14 janvier 2021

Transit (2018) de Christian Petzold

TransitDe nos jours, dans une France sous régime dictatorial venu d’outre-Rhin, l’allemand Georg rejoint Marseille pour fuir le fascisme. Il espère pouvoir s’embarquer pour le Mexique. Il prend l’identité d’un écrivain qui vient de se suicider afin de profiter de son visa…
Transit est le sixième long métrage de l’allemand Christian Petzold. Il s’agit de la seconde adaptation du roman homonyme qu’Anna Seghers a écrit en 1941 (paru en 1944) en s’inspirant de son propre parcours au début de la guerre. Le réalisateur a fait le pari audacieux de replacer le récit à l’époque actuelle sans changer les attitudes et les rapports entre les personnes ; ainsi, les policiers français actuels se comportent comme les soldats allemands pendant la guerre. Il est bon d’être averti de cela car, sinon, le début est très déroutant. Le but de cette translation est d’éviter le format du film historique pur et de faire en sorte que le propos entre en résonance avec notre monde d’aujourd’hui, notamment sur le plan de la condition de réfugié. Le réalisateur utilise une voix-off à la troisième personne qui donne une coloration très littéraire (dans le bon sens du terme) à l’ensemble. Franz Rogowski met beaucoup de force dans son interprétation, l’acteur allemand (qui ressemble étrangement à Joaquin Phoenix) montre là un réel talent.
Elle: 3 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Franz Rogowski, Paula Beer, Godehard Giese, Matthias Brandt
Voir la fiche du film et la filmographie de Christian Petzold sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

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TransitPaula Beer et Franz Rogowski dans Transit de Christian Petzold.

Précédente adaptation :
Transit de René Allio (1991) avec Sebastian Koch.

16 décembre 2016

L’insoutenable légèreté de l’être (1988) de Philip Kaufman

Titre original : « The Unbearable Lightness of Being »

L'insoutenable légèreté de l'êtrePrague, printemps 1968. Un vent de liberté souffle sur la Tchécoslovaquie. Tomas est un jeune et séduisant chirurgien du cerveau qui multiplie les conquêtes féminines. Il cultive une forme d’amitié érotique avec une artiste, Sabina, et développe un amour plus sérieux pour Tereza, une jeune serveuse rencontrée lors d’un déplacement en province… L’insoutenable légèreté de l’être est un roman à succès de Milan Kundera, adapté ici pour le grand écran par Jean-Claude Carrière. Le thème principal est l’opposition entre légèreté et gravité : comment peut-on être léger et insouciant face à la pesanteur des destinées? Tereza finit par trouver insoutenable la légèreté de Tomas alors qu’ils assistent impuissants à l’écrasement de leur pays. Le récit de Kundera a en effet aussi un aspect historique, par son témoignage de l’irruption des chars et soldats soviétiques à Prague en août 1968 et du processus de « normalisation » qui a suivi. Kundera a orné son récit d’une sensualité érotique que l’on retrouve à l’écran. Elle contribue à l’équilibre général de l’ensemble en lui donnant une plus grande accessibilité (ou bien Kundera aurait-il cherché à privilégier une certaine légèreté ?) Bien qu’un peu trop long (près de 3 heures), le film de Philip Kaufman est une belle adaptation du roman.
Elle: 4 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Daniel Day-Lewis, Juliette Binoche, Lena Olin, Stellan Skarsgård
Voir la fiche du film et la filmographie de Philip Kaufman sur le site IMDB.

Remarques :
* L’insoutenable légèreté de l’être a lancé la carrière internationale de Juliette Binoche.
* Roman (publié en 1984) et film précèdent la chute du Mur de quelques années. Kundera a écrit son roman juste après la mort de Brejnev (qui avait ordonné la « normalisation » de la Tchécoslovaquie en 1968).

 

L'insoutenable légèreté de l'être
Légèreté : Lena Olin et Daniel Day-Lewis dans L’insoutenable légèreté de l’être de Philip Kaufman.

L'insoutenable légèreté de l'être
Gravité : Juliette Binoche dans L’insoutenable légèreté de l’être de Philip Kaufman.

