7 avril 2022

Des hommes et des dieux (2010) de Xavier Beauvois

Des hommes et des dieuxDans un monastère dans un village isolé au milieu des montagnes algériennes, une petite communauté de neuf moines catholiques mènent une vie simple, austère, rythmée par la prière et les tâches quotidiennes. Une place importante est accordée au travail de la terre, à l’aide aux démunis, aux soins apportés aux malades…
Des hommes et des dieux est un film français réalisé par Xavier Beauvois, inspiré librement de l’assassinat des moines de Tibhirine en Algérie en 1996, pendant la guerre civile algérienne qui a opposé l’Armée nationale populaire (ANP) et divers groupes islamistes. Ce n’est pas un récit l’enlèvement des moines mais plutôt de ce qui l’a précédé, les quelques mois où le danger grandissait et où la question  « partir ou rester » se posait. Bien entendu, la question se pose ici en termes théologiques mais aussi, et surtout, en termes humains. Xavier Beauvois dresse en effet un portrait en profondeur de ces hommes et la question de la Foi est finalement très peu abordée. Il nous place ainsi très près de ses personnages et l’excellente interprétation encourage cette proximité. Le film est lent mais jamais ennuyeux. Des hommes et des dieux est un très beau film, assez unique en son genre.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lambert Wilson, Michael Lonsdale, Olivier Rabourdin, Philippe Laudenbach, Jacques Herlin, Loïc Pichon, Xavier Maly, Jean-Marie Frin, Sabrina Ouazani, Olivier Perrier
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Des hommes et des dieux Olivier Rabourdin et Lambert Wilson dans Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois.

Des hommes et des dieuxMichael Lonsdale et Sabrina Ouazani dans Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois.

20 septembre 2016

A Touch of Zen (1971) de King Hu

Titre original : « Xia nü »

A Touch of ZenDans la Chine du XVIIe siècle, Gu Shengzai est écrivain public et portraitiste. Trentenaire, célibataire et sans ambition, il vit avec sa mère dans son village natal. Intrigué par la présence d’une jeune femme qui s’est installée dans le fort abandonné face à sa maison, il va se retrouver mêlé, malgré lui, à des rivalités politiques qui opposent le mouvement Donglin de Yang Lian et le Grand Eunuque Weï… A Touch of Zen est un film taïwanais qui a marqué le genre wu xia pian (film de sabre chinois). Il a été récemment restauré (en 2014). Originellement sorti en deux parties, il s’étale sur près de trois heures. Il faut bien avouer que la mise en place paraît bien longue, très longue même : il faut patienter une bonne heure avant d’avoir le sentiment d’être entré dans le vif du sujet. L’image est très belle : King Hu est un perfectionniste (le tournage a duré plus de deux ans) et cela se sent dans tous ses plans. Il exploite merveilleusement l’écran large par de superbes travelings. Les décors naturels en dehors du village sont superbes. La scène la plus célèbre est celle du combat dans la forêt des bambous verts : King Hu met en symbiose parfaite un décor inhabituel et une élégante chorégraphie bondissante. De façon générale, et en comparaison avec les films plus récents du genre, les scènes de combats sont très bien intégrées dans un ensemble harmonieux, un ensemble doté d’une dimension morale, voire spirituelle, forte.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Hsu Feng, Shih Chun, Bai Ying
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A Touch of Zen
Hsu Feng dans A Touch of Zen de King Hu.

4 juin 2015

Il Monaco di Monza (1962) de Sergio Corbucci

Il monaco di MonzaAu Moyen-âge, Pasquale est un cordonnier (spécialisé dans les pieds droits) à Monza, il est veuf avec douze enfants à charge. Sans argent et couvert de dettes, il quitte la ville avec ses enfants en se faisant passer pour un moine quêteur. En chemin, il rencontre Cervelet, un berger sans troupeau qui le suit. Ils arrivent dans un château… Il Monaco di Monza (= Le Moine de Monza) est une variation satirique de La Monaca di Monza (= La Religieuse de Monza) sorti quasi simultanément sur les écrans basé sur l’histoire d’une nonne martyre à la suite d’un amour interdit (1). Ici, Totò nous interprète un faux moine qui, de façon intéressée, vole au secours d’une comtesse séquestrée par son beau-frère. L’histoire est bien entendu totalement farfelue. L’humour y est très dense, cela ne s’arrête jamais, tout est tourné en dérision et on joue gaiement avec les anachronismes. Aucune longueur ni lourdeur, tout est bien dosé pour notre plus grand plaisir. Il Monaco di Monza est un film assez rare mais néanmoins d’un excellent niveau comique ; Totò au meilleur de son talent.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Totò, Nino Taranto, Erminio Macario, Lisa Gastoni, Moira Orfei
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Remarques :
Il monaco di Monza* Dans une scène de taverne, les chanteurs Adriano Celentano et Don Backy font une apparition en faux frères dominicains et interprètent une chanson dans le pur style yéyé. Ils étaient alors suffisamment populaires pour se retrouver en bonne position sur l’affiche ci-contre (en haut à gauche et à droite de l’actrice principale) alors qu’ils ne se sont présents que 2 minutes tout au plus.

