4 juin 2015

Il Monaco di Monza (1962) de Sergio Corbucci

Il monaco di MonzaAu Moyen-âge, Pasquale est un cordonnier (spécialisé dans les pieds droits) à Monza, il est veuf avec douze enfants à charge. Sans argent et couvert de dettes, il quitte la ville avec ses enfants en se faisant passer pour un moine quêteur. En chemin, il rencontre Cervelet, un berger sans troupeau qui le suit. Ils arrivent dans un château… Il Monaco di Monza (= Le Moine de Monza) est une variation satirique de La Monaca di Monza (= La Religieuse de Monza) sorti quasi simultanément sur les écrans basé sur l’histoire d’une nonne martyre à la suite d’un amour interdit (1). Ici, Totò nous interprète un faux moine qui, de façon intéressée, vole au secours d’une comtesse séquestrée par son beau-frère. L’histoire est bien entendu totalement farfelue. L’humour y est très dense, cela ne s’arrête jamais, tout est tourné en dérision et on joue gaiement avec les anachronismes. Aucune longueur ni lourdeur, tout est bien dosé pour notre plus grand plaisir. Il Monaco di Monza est un film assez rare mais néanmoins d’un excellent niveau comique ; Totò au meilleur de son talent.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Totò, Nino Taranto, Erminio Macario, Lisa Gastoni, Moira Orfei
Voir la fiche du film et la filmographie de Sergio Corbucci sur le site IMDB.

Voir les autres films de Sergio Corbucci chroniqués sur ce blog…

Remarques :
Il monaco di Monza* Dans une scène de taverne, les chanteurs Adriano Celentano et Don Backy font une apparition en faux frères dominicains et interprètent une chanson dans le pur style yéyé. Ils étaient alors suffisamment populaires pour se retrouver en bonne position sur l’affiche ci-contre (en haut à gauche et à droite de l’actrice principale) alors qu’ils ne se sont présents que 2 minutes tout au plus.

(1) La Nonne de Monza est un personnage qui a réellement existé: Soeur Virginia Maria, née Marianna de Leyva. Son histoire a été portée plusieurs fois à l’écran, petit et grand. A noter qu’elle est aussi présente dans ce film puisque la nonne, également victime du comte, se prénomme Virginia.

Il Monaco di Monza
– Maria Denis
– Ora Pro Nobis
– Sophia Loren
– Ora Pro Nobis
– …
(comme il ne connait pas un mot de latin mais veut donner l’impression qu’il récite ses prières, Totò égrène consciencieusement une liste d’actrices….)
Erminio Macario et Totò dans Il Monaco di Monza de Sergio Corbucci.

5 mai 2015

La Diligence vers l’Ouest (1966) de Gordon Douglas

Titre original : « Stagecoach »

La diligence vers l'OuestUne diligence part en direction de la ville de Cheyenne alors que la région est sous la menace de raids indiens meurtriers. Ses six passagers ont des motivations bien différentes de se rendre à leur destination…. On peut parfois se demander quelles motivations peut avoir un metteur en scène à s’attaquer à des films-monuments comme Stagecoach de John Ford. Penser que l’on va pouvoir surpasser ou au moins égaler l’original est passablement présomptueux. Gordon Douglas est un réalisateur aguerri, spécialiste des comédies et des westerns. Sur le déroulement de l’histoire, ce remake est la copie conforme de l’original : on y retrouve les mêmes personnages, les mêmes évènements, mais ici cette histoire n’a aucune force, tout tombe à plat. La poursuite est toutefois un peu différente, placée en forêt, probablement pour qu’elle soit plus spectaculaire. Côté acteurs, si Alex Cord est bien terne par rapport à John Wayne, l’interprétation de Bing Crosby (le médecin alcoolique), de Van Heflin (le shérif) et d’Ann-Margret (la jeune prostituée) sont honorables, voire excellente dans le cas de Bing Crosby dont c’est ici le dernier film. Cela ne suffit pas à sauver ce remake qui paraît bien inutile.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Ann-Margret, Bing Crosby, Robert Cummings, Van Heflin, Red Buttons, Slim Pickens, Stefanie Powers
Voir la fiche du film et la filmographie de Gordon Douglas sur le site IMDB.

Voir la présentation de l’original : La Chevauchée fantastique de John Ford (1939)

Stagecoach 1966
Slim Pickens et Van Heflin dans La diligence vers l’Ouest de Gordon Douglas

Stagecoach 1966
Alex Cord, Bing Crosby, Red Buttons et Mike Connors dans La diligence vers l’Ouest de Gordon Douglas.

