12 octobre 2014

Gueule d’amour (1937) de Jean Grémillon

Gueule d'amourUn beau militaire du régiment des spahis (1) d’Orange collectionne les aventures féminines ce qui lui vaut le surnom de Gueule d’amour. Venu à Cannes en permission, il tombe sous le charme d’une femme mondaine… Adaptation d’un roman d’André Beucler, Gueule d’amour de Jean Grémillon permet de retrouver le couple formé par Jean Gabin et Mireille Balin qui avait tant séduit les spectateurs de Pépé le Moko de Julien Duvivier, sorti quelques mois auparavant. Le fond est assez similaire, une histoire d’amour rendu impossible par les différences de classe, à ceci près que la femme est ici une courtisane, incapable de sentiments, irrémédiablement pourrie par l’argent. Mireille Balin en femme fatale est assez convaincante. Elle et Jean Gabin forment un vrai couple de cinéma, d’une forte présence à l’écran. Le scénario peut certainement paraître trop prédictible, surtout à nos yeux actuels, mais il y a de très belles scènes, notamment dans la première partie du film, lorsque l’alchimie entre les deux acteurs est vraiment manifeste à l’écran.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Mireille Balin, René Lefèvre, Jean Aymé
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Grémillon sur le site IMDB.
Voir les autres films de Jean Grémillon chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Jean Grémillon

Remarques :
* Le surnom de Gueule d’amour restera attaché à Jean Gabin l’acteur, surnom dont il n’arrivera à se débarrasser que dans les années cinquante.
* Avec son image de vamp, Mireille Balin aurait pu faire une belle carrière mais, hélas, elle n’aura vraiment connu le succès qu’avec Pépé le Moko et Gueule d’amour.

(1) Les spahis étaient des unités de cavalerie appartenant à l’Armée d’Afrique du Nord, branche de l’armée de terre française.

Gueule d'amourMireille Balin et Jean Gabin dans Gueule d’amour de Jean Grémillon.

23 septembre 2014

La Comtesse (2009) de Julie Delpy

Titre original : « The Countess »

La comtesseDans la Hongrie de la fin du XVIe siècle, la comtesse Élisabeth Báthory se retrouve, à la mort de son mari, seule à la tête d’une grande fortune. Elle fait la connaissance du fils d’un notable beaucoup plus jeune qu’elle et s’en éprend…
Julie Delpy nous raconte l’histoire assez épouvantable de la comtesse Élisabeth Báthory en nous précisant bien dès le départ que tout ce qui va être dit est probablement faux, du moins assez fortement déformé. Il est vrai que les historiens ne savent démêler la vérité des légendes qui entourent celle qui fut surnommée « la comtesse sanglante » ou encore « la comtesse Dracula ». Julie Delpy suggère que la comtesse aurait été victime d’une machination visant à faire main basse sur sa fortune et lui enlever tout pouvoir, jugé trop important pour une femme. Elle n’écarte pas toutefois les crimes (abominables) commis mais la présente comme une femme victime de ses sentiments : « la faiblesse d’une femme se situe au niveau de son coeur » lui fait-elle dire. Julie Delpy a écrit, produit, réalisé ce film, empreint d’une belle austérité, servi par une très belle photographie de Martin Ruhe. Elle en interprète également le rôle titre, assez brillamment, restituant toute la complexité de son personnage, aussi parfaite en femme aimante au visage angélique qu’en femme angoissée au visage vieilli par la haine. Une belle réussite.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Julie Delpy, Daniel Brühl, William Hurt, Anamaria Marinca, Sebastian Blomberg
Voir la fiche du film et la filmographie de Julie Delpy sur le site IMDB.

Voir les autres films de Julie Delpy chroniqués sur ce blog…

La Comtesse (The Countess)Daniel Brühl et Julie Delpy dans La Comtesse (The Countess) de Julie Delpy.

11 septembre 2014

La Bête humaine (1938) de Jean Renoir

La bête humaineConducteur de la locomotive La Lison entre Paris et Le Havre, Jacques Lantier est le témoin indirect d’un crime. Au regard suppliant de Séverine, la jeune et jolie femme du sous-chef de gare Roubaud, il choisit de se taire. Ils se revoient par la suite et la relation entre eux évolue… Jean Renoir s’est laissé convaincre d’adapter le roman de Zola La Bête humaine. Le film s’inscrit pleinement dans la veine du réalisme poétique. Renoir a choisi d’écarter les scènes les plus spectaculaires et les plus noires pour mieux mettre en scène l’univers des cheminots, comme l’annonce la longue et impressionnante scène d’ouverture où nous sommes à bord d’une locomotive lancée à pleine vitesse. Mais la force du roman est intacte, une puissante histoire de passion maudite et de personnages victimes d’une fatalité sur laquelle ils n’ont aucune prise. Gabin exprime admirablement toute la complexité de son personnage et la photographie de l’allemand Kurt Courant est magnifique.
Elle: 5 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Simone Simon, Fernand Ledoux, Julien Carette
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Renoir sur le site IMDB.
Voir les autres films de Jean Renoir chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Jean Renoir

