8 février 2015

Tirez la langue, mademoiselle (2013) de Axelle Ropert

Tirez la langue, mademoiselleBoris et Dimitri Pizarnik sont médecins dans le quartier chinois à Paris. Ils sont frères et c’est ensemble qu’ils pratiquent leur métier, consacrant tout leur temps à leurs patients. Une nuit, ils sont amenés à soigner une petite fille diabétique que sa mère, Judith, élève seule… Ecrit et réalisé par Axelle Ropert, Tirez la langue, mademoiselle est un film assez original. Ses personnages frappent d’emblée : ces deux frères quarantenaires font tout ensemble, habitent l’un en face de l’autre, donnent ensemble leurs consultations ; ils semblent presque interchangeables. Il était inévitable qu’ils tombent amoureux au même moment et de la même femme. Le thème du triangle amoureux prend de ce fait une tonalité nouvelle, d’autant plus que les dialogues ont une plaisante facture littéraire et qu’une place est laissée à la rêverie, au mystère. Les décors parisiens expriment un certain isolement. On peut reprocher des scènes d’ambiance un peu longues, un environnement sonore trop présent et peut-être regretter que les personnages (premiers et seconds rôles) ne soient pas plus approfondis. Même s’il n’est pas parfait, Tirez la langue, mademoiselle est à la fois original et séduisant.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Cédric Kahn, Laurent Stocker, Louise Bourgoin
Voir la fiche du film et la filmographie de Axelle Ropert sur le site IMDB.

Tirez la langue, Mademoiselle
Laurent Stocker et Cédric Kahn sont deux frères dans Tirez la langue, mademoiselle d’Axelle Ropert.

7 février 2015

Exodus (1960) de Otto Preminger

ExodusExodus raconte les évènements qui précèdent la fondation de l’état d’Israël en 1948, depuis l’odyssée du cargo éponyme rempli de réfugiés jusqu’au vote du partage de la Palestine à l’ONU… Adapté d’un roman fleuve de Leon Uris, Exodus a été conçu comme une vaste saga, avec de nombreux personnages et s’étalant sur plus de trois heures. Le scénariste Donald Trumbo a fait un beau travail d’écriture qui donne un bel équilibre entre romance et action politique, même si l’on peut regretter l’emploi de stéréotypes pour générer le lyrisme. Version romancée de faits historiques, Exodus (et notamment son degré d’objectivité) va être diversement apprécié selon le regard que l’on porte sur le conflit qui a suivi ces évènements. Si les sentiments mitigés et embarrassés des anglais sont bien représentés, si l’option de l’action violente est bien montrée comme source de dissensions parmi les juifs et comme futur héritage embarrassant, il faut bien reconnaître que le point de vue arabe n’est jamais montré. Cinématographiquement parlant, Exodus est réussi, bien maitrisé de bout en bout par son réalisateur. Les acteurs font tous une belle prestation, Sal Mineo étant particulièrement remarquable dans un rôle d’homme-enfant. La musique d’Ernest Gold fut oscarisée. Le succès et l’impact du film furent très importants.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Paul Newman, Eva Marie Saint, Ralph Richardson, Lee J. Cobb, Sal Mineo, John Derek, Hugh Griffith, Gregory Ratoff, Jill Haworth, Marius Goring, Alexandra Stewart
Voir la fiche du film et la filmographie de Otto Preminger sur le site IMDB.

Voir les autres films de Otto Preminger chroniqués sur ce blog…

Lire une analyse plus complète sur le site DVDClassiks

Voir les livres sur Otto Preminger

Exodus d'Otto Preminger

Remarques :
* Dans ses mémoires, Otto Preminger raconte comment il a racheté les droits du roman de Leon Uris à la MGM en les convaincant qu’ils risquaient un boycott dans les pays arabes : « Moi, je peux me le permettre car je suis un producteur indépendant. » Une fois en possession des droits, Preminger commença à travailler au scénario avec l’auteur, mais peu satisfait des dialogues, écarta ce dernier pour embaucher Albert Maltz (rapidement jugé trop lent) puis Dalton Trumbo, tous deux alors sur la liste noire établie aux heures les plus sombres du maccarthysme. Preminger mit Donald Trumbo sous son vrai nom au générique, ce qui constituait une première et contribua grandement à la réhabilitation des talents mis sur liste noire qui devint ipso facto lettre morte.

