4 octobre 2023

Duvidha (1973) de Mani Kaul

DuvidhaUn homme, fils de marchand, doit laisser temporairement son épouse pour aller faire des affaires dans une ville éloignée pendant cinq ans. Un esprit prend malicieusement son apparence, et tombe amoureux de sa femme tout en lui avouant la supercherie. Mais le mari finit par revenir…
Duvidha (également sous-titré Le Dilemme) est un film indien réalisé par Mani Kaul. C’est l’adaptation d’une histoire courte du même nom écrite par Vijaydan Detha. Originaire du Rajasthan (nord-ouest de l’Inde), Mani Kaul est un cinéaste indien peu connu en occident (1), que le l’on peut classer dans le « Nouveau Cinéma indien » des années soixante-dix. La sortie récente de quatre de ses films nous permet de le découvrir. Duvidha, son troisième long métrage, est sa première réalisation en couleurs. Il s’agit d’un conte sur le dilemme entre l’amour et l’argent. Mais ce n’est tant l’histoire qui est importante, ce qui enflamme les critiques est plutôt à chercher du côté de la forme, très épurée, avec de nombreux plans fixes, parfois agrémentés d’un lent traveling, des dialogues épars dits en voix off ou par les personnages quand ils sont hors-champ, d’une voix égale et monocorde. Cette recherche de l’épure évoque le cinéma de Robert Bresson. Personnellement, je dois avouer avoir beaucoup de mal avec ce genre de recherches.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Ravi Menon, Raisa Padamsee
Voir la fiche du film et la filmographie de Mani Kaul sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

(1) Ne cherchez pas Mani Kaul dans vos dictionnaires de cinéma, vous ne le trouverez pas. Personnellement, je ne l’ai trouvé dans ma bibliothèque que rapidement mentionné dans un ouvrage sur le cinéma indien où il est décrit ainsi : « Le style individualiste de Kaul enchante ceux qui y voient l’abstraction et l’intellectualisme propres aux films dits d’auteur, plutôt rares pour la scène indienne. » (Dictionnaire de 65 cinéastes indiens par Aruna Vasudev et Partha Chatterjee dans Les Cinémas indiens, série CinémAction n°29-30, Editions du Cerf 1984.)

Raisa Padamsee dans Duvidha de Mani Kaul.

Autres longs métrages de Mani Kaul ressorti en 2023 :
Uski Roti (1970)
Un jour avant la saison des pluies (1971)
Nazar (1990), adaptation de La Douce de Dostoïevski, précédemment adapté par Robert Bresson en 1969.
(Je n’ai réussi à regarder aucun de ces trois autres films jusqu’au bout (!) donc il me semble inutile de les commenter. Je réessayerai peut-être plus tard…)

5 janvier 2023

La Saison des femmes (2015) de Leena Yadav

Titre original : « Parched »

La Saison des femmes (Parched)Dans un petit village du nord-est de l’Inde, de nos jours, quatre femmes osent s’opposer aux hommes et aux traditions ancestrales qui les asservissent. Portées par leur amitié et leur désir de liberté, elles affrontent leurs démons, et rêvent d’amour et d’ailleurs…
La Saison des femmes est un film indien, écrit et réalisé par Leena Yadav. Après les séries et deux réalisations Bollywoodiennes, la réalisatrice indienne se tourne vers le cinéma indépendant pour signer un film plus personnel. Il s’agit d’un récit de fiction qui traduit hélas une réalité, témoignage de la position des femmes dans la société indienne. Le récit est édifiant. La réalisatrice a eu beaucoup de difficultés à tourner (1) et n’a pu trouver d’autres producteurs que son mari. Elle a su ne pas trop alourdir son propos et même placer des notes d’humour. Mais son message passe bien, on ne peut qu’être indigné et consterné devant tant d’archaïsme.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tannishtha Chatterjee, Radhika Apte, Surveen Chawla, Lehar Khan
Voir la fiche du film et la filmographie de Leena Yadav sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

(1) « Lors de nos repérages pour les scènes en extérieur, nous avons visité une bonne trentaine de villages (…). On nous a interdit d’y tourner, car les villageois n’approuvaient pas qu’une femme (moi, en l’occurrence) dirige une équipe, porte des pantalons, ne se couvre pas la tête et parle ouvertement aux hommes », raconte la réalisatrice. « Contre toute attente, ce sont les hommes de la jeune génération, ceux qui sont aux commandes aujourd’hui, qui ont eu le plus de mal à accepter une femme émancipée comme chef d’équipe ».

