19 octobre 2019

C’est pas parce qu’on n’a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule! (1975) de Jacques Besnard

C'est pas parce qu'on n'a rien à dire qu'il faut fermer sa gueule!Max et Riton, deux gangsters minables, acceptent de se mettre sous les ordres de Phano pour faire le gros coup du siècle : voler les fonds de la caisse de retraite de la SNCF entreposés dans un coffre-fort sous la gare de l’Est à Paris. Phano a tout prévu : il suffit de pratiquer une ouverture dans le mur mitoyen situé dans les toilettes de la gare…
L’idée originale de cette comédie humoristique du cinéma populaire français, nous la devons à trois membres de la troupe du Splendid, Thierry Lhermitte, Christian Clavier et Gérard Jugnot. Elle est bien entendu loufoque : afin de ne pas éveiller les soupçons de la « dame-pipi », les trois compères doivent en effet agir sous divers déguisements successifs et passablement pittoresques. Sur ce point, l’humour fonctionne bien mais il manque un développement plus poussé de la situation qui aurait porté le film plus haut. Chacun des trois acteurs principaux s’en donnent à cœur joie pour faire son numéro et les dialoguistes ont écrits dans le style de Michel Audiard, certains dialogues étant même calqués (on peut aussi dire « copiés ») sur des répliques célèbres. De bons moments mais l’ensemble est tout de même décevant.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Bernard Blier, Michel Serrault, Jean Lefebvre, Tsilla Chelton
Voir la fiche du film et la filmographie de Jacques Besnard sur le site IMDB.

C'est pas parce qu'on n'a rien à dire qu'il faut fermer sa gueule!Michel Serrault, Bernard Blier et Jean Lefebvre dans C’est pas parce qu’on n’a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule! de Jacques Besnard.

6 février 2016

L’Horloge (1945) de Vincente Minnelli

Titre original : The Clock

L'horlogeProfitant d’une permission de deux jours, le soldat Joe Allen arrive à New York pour visiter cette ville qu’il n’a jamais vue. Dans la gare, il rencontre une jeune fille qui finit par accepter de lui montrer Central Park et le musée Metropolitan… The Clock était déjà en cours de tournage par Fred Zinnemann, lorsque la MGM a décidé d’en stopper la production. Son interprète principal, Judy Garland, fit en sorte que l’homme avec lequel elle vivait, Vincente Minnelli (ils se marieront peu après), reprenne le projet pour le faire aboutir. Judy Garland croyait en effet beaucoup dans cette histoire assez délicate d’amour éclair. Minnelli parvient à rendre ses personnages très humains et attachants. Il utilise également toutes les techniques possibles pour donner l’impression que le film est tourné in-situ, dans les rues de New York, avec moult projections arrière et transparences. A l’époque, critiques et spectateurs ont loué le caractère naturel des images, ce qui paraît assez étonnant aujourd’hui car ces effets sont très visibles, du moins à nos yeux modernes (Minnelli est le premier à s’étonner dans ses mémoires que les spectateurs ne remarquent pas la « différence de grain »). Cette histoire, qui peut nous paraître assez conventionnelle, fut un gros succès à l’époque. Le film vint confirmer le grand talent de Minnelli pour la mise en scène.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Judy Garland, Robert Walker, James Gleason, Keenan Wynn
Voir la fiche du film et la filmographie de Vincente Minnelli sur le site IMDB.

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Remarques :
* Dans la filmographie de Judy Garland, The Clock est l’un des 3 seuls films non musicaux ; les deux autres sont Jugement à Nuremberg (Judgment at Nuremberg, 1961) de Stanley Kramer et Un enfant attend (A Child Is Waiting, 1963) de John Cassavetes.
* L’horloge dont il est question dans le titre est celle de l’Hôtel Astor près de Times Square à Manhattan, imposant édifice du début du siècle et aujourd’hui détruit.
* Cameo : Lorsque le couple entre avec le laitier dans le bar pour téléphoner, Vincente Minnelli apparaît furtivement : il est le client attablé au bar qui paye et sort aussitôt.

The Clock
Robert Walker et Judy Garland dans L’horloge de Vincente Minnelli.

