4 juin 2016

Le Voile des illusions (1934) de Richard Boleslawski

Titre original : « The Painted Veil »

Le Voile des illusions Une jeune femme autrichienne épouse un médecin-chercheur, collaborateur de son père, et le suit à Hong Kong où il va soigner le choléra. Là, son mari étant accaparé par son travail, elle se laisse séduire par un diplomate anglais… Le Voile des illusions est adapté du roman de Somerset Maugham. Ce mélodrame fortement teinté d’exotisme repose sur un triangle amoureux. Si le film n’est aussi puissant qu’espéré, ce n’est pas tant du fait de Greta Garbo qui fait une belle prestation, d’une grande expressivité, notamment de son visage, dans le dernier tiers du film, mais plutôt de ses deux partenaires masculins. George Brent est particulièrement fade et sans saveur et Herbert Marshall, tout en ayant un jeu bien supérieur, n’est pas ici à son meilleur. De ce fait, Le Voile des illusions est souvent décrit, assez injustement, comme un film assez mou. Le film rencontra un franc succès en Europe mais, tout comme le précédent film de Garbo, le très beau La Reine Christine, ne toucha pas le public américain et fut donc considéré par ses producteurs comme un échec.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Greta Garbo, Herbert Marshall, George Brent, Warner Oland
Voir la fiche du film et la filmographie de Richard Boleslawski sur le site IMDB.

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Remarques :
* Certaines scènes ont été tournées par George Hill en Chine. Elles seront réutilisées par The Good Earth (Visages d’Orient) de Sidney Franklin (1937).
* Durant le tournage, Garbo s’est prise d’amitié pour George Brent qui était, comme elle, assez solitaire. Ils passaient tant de temps ensemble que des rumeurs de liaison ont commencé à circuler. George Brent a raconté à des amis qu’il allait épouser Greta Garbo mais ce n’était visiblement pas dans les projets de l’actrice puisqu’ils se virent de moins en moins une fois le tournage terminé.

Remakes :
La passe dangereuse (The seventh sin) de Ronald Neame (1957) avec Eleanor Parker et Jean-Pierre Aumont
le Voile des illusions (The Painted Veil) (2006), beau film de John Curran avec Naomi Watts, Edward Norton

Le Voile des illusions
Greta Garbo dans Le Voile des illusions de Richard Boleslawski.

Le Voile des illusions
Greta Garbo et George Brent : 5 ans avant Ninotchka, Garbo rit dans Le Voile des illusions de Richard Boleslawski.

Le Voile des illusions
Greta Garbo et Herbert Marshall dans Le Voile des illusions de Richard Boleslawski (photo publicitaire, le film n’est pas en couleurs).

27 mai 2015

Quatre de l’espionnage (1936) de Alfred Hitchcock

Titre original : « Secret Agent »

Quatre de l'espionnagePendant la Première Guerre mondiale, un officier britannique est envoyé en mission à Genève pour traquer un agent allemand. Il y est accompagné par un homme de main et découvre, à son arrivée, que les services secrets ont également envoyé une jeune femme qui doit passer pour être sa femme… Dans la période anglaise d’Alfred Hitchcock, Secret Agent (Quatre de l’espionnage) vient juste après le magnifique Les 39 marches. Il est hélas d’une qualité bien différente. Pour en écrire l’histoire, le cinéaste a choisi comme inspiration deux nouvelles de Somerset Maugham extraites de son recueil Ashenden et une pièce de Campbell Dixon également adaptée de ce recueil. Le résultat est une histoire un peu complexe mais bien développée avec de belles trouvailles (la chocolaterie, la longue-vue, etc.) et de beaux moments de tension. En revanche, et de l’aveu même du cinéaste, le personnage principal est problématique car il ne tient pas son rôle de héros : il est hésitant, réticent à remplir sa mission, « il doit tuer un homme et il ne veut pas le faire, c’est un but négatif et cela donne un film d’aventures qui n’avance pas, qui tourne à vide ». Il est vrai qu’il nous apparaît bien fade, d’autant plus que John Gielgud a un physique et un jeu sans éclat. Le choix de Robert Young, acteur marqué par ses rôles de comédie, n’est pas très heureux non plus. Le personnage le plus fort est indéniablement celui de l’acolyte homme de main, merveilleusement interprété par un Peter Lorre mielleux et équivoque à souhait.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Madeleine Carroll, Peter Lorre, John Gielgud, Robert Young
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Quatre de l'espionnage
John Gielgud, Madeleine Carroll et Peter Lorre  dans Quatre de l’espionnage d’Alfred Hitchcock (1936).