* Autres films relatant les mêmes évènements :
Exodus (Il grido della terra) de l’italien Duilio Coletti (1949)
La Bataille des sables (Sword in the desert) de l’américain George Sherman (1949) avec Dana Andrews
deux films beaucoup moins connus et faits « à chaud ».

5 février 2015

Le Fil du rasoir (1946) de Edmund Goulding

Titre original : « The Razor’s Edge »

Le fil du rasoirAnnées 1920. Profondément marqué d’avoir vu à la guerre un de ses camarades mourir devant lui, le jeune Larry Darrell ne peut se résoudre à suivre le chemin tout tracé qui s’ouvre devant lui : un mariage dans la bonne société avec Isabel qui l’aime plus que tout et une confortable carrière dans la finance. Il sent qu’il doit d’abord trouver quel sens donner à sa vie… Le Fil du rasoir est un film de producteur, en l’occurrence Darryl F. Zanuck qui s’est pris de passion pour le roman de Somerset Maugham écrit en 1944. Commencé avec George Cukor, que Zanuck exclut rapidement à la suite de dissensions, le film sera finalement réalisé par Edmund Goulding avec un budget important, 89 décors différents et plus de trois mois de tournage. Vu aujourd’hui, on peut trouver des défauts à ce grand  mélodrame, regretter par exemple la présence de certains clichés, mais si l’on dépasse ces apparences, Le fil du rasoir apparaît comme un film qui sort du lot par son propos : aspirations métaphysiques et mysticisme oriental, sujets bien peu photogéniques au demeurant, n’étaient guère courants à cette époque. Le cinéma hollywoodien s’étant en grande partie bâti sur l’exposition du rêve américain, les films qui proposent une alternative au matérialisme en tant que source unique du bonheur ou de l’accomplissement de soi, ne sont pas légion. Tyrone Power, lui aussi de retour de guerre (la Seconde), montre une belle conviction dans cette recherche de la sérénité, un chemin que le sage dit être « aussi étroit que le fil d’un rasoir ». Le personnage de Gene Tierney, égoïste et matérialiste, est sans doute un peu trop typé. Clifton Webb est parfait, dans un rôle de personnage mondain snob qu’il a si souvent interprété. Le film est indéniablement un peu trop long (2 h 25) mais sans aller jusqu’à générer l’ennui. Le Fil du rasoir fut un grand succès.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tyrone Power, Gene Tierney, John Payne, Anne Baxter, Clifton Webb, Herbert Marshall, Lucile Watson
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Remarques :
* Edmund Goulding avait pour méthode de faire répéter très longuement ses acteurs avant de filmer en longs plans-séquences avec de beaux mouvements de caméra. Il utilisait assez peu les gros plans sur les acteurs.
* Anne Baxter reçut l’Oscar du meilleur second rôle pour ce film.
* Remake :
Le Fil du rasoir (The Razor’s Edge) de John Byrum (1984) avec Bill Murray.

Le fil du rasoir
(de g. à d.) Herbert Marshall, Clifton Webb (assis), Gene Tierney, Anne Baxter (assise) et Tyrone Power dans Le Fil du rasoir (20th Century Fox, 1946).

4 février 2015

Amator (1979) de Krzysztof Kieslowski

AmatorUn employé achète une caméra pour filmer sa fille qui vient de naître. Quand son patron apprend cela, il lui demande de filmer un évènement de son entreprise. C’est le début d’une passion… L’Amateur (parfois titré Le Profane) fait partie des premiers longs métrages du polonais Krzysztof Kieslowski qui livre un peu de lui-même dans ce récit. Comme il a pu l’être lui-même, son héros est gagné par une passion dévorante du cinéma qui phagocyte peu à peu sa vie personnelle et lui donne un regard nouveau sur le monde qui l’entoure. Il apprivoise son langage, le cadrage, le montage. Il va aussi découvrir son pouvoir, sa fonction au sein d’une société, la force du documentaire, sa portée politique, avec comme inévitable corollaire (du moins en pays communiste comme l’était la Pologne), la censure. L’Amateur est ainsi une belle réflexion sur le rôle du cinéma, sur l’implication de l’artiste dans son art et ses interrogations, tout cela presque sans en avoir l’air car Kieslowski reste très près de son personnage.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jerzy Stuhr, Malgorzata Zabkowska, Stefan Czyzewski
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Remarque :
* Le réalisateur Krzysztof Zanussi (l’un des grands représentants de la Nouvelle Vague polonaise et par ailleurs ami dans la vraie vie de Kieslowski) interprète lui-même son propre rôle.