Stagecoach 1966
Robert Cummings (de dos) et Ann-Margret dans La diligence vers l’Ouest de Gordon Douglas.

 

29 avril 2015

La Marche sur Rome (1962) de Dino Risi

Titre original : « La marcia su Roma »

La marche sur RomeAu lendemain de la Première Guerre mondiale, à Milan, deux ex-soldats désoeuvrés se laissent embrigader dans le mouvement fasciste par leur ancien capitaine. Sans grande conviction, ils participent à la Marche sur Rome organisée par Mussolini… D’un évènement historique assez sombre (octobre 1922) qui marque l’arrivée au pouvoir du dictateur italien, Dino Risi parvient à faire une comédie. C’est là tout l’art de la comédie italienne. Les deux compères, deux véritables Pieds-Nickelés admirablement interprétés par Vittorio Gassman et Ugo Tognazzi en grande forme, sont assez affligeants par leur bêtise et leur inconséquence ; on peut dire qu’ils sont acteurs d’évènements qui les dépassent mais leurs attitudes sont finalement assez représentatives de celles qui vont permettre à une poignée de fascistes d’accéder au pouvoir malgré une idéologie imprécise. L’humour est constant, y compris dans les scènes les plus graves. Le terme « tragi-comique » prend ici toute son essence. A noter la présence de Roger Hanin qui étonnamment campe un chef fasciste très crédible.  Le film s’achève par des images d’archives montrant l’arrivée des partisans de Mussolini à Rome et Risi y ajoute une note tragi-comique en faisant dire au roi Victor-Emmanuel III : « Essayons ces fascistes quelques mois… » (Mussolini a gardé le pouvoir pendant 20 ans).
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Vittorio Gassman, Ugo Tognazzi, Roger Hanin, Mario Brega
Voir la fiche du film et la filmographie de Dino Risi sur le site IMDB.

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Voir les livres sur Dino Risi

La marche sur Rome
Vittorio Gassman et Ugo Tognazzi dans La marche sur Rome de Dino Risi

20 avril 2015

Le Baron de Crac (1962) de Karel Zeman

Titre original : « Baron Prásil »

Le baron de cracA sa grande surprise, le cosmonaute Tonik rencontre à son arrivée sur la Lune ses illustres prédécesseurs : Impey Barbicane (le personnage de Jules Verne), Cyrano de Bergerac et surtout Le baron de crac (alias Baron de Münchhausen) qui le prend pour un authentique sélénite et décide de l’emmener sur Terre pour lui faire découvrir les merveilles de la civilisation. Ils arrivent à Constantinople où ils délivrent la princesse Bianca retenue prisonnière par le sultan… Karel Zeman est un réalisateur tchèque qui mêle acteurs réels à des décors dessinés ou peints et animés manuellement. Cette technique est parfaitement adaptée aux histoires du célèbre Baron, avec tous leurs éléments fantastiques, oniriques et poétiques. Le film reprend quelques épisodes fameux de ces récits qui, rappelons-le ont connu de multiples variations dans le temps depuis leur première publication à la fin du XVIIIe siècle sous la plume de Rudolf Erich Raspe. Cela donne au final un film totalement à part, aussi magique dans le premier sens du terme que pouvaient l’être les films de Méliès 50 ans auparavant, doté d’un bel humour et très inventif.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Milos Kopecký, Rudolf Jelínek, Jana Brejchová
Voir la fiche du film et la filmographie de Karel Zeman sur le site IMDB.

Le Baron de Crac
Le Baron de Crac de Karel Zeman

Remarques :
* Le Baron de Münchhausen (1720-1793), capitaine de l’armée russe, a bien existé. Il fut surnommé Le Baron de Crac (« Baron du mensonge », de l’expression «raconter des craques») en raison des ses récits extraordinaires : il racontait avoir voyagé sur la Lune, chevauché un boulet de canon, dansé avec Vénus. La première publication de ses récits eut lieu de son vivant, en 1785.