Remarques :
* Ne pas confondre :
Secret Agent (titre français : Quatre de l’espionnage) avec
Sabotage (titre français : Agent secret)
tous deux des films d’Alfred Hitchcock datés de 1936.

* Cameo : Hitchcock apparaît fugitivement à la 7e minute parmi les passagers qui descendent du bateau.

5 février 2015

Le Fil du rasoir (1946) de Edmund Goulding

Titre original : « The Razor’s Edge »

Le fil du rasoirAnnées 1920. Profondément marqué d’avoir vu à la guerre un de ses camarades mourir devant lui, le jeune Larry Darrell ne peut se résoudre à suivre le chemin tout tracé qui s’ouvre devant lui : un mariage dans la bonne société avec Isabel qui l’aime plus que tout et une confortable carrière dans la finance. Il sent qu’il doit d’abord trouver quel sens donner à sa vie… Le Fil du rasoir est un film de producteur, en l’occurrence Darryl F. Zanuck qui s’est pris de passion pour le roman de Somerset Maugham écrit en 1944. Commencé avec George Cukor, que Zanuck exclut rapidement à la suite de dissensions, le film sera finalement réalisé par Edmund Goulding avec un budget important, 89 décors différents et plus de trois mois de tournage. Vu aujourd’hui, on peut trouver des défauts à ce grand  mélodrame, regretter par exemple la présence de certains clichés, mais si l’on dépasse ces apparences, Le fil du rasoir apparaît comme un film qui sort du lot par son propos : aspirations métaphysiques et mysticisme oriental, sujets bien peu photogéniques au demeurant, n’étaient guère courants à cette époque. Le cinéma hollywoodien s’étant en grande partie bâti sur l’exposition du rêve américain, les films qui proposent une alternative au matérialisme en tant que source unique du bonheur ou de l’accomplissement de soi, ne sont pas légion. Tyrone Power, lui aussi de retour de guerre (la Seconde), montre une belle conviction dans cette recherche de la sérénité, un chemin que le sage dit être « aussi étroit que le fil d’un rasoir ». Le personnage de Gene Tierney, égoïste et matérialiste, est sans doute un peu trop typé. Clifton Webb est parfait, dans un rôle de personnage mondain snob qu’il a si souvent interprété. Le film est indéniablement un peu trop long (2 h 25) mais sans aller jusqu’à générer l’ennui. Le Fil du rasoir fut un grand succès.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tyrone Power, Gene Tierney, John Payne, Anne Baxter, Clifton Webb, Herbert Marshall, Lucile Watson
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Remarques :
* Edmund Goulding avait pour méthode de faire répéter très longuement ses acteurs avant de filmer en longs plans-séquences avec de beaux mouvements de caméra. Il utilisait assez peu les gros plans sur les acteurs.
* Anne Baxter reçut l’Oscar du meilleur second rôle pour ce film.
* Remake :
Le Fil du rasoir (The Razor’s Edge) de John Byrum (1984) avec Bill Murray.

Le fil du rasoir
(de g. à d.) Herbert Marshall, Clifton Webb (assis), Gene Tierney, Anne Baxter (assise) et Tyrone Power dans Le Fil du rasoir (20th Century Fox, 1946).