La Saison des femmes (Parched)Radhika Apte, Surveen Chawla et Tannishtha Chatterjee dans La Saison des femmes (Parched) de Leena Yadav.

20 octobre 2022

Le Salon de musique (1958) de Satyajit Ray

Titre original : « Jalsaghar »

Le Salon de musique (Jalsaghar)Dans les années 1920, au Bengale, un aristocrate propriétaire terrien a sacrifié sa fortune et sa famille à sa passion pour la musique, en donnant de coûteuses réceptions de musique et de danse dans son salon de musique. Il n’a que mépris pour son voisin, un nouveau riche aux attitudes grossières qui prétend s’intéresser lui aussi à la musique…
Le Salon de musique est un film indien écrit et réalisé par Satyajit Ray, son quatrième long métrage. Rompant avec les accents néo-réalistes de sa précédente trilogie d’Apu, le cinéaste bengali dresse le portrait d’une fin d’époque, la montée d’une nouvelle bourgeoisie au détriment d’une aristocratie qui perd ses pouvoirs et son aura. Satyajit Ray parvient à nous faire ressentir de l’empathie pour cet homme impuissant à empêcher sa déchéance et qui choisira l’auto-destruction. Le cinéaste en fait une tragédie tchékovienne qu’il baigne  d’une atmosphère presque irréelle. Les plans sont tous remarquablement éclairés et les lents mouvements de caméra sont particulièrement prégnants. Nous sommes comme envoutés par l’ensemble et les longues improvisations musicales des musiciens finissent par nous pénétrer. Le Salon de musique est à juste titre classé parmi les plus grands films du cinéma.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Chhabi Biswas, Gangapada Basu, Kali Sarkar, Tulsi Lahiri
Voir la fiche du film et la filmographie de Satyajit Ray sur le site IMDB.

Voir les autres films de Satyajit Ray chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Satyajit Ray

Le Salon de musique (Jalsaghar)Chhabi Biswas dans Le Salon de musique (Jalsaghar) de Satyajit Ray.

26 juillet 2021

The Lunchbox (2013) de Ritesh Batra

The LunchboxChaque jour à Bombay, près de 200 000 gamelles (dabba) préparées à la maison sont livrées par les dabbawallahs sur leur lieu de travail aux employés de bureau. Ila Singh, une jeune femme au foyer tente de reconquérir son mari qui la délaisse en lui confectionnant des repas merveilleux. Le repas est livré par erreur à Saajan Fernandes, un comptable solitaire ennuyé de devoir partir prochainement à la retraite…
The Lunchbox est le premier long métrage du réalisateur trentenaire indien Ritesh Batra. Il en a écrit le scénario qui est particulièrement original. Il a su trouver un subtil équilibre entre drame et comédie, et aussi sortir des sentiers battus pour nous dresser un portrait de la société indienne moderne. Son histoire a sur ce plan d’indéniables qualités, elle procède par petites touches, délicates et subtiles. La condition féminine au sein de la classe moyenne, la densité de la population, le poids de la religion font partie des thèmes abordés. A noter que le cinéaste a pris soin de s’affranchir du carcan du système de castes (lire ci-dessous). En outre, dans sa mise en scène, Ritesh Batra se montre remarquable par l’utilisation d’objets ou de sons pour ses raccords. Une belle réussite.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Irrfan Khan, Nimrat Kaur, Nawazuddin Siddiqui
Voir la fiche du film et la filmographie de Ritesh Batra sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Remarques :
* L’université de Harvard a réellement étudié le principe de livraison qui utilise un système de couleurs (la plupart des livreurs sont illettrés). Ils en ont conclu que seulement un repas sur un million était livré à la mauvaise personne.