(1) La Nonne de Monza est un personnage qui a réellement existé: Soeur Virginia Maria, née Marianna de Leyva. Son histoire a été portée plusieurs fois à l’écran, petit et grand. A noter qu’elle est aussi présente dans ce film puisque la nonne, également victime du comte, se prénomme Virginia.

Il Monaco di Monza
– Maria Denis
– Ora Pro Nobis
– Sophia Loren
– Ora Pro Nobis
– …
(comme il ne connait pas un mot de latin mais veut donner l’impression qu’il récite ses prières, Totò égrène consciencieusement une liste d’actrices….)
Erminio Macario et Totò dans Il Monaco di Monza de Sergio Corbucci.

3 mars 2015

Païsa (1946) de Roberto Rossellini

Titre original : « Paisà »

PaïsaSix sketches dans l’Italie en guerre entre l’été 1943 et le printemps 1945. 1) En Sicile, lors du débarquement de juillet 1943, une petite troupe de soldats américains se fait guider par une jeune fille qui sera accusée à tort. 2) A Naples, un gamin vole les chaussures d’un soldat américain. Lorsqu’il retrouve l’enfant, il entreprend de le ramener à ses parents mais découvre qu’il est orphelin et vit dans une misère la plus totale. 3) A Rome, une jeune fille devenue prostituée ramasse un soldat américain saoul et reconnait celui qu’elle avait accueilli six plus tôt et qui avait promis de venir la chercher. 4) A Florence, en pleine bataille pour la libération de la ville, une infirmière anglaise cherche à rejoindre le chef des partisans avec qui elle avait eu une aventure avant la guerre. 5) Dans l’Apennin du Nord, trois aumôniers militaires américains sont accueillis pour la nuit dans un couvent franciscain. Lorsque les moines réalisent que l’un est protestant et l’autre juif, ils décident de jeuner pour obtenir leur conversion. 6) Dans le delta du Pô, des partisans en petit nombre et quelques parachutistes alliés se battent désespérément contre les Allemands dans les marais… En suivant la progression des Alliés, du sud au nord, les six sketches de Païsa nous dressent un portrait de l’Italie se libérant du joug allemand, un portrait d’un réalisme presque documentaire et présentant la situation du peuple italien sous de nombreuses facettes. Tourné peu de temps après les évènements qu’il relate, au milieu du grouillement des rues encore emplies de soldats alliés et des décombres, Païsa est plus qu’un témoignage, c’est une réflexion sur l’avenir de son pays et des hommes qui le composent. Le plus étonnant, c’est le recul dont fait preuve Rossellini alors que ces évènements n’ont que quelques mois, que l’avenir est totalement incertain. La vision qu’il nous propose semble être à la fois de l’intérieur et de l’extérieur. Rome, ville ouverte était une vision à l’échelle d’une ville, Paisa est à l’échelle d’un pays.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Maria Michi, Harriet Medin, William Tubbs
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Païsa (1946) de Roberto Rossellini

Remarques :
* Coscénariste et assistant sur le tournage de Païsa, Federico Fellini raconte : « Je crois avoir appris de Rossellini ­ un apprentissage jamais traduit en paroles, jamais exprimé, jamais transformé en programme ­ la possibilité de marcher en équilibre au milieu des conditions les plus hostiles, les plus opposées, et en même temps la capacité naturelle de tourner à son propre avantage ces adversités, de les transformer en un sentiment, en des valeurs émotionnelles, en un point de vue. »

* Rome, ville ouverte (1945), Paisa (1946) et Allemagne année zéro (1947) forment ce que l’on appelle « la trilogie néoréaliste de Rossellini ».