Amator de Krzysztof Kieslowski
Jerzy Stuhr est le cinéaste amateur dans le film L’Amateur de Kieslowski. Il utilise ici une caméra 8mm Quartz 2 de fabrication russe. Derrière lui se tient Malgorzata Zabkowska.

Amator de Krzysztof Kieslowski
Vers la fin du film, la seconde caméra qu’il utilise est la légendaire Krasnogorsk K3, caméra 16mm à visée reflex de fabrication russe avec zoom Meteor (une caméra que Kieslowski a lui-même utilisée à ses débuts… mais pas pour L’Amateur qui est tourné en 35mm).
En savoir plus sur cette caméra

3 février 2015

Anna et les loups (1972) de Carlos Saura

Titre original : « Ana y los lobos »

Ana y los lobosAnna, une jeune institutrice étrangère, trouve un emploi de gouvernante dans une riche famille espagnole. Elle doit composer avec les trois frères qui régissent la maison… Pour tous ses films, Carlos Saura a été en prise avec la censure franquiste et doit user d’allégories pour parler des forces qui paralysent l’Espagne. Dans Anna et les loups, cette allégorie est plus immédiate que dans ses films précédents et c’est peut-être pour cette raison qu’il a du attendre un an pour que son scénario soit accepté et avoir l’autorisation de tourner. Les trois frères frustrés sont les loups, ils représentent l’armée, la religion et le sexe, les trois grandes forces oppressives du pays ; la grand-mère à demi-paralysée symbolise l’Espagne franquiste et la jeune Anna la nouvelle génération. Cette dernière tente de jouer un rôle sans comprendre tous les rouages ; on ne sait très bien qui complote avec qui. Les tabous sont forts, sclérosants. Carlos Saura trouve un équilibre parfait entre un certain mal à l’aise et un humour insolite, le cinéaste montrant là une certaine filiation avec Buñuel. La fin est-elle réelle ou un cauchemar éveillé ? Les acteurs ont tous le ton juste ; Geraldine Chaplin trouve là l’un de ses plus beaux rôles. Anna et les Loups apparaît comme l’un des films les plus aboutis de Carlos Saura.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Geraldine Chaplin, Fernando Fernán Gómez, José María Prada, José Vivó, Rafaela Aparicio
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Anna et les loups (1972) de Carlos Saura
Geraldine Chaplin et José María Prada dans Anna et les loups de Carlos Saura.

2 février 2015

Moana (1926) de Robert Flaherty

MoanaLe succès mondial de Nanook of the North permit à Robert Flaherty et à sa femme Frances d’aller passer deux années entières dans l’archipel des Samoa en plein Pacifique. Grâce à la petite fille du chef Seumanutafa, qui fut ami intime de Robert Louis Stevenson, ils vont pouvoir partager l’existence des Polynésiens qui vivent là en pleine harmonie avec la nature, à l’écart de toute civilisation moderne. Après le grand nord de Nanouk, ces îles prennent l’apparence d’un véritable paradis terrestre avec ses scènes de cueillette, de pêche et de chasse. Moana nous en montre tous les aspects, ce qui est très intéressant. Toute la fin du film est consacrée au rite de passage d’un jeune samoan au statut d’Homme, partie qui il faut bien l’avouer paraît un peu longue, même si le caractère ethnologique de la démarche des époux Flaherty y est très nette (1). Roman Moana Le montage est travaillé, assez remarquable, et le cinéaste utilise parfaitement les gros plans pour nous placer près des corps. Contrairement à son prédécesseur, Moana n’eut pas les faveurs du public. L’une des explications que l’on peut avancer pour expliquer cet insuccès est l’absence de danger apparent ou de tension. Moana de Robert Flaherty est néanmoins un très beau film que nous pouvons voir aujourd’hui dans une version restaurée et (fort bien) sonorisée en 1980 par Monica Flaherty, sa fille, qui a accompagné le tournage… âgée de trois ans. C’est l’un des films fondateurs du genre documentaire.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs:
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(1) Il semblerait que ce rite était tombé en désuétude et qu’il n’ait été ravivé que pour le film.