La bête humaine Remarques :
* C’est Claude Renoir, frère de Jean Renoir, qui a tourné la scène d’ouverture, un tournage particulièrement périlleux et dangereux.
* Jean Renoir interprète lui-même le rôle de Cabuche, le cheminot injustement accusé.
* Jean Renoir est allé chercher Simone Simon aux Etats-Unis où elle faisait alors carrière. Elle y retournera peu après, avant de revenir définitivement en France à la fin de la guerre après avoir été, dans sa vie privée, la cible de l’échotière fouilleuse de poubelles Louella Parsons.

La Bête humaineJean Gabin et Julien Carette dans La Bête humaine de Jean Renoir.

La Bête humaineJean Gabin et Simone Simon dans La Bête humaine de Jean Renoir.

Remake américain :
Désirs humains (Human Desire) de Fritz Lang (1954) avec Glenn Ford et Gloria Grahame.

8 septembre 2014

Les Amitiés particulières (1964) de Jean Delannoy

Les amitiés particulièresDans la France des années 1920, Georges de Sarre, âgé de 14 ans, entre dans un pensionnat catholique tenu avec grande fermeté par des Frères jésuites. Il est attiré par le jeune Alexandre, plus jeune que lui, et les deux enfants développent une relation qui va au-delà de l’amitié…
Le roman de Roger Peyrefitte, Les Amitiés particulières, qui fit scandale à sa sortie en 1943, avait tout de suite intéressé Jean Delannoy  mais le cinéaste dût attendre 1963 pour avoir enfin les moyens de l’adapter. Le sujet ne doit plus choquer grand monde aujourd’hui : l’amitié entre ces deux enfants, qui prend la forme d’un amour platonique (billets doux et quelques petits baisers furtifs), est traitée avec beaucoup de tact et de délicatesse par Jean Delannoy et le scénariste Jean Aurenche. En revanche, le jeu des acteurs reste très figé, en total contraste avec l’émoi sentimental de ces adolescents ; il rend le film un peu ennuyeux, hélas.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Francis Lacombrade, Didier Haudepin, Louis Seigner, Michel Bouquet
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Delannoy sur le site IMDB.

Voir les autres films de Jean Delannoy chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Jean Delannoy

Remarques :
* La productrice Christine Gouze-Rénal n’avait accepté de produire Les Amitiés particulières qu’à la condition expresse que le scénario soit accepté par la commission de pré-censure. Cet accord fut obtenu avec même les félicitations de la commission pour le tact avec lequel ce sujet délicat était traité. La polémique commença toutefois avant même la sortie du film notamment avec un article de François Mauriac, scandalisé, dans Le Figaro Littéraire ce qui lui valut une réponse restée célèbre de Roger Peyrefitte dans la revue Arts (avril et mai 1964). Sous la pression de l’Office catholique du film, le film fut, à sa sortie, interdit au moins de 18 ans, interdiction qui sera levée quelques années plus tard. Il semble que ce qui gênait l’Eglise n’était pas tant la peinture de l’amitié si particulière entre deux adolescents mais plutôt par la démonstration de la totale mainmise des jésuites sur l’éducation des enfants et leur incapacité à empêcher le pire.

* Si Les Amitiés particulières est l’unique prestation de Francis Lacombrade, Didier Haudepin aura une carrière cinématographique bien remplie : IMDB le crédite de 42 films en tant qu’acteur, 3 films en tant que réalisateur, 8 films en tant que producteur. A noter qu’il est le frère aîné de Sabine Haudepin.

Les Amitiés particulièresDidier Haudepin et Francis Lacombrade dans Les Amitiés particulières de Jean Delannoy.