* La technique utilisée par Karel Zeman évoque fortement celle qu’utilisera Terry Gilliam pour ses animations du Monty Python Flying Circus, à la fin des années soixante. Gilliam adaptera d’ailleurs, lui aussi, les aventures du Baron de Münchhausen mais en images réelles. Bien que la filiation soit soulignée par beaucoup, l’influence directe n’est pas évidente car, dans une interview, Terry Gilliam dit avoir découvert le film de Zeman dans les années 80, alors qu’il préparait sa propre adaptation de Münchhausen : « Je me rappelle avoir vu, alors que je préparais Baron Munchausen, un film de Karel Zeman dans le catalogue du British Film Institute. Je me suis dit « Wow, qu’est ce que c’est que ce truc ? » et, après avoir réussi à voir le film, « Wow, c’est génial », parce qu’il avait fait ce que j’ai toujours essayé de faire : combiner une action réelle avec des arrière-plans animés à la Gustave Doré. Le film exprimait parfaitement l’esprit du personnage ». (Terry Gilliam: Interviews, University Press of Mississippi, pp. 132–-133)

Autres adaptations :
Les Aventures du baron de Münchausen de Georges Méliès (1911)
Les Aventures fantastiques du baron Münchhausen de l’allemand de Josef Von Baky (1943) réalisé pour les 25 ans de la UFA à la demande de Goebbels.
Les fabuleuses aventures du légendaire Baron de Munchausen de Jean Image (1979), dessin animé
Le Secret des Sélénites de Jean Image (1984), dessin animé.
Les Aventures du baron de Munchausen de Terry Gilliam (1988)

12 avril 2015

Tourments (1964) de Mikio Naruse

Titre original : « Midareru »

TourmentsMariée très jeune, Reiko ne l’est restée que quelques mois, son jeune mari étant mort à la guerre. Depuis dix-huit ans, elle s’est entièrement dévouée à faire prospérer le commerce de sa belle famille tout en espérant que le jeune frère de son défunt mari prenne un jour le relais. Il a maintenant 25 ans mais mène une vie quelque dissolue. Pendant ce temps, les supermarchés s’implantent et font une sérieuse concurrence aux petits commerces… Tourments fait partie des derniers films de Mikio Naruse. Le cinéaste japonais en a, lui-même, écrit la base de l’histoire. Une fois de plus, il s’agit d’un très beau portrait de femme dont la fidélité, l’effacement et l’abnégation émeuvent profondément. Le mélodrame peut paraître classique dans ses fondements, voire assez simple ou du moins, épuré, mais la perfection de sa mise en scène par Naruse force l’admiration. La progression est remarquable, partant d’une certaine légèreté pour finir dans une grande intensité. Actrice fétiche du réalisateur, Hideko Takamine fait preuve de grande délicatesse dans son interprétation, exprimant à la fois la force de son personnage mais aussi sa fragilité et son aspiration secrète à l’amour. La filmographie de Mikio Naruse est loin d’être aussi connue qu’elle le mériterait et, au sein de celle-ci, Tourments est l’un des films les moins répandus… Quel dommage !
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Hideko Takamine, Yûzô Kayama, Mitsuko Kusabue, Yumi Shirakawa, Aiko Mimasu
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Voir les autres films de Mikio Naruse chroniqués sur ce blog…

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Tourments de Mikio Naruse
L’émouvante Hideko Takamine dans Tourments de Mikio Naruse

Homonymes :
Ne pas confondre avec….
Tourments (Hets) de Alf Sjöberg (1944) sur un scénario d’Ingmar Bergman
Tourments (El) de Luis Bunuel (1953) également chroniqué sur ce blog
Tourments de Jacques Daniel-Norman (1954) avec Tino Rossi
Tourments (Trápení) du tchèque Karel Kachyna (1962)

25 mars 2015

Histoires extraordinaires (1968) de Federico Fellini, Louis Malle et Roger Vadim

Histoires extraordinairesTrois adaptations d’une histoire d’Edgar Poe par trois réalisateurs différents :
1. Metzengerstein de Roger Vadim avec Jane Fonda, Peter Fonda : Au Moyen-âge, une jeune et riche comtesse dilapide son temps en orgies et en jeux cruels.
2. William Wilson de Louis Malle avec Alain Delon et Brigitte Bardot : Un jeune officier, cruel et sadique, de l’armée hongroise confesse à un abbé qu’il a tué son double.
3. Toby Dammit de Federico Fellini avec Terence Stamp : Un acteur anglais alcoolique et décadent arrive à Rome pour tourner un « western catholique »…