7 février 2015

Exodus (1960) de Otto Preminger

ExodusExodus raconte les évènements qui précèdent la fondation de l’état d’Israël en 1948, depuis l’odyssée du cargo éponyme rempli de réfugiés jusqu’au vote du partage de la Palestine à l’ONU… Adapté d’un roman fleuve de Leon Uris, Exodus a été conçu comme une vaste saga, avec de nombreux personnages et s’étalant sur plus de trois heures. Le scénariste Donald Trumbo a fait un beau travail d’écriture qui donne un bel équilibre entre romance et action politique, même si l’on peut regretter l’emploi de stéréotypes pour générer le lyrisme. Version romancée de faits historiques, Exodus (et notamment son degré d’objectivité) va être diversement apprécié selon le regard que l’on porte sur le conflit qui a suivi ces évènements. Si les sentiments mitigés et embarrassés des anglais sont bien représentés, si l’option de l’action violente est bien montrée comme source de dissensions parmi les juifs et comme futur héritage embarrassant, il faut bien reconnaître que le point de vue arabe n’est jamais montré. Cinématographiquement parlant, Exodus est réussi, bien maitrisé de bout en bout par son réalisateur. Les acteurs font tous une belle prestation, Sal Mineo étant particulièrement remarquable dans un rôle d’homme-enfant. La musique d’Ernest Gold fut oscarisée. Le succès et l’impact du film furent très importants.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Paul Newman, Eva Marie Saint, Ralph Richardson, Lee J. Cobb, Sal Mineo, John Derek, Hugh Griffith, Gregory Ratoff, Jill Haworth, Marius Goring, Alexandra Stewart
Voir la fiche du film et la filmographie de Otto Preminger sur le site IMDB.

Voir les autres films de Otto Preminger chroniqués sur ce blog…

Lire une analyse plus complète sur le site DVDClassiks

Voir les livres sur Otto Preminger

Exodus d'Otto Preminger

Remarques :
* Dans ses mémoires, Otto Preminger raconte comment il a racheté les droits du roman de Leon Uris à la MGM en les convaincant qu’ils risquaient un boycott dans les pays arabes : « Moi, je peux me le permettre car je suis un producteur indépendant. » Une fois en possession des droits, Preminger commença à travailler au scénario avec l’auteur, mais peu satisfait des dialogues, écarta ce dernier pour embaucher Albert Maltz (rapidement jugé trop lent) puis Dalton Trumbo, tous deux alors sur la liste noire établie aux heures les plus sombres du maccarthysme. Preminger mit Donald Trumbo sous son vrai nom au générique, ce qui constituait une première et contribua grandement à la réhabilitation des talents mis sur liste noire qui devint ipso facto lettre morte.

* Autres films relatant les mêmes évènements :
Exodus (Il grido della terra) de l’italien Duilio Coletti (1949)
La Bataille des sables (Sword in the desert) de l’américain George Sherman (1949) avec Dana Andrews
deux films beaucoup moins connus et faits « à chaud ».

15 juin 2013

Barbara (2012) de Christian Petzold

BarbaraDans l’Allemagne de l’Est de 1980, une doctoresse trentenaire est mutée dans un petit hôpital de province après avoir fait un séjour en détention pour avoir cherché à obtenir un visa de sortie. Elle reste distante envers ses collègues, craignant la police secrète et ses informateurs… Christian Petzold est l’un des meilleurs talents de la nouvelle génération de cinéastes allemands, ce film Barbara le démontre magistralement. Il en a écrit lui-même le scénario, une histoire qui mêle habilement le contexte politique de la RDA avec une histoire sentimentale et qui constitue un bel hymne à la vie. Christian Petzold ne théorise pas, le climat de surveillance constante est ici montré dans son expression la plus quotidienne, sans scène spectaculaire, une description assez épurée mais très authentique. Barbara est aussi un portrait de femme, très fermée et froide de prime abord et qui va s’ouvrir très lentement pour parvenir à une autre vision de la vie à laquelle elle aspire. Cette femme est remarquablement incarnée par la belle et longiligne Nina Hoss qui fait montre d’une grande présence à l’écran. Barbara est un film sans artifice. Il y a beaucoup de sensibilité et de délicatesse dans le regard de Christian Petzold.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Nina Hoss, Ronald Zehrfeld, Rainer Bock
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