Moana de Robert Flaherty

1 février 2015

Nanouk l’Esquimau (1922) de Robert Flaherty

Titre original : « Nanook of the North »

Nanouk l'Esquimau(Film muet) Nanouk l’Esquimau fait partie des films fondateurs de l’art cinématographique : si Robert Flaherty n’a pas « inventé » le documentaire, il lui a certainement donné ses titres de noblesse. Plusieurs tentatives précédentes ratées lui ont permis d’affiner sa démarche : avec ce film, il désire éviter tout folklore ou exotisme pour nous montrer cette famille d’Inuits comme des êtres humains, avec leurs aspirations et leur culture. Une approche très ethnologique donc. Pour atteindre son but, Flaherty n’hésite pas à recréer les situations où Nanouk et sa famille jouent leur propre rôle avec beaucoup de naturel (seule une scène, celle du gramophone, laisse transpirer une certaine artificialité). Il filme des kilomètres de pellicule, qu’il développe sur place et montre à ses « acteurs ». Au montage, il n’en gardera qu’un dixième environ. Même un siècle plus tard, le résultat est assez passionnant, nous laissant souvent ébahis face à l’ingéniosité déployée par l’homme pour survivre dans un environnement si hostile. Nous sommes également assez émerveillé par la vision de cette nature inviolée avec laquelle l’homme paraît être en communion. La construction de l’igloo d’un soir, la chasse au morse, la chasse au phoque et son dépeçage immédiat et même le réveil de toute la famille sont des scènes étonnantes. Flaherty prend le temps de bien expliquer la raison de chaque comportement. Le succès de Nanouk l’Esquimau fut très important et son influence sur l’émergence d’un certain style documentaire fut considérable.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs:
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Remarques :
* La méthode de Flaherty peut être opposée à celle de Dziga Vertov (le cinéma-oeil) pour qui la personne filmée devait ignorer la présence de la caméra.

* Pour les scènes à l’intérieur de l’igloo et avoir suffisamment de recul pour placer sa caméra, Flaherty proposa à Nanouk de construire « le plus grand igloo jamais construit ». Ils mirent plusieurs jours à y parvenir après de nombreux écroulements.

* Le succès du film fut tel que les chocolats glacés, récemment apparus (l’inventeur américain avait déposé son brevet sous le nom d’eskimo-pie quelques mois avant la sortie du film), furent appelés des nanouks en Allemagne, URSS et Europe centrale. En France, Gervais avait déposé la marque Esquimau. Le film accompagna leur rapide popularité.

* Le film a été financé par le fourreur français Revillon (ce qui explique certainement la présence de cette longue scène au début du film où Nanouk apporte ses peaux à vendre à la ville).

* Nanouk n’a rien su de sa popularité mondiale car il est mort de faim peu après le tournage, lors d’une de ses longues expéditions de chasse en forêt, avant même la sortie du film.

* Un documentaire de 65 minutes Saumialuk, le grand gaucher (c’est le surnom de Flaherty donné par les Esquimaux qui le voyaient toujours tourner la manivelle de la main gauche) a été réalisé en 1987 par Sébastien Régnier et Claude Massot qui sont partis sur les traces de Flaherty plus de soixante ans après.

Nanouk l'Esquimau (1922) de Robert J. Flaherty
Nanouk l’Esquimau

Nanouk l'Esquimau (1922) de Robert J. Flaherty
Nyla, la femme de Nanouk, et leur plus jeune fils.