Histoires extraordinaires est hélas plutôt décevant. Pour Roger Vadim, le film est surtout l’occasion de mettre en valeur sa femme Jane Fonda en jeune comtesse cruelle aux moeurs dépravées, dans de superbes tenues affriolantes. Elle est effectivement très agréable à regarder mais l’histoire, peu développée, est moins intéressante. On pourra tout de même remarquer l’habileté de Vadim pour faire jouer les animaux, notamment les chevaux. Le sketch de Louis Malle n’est guère plus remarquable : Brigitte Bardot, attifée d’une perruque brune mal ajustée, joue épouvantablement et le thème du Bien et du Mal y est bien mal traité. Heureusement, Fellini joue dans une toute autre cour, on s’en rend compte dès les premières minutes. On retrouve ici certains de ses thèmes favoris, notamment celui d’un monde du spectacle très superficiel et artificiel. Mais le véritable thème de son sketch est plus sur la représentation de la mort. Il est difficile de ne pas penser au propre vécu du cinéaste : victime d’une embolie, Fellini a frôlé la mort et ce sketch est le premier film qu’il tourne après une longue convalescence. Face à la fausseté du monde qui l’entoure, son personnage ne trouve d’issue que dans une course hallucinée vers la mort.
Elle:
Lui : 2 étoiles (Sketch de Fellini : 3 étoiles)

Acteurs: Jane Fonda, Peter Fonda, Brigitte Bardot, Alain Delon, Terence Stamp
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Histoires extraordinaires (1968) de Roger Vadim
Jane Fonda dans Metzengerstein de Roger Vadim, l’un des trois sketches de Histoires extraordinaires (1968).

Histoires extraordinaires (1968) de Louis Malle
Brigitte Bardot et Alain Delon dans William Wilson de Louis Malle, l’un des trois sketches de Histoires extraordinaires (1968).

Histoires extraordinaires (1968) de Federico Fellini
Terence Stamp dans Toby Dammit de Federico Fellini, l’un des trois sketches de Histoires extraordinaires (1968).

Remarques :
* Les trois réalisateurs initialement prévues étaient Orson Welles, Luis Bunuel et Federico Fellini.
* Le sketch de Roger Vadim est le seul film où les deux enfants d’Henry Fonda, Jane et Peter, apparaissent ensemble.

2 mars 2015

Un crime dans la tête (1962) de John Frankenheimer

Titre original : « The Manchurian Candidate »

Un crime dans la têtePendant la Guerre de Corée, un petit groupe de soldats américains est capturé l’ennemi. Après être rentré au pays sous les honneurs, le major Marco est en proie à un malaise permanent alimenté par ses cauchemars récurrent : il se voit face à des militaires russes et chinois qui lui ont fait subir un lavage de cerveaux élaboré ce qui leur permet d’avoir sur lui un contrôle à distance… The Manchurian Candidate est adapté d’un roman de Richard Condon. C’est une histoire assez extravagante qu’il faut la replacer dans son contexte de 1962, c’est-à-dire en pleine Guerre Froide qui alimentait les fantasmes les plus fous. Mais on finit par y croire grâce aux talents de mise en scène de Frankenheimer : le montage est assez remarquable (la scène du cauchemar est franchement exceptionnelle dans son montage), les mouvements de caméra et les angles de prise de vue sont très travaillés. Le réalisateur utilise en outre des focales courtes pour accentuer l’impression de rêve (cauchemar) éveillé. Il instaure finalement un climat surréaliste et anxiogène qu’il appuie encore en introduisant le personnage d’Eugenie (Janet Leigh) dont on ne parvient pas à deviner les motivations. Côté acteurs, Sinatra est égal à lui-même, c’est-à-dire mauvais, mais Angela Lansbury et Laurence Harvey (la mère et le fils) font tous deux une prestation superbe.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Frank Sinatra, Laurence Harvey, Janet Leigh, Angela Lansbury, James Gregory
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Un crime dans la tête (1962) de John Frankenheimer
Malgré une différence d’âge de seulement trois années entre les deux acteurs, Angela Lansbury et Laurence Harvey sont mère et fils dans Un crime dans la tête (The Manchurian Candidate) de John Frankenheimer.