20 octobre 2014

L’Opinion publique (1923) de Charles Chaplin

Titre original : « A Woman of Paris: A Drama of Fate »

L'opinion publiqueDans un petit village de France, Marie Saint-Clair désire fuir un père tyrannique pour se rendre à Paris avec Jean, son fiancé. Ce dernier lui ayant fait faux bond, c’est seule qu’elle doit se chercher une nouvelle vie. Un an plus tard, elle mène une vie de courtisane mondaine…
Aspirant à plus de liberté créative que ne lui offrait son personnage de vagabond, Charles Chaplin écrit et réalise L’Opinion publique, son deuxième long métrage, un film assez atypique dans sa filmographie. C’est un film dramatique, dans lequel il n’apparait pas (1)(2), sans ressort comique (3). Il a tourné cette histoire de triangle amoureux quasi tchékhovien sans scénario formel et sa mise en scène est à la fois sobre, d’une simplicité limpide et assez moderne dans son approche. Le film est remarquable d’équilibre, l’intensité dramatique est forte, sans effet trop appuyé et surtout bien contrebalancée par la folle insouciance des personnages. Premier film de Chaplin pour les Artistes Associés dont il est l’un des quatre fondateurs, L’opinion publique fut un échec commercial, le public n’acceptant ce changement de registre et son absence à l’écran. Chaplin était en quelque sorte prisonnier de son personnage. Il ne renouvellera pas l’expérience. (film muet)
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Edna Purviance, Carl Miller, Adolphe Menjou
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Remarques :
* Le premier titre prévu pour le film était Destiny, puis Public Opinion ce qui explique le titre français.

* Le film avait une préface qui éclaire bien la vision de Chaplin :
« L’humanité est composée, non de héros et de traitres, mais simplement d’hommes et de femmes. Et les passions qui les agitent, bonnes ou mauvaises, c’est la nature qui les leur a données. Ils errent dans l’aveuglement. L’ignorant condamne leurs fautes, le sage les prend en pitié. »
A propos de cette dernière phrase, on pourra remarquer que tout jugement moral est effectivement absent du film.

* La scène qui fut la plus remarquée est celle de l’arrivée du train en gare : le train n’apparait pas à l’image, nous ne voyons que les lumières des wagons (c’est un train de nuit) qui se déplacent sur le mur de la gare alors que la caméra reste centrée sur Edna Purviance qui s’apprête à monter dans le train. Cette façon de placer l’action hors champ était inhabituelle dans le cinéma de l’époque (et rappelons qu’il n’y a pas de bruitages de train non plus puisqu’il s’agit d’un film muet).

* Deux fins ont été tournées : celle que l’on connait (le croisement anonyme) destinée au public américain et une autre, moins morale, pour le public européen : Marie revient vers Pierre après le suicide de Jean.

* Dans l’esprit de Chaplin, A Woman of Paris devait donner un nouvel élan à la carrière d’Edna Purviance en lui ouvrant la possibilité de rôles dramatiques car lui-même ne désirait plus la faire apparaitre dans ses films. Ce ne fut pas le cas mais Chaplin ne l’abandonna pas pour autant car il continua à donner un salaire à l’actrice jusqu’à la fin de ses jours.

* En revanche, le film fut un tremplin pour la carrière d’Adolphe Menjou (américain de naissance, français par son père et irlandais par sa mère) et il continuera à exceller dans ces rôles de playboy mondain, hédoniste et jouisseur.

(1) En réalité, Chaplin apparaît à l’écran quelques secondes en porteur à la gare mais il est impossible de le reconnaitre.
(2) Il faudra attendre 1967 et La Comtesse de Hong Kong, son dernier film, pour voir un autre film de Chaplin dans lequel il ne joue pas.
(3) Au registre de l’humour, il faut quand même citer la scène où la femme jette son collier par la fenêtre pour montrer son détachement des choses matérielles à son amant… avant de se précipiter dans la rue pour l’arracher des mains d’un vagabond qui venait de le ramasser. Et, touche sublime, après quelques pas, elle fait demi-tour et revient donner une pièce au vagabond.

