12 février 2017

La Ligne rouge (1998) de Terrence Malick

Titre original : « The Thin Red Line »

La Ligne rougeEn 1942, à Guadalcanal, les américains attaquent l’île tenue par les japonais. Dans un paysage paradisiaque, les soldats vont se livrer une bataille sanglante… La Ligne rouge marque le retour de Terrence Malick qui signe son troisième long métrage exactement vingt ans après son deuxième (Les Moissons du ciel, 1978). Et il ne déçoit pas : La Ligne rouge est un film sur la guerre doté d’une dimension philosophique vraiment inhabituelle. Cette profonde réflexion sur la relation de l’homme à la nature, de l’homme à la violence, de l’homme à la mort est entrecoupée de scènes d’actions aussi réalistes que violentes, où le spectateur entrevoit l’enfer qu’ont vécu les soldats engagés. La forme est enthousiasmante avec une photographie signée John Toll faisant une part belle à la Nature et des scènes semi-oniriques d’une beauté inouïe (telle la scène de la balançoire). Les monologues intérieurs des personnages sont un moyen élégant d’enrichir le propos. Il n’y a pas vraiment un personnage au premier plan, il y en a plusieurs et la distribution est assez éblouissante. La Ligne rouge est un grand film.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Sean Penn, Nick Nolte, Jim Caviezel, Elias Koteas, Ben Chaplin, John Cusack, Adrien Brody, John C. Reilly, Woody Harrelson, John Travolta, George Clooney
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The Thin red line

The Thin Red Line
Sean Penn, Nick Nolte et Elias Koteas dans La Ligne rouge de Terrence Malick.

Remarques :
* Le premier montage de La Ligne rouge durait 6 heures. Au montage final, de nombreuses séquences ont donc été supprimées pour atteindre 2 heures 50, notamment celles avec Mickey Rourke, Gary Oldman, Bill Pullman et Lukas Haas. Le jeune Adrien Brody, qui interprète le personnage central du roman, fut dévasté de voir que son personnage avait été réduit à seulement deux répliques.

* La liste des acteurs ayant désiré apparaitre dans le film est impressionnante, le plus souvent prêts à travailler pour un cachet symbolique.

* Le film est basé sur un roman de James Jones, ancien soldat. Son œuvre a inspiré à plusieurs reprises le cinéma et la télévision, citons notamment Tant qu’il y aura des hommes de Fred Zinnemann (1953) et Comme un torrent de Vincente Minnelli (1958). Le roman The Thin Red Line avait déjà été porté à l’écran :
L’attaque dura sept jours (The Thin Red Line) d’Andrew Marton (1964) avec Keir Dullea, Jack Warden.

* Guadalcanal fait partie des îles Salomon, à l’est de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, au nord-est de l’Australie. La bataille de Guadalcanal fût un tournant de la Seconde Guerre mondiale, marquant le passage des Alliés à une stratégie offensive.

* Le titre vient d’un poème de Rudyard Kipling intitulé Tommy ( « tommy » est le surnom familier du fantassin britannique) dans lequel le poète exprime que ce sont avant tout des hommes. L’expression The Thin Red Line (= la mince ligne rouge) fut employée en premier pour surnommer la Bataille de Balaclava (1854) durant la Guerre de Crimée, le rouge étant celui des uniformes de l’armée britannique.

The Thin Red Line
Jim Caviezel dans La Ligne rouge de Terrence Malick.

The Thin Red Line
John Cusack dans La Ligne rouge de Terrence Malick.

2 février 2015

Moana (1926) de Robert Flaherty

MoanaLe succès mondial de Nanook of the North permit à Robert Flaherty et à sa femme Frances d’aller passer deux années entières dans l’archipel des Samoa en plein Pacifique. Grâce à la petite fille du chef Seumanutafa, qui fut ami intime de Robert Louis Stevenson, ils vont pouvoir partager l’existence des Polynésiens qui vivent là en pleine harmonie avec la nature, à l’écart de toute civilisation moderne. Après le grand nord de Nanouk, ces îles prennent l’apparence d’un véritable paradis terrestre avec ses scènes de cueillette, de pêche et de chasse. Moana nous en montre tous les aspects, ce qui est très intéressant. Toute la fin du film est consacrée au rite de passage d’un jeune samoan au statut d’Homme, partie qui il faut bien l’avouer paraît un peu longue, même si le caractère ethnologique de la démarche des époux Flaherty y est très nette (1). Roman Moana Le montage est travaillé, assez remarquable, et le cinéaste utilise parfaitement les gros plans pour nous placer près des corps. Contrairement à son prédécesseur, Moana n’eut pas les faveurs du public. L’une des explications que l’on peut avancer pour expliquer cet insuccès est l’absence de danger apparent ou de tension. Moana de Robert Flaherty est néanmoins un très beau film que nous pouvons voir aujourd’hui dans une version restaurée et (fort bien) sonorisée en 1980 par Monica Flaherty, sa fille, qui a accompagné le tournage… âgée de trois ans. C’est l’un des films fondateurs du genre documentaire.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs:
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(1) Il semblerait que ce rite était tombé en désuétude et qu’il n’ait été ravivé que pour le film.