* A propos des castes : Dans le film, le personnage central se nomme Fernandes, nom remontant aux colonisateurs portugais et porté par plusieurs ministres indiens (dont le ministre de la Défense). Ce veuf visite la tombe de son épouse dans un cimetière chrétien. Le personnage est ainsi hors caste. Ce n’est pas innocent dans le contexte de l’Inde actuelle. La jeune cuisinière porte tika et sari, signant son origine hindoue. Le remplaçant présumé de Fernandes se nomme Shaikh, un nom à priori musulman. Celui-ci épouse une femme elle-même hors des règles de sa caste. Tous ces détails sont des jalons qui vont à contre-courant d’une perception de la société par caste, d’autant que la livraison des repas est également un moyen de permettre de manger en respectant les prescriptions de sa caste. (Source Wikipédia… et un article bien documenté sur disons.fr)

The LunchboxNimrat Kaur dans The Lunchbox de Ritesh Batra.

The LunchboxIrrfan Khan dans The Lunchbox de Ritesh Batra.

22 février 2021

Monsieur (2018) de Rohena Gera

Titre original : « Sir »

Monsieur (Sir)Ratna est une très jeune veuve. Elle est domestique chez Ashwin, le fils d’une riche famille de Mumbai (anc. Bombay). En apparence la vie du jeune homme semble parfaite, pourtant il est perdu. Ratna sent qu’il a renoncé à ses rêves. Elle, elle n’a rien, mais ses espoirs et sa détermination la guident obstinément…
Monsieur est un film indo-français, écrit et réalisé par l’indienne Rohena Gera ; il s’agit de son premier long métrage. Elle a écrit une histoire subtile et délicate qui, tout en montrant bien les séparations de classes en Inde et la condition des veuves, ne tombe pas dans la démonstration appuyée et évite tout manichéisme. La réalisatrice ne cherche pas la victimisation, elle met plutôt en avant la force de son héroïne. Le propos n’en garde pas moins tout son impact et le poids des conventions sociales nous paraît effrayant. On s’attache rapidement à ces deux personnages, interprétés avec beaucoup de retenue et peu de mots échangés. Monsieur est un très beau film.
Elle: 5 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tillotama Shome, Vivek Gomber
Voir la fiche du film et la filmographie de Rohena Gera sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Monsieur (Sir)Vivek Gomber et Tillotama Shome dans Monsieur (Sir) de Rohena Gera.

Homonymes  :
Monsieur (1964) de Jean-Paul Le Chanois, comédie avec Jean Gabin
Monsieur (2018) de Jean Delahousse, documentaire sur Jean d’Ormesson

27 avril 2016

Ugly (2013) de Anurag Kashyap

UglyA Bombay, les parents de Kali, 10 ans, sont divorcés. Sa mère s’est remariée avec un commissaire de police qui la maintient cloitrée. Un samedi, alors que Kali passe la journée avec son père, elle disparaît. Tout porte à croire qu’elle a été enlevée. Bien qu’ils se détestent au plus haut point, le père et le beau-père se mettent à sa recherche… Ugly est le dixième long métrage d’Anurag Kashyap, chef de file du nouveau cinéma indépendant indien. Nous sommes loin de l’univers féérique de Bollywood : l’univers d’Ugly est assez glauque et souligne les travers de la société indienne contemporaine. Ses personnages sont souvent aveuglés par leur individualisme et leurs querelles, chacun cherchant à profiter de la situation, si tragique soit-elle. Le portrait de la police n’est pas très flatteur : un commissaire aux méthodes particulièrement violentes et des subalternes pas très futés. Le déroulement du scénario tient parfois du puzzle, avec des flash-back qui surviennent sans crier gare ; le montage est rapide. La cohérence d’ensemble est assez remarquable quand on sait que les dialogues furent en grande partie improvisés. Ugly est un beau film très nerveux, assez sombre et sans concession, remarquablement réalisé.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Rahul Bhat, Ronit Roy, Tejaswini Kolhapure
Voir la fiche du film et la filmographie de Anurag Kashyap sur le site IMDB.

Remarque :
* La sortie du film en Inde a été retardée de presque 1 an parce qu’Anurag Kashyap refusait que son film affiche les messages anti-tabac. En effet, la législation indienne est très stricte à ce sujet : les messages d’avertissement sur les dangers du tabac sont obligatoires dès qu’un personnage fume à l’écran (le pays compte 250 millions de fumeurs… ouille). Il n’est pas le seul à s’être insurgé contre cette règle : par exemple, Woody Allen a refusé de sortir Blue Jasmine en Inde pour cette raison.