31 janvier 2015

Sommaire de janvier 2015

Soleil vertLes Chiens de pailleLe Chevalier de MaupinMinuit dans le jardin du bien et du malSeptemberLe Couple invisibleHannah et ses soeursHellzapoppin'

Soleil vert

(1973) de Richard Fleischer

Les Chiens de paille

(1971) de Sam Peckinpah

Le Chevalier de Maupin

(1967) de Mauro Bolognini

Minuit dans le jardin du bien et du mal

(1997) de Clint Eastwood

September

(1987) de Woody Allen

Le Couple invisible

(1937) de Norman McLeod

Hannah et ses soeurs

(1986) de Woody Allen

Hellzapoppin’

(1941) de H.C. Potter

Histoire de détectiveLa Dernière VagueTempête à WashingtonFrançois PremierCinéma ParadisoQuatre au paradisTabouLa Lumière

Histoire de détective

(1951) de William Wyler

La Dernière Vague

(1977) de Peter Weir

Tempête à Washington

(1962) de Otto Preminger

François Premier

(1937) de Christian-Jaque

Cinéma Paradiso

(1988) de Giuseppe Tornatore

Quatre au paradis

(1938) de Michael Curtiz

Tabou

(2012) de Miguel Gomes

La Lumière

(1987) de Souleymane Cissé

Le ventLoveLa Vie d'un honnête hommeVille conquisePoulet au vinaigre

Le Vent

(1982) de Souleymane Cissé

Love

(1969) de Ken Russell

La Vie d’un honnête homme

(1953) de Sacha Guitry

Ville conquise

(1940) de Anatole Litvak

Poulet au vinaigre

(1985) de Claude Chabrol

Nombre de billets : 21

30 janvier 2015

Soleil vert (1973) de Richard Fleischer

Titre original : « Soylent Green »

Soleil vertNew York en 2022 compte quarante millions d’habitants, la plupart sans domicile, se nourrissant des nourritures synthétiques en plaque fabriquées par la compagnie Soylent. Le policier Thorn a la chance d’avoir un minuscule appartement qu’il partage avec Sol, un vieillard qui l’aide dans ses enquêtes. La mort suspecte d’un « homme riche » va les amener à découvrir un terrible secret… Soleil vert, l’un des films majeurs de la science-fiction au cinéma, est l’adaptation d’un roman d’Harry Harrison. Si le film est remarquable, ce n’est pas tant par le déroulement de l’enquête, ni même par la découverte du terrible secret (que le spectateur devinera certainement très tôt dans le film, s’il ne l’a pas appris à l’avance à la lecture d’un résumé), mais plutôt par la vision qu’il nous permet d’avoir d’un futur proche, celle d’un monde asphyxié par une surpopulation extrême, une pollution omniprésente, une pénurie généralisée, une perte totale des liens avec la nature. Certaines scènes sont vraiment marquantes (comme celle des camions-bennes anti-émeute) mais la puissance du film vient certainement de la proximité du monde décrit avec notre monde actuel, autant celui de 1973 que celui du troisième millénaire. Bien entendu, notre monde n’a (heureusement) pas atteint ce niveau de surpopulation mais le point important dans cette vision est de nous montrer un monde en pleine « dé-socialisation », en proie à un délitement total des rapports entre les hommes, à la perte progressive de la valeur humaine. Cette préoccupation reste très actuelle : l’accroissement de la valeur humaine, que l’on pourrait sans doute nommer progrès de l’humanité, pourrait-elle à un moment donné culminer pour nous faire basculer dans une régression ? La question se situe bien au-delà de la simple préoccupation de savoir si cette vision est pessimiste ou pas (elle l’est, mais c’est secondaire). Soleil vert se situe donc bien dans la lignée des grands romans ou films de science-fiction qui, 1984 en tête, jouent le rôle de lanceurs d’alerte en extrapolant. Ils nous questionnent sur notre monde, celui d’aujourd’hui, le monde dans lequel nous vivons. Ils ont ainsi une indéniable dimension philosophique.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Charlton Heston, Edward G. Robinson, Chuck Connors, Joseph Cotten
Voir la fiche du film et la filmographie de Richard Fleischer sur le site IMDB.

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Soleil Vert
Charlton Heston découvre le secret du Soleil vert dans le film homonyme de Richard Fleisher.