4 juillet 2014

Léviathan (1962) de Léonard Keigel

LeviathanPaul Guéret aime Angèle, une jeune blanchisseuse. Il la suit, réussit à lui parler, lui donne rendez-vous mais elle se refuse à lui. Paul en est désespéré… Dès sa publication en 1929, le grand roman de Julien Green Léviathan a attiré plusieurs metteurs en scène et non des moindres : Marc Allégret, Georg Pabst, Robert Siodmak, Eisenstein, Cukor, Jacques Tourneur, Visconti. A chaque fois, le projet n’aboutit pas pour des raisons diverses et ce n’est qu’en 1962 que l’adaptation au grand écran verra enfin le jour sous la direction du débutant Léonard Kiegel. Il s’agit d’une histoire très sombre où les différents personnages ont de grandes frustrations et où l’amour, loin d’être un élément émancipateur, n’apporte qu’aigreur et rancoeur, voire pire encore. Pour son premier film, Léonard Kiegel parvient parfaitement à restituer l’atmosphère assez oppressante, presque morbide, du livre ; il est aidé par la présence de Julien Green qui a écrit les dialogues de cette adaptation. Louis Jourdan a laissé au vestiaire son profil de grand séducteur : son personnage est censé être quelconque, sans attrait ; il a su adapter son jeu et gagne ainsi en complexité. Face à lui, Marie Laforêt apporte une touche de sensualité et de spontanéité, elle semble entrer dans son personnage au fur et à mesure que le film avance. Mais le plus beau personnage, le plus complexe, le plus tourmenté sans doute, est celui de Madame Grosgeorges admirablement interprété par l’actrice internationale Lili Palmer (1) qui a probablement ici l’un de ses plus beaux rôles. Elle fait preuve d’une très grande présence à l’écran, absolument superbe dans toutes les scènes où elle apparaît. La très belle photographie est signée Nicolas Hayer(2). Léviathan est une belle adaptation littéraire, assez puissante, qui a certainement grandement bénéficié de la participation active de Julien Green. Il fait partie de ces films qu’une mauvaise distribution à l’époque a jetés dans l’ombre alors qu’ils méritent un bien meilleur statut.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Louis Jourdan, Lilli Palmer, Marie Laforêt, Madeleine Robinson, Georges Wilson
Voir la fiche du film et la filmographie de Léonard Keigel sur le site IMDB.
Voir les autres films de Léonard Keigel chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Le film est produit par Pierre Jourdan, frère de Louis Jourdan.
* La musique utilise des extraits de La Nuit transfigurée d’Arnold Schönberg.
* Auparavant très difficile à visionner, Léviathan vient de ressortir restauré dans une belle édition DVD (Voir sur Amazon…) Parmi les suppléments, il faut noter la présence de scènes commentées d’une autre adaptation d’un roman de Julien Green, Adrienne Mesurat, que Marcel L’Herbier a réalisée pour la télévision en 1953 avec Anouk Aimée et Alain Cuny dans les rôles principaux. Ces courtes scènes filmées (env. 15 à 20 minutes) sont les seules dont on ait la trace aujourd’hui car toutes les autres ont été interprétées en direct.

(1) Lili Palmer est une actrice d’origine allemande qui a tourné en Allemagne, en Angleterre, aux Etats Unis et en France.

(2) Nicolas Hayer est l’un des plus grands directeurs de la photographie français. Sa filmographie est impressionnante, il a travaillé pour Clouzot (Le Corbeau), Cocteau (Orphée), Duvivier, Melville, Daquin, Becker, etc.

16 juin 2014

La Route impériale (1935) de Marcel L’Herbier

La route impérialeImpliqué malgré lui dans une affaire de trahison dont il sort blanchi, le lieutenant Brent rejoint le régiment de l’armée britannique basé à Bagdad où la Route des Indes est menacée par des rebelles. Il découvre alors que la femme de son colonel est une femme qu’il a beaucoup aimée… Adapté de la pièce de Pierre Frondaie La Maison cernée, déjà portée à l’écran par le suédois Victor Sjöström, La Route impériale est pour Marcel L’Herbier une commande. Il transpose l’histoire de Palestine en Irak, en parfaite résonnance avec la situation géopolitique mondiale de 1935, l’armée britannique se préparant à défendre le Canal de Suez face aux menaces de Mussolini d’envahir l’Ethiopie. Assez prenant, le film est un subtil mélange d’exotisme, de romance et d’héroïsme militaire, un film dans le sillage du succès des Trois Lanciers du Bengale d’Henry Hathaway l’année précédente. Reflet de son époque, le film offre bien entendu  une vision très colonialiste des soulèvements des peuples colonisés. La Route impériale est fort bien mis en scène par Marcel L’Herbier, que ce soit en studio ou en extérieurs (tournés en Algérie), avec de beaux mouvements de caméra. Le succès à l’époque fut important mais, le film ayant été détruit par les allemands pendant l’Occupation, il était devenu extrêmement rare et difficile à voir jusqu’à ce qu’il ressorte restauré en DVD (en mai 2014) avec une intéressante présentation de Mireille Beaulieu qui couvre bien tous les aspects du film.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Käthe von Nagy, Pierre Richard-Willm, Jaque Catelain, Pierre Renoir
Voir la fiche du film et la filmographie de Marcel L’Herbier sur le site IMDB.
Voir les autres films de Marcel L’Herbier chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Marcel L’Herbier