9 mars 2014

Trop de maris (1940) de Wesley Ruggles

Titre original : « Too Many Husbands »

Trop de marisQuelques mois après que son mari Bill ait été déclaré mort, perdu en mer, Vicky s’est remariée avec son associé et meilleur ami Henry. Or, un beau matin, Bill réapparaît : il était resté bloqué sur une petite île déserte. Vicky se retrouve alors avec deux maris. Lequel va-t-elle choisir ? … Adapté d’une pièce de Somerset Maugham jouée à Broadway en 1919, Too Many Husbands est une comédie de type screwball qui s’amuse avec le concept de polygamie : après avoir été catastrophée du caractère insoluble de sa situation, Vicky se rend compte qu’elle est au centre de toutes les attentions et décide de profiter de la situation. Si la comédie est plaisante et ne génère pas l’ennui, elle ne s’envole vraiment à aucun moment, l’ensemble restant assez sage. Certes, la censure est passée par là, réduisant sans doute le propos, mais l’écriture manque indéniablement de brillance. Deux mois après ce Too Many Husbands de la Columbia, RKO a sorti le merveilleux My Favorite Wife de Garson Kanin, qui est la situation exactement inverse (un homme avec deux épouses) pour un résultat autrement plus réussi.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jean Arthur, Fred MacMurray, Melvyn Douglas, Harry Davenport
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Remarques :
* Deux fins ont été tournées (Jean Arthur choisissant l’un ou l’autre des deux maris) et plus de 10 000 questionnaires furent distribués à des audiences-tests pour savoir qu’elle était celle qui remportait le plus d’adhésion (un procédé si souvent utilisé à Hollywood mais dont on n’est pas obligé de penser que du bien…)
* L’histoire est une variation du poème Enoch Arden de Lord Tennyson, poème déjà adapté par D.W. Griffith : Enoch Arden Part 1 et Enoch Arden Part 2 (1911), puis une nouvelle fois en moyen métrage, Enoch Arden (1915) avec Lilian Gish et Alfred Paget

Remake :
Tout le plaisir est pour moi (Three for the show) de H.C. Potter (1955) avec Betty Grable et Jack Lemmon.

3 décembre 2011

The Circle (1925) de Frank Borzage

The Circle(film muet) En 1890, Lady Catherine quitte son mari et son fils pour partir avec son amant. 30 ans plus tard, le fils est marié à une jeune femme sur le point de faire la même chose. Mais avant de fuir, la jeune femme invite Lady Catherine à venir dans la maison familiale car elle veut savoir si elle a été heureuse ou malheureuse après sa fugue… The Circle est adapté d’une pièce de Somerset Maugham. Ce genre de sujet, le mari ou la femme volage, faisait fureur en ce milieu des années vingt. Frank Borzage parvient à combler le handicap du manque de paroles (particulièrement criant dans les adaptations de pièces qui reposent sur les dialogues) par des intertitres assez nombreux et surtout des expressions de visages assez marquées, quelquefois trop. L’ensemble est très amusant, vif et relevé. On peut regretter que Borzage ait sacrifié la fin originale de la pièce pour terminer sur un happy end, enlevant ainsi une partie du sens du titre, le cercle symbolisant un éternel recommencement.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Eleanor Boardman, Malcolm McGregor, Joan Crawford
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Remarques :
La jeune Lady Catherine, en 1890 donc, est interprétée par Joan Crawford. The Circle est ainsi son premier film tourné sous le nom qu’elle gardera ensuite. Elle avait tourné trois films auparavant, un sous le nom de Lucille Le Sueur (son vrai nom) et deux autres pour lesquels elle ne figurait pas au générique (l’un des deux est La Veuve Joyeuse d’Erich von Stroheim).

Autre adaptation de la pièce de Somerset Maugham:
Strictly Unconventional de David Burton (1930)