Remarques :
* The Manchurian Candidate est sorti sur les écrans un an avant l’assassinat du Président Kennedy (qui avait d’ailleurs donné son aval au film).
* La rumeur qui affirme que le film a été plus ou moins retiré de la circulation sous l’accusation d’avoir inspiré Lee Harvey Oswald serait totalement fausse.
* Dans la scène où il montre le jeu de cartes à son ami, Sinatra est franchement flou. Ce n’était pas un effet intentionnel mais accidentel. Frankenheimer a dû se résoudre à utiliser ce plan qui était celui où Sinatra était le meilleur (il était toujours très difficile de faire rejouer une scène à Sinatra).
* Remake :
Un crime dans la tête (The Manchurian Candidate) de Jonathan Demme (2004) avec Denzel Washington, Liev Schreiber et Meryl Streep.

7 février 2015

Exodus (1960) de Otto Preminger

ExodusExodus raconte les évènements qui précèdent la fondation de l’état d’Israël en 1948, depuis l’odyssée du cargo éponyme rempli de réfugiés jusqu’au vote du partage de la Palestine à l’ONU… Adapté d’un roman fleuve de Leon Uris, Exodus a été conçu comme une vaste saga, avec de nombreux personnages et s’étalant sur plus de trois heures. Le scénariste Donald Trumbo a fait un beau travail d’écriture qui donne un bel équilibre entre romance et action politique, même si l’on peut regretter l’emploi de stéréotypes pour générer le lyrisme. Version romancée de faits historiques, Exodus (et notamment son degré d’objectivité) va être diversement apprécié selon le regard que l’on porte sur le conflit qui a suivi ces évènements. Si les sentiments mitigés et embarrassés des anglais sont bien représentés, si l’option de l’action violente est bien montrée comme source de dissensions parmi les juifs et comme futur héritage embarrassant, il faut bien reconnaître que le point de vue arabe n’est jamais montré. Cinématographiquement parlant, Exodus est réussi, bien maitrisé de bout en bout par son réalisateur. Les acteurs font tous une belle prestation, Sal Mineo étant particulièrement remarquable dans un rôle d’homme-enfant. La musique d’Ernest Gold fut oscarisée. Le succès et l’impact du film furent très importants.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Paul Newman, Eva Marie Saint, Ralph Richardson, Lee J. Cobb, Sal Mineo, John Derek, Hugh Griffith, Gregory Ratoff, Jill Haworth, Marius Goring, Alexandra Stewart
Voir la fiche du film et la filmographie de Otto Preminger sur le site IMDB.

Voir les autres films de Otto Preminger chroniqués sur ce blog…

Lire une analyse plus complète sur le site DVDClassiks

Voir les livres sur Otto Preminger

Exodus d'Otto Preminger

Remarques :
* Dans ses mémoires, Otto Preminger raconte comment il a racheté les droits du roman de Leon Uris à la MGM en les convaincant qu’ils risquaient un boycott dans les pays arabes : « Moi, je peux me le permettre car je suis un producteur indépendant. » Une fois en possession des droits, Preminger commença à travailler au scénario avec l’auteur, mais peu satisfait des dialogues, écarta ce dernier pour embaucher Albert Maltz (rapidement jugé trop lent) puis Dalton Trumbo, tous deux alors sur la liste noire établie aux heures les plus sombres du maccarthysme. Preminger mit Donald Trumbo sous son vrai nom au générique, ce qui constituait une première et contribua grandement à la réhabilitation des talents mis sur liste noire qui devint ipso facto lettre morte.

* Autres films relatant les mêmes évènements :
Exodus (Il grido della terra) de l’italien Duilio Coletti (1949)
La Bataille des sables (Sword in the desert) de l’américain George Sherman (1949) avec Dana Andrews
deux films beaucoup moins connus et faits « à chaud ».

25 janvier 2015

Le Chevalier de Maupin (1967) de Mauro Bolognini

Titre original : « Madamigella di Maupin »