Païsa (1946) de Roberto Rossellini
Gar Moore et Maria Michi dans la troisième séquence de Païsa de Roberto Rossellini

6 novembre 2014

Brother Orchid (1940) de Lloyd Bacon

Brother OrchidLorsque le chef de gang Little John Sarto (Edward G. Robinson) revient prendre sa place après avoir tenté de se retirer du racket, il la trouve occupée par son ancien bras droit Jack Buck (Humphrey Bogart). Entre les deux hommes, la guerre est déclarée… Brother Orchid illustre la fin d’un genre :  nous sommes bien à la fin de la décennie des films de gangsters. L’idée est ici à la fois d’adoucir le personnage du truand et d’introduire une bonne dose de comédie : Edward G. Robinson décide ainsi de partir en Europe « pour apprendre à avoir de la classe » et l’histoire le verra même enfiler une robe de bure dans un monastère. Aussi étonnant que cela puisse paraître, le mélange des genres est assez réussi : Brother Orchid est très plaisant, avec un humour bien dosé, les seconds rôles sont très bien tenus. Le film connut un certain succès, à son époque du moins.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Edward G. Robinson, Ann Sothern, Humphrey Bogart, Donald Crisp, Ralph Bellamy
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Remarques :
* Fatigué des rôles de gangster, Edward G. Robinson n’avait pu obtenir son rôle dans Dr. Ehrlich’s Magic Bullet de William Dieterle (retraçant la vie d’un éminent chercheur en biologie) qu’à la condition de faire un film de gangster supplémentaire. Ce sera Brother Orchid.
* Le film n’est jamais sorti en France.

 

Brother Orchid

29 octobre 2014

Le Fantôme de la liberté (1974) de Luis Buñuel

Le fantôme de la libertéDes condamnés à mort qui crient « Vive les chaînes » au moment d’être fusillés (1)… dès la scène du générique, le ton est donné : la logique et les conventions vont être bien malmenées dans Le Fantôme de la liberté et Luis Buñuel et Jean-Claude Carrière sont ici allés encore plus loin que dans Le Charme discret de la bourgeoisie. La structure est inhabituelle : selon le principe des « cadavres exquis » des surréalistes, chacune des petites histoires qui composent le film est reliée à la suivante par un personnage ou une situation qui nous emmènent sur un thème totalement différent. Buñuel nous surprend sans arrêt, il retourne les usages, prend des directions inattendues. Il chamboule nos certitudes, nous faisant prendre parfois un énorme recul sur ce que nous voyons. On peut ainsi dire que le film a une dimension philosophique dans le sens où il nous fait voir de façon nouvelle des évènements ou des comportements les plus anodins, il bouscule ce que nous tenons pour acquis. L’humour, quant à lui, est toujours présent. Aujourd’hui comme il y a quarante ans, Le Fantôme de la liberté est un petit bijou.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Monica Vitti, Jean-Claude Brialy, Paul Frankeur, Michael Lonsdale, François Maistre, Michel Piccoli, Claude Piéplu, Jean Rochefort, Julien Bertheau, Marie-France Pisier, Adolfo Celi
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Remarques :
* La Voie lactée, Le Charme discret de la bourgeoisie et  Le fantôme de la liberté forment une trilogie surréaliste. Buñuel préfère le terme de triptyque, « comme au Moyen Âge » ajoute t-il. « Les même thèmes, quelquefois même les mêmes phrases se retrouvent dans les trois films. Ils parlent de la recherche de la vérité, qu’il faut fuir dès que l’on croit l’avoir trouvée, du rituel social implacable. Ils parlent de la recherche indispensable, du hasard, de la morale personnelle, du mystère qu’il faut respecter. » (Extrait de l’autobiographie de Luis Buñuel « Mon dernier soupir »)

* Cameo : Au tout début du film, Luis Buñuel est l’un des quatre fusillés : le moine portant une barbe. A sa gauche, l’homme avec un bandeau sur le front est son producteur Serge Silberman.

(1) Luis Buñuel précise dans son autobiographie que cette scène est authentique : par haine des idées libérales introduites par Napoléon, le peuple espagnol criait « Vive les chaînes » au retour des Bourbons.
A noter que ces exécutions sont le sujet du tableau de Goya Tres de Mayo dont une reproduction ouvre le film.