Précédente adaptation :
La Maison cernée (Det omringade huset) de Victor Sjöström (1922)

14 mai 2014

Impasse des Deux Anges (1948) de Maurice Tourneur

Impasse des Deux AngesActrice de music-hall, Marianne est sur le point d’abandonner sa carrière pour épouser le marquis Antoine de Fontaines qui lui confie un superbe collier de diamants pour la cérémonie. La veille du mariage, elle voit revenir Jean, l’un de ses anciens amours au passé trouble… Ultime réalisation de Maurice Tourneur, Impasse des Deux Anges n’est pas parfaitement représentatif du talent de ce réalisateur. L’histoire, écrite par Jean-Paul Le Chanois, entremêle une histoire d’amour sur une trame policière avec une peinture sociale, mais aucun de ces trois éléments n’est vraiment convaincant et l’ensemble peut paraître bancal. Le plus réussi est encore l’atmosphère, tout à fait dans la veine du réalisme poétique des années trente. Cette atmosphère est soulignée par un joli effet de double exposition dans les flashbacks qui rend les personnages transparents.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Paul Meurisse, Simone Signoret, Marcel Herrand, Danièle Delorme, Jacques Baumer
Voir la fiche du film et la filmographie de Maurice Tourneur sur le site IMDB.

Voir les autres films de Maurice Tourneur chroniqués sur ce blog…

27 avril 2014

Vous n’avez encore rien vu (2012) de Alain Resnais

Vous n'avez encore rien vuUn dramaturge a laissé des instructions très précises à exécuter après sa mort. Il demande à une douzaine d’acteurs qui ont tous joué dans les versions successives de sa pièce Eurydice de venir dans sa maison. Là, une bande vidéo enregistrée du dramaturge leur demande de visionner une mise en scène de la même pièce par une jeune troupe de comédiens… Quel que soit le jugement que l’on porte sur Vous n’avez encore rien vu, il est indéniable qu’Alain Resnais avait encore, à 89 ans, les moyens de nous surprendre. L’idée est fondre en seul film plusieurs interprétations d’une même pièce de Jean Anouilh (1). Abolissant la frontière de l’écran, les acteurs présents interviennent pour donner leur propre version. Ce sont ainsi trois versions qui se s’entrecroisent et se superposent, Resnais ayant fait l’assemblage final qu’au moment du montage. Le début n’est pas tout à fait convaincant, le film étant alors presque irritant mais, alors qu’une version s’impose d’elle-même, le film gagne en intensité. On mesure alors tout le talent du couple formé par Pierre Arditi et Sabine Azéma qui nous font totalement oublier qu’ils ont trois fois l’âge de leurs personnages et rendent bien pâles les autres interprètes. Mais on se retrouve alors à regarder une pièce de Anouilh et c’est un peu la limite de l’exercice : l’assemblage des trois versions est un beau challenge de réalisation et surtout de montage mais cela apporte t-il au spectateur autre chose qu’une comparaison ? Certes, cela montre qu’une histoire forte peut s’affranchir du temps et même de l’espace mais on peut le prouver avec une seule mise en scène épurée. Surprenant et étonnant, Vous n’avez encore rien vu nous laisse sur des impressions un peu mitigées mais reste un plaisir à regarder.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Pierre Arditi, Sabine Azéma, Mathieu Amalric, Lambert Wilson, Anne Consigny, Anny Duperey, Hippolyte Girardot, Michel Piccoli, Denis Podalydès, Michel Robin, Michel Vuillermoz
Voir la fiche du film et la filmographie de Alain Resnais sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Voir les autres films de Alain Resnais chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Alain Resnais

Remarque :
La jeune troupe est la Compagnie de la Colombe. Cette partie a été entièrement filmée et mise en scène par Bruno Podalydès de façon totalement indépendante. Alain Resnais n’en a vu les images qu’au moment du montage.