L'Opinion publique (A Woman of Paris: A Drama of Fate)Carl Miller et Edna Purviance dans L’Opinion publique (A Woman of Paris: A Drama of Fate) de Charles Chaplin.

19 mars 2014

Le Pèlerin (1923) de Charles Chaplin

Titre original : « The Pilgrim »

Le pélerin(Muet, 40 mn) Un évadé de prison (Charlie Chaplin) réussit à prendre les habits d’un pasteur et à monter dans un train. Sur le trajet, dans une gare du Texas, les habitants d’une petite ville le prennent pour leur nouveau pasteur qui devait arriver ce jour-là. Il doit conduire un office… Le Pèlerin est le dernier court métrage de Chaplin : il ne fera ensuite que des longs métrages. Le Pèlerin même plutôt un moyen métrage car, démarré pour être un « 2 bobines » (env. 20 mn), le projet a enflé pour devenir un « 4 bobines » (40 mn) ce qui permet à Chaplin de ne plus devoir de film à la First National, Le pélerin il est dorénavant libre (1). Le film mélange le comique avec une peinture sociale de la bigote petite bourgeoisie d’une ville moyenne. Cela fera bien entendu grincer quelques dents et Chaplin sera accusé d’avoir voulu ridiculiser un homme d’église ; le film ne sera pas ou peu distribué dans certains comtés. Le Pèlerin est loin d’être un « grand Chaplin », on ne retrouve pas ici le perfectionnisme dont il fait si souvent preuve, on peut même sentir une certaine précipitation ; il comporte néanmoins de bons passages et le portrait de ce prisonnier évadé est empreint d’humanité.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Edna Purviance, Charles Chaplin
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Remarques :
* En 1959, Chaplin a refait légèrement le montage de The Pilgrim et ajouté la chanson «Bound for Texas» qu’il a lui-même écrite dans le style des cowboy songs. Elle est chantée par l’anglais Matt Monroe.  Le film était inclus dans The Chaplin Revue qui comprenait en outre deux autres courts métrages First National : A Dog’s Life et Shoulder Arms. C’est cette version que l’on voit généralement aujourd’hui.

* On peut rapprocher ce film de The Adventurer, le dernier court métrage pour la Mutual, où Chaplin interprétait déjà un prisonnier évadé. Le film était nettement plus orienté slapstick mais comportait déjà un petit aspect social car le prisonnier se retrouvait immergé dans un univers de riches bourgeois. En comparant les deux films, on peut percevoir l’évolution de Chaplin sur cette période.

* L’acteur qui interprète l’ancien compagnon de cellule est le réalisateur et scénariste Charles Reisner. A noter que le sale gosse est joué par son fils, Dean Reisner, qui sera plus tard, lui aussi, scénariste.

(1) Rappelons que Chaplin est, avec Mary Pickford, Douglas Fairbanks et David W. Griffith, l’un des quatre fondateurs d’United Artists qui distribuera bien évidemment ses films suivants.

6 mai 2013

Hugo Cabret (2011) de Martin Scorsese

Titre original : « « Hugo » »

Hugo CabretDans le Paris de 1930, Hugo Cabret est un garçon qui vit dans les greniers de la gare Montparnasse où il doit remonter régulièrement les grandes horloges. Passionné par les mécanismes, il tente de réparer un automate, seul souvenir de son père décédé. Dans la gare, il fait la rencontre d’un marchand de jouets… Adaptation d’un roman de Brian Selznick, Hugo Cabret nous fait revivre le moment de la redécouverte de George Méliès, à une époque où il était tombé dans l’oubli (1). Martin Scorsese (qui n’avait pas fait de film « tous publics » depuis près de vingt ans) recrée ce moment sous la forme d’un conte pour enfants avec force images de synthèse. A un siècle d’intervalle, il crée autant de magie que Méliès pouvait en créer ; les trucages, rudimentaires mais ingénieux, de Méliès ont aujourd’hui cédé la place aux ordinateurs. Pour un amateur de cinéma, c’est surtout à la partir de la mi-film que cela devient le plus intéressant, avec des extraits habilement insérés et surtout la reconstitution, devant nos yeux émerveillés, de certains tournages de Méliès dans son studio tout en verre. C’est assez magique et ces scènes à elles seules, justifient la vision du film. D’un budget pharaonique, Hugo Cabret utilise beaucoup d’effets et multiplie les plans spectaculaires et vertigineux. Le film est finalement un bel hommage à ce grand pionnier du cinéma.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Ben Kingsley, Sacha Baron Cohen, Asa Butterfield, Chloë Grace Moretz, Emily Mortimer, Christopher Lee, Michael Stuhlbarg, Jude Law
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(1) Le dernier film de George Méliès date de 1913. Criblé de dettes, il a ensuite monté de petits spectacles. En 1925, il retrouve son actrice fétiche, Jeanne d’Alcy, qui tient une petite échoppe de jouets dans la gare Montparnasse. Il l’épouse et l’aide à tenir la petite boutique. C’est là qu’il fut redécouvert en 1929 par le directeur de Ciné-Journal.