Moana de Robert Flaherty

6 septembre 2014

Le Temps de la colère (1956) de Richard Fleischer

Titre original : « Between Heaven and Hell »

Le temps de la colèreFils d’un riche planteur de coton du sud des Etats-Unis, le jeune Sam Gifford se retrouve en 1945 sur une île du Pacifique en proie à d’incessants combats contre les soldats japonais. Pour avoir frappé un officier lors d’une mission, il a été rétrogradé et envoyé dans un poste avancé dirigé par l’étrange capitaine Waco…
Between Heaven and Hell, titre bizarrement traduit Le Temps de la colère (1), est un film de guerre assez riche par les sujets qu’il aborde. Le thème principal est celui de l’inadaptabilité de l’homme à l’univers de la guerre ce qui en fait par essence un film antimilitariste. L’environnement de la guerre accentue les névroses. Le capitaine Waco (à noter que wacky ou wacko signifie en anglais argotique « cinglé ») est un véritable psychopathe qui peut donner libre cours à ses fantaisies. Toutefois, Richard Fleischer contrebalance cela avec un autre aspect, plus bénéfique celui-là, sur le comportement humain : la guerre abolit les différences de classe sociale, le jeune héritier qui traitait fort mal ses métayers mesure ici leur vraie valeur humaine et, pour la première fois de sa vie, il se fait des amis. Richard Fleischer étudie comment la guerre peut modifier ou révéler la nature humaine. La construction utilise habilement de grands flashbacks.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Robert Wagner, Terry Moore, Broderick Crawford, Buddy Ebsen
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(1) Une fois de plus, il est manifeste que la personne qui a choisi Le Temps de la colère comme titre français n’avait pas vu le film auparavant ; il n’avait probablement lu que les deux premières lignes du synopsis…

Le Temps de la colère (Between Heaven and Hell)Robert Wagner et Terry Moore dans Le Temps de la colère (Between Heaven and Hell) de Richard Fleischer.

Le Temps de la colère (Between Heaven and Hell) Le Temps de la colère (Between Heaven and Hell) de Richard Fleischer.

27 mars 2014

Grand méchant loup appelle (1964) de Ralph Nelson

Titre original : « Father Goose »

Grand méchant loup appelleEn 1942, alors que les japonais attaquent en Indonésie, un aventurier américain (Cary Grant) est placé de force sur une petite île isolée comme guetteur pour signaler les passages d’avions ennemis. Quelques jours plus tard, il recueille une institutrice et sept fillettes… Father Goose est une excellente comédie écrite par S.H. Barnett et adaptée par Peter Stone et Frank Tarloff, tous trois oscarisés pour ce film. C’est l’avant-dernier film tourné par Cary Grant qui, à 60 ans, joue toujours les bourreaux des coeurs. Mais surtout, il excelle toujours autant dans le registre de la comédie avec ses multiples expressions et sa forte présence. Contrairement à son habitude, son personnage est ici plutôt miteux, un peu alcoolique et mal rasé (1). C’est Leslie Caron qui doit ici lui tenir tête et elle y parvient parfaitement en composant un personnage délicieusement intransigeant. Le scénario se déroule joliment, avec de multiples situations (malgré la promiscuité des lieux) et des dialogues enlevés. Father Goose est une comédie réussie qui remporta un certain succès à son époque.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Cary Grant, Leslie Caron, Trevor Howard
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Remarques :
* Aucune des fillettes n’a vraiment fait de carrière d’actrice par la suite. Le plus souvent, ce fut leur seul film.
* Cary Grant a tellement apprécié travailler sur ce film qu’il est resté en contact avec les sept fillettes après qu’elles aient grandi et même après qu’elles se soient mariées.

(1) Après avoir dit au moment de la sortie du film que son personnage était tout le contraire de lui-même, Cary Grant dira plus tard qu’en réalité ce personnage était plus proche de son vrai moi…

31 octobre 2011

Permission jusqu’à l’aube (1955) de John Ford et Mervyn LeRoy

Titre original : « Mister Roberts »

Permission jusqu'à l'aubeSur un bâtiment de la marine américaine dédié au ravitaillement dans le Pacifique, le lieutenant Roberts, second du navire, se morfond de ne pas participer aux combats. Le capitaine, peu aimé de son équipage, fait en sorte que ses demandes de mutation soient refusées… Mister Roberts (Permission jusqu’à l’aube) était tout d’abord une pièce à succès à Broadway de la fin des années quarante. Henri Fonda reprend le rôle qu’il interprétait sur les planches bien qu’il avoue lui-même être un peu âgé pour son personnage (1). La direction est confiée à John Ford, afin d’assurer le succès. John Ford fait réécrire le scénario au grand dam de Fonda et rapidement les deux hommes s’opposent : le réalisateur frappe Henri Fonda qui se retrouve à terre ! Le tournage se poursuit néanmoins mais, suite à des problèmes de santé et d’excès d’alcool, John Ford doit arrêter. Mervyn LeRoy est appelé à la rescousse et (re-)tourne l’essentiel du film en revenant au plus près du scénario de la pièce. Mister Roberts est une comédie qui met en avant deux notions (qui devaient plaire à John Ford) : l’héroïsme ordinaire et le fait qu’un bon officier sait se faire aimer par ses hommes. Il y a quelques bonnes scènes, très amusantes, comme celle où Fonda/Powell/Lemmon concoctent un ersatz de whisky mais l’ensemble n’est pas aussi brillant hélas. Jack Lemmon se fera remarquer ici dans l’un de ses premiers films, William Powell est en revanche dans son dernier. Le film connut un grand succès.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Henry Fonda, James Cagney, William Powell, Jack Lemmon
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Remarques :
Joshua Logan, qui avait mis en scène la pièce à Broadway , a également tourné deux scènes.

(1) C’est John Ford qui a imposé Henri Fonda aux producteurs qui préféraient avoir Marlon Brando.