Le Fantôme de la liberté (1974) de Luis Buñuel
La maitresse de maison (Alix Mahieux) place les invités à table…
Les rituels de notre société sont malmenés : ici, on défèque tout en discutant et on s’absente discrètement quelques minutes pour aller manger dans la cuisine.
(avec Marie-France Pisier, Jean Rougerie, …)

28 octobre 2013

Le héros sacrilège (1955) de Kenji Mizoguchi

Titre original : « Shin heike monogatari »

Le héros sacrilègeDans le Japon du XIIe siècle, le capitaine Tadamori rentre à Kyoto après avoir vaincu une révolte de pirates dans les mers de l’ouest. Les nobles de la cour empêchent l’empereur de le féliciter car il n’est qu’un samouraï. Ce mépris génère un fort ressentiment chez son fils Kiyomori… Avec Le héros sacrilège, Kenji Mizoguchi met en scène une période charnière de l’histoire du Japon, le moment où les nobles et les moines d’influence chinoise vont perdre leurs pouvoirs au profit des samouraïs, ouvrant ainsi une période de pouvoirs plutôt militaires qui va durer 7 siècles. Il est bien entendu possible de faire un parallèle avec le Japon des années cinquante qui, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, était également en mutation, avec la bénédiction des américains. Dans les deux cas, une classe au pouvoir devait céder le pouvoir au peuple. Le héros sacrilège est donc une belle fresque historique, le second (et dernier) film en couleurs de Mizoguchi (1). Le film a été tourné avec des moyens assez importants comme l’attestent plusieurs scènes de grande ampleur avec de très nombreux figurants. Mizoguchi soigne la reconstitution, les décors, les costumes. Fait rarissime chez le cinéaste, la femme est ici vile et cupide, le héros est un homme. Ce fils va se construire en créant la rupture, bravant les interdits, refusant le joug de la caste des nobles ou des religieux. Outre la force du récit, l’autre point fort du film est sa beauté formelle. La mise en scène Mizoguchi appuie subtilement le propos, alternant plans séquences avec un montage plus heurté, jouant avec les couleurs pour renforcer des sentiments. Le héros sacrilège est certes un film inhabituel pour Mizoguchi (et il n’était probablement pas totalement enthousiasmé par le sujet) mais il n’en mérite pas moins de figurer parmi ses plus grandes réalisations.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Narutoshi Hayashi, Raizô Ichikawa, Tatsuya Ishiguro, Michiyo Kogure, Yoshiko Kuga, Eitarô Shindô
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Remarques :
* Mizoguchi adapte le roman historique d’Eiji Yoshikawa, Shin heike monogatari, qui donnait une nouvelle version de cette montée au pouvoir du clan Taira (aussi nommé Heike) au XIIe siècle. L’écrivain réhabilitait le rôle de Kiyomori Taira qui était auparavant mal considéré dans la tradition populaire. Mizoguchi n’adapte que la moitié du roman, la seconde sera adaptée en 1956 par Teinosuke Kinugasa : Shin, Heike monogatari: Yoshinaka o meguru sannin no onna, film aujourd’hui perdu. Kinugasa avait déjà réalisé deux ans plus tôt, La Porte de l’enfer (1953), film récompensé par une Palme d’or à Cannes et qui traite de la même époque.

* Mizoguchi n’aime pas les scènes d’action et son scénariste, Yoshikata Yoda, raconte que le cinéaste l’a fait venir au moment de tourner la scène finale avec les palanquins, une scène avec laquelle il était très mal à l’aise et qu’il aurait préféré ne pas tourner.

* Le héros sacrilège a lancé la carrière du jeune acteur Raizô Ichikawa (qui n’a aucun lien de parenté avec le réalisateur Kon Ichikawa) qui est devenu un acteur très célèbre au Japon.

(1) Mizoguchi préférera revenir au noir au blanc pour son film suivant qui sera, hélas, son ultime réalisation.

21 avril 2013

Oncle Boonmee (2010) de Apichatpong Weerasethakul

Titre original : « Loong Boonmee raleuk chat »
Titre complet : « Oncle Boonmee (celui qui se souvient de ses vies antérieures) »