(1) Il s’agit de la pièce Eurydice, écrite par Jean Anouilh en 1942, sous l’Occupation. Le film s’inspire également de la pièce Cher Antoine ou l’amour raté (écrite en 1969) pour la partie du dramaturge mort qui réunit ses principaux acteurs dans sa demeure.

Vous n'avez encore rien vu
Lambert Wilson, Anne Consigny, Mathieu Amalric, Sabine Azéma et Pierre Arditi dans Vous n’avez encore rien vu de Alain Resnais.

18 avril 2014

Au-delà des collines (2012) de Cristian Mungiu

Titre original : « Dupa dealuri »

Au-delà des collinesAlina rend visite à sa grande amie Voichita. Elles ont grandi ensemble à l’orphelinat. Alina espère convaincre Voichita de quitter le petit couvent où elle est devenue nonne… L’histoire de Au-delà des collines est tirée d’un fait divers qui a ébranlé la Roumanie en 2005. Cristian Mungiu s’est inspiré de deux livres écrits par Tatiana Niculescu sur les faits et le procès qui a suivi pour élargir le propos et dresser le portrait de son pays qui sort difficilement de plusieurs décennies de communisme. Le résultat est assez remarquable car, malgré une certaine austérité, le film nous captive par la force de ses personnages et cette situation extrême d’amour impossible : les quelque 2h30 semblent passer rapidement. La perfection de la mise en scène et l’interprétation y sont certainement pour beaucoup. Le contexte de fanatisme religieux pèse de tout son poids, jusqu’à certains extrêmes, faisant alors presque basculer le film dans un autre registre et laissant le spectateur assez suffoqué par l’issue (du moins, le spectateur qui, comme moi, a l’avantage de n’avoir rien lu sur le film avant de le regarder).
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Cosmina Stratan, Cristina Flutur, Valeriu Andriuta
Voir la fiche du film et la filmographie de Cristian Mungiu sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

16 avril 2014

Witness (1985) de Peter Weir

Titre français parfois utilisé : « Témoin sous surveillance »

Witness: Témoin sous surveillanceDe passage dans la gare de Philadelphie, un enfant de la communauté Amish est témoin du meurtre d’un homme. Lorsqu’il découvre que des policiers sont impliqués, l’inspecteur John Book (Harrison Ford) doit se réfugier chez les Amish… Pour son premier film américain, on peut dire que l’australien Peter Weir a réussi un coup de maître : tout en adoptant l’enveloppe très hollywoodienne d’un film policier, il a su conserver une approche toute personnelle et son attrait pour les civilisations perdues ou isolées. L’idée de départ toutefois est celle du producteur Edward S. Feldman qui eut bien du mal à imposer son projet (1). L’intrigue policière est rapidement délaissée pour se concentrer sur cette communauté Amish qui vit de manière identique depuis le XVIIIe siècle. L’approche de cette vaste communauté puritaine et austère est très respectueuse, nous montrant une partie de son fonctionnement et la formidable entraide entre ses membres (superbe scène de la construction d’une grange). Leur non violence est tout en contraste avec celle du monde extérieur mais l’approche de Peter Weir n’est aucunement manichéenne : il met en parallèle plus qu’il n’oppose. Witness, c’est aussi l’histoire d’un amour impossible. Harrison Ford est remarquable. L’acteur sortait de plusieurs films à succès (Star Wars, Indiana Jones) qui l’enfermaient dans un certain type de rôles. Witness lui a permis de prouver qu’il pouvait interpréter des rôles d’une certaine profondeur. Sa présence a certainement contribué au succès populaire du film. Face à lui, Kelly McGillis montre beaucoup de sensibilité avec un visage presque angélique. Witness fut un très grand succès. Même s’il n’y a plus aujourd’hui cet aspect de la découverte d’une communauté étonnante, Witness est, trente ans plus tard, toujours aussi enthousiasmant.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Harrison Ford, Kelly McGillis, Lukas Haas, Alexander Godunov, Danny Glover
Voir la fiche du film et la filmographie de Peter Weir sur le site IMDB.

Voir les autres films de Peter Weir chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Lukas Haas, âgé de 8 ans au moment du tournage, a maintenant presque 40 ans et plus de 80 films à son actif.
* La communauté Amish n’a pas trop apprécié être propulsée ainsi sur le devant de la scène, estimant que le film donnait d’eux une image fausse. En outre, ils ont du faire face à un afflux de curieux.

(1) Initialement, Edward S. Feldman a proposé le projet à la Fox qui lui a répondu que la Fox ne faisait pas de « rural movies ». Le projet a ensuite plus ou moins fait le tour de tous les studios avant d’être accepté in extremis par la Paramount.