Ugly
Rahul Bhat, le père de la fillette, dans Ugly de Anurag Kashyap.

Ugly
Ronit Roy (au centre), l’inquiétant commissaire de Ugly de Anurag Kashyap.

15 décembre 2015

Le Dieu éléphant (1979) de Satyajit Ray

Titre original : « Joi Baba Felunath »

Le Dieu éléphantAlors qu’il est en vacances avec son ami écrivain et son assistant, le détective indépendant Feluda est sollicité pour enquêter sur le vol d’une statuette représentant Ganesh, le Dieu éléphant. Les soupçons se portent rapidement sur un trafiquant qui avait rendu visite peu avant pour tenter d’acheter l’objet… Le Dieu éléphant est le second film avec le détective Feluda alias Mitra (1). Satyajit Ray en a écrit l’histoire qu’il avait publiée en roman. C’est un film destiné à un public large, plutôt jeune, voire très jeune. Les personnages sont très typés et l’humour est omniprésent, venant constamment désamorcer toute tension naissante. L’ensemble est plaisant mais peu intense. Le Dieu éléphant loin d’avoir la profondeur habituelle des films de Satyajit Ray mais il y a une certaine délicatesse dans le traitement. On notera comment l’auteur se moque des fausses religions et on remarquera le petit clin d’oeil à Tintin.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Soumitra Chatterjee, Siddhartha Chatterjee, Santosh Dutta
Voir la fiche du film et la filmographie de Satyajit Ray sur le site IMDB.

Voir les autres films de Satyajit Ray chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Satyajit Ray

Le Dieu éléphant
Siddhartha Chatterjee, Soumitra Chatterjee et Santosh Dutta dans Le Dieu éléphant de Satyajit Ray
.

(1) Le premier film de Satyajit Ray avec le détective Feluda est le peu connu Sonar Kella (1974), film qui semble t-il n’a été que très peu distribué en dehors d’Inde. Titre international = The Golden Fortress (La Forteresse d’Or).

14 décembre 2015

La Grande Ville (1963) de Satyajit Ray

Titre original : « Mahanagar »

La Grande villeSubrata est employé de banque. Son salaire ne lui permet que difficilement de faire vivre sa famille, d’autant qu’il a ses parents âgés à charge. Lorsque sa jeune femme Arati émet l’idée de travailler, il finit par donner son accord tout en sachant que son père, très traditionnel dans ses idées, ne pourra l’accepter… La Grande Ville est le dixième long métrage de Satyajit Ray et le premier à se situer à l’époque contemporaine. Il porte un regard sur la société indienne en pleine évolution de moeurs en se concentrant sur les relations à l’intérieur de la famille. Car c’est dans la famille elle-même que cette femme qui désire travailler trouve l’opposition la plus vive et le fait qu’elle le fasse dans l’intérêt de tous n’atténue nullement la « faute » à leurs yeux. L’art de Satyajit Ray est de mêler cette peinture sociale assez militante à une histoire dotée de rebondissements et même d’un certain suspense. Cet ensemble parfait nous place en empathie totale avec cette femme qui est superbement interprété par Madhabi Mukherjee. Belle, intelligente et déterminée, le cinéaste en fait une héroïne idéale pour que le spectateur soit conquis. La Grande Ville est un film au propos fort et porteur d’espoir.
Elle: 5 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Anil Chatterjee, Madhabi Mukherjee
Voir la fiche du film et la filmographie de Satyajit Ray sur le site IMDB.

Voir les autres films de Satyajit Ray chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Satyajit Ray

La Grande Ville
Madhabi Mukherjee dans La Grande ville de Satyajit Ray.

