Il colosso di Rodi)280 av. J.-C. L’île de Rhodes est gouvernée par le tyran Xerxès qu’un groupe de rebelles tente d’assassiner. Une énorme statue d’Apollon (le colosse) protège le port et le tyran envisage une alliance avec la Phénicie contre la Grèce. Darios, héros militaire grec, rend visite à son oncle à Rhodes. Il s’éprend de la jolie Diala, fille de l’architecte de la statue…
Le Colosse de Rhodes est un péplum italien réalisé par Sergio Leone. Lorsqu’il le dirige, le réalisateur a acquis une solide expérience durant la précédente décennie : il est l’un des assistants les plus recherchés de Cinecittà et excelle dans la maitrise des scènes de foule. Il est bien entendu difficile de déceler ici la patte du futur réalisateur de westerns, tout au plus peut-on deviner des similitudes dans le profil du héros (personnage extérieur, plutôt laconique, qui ne veut pas s’impliquer) et s’amuser à trouver des scènes qui ont un parfum de western (la scène finale par exemple). L’histoire est assez classique pour le genre, avec son lot de traitrises et cruautés ; comme souvent, de grandes libertés ont été prises par rapport à la vérité historique, des évènements qui se sont déroulés sur plusieurs siècles sont condensés en une seule époque. Les scènes d’ampleur sont remarquablement maitrisées et les acteurs bien dirigés (éviter toutefois la version doublée en français). L’ensemble se regarde sans déplaisir.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Rory Calhoun, Lea Massari, Georges Marchal, Conrado San Martín, Ángel Aranda, Mabel Karr, George Rigaud
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Le Colosse de Rhodes (Il colosso di Rodi)Lea Massari, Rory Calhoun et George Rigaud dans Le Colosse de Rhodes (Il colosso di Rodi) de Sergio Leone.

8 janvier 2021

Le Professeur (1972) de Valerio Zurlini

Titre original : « La prima notte di quiete »

Le Professeur (La prima notte di quiete)Daniele Dominici arrive dans la ville de Rimini pour un poste de professeur remplaçant de poésie dans un lycée classique. Il a aussi la passion du jeu et délaisse sa femme pour aller jouer tous les soirs avec un petit groupe de flambeurs. Il est attiré par l’une de ses élèves, Vanina…
L’idée de départ de Valério Zurlini de réaliser une fresque en plusieurs films sur la déchéance d’une famille coloniale italienne n’a finalement abouti qu’à ce seul La prima notte di quiete (= la première nuit de quiétude, titre emprunté à Goethe). L’ambitieuse chronique de l’Italie sur près d’un siècle s’est transformée en variation sur la pureté du sentiment amoureux en proie aux conventions sociales, à l’ennui et modifié par la libération sexuelle. Cette réduction du sujet serait due à l’influence d’Alain Delon, acteur et coproducteur du film. L’acteur est de presque tous les plans, il donne de la superbe à ce perdant, toujours morose, désabusé, un peu vouté mais doté d’une grande présence et donnant l’impression d’avoir vécu beaucoup. La photographie est superbe. Zurlini affectionne les ambiances de station balnéaires hors saison, lorsque la brume adoucit des paysages urbains et se confond avec la mer. Un film beau, mélancolique et sombre.
Elle: 4 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Alain Delon, Sonia Petrovna, Lea Massari, Giancarlo Giannini, Renato Salvatori
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Remarque :
* Alain Delon a profondément modifié la version sortie en France en 1972 : il a fait des coupes, ramenant la durée de 132 à 105 minutes et changé le titre pour le simple Le Professeur. Valerio Zurlini l’a menacé de procès. Il a fallu attendre 2019 pour que le film ressorte en version intégrale. Il fut présenté par Alain Delon lui-même au Festival de Cannes 2019.

Le Professeur (La prima notte di quiete)Sonia Petrovna et Alain Delon dans Le Professeur (La prima notte di quiete) de Valerio Zurlini.

19 décembre 2018

Une vie difficile (1961) de Dino Risi

Titre original : « Una vita difficile »

Une vie difficilePendant la Seconde Guerre mondiale, Silvio rédige un journal clandestin. Traqué par les allemands, il est sauvé par une jeune femme qui le cache dans un vieux moulin. Il lui fait des promesses mais finit par rejoindre le maquis. Bien après la Libération, il retourne dans le village où il l’avait rencontré…
Une vie difficile fait partie des films les plus remarquables de Dino Risi, ceux qui montrent le plus son extraordinaire capacité à mêler un propos très sérieux avec la comédie de divertissement (1). Le cinéaste nous raconte l’évolution de la société italienne en suivant un journaliste communiste un peu dilettante. Il englobe tous les problèmes de l’Italie des années cinquante et utilise même quelques images d’archives pour les grands moments historiques. Son héros est un idéaliste qui voit sombrer ses illusions et forcé de faire des « compromis ». La forme est classique, avec beaucoup de plans larges pour mieux nous concentrer sur les dialogues et le contenu en général. Alberto Sordi est époustouflant dans ce rôle, inspirant toute une foule de sentiments parfois opposés. Lea Massari sait donner de l’épaisseur à son personnage. Tout l’art de la comédie italienne, ce qui la rend absolument unique est dans Une vie difficile, drôle et grave à la fois.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Alberto Sordi, Lea Massari, Franco Fabrizi
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(1) S’il n’y avait qu’un exemple à donner de ce subtil mélange, ce serait bien entendu la scène du dîner chez les royalistes le soir du référendum.

Une vie difficile
Lea Massari et Alberto Sordi dans Une vie difficile de Dino Risi.