Remarques :
* Le mot « Soylent » est formé avec la première syllabe des deux mots « soybeans & lentils » (soja et lentilles).
* Le roman de Harry Harrison s’intitule Make room ! Make room ! (1966). En dehors de ce roman, ses histoires étaient souvent marquées par un certain humour. Il a notamment créé les personnages Ratinox (The Stainless Steel Rat) et Bill, le héros galactique (Bill, the Galactic Hero) (récemment porté à l’écran) qu’il a fait vivre dans plusieurs romans. Harry Harrison a eu sans doute plus d’influence en étant éditeur de plusieurs magazines publiant des nouvelles.
* La composition si particulière du Soleil vert n’était pas dans le roman. Cette facette a été introduite par le scénariste Stanley R. Greenberg.
* Soleil vert est le dernier film d’Edward G. Robinson. L’acteur était très malade pendant le tournage et en outre était devenu presque totalement sourd. Il est décédé en janvier 1973, avant même la sortie du film.
* Le jeu vidéo auquel joue la jeune femme dans l’appartement de Joseph Cotten est Computer Space. Ce jeu créé en 1971 par Nolan Bushnell (futur créateur d’Atari) est le premier jeu vidéo en machine d’arcades (à pièces). A l’époque du tournage, c’était le seul. Pong apparaitra quelques mois plus tard.

 

Soleil vert (1973) de Richard Fleischer
Charlton Heston et Edward G. Robinson dans Soleil vert de Richard Fleischer

Soleil vert (1973) de Richard Fleischer
Les camions-bennes anti-émeute à l’oeuvre dans un monde en proie à la surpopulation dans Soleil vert de Richard Fleischer.

28 janvier 2015

Les Chiens de paille (1971) de Sam Peckinpah

Titre original : « Straw Dogs »

Les chiens de paillePour fuir la violence qu’il jugeait trop omniprésente dans son pays, un jeune américain est venu s’installer dans le village natal de sa femme en Cornouailles afin de poursuivre au calme ses recherches en mathématiques. Pour retaper le garage, il a engagé des habitants du village qui semblent surtout motivés à lorgner sa femme… Adaptation d’un roman en faveur de l’auto-défense, Les Chiens de paille est le premier film de Sam Peckinpah qui n’est pas un western. La mise en place est très longue, Sam Peckinpah prenant tout son temps pour installer un climat angoissant qui nous met très mal à l’aise. Outre la galerie de véritables primates que sont les autochtones, il utilise pour ce faire un style de montage très particulier, très haché, qui génère une impression de déséquilibre. Dans une seconde moitié, il donne libre cours à son thème favori, la violence : à la violence bestiale des primates précités, il oppose la violence plus froide et calculée de l’intellectuel, qui se révèle finalement être aussi épidermique et primitive que la première. Sans offrir vraiment de réflexion sur cette violence (contrairement à d’autres films de la même époque, on peut penser à Délivrance ou à Orange mécanique par exemple), Peckinpah semble plus vouloir jouer sur la fascination / répulsion face à cette ultra-violence, la scène du double viol étant la meilleure illustration.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Dustin Hoffman, Susan George, Peter Vaughan, David Warner
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Remarques :
* On peut s’interroger sur le sens du titre. La production a déclaré que l’origine en était une citation de Lao Tseu : « Rudes sont le ciel et la terre qui traitent en chiens de paille la multitude des êtres. Rude est le sage qui traite le peuple en chien de paille. »
Hum… c’est effectivement nettement plus clair ! En cherchant un peu plus, on trouve que les chiens de paille étaient utilisés comme figure sacrificielle dans la Chine ancienne. Avec cette précision, on peut commencer à comprendre la citation (mais on ne voit pas bien pourquoi elle s’appliquerait au film…)
* D’habitude fort peu attiré par la violence, Dusty Hoffman a avoué n’avoir tourné ce film que pour des raisons pécuniaires.
* Le roman, intitulé The Siege of Trencher’s farm (1969), est de l’écossais Gordon Williams.

Remake :
Chiens de paille (Straw Dogs) de Rod Lurie (2011) avec James Marsden et Kate Bosworth.

Les Chiens de paille
Le calme avant la tempête… Susan George et Dustin Hoffman dans Les Chiens de Paille de Sam Peckinpah.