4 novembre 2015

Le Héros (1966) de Satyajit Ray

Titre original : « Nayak »

Le HérosAu sommet de la gloire, un acteur bengali doit se rendre à Delhi pour y recevoir un prix. Dans le train, il fait plusieurs rencontres qui l’amènent à s’interroger sur sa vie… Ecrit et réalisé par Satyajit Ray, Le Héros démarre par un tableau assez idyllique de cet acteur sûr de lui et de son succès. Cette assurance va se fissurer au cours du voyage grâce à la présence d’une jeune femme qui affiche un apparent désintérêt pour son personnage public. Des flashbacks et des scènes de rêves viennent se mêler à celles du voyage pour former un ensemble riche, d’une belle profondeur. Satyajit Ray n’affirme pas que les choix que cet acteur a fait dans sa vie sont mauvais mais il nous laisse entrevoir qu’ils ne sont pas forcément les bons. Ray utilise les personnages secondaires pour élargir le propos et brosser un portrait de la société indienne : un vieux passéiste, un homme d’affaires moderne, un arriviste prêt à jeter sa femme dans les bras d’un client potentiel, et d’autres. Le Héros est un film très fluide, une réussite de plus dans la filmographie de ce passionnant réalisateur indien.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Uttam Kumar, Sharmila Tagore
Voir la fiche du film et la filmographie de Satyajit Ray sur le site IMDB.

Voir les autres films de Satyajit Ray chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Satyajit Ray

Le Héros
Sharmila Tagore et Uttam Kumar dans Le Héros de Satyajit Ray.

Remarques :
* A la simple lecture du synopsis, on ne peut que penser aux Fraises sauvages de Bergman. Si l’on ajoute qu’il y a des séquences de rêves, la ressemblance n’en paraît que plus forte. Satyajit Ray a toutefois affirmé que la ressemblance était accidentelle et qu’il avait vu Les Fraises sauvages après avoir fait Le Héros (Entretien avec Henri Micciollo, Satyajit Ray, Editions L’Âge d’Homme, 1981, page 298).

* Uttam Kumar qui interprète l’acteur était lui-même un acteur très populaire (il était alors âgé de 40 ans). Il a tourné dans plus de 200 films entre 1948 et 1987.

19 octobre 2015

Charulata (1964) de Satyajit Ray

CharulataA Calcutta, en 1879, la jeune Charulata s’ennuie dans sa belle et grande maison. Son mari, tout occupé à publier un hebdomadaire politique, ne s’occupe guère d’elle. Il profite même du séjour de son cousin, jeune et enjoué qui se destine à la littérature, pour lui demander de pousser son épouse à reprendre la plume… Adapté d’un roman de Rabindranath Tagore, Charulata est un drame sentimental se déroulant presqu’en huis clos. C’est un film très harmonieux, d’une très grande délicatesse, où nous avons l’impression d’effleurer les personnages. La mise en scène de Satyajit Ray est proche de la perfection que ce soit dans ses placements ou mouvements de caméra, ses nombreux gros plans. Il en découle une sensation de grande fluidité (1) et même, pourrait-on ajouter, de musicalité. Les premières minutes du film sont souvent citées comme l’une des plus remarquables ouvertures de film : il n’y a pratiquement pas une parole et pourtant, dans cette mise en place du personnage principal, tout est dit. Le récit se situe à une période charnière de l’histoire de l’Inde et Ray nous fait sentir en arrière-plan le bouillonnement et les aspirations au renouveau, un certain idéalisme qui rend le personnage du mari d’autant plus maladroit dans les relations avec ses proches. Charulata est un très beau film, probablement la meilleure introduction au cinéma si attirant de Satyajit Ray.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Soumitra Chatterjee, Madhabi Mukherjee, Shailen Mukherjee
Voir la fiche du film et la filmographie de Satyajit Ray sur le site IMDB.

Voir les autres films de Satyajit Ray chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Satyajit Ray

Remarques :
* La nouvelle Nastanirh (Le nid brisé) de l’écrivain bengali Rabindranath Tagore a été publiée en 1901.
* La scène de la balançoire est certainement un hommage à Jean Renoir (Partie de campagne).

 

Charulata
Madhabi Mukherjee dans Charulata de Satyajit Ray
.

Charulata
Madhabi Mukherjee et Soumitra Chatterjee dans Charulata de Satyajit Ray
.

 

(1) Seuls les zooms ne semblent pas très heureux et se remarquent beaucoup trop mais il faut préciser, à la décharge de Satyajit Ray, que l’effet de zoom était une « maladie » répandue chez les réalisateurs dans les années 60 et le début des années 70. Heureusement, l’attrait pour le zoom s’est ensuite éteint…