15 avril 2013

Brève rencontre (1945) de David Lean

Titre original : « Brief Encounter »

Brève rencontreLaura se rend chaque jeudi en train à la ville voisine. A la gare, elle rencontre Alec, un médecin qui va chaque jeudi assurer un service à l’hôpital. Tous deux mariés, ils vont renoncer à vivre ensemble une aventure pour préserver leur mariage et leur famille…
Adapté d’une courte pièce de Noël Coward, Brève rencontre est construit en flashbacks successifs. Nous connaissons donc d’emblée l’issue : la séparation Le film nous fait revivre les étapes qui ont conduit Laura et Alec à cette décision. Tourné juste avant la fin de la guerre, le film de David Lean adopte un ton presque néoréaliste. Ses personnages apparaissent très ordinaires, issus de la classe moyenne et ce réalisme a décuplé l’impact du film. A sa sortie, Brève rencontre choqua le public anglais du fait de cette représentation très ordinaire de l’adultère (ou plutôt l’attirance vers l’adultère). Il fut même interdit en Irlande. David Lean a traité ce mélodrame avec beaucoup de sensibilité, l’aventure étant racontée par la femme en voix off, et il nous place très près de ses personnages. En outre, il a su créer un lieu d’ancrage (la gare et le buffet de la gare) et enrichir l’ensemble par des personnages secondaires bien développés qui apportent souvent une note d’humour. Le final est intense alors que, pourtant, nous le connaissons déjà puisque nous avons vu la scène en début de film. L’un des plans, où David Lean fait basculer lentement sa caméra pour exprimer le sentiment de chute dans un abîme de son héroïne, est superbe. Hormis en Angleterre où il fut un échec, Brève rencontre fut très bien reçu. Primé à Cannes, il contribua à construire la renommée de David Lean et c’est aujourd’hui l’un de ses films les plus connus du fait de ses nombreux passages à la télévision anglaise et américaine.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Celia Johnson, Trevor Howard, Stanley Holloway, Joyce Carey, Cyril Raymond
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Remake :
Brief Encounter (1974) de l’anglais Alan Bridges avec Richard Burton et Sophia Loren.

30 octobre 2012

Gare centrale (1958) de Youssef Chahine

Titre original : « Bab el hadid »

Gare centraleLa gare centrale du Caire abrite un petit monde de vendeurs et de porteurs. Un vendeur de journaux boiteux est amoureux fou d’une belle et provocante vendeuse à la sauvette de sodas… Gare centrale est l’un des films les plus intéressants de Youssef Chahine. Si la forme générale est celle du néo-réalisme à l’italienne, le film mêle brillamment plusieurs genres : documentaire (la vie à l’intérieur de la gare), le film social (les porteurs qui veulent être indépendants), le film policier. C’est surtout un film très humaniste qui nous place très près des personnages. Chahine interprète lui-même le personnage principal qu’il a dit être le reflet de ses propres frustrations de petit bourgeois. Dans l’Egypte de Nasser, Gare centrale est un film qui brisait certains tabous, notamment dans sa façon de montrer les femmes. Le film fut longtemps interdit dans son pays.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Farid Shawqi, Hind Rostom, Youssef Chahine
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