Remarques :
* L’idée de départ a germé chez Risi en voyant Cavalvade de Frank Lloyd (1933), film dramatique américain oscarisé qui retraçait le parcours de deux familles anglaises de 1899 à 1933.
* Le happy-end de fin (la gifle) fut probablement imposé à Risi car le scénario se terminait de façon plus pessimiste : Silvio ne réagissait pas.
* Alessandro Blasetti fait une courte apparition dans son propre rôle mais il n’a pas tourné de peplum en 1961. Il s’agit très probablement du tournage de Barrabas de Richard Fleisher avec effectivement Silvana Mangano et Vittorio Gassman.

18 mars 2016

Allonsanfàn (1974) de Paolo Taviani et Vittorio Taviani

AllonsanfànAux premières heures de la Restauration en Italie (1816 environ), Fulvio, un aristocrate lombard tête pensante du groupe révolutionnaire Les Frères Sublimes, est relâché par la police. Désillusionné, il veut se ranger et retrouver l’affection de sa famille. Ses compagnons ne se rendent pas compte de ce changement et continuent de l’impliquer dans leurs actions… Avec Allonsanfàn, Les frères Taviani utilise l’Histoire pour traiter des sujets actuels (de 1975) : en cinéastes politiquement engagés, ils se désolent de constater le reflux d’après-68 et la perte des idéaux qui l’ont tendu et nous montrent une période similaire de l’Histoire. Pour leur démonstration, ils suivent deux lignes principales : celle d’un homme qui se replie sur lui-même et qui perd son rapport aux autres (que ce soit à ses anciens compagnons, aux femmes qu’il aime ou à ses proches) et celle de l’aveuglement d’un groupuscule/secte révolutionnaire enfermé dans ses schémas et ses rites un peu carnavalesques, incapable de réaliser la totale inefficacité ou inutilité de sa lutte. Le propos des Taviani est donc de mettre en évidence l’échec de ces deux attitudes pour remettre en valeur l’utopie comme moteur créatif de l’homme. Et au-delà de toute considération politique (car, 40 ans plus tard, les questions ne se posent plus dans les mêmes termes), c’est sur la question de l’utopie que le film revêt un aspect philosophique intéressant car l’utopie est, elle, toujours d’actualité, elle est même multiforme. Le film provoque ainsi des réflexions intéressantes. Sur la forme, Allonsanfàn a une esthétique assez travaillée bien qu’empreinte d’une certaine austérité, certaines scènes sont très belles. La musique d’Ennio Morricone est très présente, elle structure le film.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Marcello Mastroianni, Lea Massari, Mimsy Farmer, Laura Betti, Claudio Cassinelli
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Remarque :
* Allonsanfàn est le prénom donné par l’un des membres de la secte à son fils, reprenant phonétiquement les premières syllabes de La Marseillaise.

Allonsanfan
Marcello Mastroianni dans Allonsanfàn de Paolo et Vittorio Taviani.

25 janvier 2016

Ça s’est passé à Rome (1960) de Mauro Bolognini

Titre original : « La giornata balorda »

Ça s'est passé à RomeDavid Saraceno est un jeune chômeur d’un quartier populaire qui cherche un emploi stable pour pouvoir épouser une jeune fille avec laquelle il vient d’avoir un enfant. Il se rend dans le centre de Rome et va rencontrer des personnes de divers milieux au cours d’une journée particulièrement chargée… Ça s’est passé à Rome est un film assez rare de Mauro Bolognini. Tiré des Nouvelles Romaines d’Alberto Moravia, le scénario a été écrit par Pier Paolo Pasolini (*). Ça s’est passé à Rome est ainsi dans le même esprit que Les Garçons (1959) : le film est ancré dans le néo-réalisme mais avec une certaine recherche esthétique et une approche similaire à celle de la Nouvelle Vague. La caméra est mobile, tournant le plus souvent en décors naturels, et nous suivons les déambulations de ce jeune romain, avec pour accompagnement la musique jazz de Piero Piccioni. A la différence des héros du film Les Garçons, le jeune David désire trouver un vrai travail honnête et durable mais, balloté entre les bureaux et les vagues promesses, il va découvrir la corruption de la société et même une certaine injustice. Lui-même oscille encore entre l’insouciance de la jeunesse avec ses quêtes amoureuses et le sentiment de responsabilité de père d’un nouveau-né. C’est le français Jean Sorel qui incarne avec une belle présence ce jeune aspirant à une vie meilleure. Le film fut mutilé et interdit en Italie, officiellement pour « amoralité » mais surtout parce qu’il était contraire aux valeurs que le gouvernement italien cherchait à insuffler.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jean Sorel, Lea Massari, Jeanne Valérie
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Remarque :
* La scène d’ouverture du film est absolument superbe : il s’agit un lent traveling-avant en contre-plongée (quasi-verticale) entre deux rangées d’immeubles populaires reliées par des passerelles à chaque étage et le linge à sécher, avec les gens qui s’interpellent, certains habitants regardant la caméra depuis les passerelles, le tout sur la musique de Piero Piccioni. L’image est à la fois imposante et fascinante… un spectacle impressionnant. Magistral.

(*) Pasolini a écrit pour Bolognini pour quatre films entre 1958 et 60 : Les Jeunes Maris, Les Garçons, Ça s’est passé à Rome et Le Bel Antonio. Il est ici assisté de Marco Visconti (aucune relation de parenté avec le réalisateur Luchino Visconti).

Ca s'est passé à Rome
Jeanne Valérie et Jean Sorel dans Ça s’est passé à Rome de Mauro Bolognini

Ca s'est passé à Rome
Jean Sorel (ci-dessus) a de quoi troubler Lea Massari (ci-dessous) dans Ça s’est passé à Rome de Mauro Bolognini…
Ca s'est passé à Rome