Mademoiselle de MaupinAu XVIIIe siècle, Magdeleine de Maupin, déguisée en abbé, est envoyée par son père au couvent pour la protéger de l’invasion des troupes hongroises. La jeune fille préfère toutefois prendre sa liberté pour rencontrer l’amour. Prise pour un jeune garçon, elle est enrôlée de force par un fougueux capitaine du roi… Cette adaptation du roman de Théophile Gautier Mademoiselle de Maupin est l’unique film d’aventures de Mauro Bolognini. Cette histoire, qui évoque quelque peu le Chevalier d’Eon, est un divertissement léger et assez plaisant à condition de faire preuve d’imagination : aucun effort n’ayant été fait pour travestir un tant soit peu la belle Catherine Spaak en homme ou même en jeune garçon efféminé, on se demande par quel mécanisme mental les autres personnages peuvent ne pas voir qu’il s’agit d’une femme (l’habit était certes plus important à cette époque qu’aujourd’hui, la robe était certainement un élément indissociable de la féminité et inversement, les perruques gênaient-elles à l’identification des sexes ?) Toutes ces réflexions intérieures nous font perdre un peu le fil de l’histoire qui, fort heureusement, n’est guère complexe. Robert Hossein, auréolé du succès d’Angélique Marquise des anges, était un choix sans doute assez facile pour le rôle du séducteur plein de bravoure mais semble ne s’être investi qu’assez mollement dans ce personnage assez pataud. Le Chevalier de Maupin est le premier film en couleurs de Bolognini et l’image est très belle ; le meilleur du film se situe certainement là.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Catherine Spaak, Robert Hossein, Tomas Milian
Voir la fiche du film et la filmographie de Mauro Bolognini sur le site IMDB.

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Remarques :
* Le film aurait eu quelques soucis avec la censure. Pourtant, et en cherchant bien, un seul plan semble pouvoir affoler les sens d’une personne émotive (Catherine Spaak, sortant du bain, vue nue de dos une fraction de seconde dans le reflet d’une flaque d’eau)…
* Le film est de toute évidence post-synchronisé, cela se sent.
* Catherine Spaak joue le rôle d’une mère supérieure dans un remake pour la télévision (RAI en Italie et TF1 en France) : Julie, chevalier de Maupin (2004) avec Sarah Biasini (la fille de Romy Schneider) dans le rôle principal.

Chevalier
Robert Hossein et Catherine Spaak déguisée en garçon dans Le Chevalier de Maupin (1967) de Mauro Bolognini

Le Chevalier de Maupin de Mauro Bolognini
Catherine Spaak déguisée en garçon (si!) et Tomas Milian dans Le Chevalier de Maupin (1967) de Mauro Bolognini

16 janvier 2015

Tempête à Washington (1962) de Otto Preminger

Titre original : « Advise and Consent »

Tempête à WashingtonLe président des Etats-Unis a décidé de nommer Robert Leffingwell au poste de Secrétaire d’État (soit le chef du département chargé des Affaires étrangères). Ce choix doit être ratifié par le Sénat mais l’affaire s’annonce difficile car les prises de positions de Leffingwell en faveur de la paix ne font pas l’unanimité à l’intérieur même de son parti…
Tempête à Washington est l’adaptation d’un copieux roman d’Allen Drury, correspondant du New York Times à Washington qui a reçu le Prix Pulitzer. Inspiré de personnages réels (le président étant basé sur Franklin Roosevelt), l’histoire décrit les basses manoeuvres qui sont monnaie courante à Washington. Bien qu’il s’attaque plus aux hommes qu’aux institutions et qu’il se révèle être finalement à la gloire de la démocratie à l’américaine, le film fut parfois critiqué à sa sortie pour la mauvaise image qu’il donnait des Etats-Unis (1). Le tour de force de Preminger est d’une part de réussir à nous intéresser sur un sujet à priori rébarbatif mais surtout de montrer une maitrise totale et parfaite de la mise en scène malgré le très grand nombre de personnages.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Henry Fonda, Walter Pidgeon, Charles Laughton, Gene Tierney, Burgess Meredith, Franchot Tone, Lew Ayres
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Remarques :
* Le film reçut l’aide du gouvernement qui donna l’autorisation de filmer à l’intérieur du Capitole.
* Dans son autobiographie, Otto Preminger mentionne un article, à l’époque paru dans Le Monde, qui vantait la liberté d’expression aux Etats-Unis, affirmant qu’un tel film n’aurait pas être tourné en France car le gouvernement français était intouchable (Otto Preminger Autobiographie JC Lattès 1981 p. 173).
* Tempête à Washington est de dernier film de Charles Laughton. Déjà très affaibli par son cancer pendant le tournage, il décédera quelques mois plus tard.
* Tempête à Washington marque le retour à l’écran de Gene Tierney après une longue dépression nerveuse.

(1) Ces critiques font penser à celles que reçut  Mr. Smith au sénat (1939) de Frank Capra. Les deux films sont d’ailleurs assez proches dans l’esprit.

Tempête à Washington (1962) de Otto PremingerCharles Laughton et Walter Pidgeon en pleine joute verbale au Sénat dans Tempête à Washington d’Otto Preminger.