Oncle BoonmeeBoonmee, un apiculteur thaïlandais d’une soixantaine d’années, sent la mort approcher. Un soir, sa femme défunte et son fils disparu depuis des années font une apparition à la table du dîner. Le fils a pris l’apparence d’un grand singe aux yeux rouges brillants. Boonmee a la faculté de se souvenir de ses vies antérieures. Accompagné de sa famille, il va traverser la jungle jusqu’à une grotte au sommet d’une colline, lieu de naissance de sa première vie… Inspiré du livre « A Man Who Can Recall Past Lives » du moine thaïlandais Phra Sripariyattiweti, livre qui serait basé sur une histoire vraie, Oncle Boonmee a pour thème central la réincarnation et c’est un film que l’on peut ressentir différemment selon ses attirances vers une certaine spiritualité de l’existence. Il n’est pas ici question que de vies antérieures mais aussi d’une certaine superposition (ou entrelacement) de différents degrés de réalités, dans lesquels des créatures fantastiques (et/ou imaginaires) peuvent apparaître. Le film est particulièrement lent mais certaines scènes sont très belles et pleines de douceur. C’est en tous cas un film qui a le mérite d’être différent. Oncle Boonmee a été primé à Cannes en 2010, l’année où Tim Burton était président du jury.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Thanapat Saisaymar, Jenjira Pongpas
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6 juillet 2012

Andreï Roublev (1966) de Andreï Tarkovski

Titre original : « Andrey Rublyov »

Andreï RoublevPour évoquer la vie du peintre Andreï Roublev, Tarkovski ne pouvait se baser sur des faits historiques puisque nous ne savons rien de la vie de ce moine russe du XVe siècle. Il s’est donc attaché à retranscrire l’âme du peintre. Il le fait en huit tableaux plus un prologue (1) et un épilogue où le film passe en couleurs pour nous montrer son œuvre (2). Il nous dépeint un Andreï Roublev tourmenté par l’idée de la vengeance du Jugement dernier, refusant ainsi l’image d’un Dieu implacable et même cruel, une idée qui aidait les seigneurs de cette époque à garder les paysans en semi-esclavage. En filigrane, Tarkovski nous fait partager ses propres interrogations sur le rôle de l’artiste sous un régime totalitaire, une lecture qui n’a pas échappé aux autorités et lui valu blocages et interdictions. Pour Andreï Roublev, Dieu ne peut qu’insuffler l’amour et ne peut que s’opposer à la cruauté omniprésente dans cette société du XVe siècle. Le film est superbe aussi dans sa forme, assez proche du cinéma d’Eisenstein. Certaines scènes sont d’une rare ampleur ; de nombreux plans sont superbes. Empreint d’un grand mysticisme, Andreï Roublev est un très beau film, puissant, profond et doté d’une grande énergie. (Film de 3h03)
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Anatoliy Solonitsyn, Ivan Lapikov, Nikolay Grinko, Nikolai Sergeyev
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Remarque :
Andreï Roublev Le scénario a été cosigné par Andreï Tarkovski et Andreï Konchalovsky.

(1) Le prologue reprend l’idée que le ballon à air chaud aurait été inventé en Russie bien avant les frères Montgolfier. Sauf que cette théorie attribue l’invention à Furvin Kryakutnoi en l’an 1731. Tarkovski va donc encore plus loin en créant une invention encore antérieure, au XVe siècle.
(2) Les icones montrées dans l’épilogue ne sont pas toutes d’Andreï Roublev mais datent toutes de son époque.

2 juillet 2012

L’homme qui voulut être roi (1975) de John Huston

Titre original : « The man who would be king »

L'homme qui voulut être roiAux alentours de 1880, en Inde, deux ex-soldats de l’armée britannique décident de se rendre au Kafiristan, petit pays voisin mais isolé par de hautes montagnes où aucun européen n’a mis les pieds depuis Alexandre le Grand. Leur but est de prendre possession du pays et de s’y faire sacrer roi… Grand lecteur de Kipling depuis l’enfance, John Huston avait déjà en projet dans les années cinquante d’adapter la courte nouvelle L’homme qui voulut être roi ; les deux rôles principaux allaient être tenus par Clark Gable et Humphrey Bogart. Le décès de ce dernier mis fin au projet et ce n’est que vingt ans plus tard qu’il pourra le concrétiser. John Huston enrichit la nouvelle qui, tout en étant un grand film d’aventures, garde toute sa dimension philosophique sur l’attrait du pouvoir et de la richesse opposé à des sentiments plus nobles d’honneur, d’idéalisme et de loyauté dans l’amitié. Les images sont superbes (le film a été tourné entièrement au Maroc) et Michael Caine et Sean Connery forment un duo parfait, très britannique, les deux acteurs s’étant parfaitement entendus sur le tournage. L’homme qui voulut être roi est un film d’une belle ampleur.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Sean Connery, Michael Caine, Christopher Plummer
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Remarques :
* Le Kafiristan est aujourd’hui le Nouristan, une province au nord-ouest de l’Afghanistan.
* L’actrice qui interprète Roxanne est la propre femme de Michael Caine, d’origine indienne.