15 juin 2018

Macao, l’enfer du jeu (1942) de Jean Delannoy

Macao, l'enfer du jeuDans la Chine en guerre avec le Japon, un aventurier trafiquant d’armes sauve une danseuse du peloton d’exécution. Il se rend avec elle à Macao, haut lieu du jeu et de tous les trafics, pour tenter de se procurer des armes auprès d’un magnat local de la pègre…
Macao, l’enfer du jeu est adapté d’un roman best-seller de Maurice Dekobra paru en 1938 et bénéficie de l’attrait de l’exotisme assez typique  de cette période. Jean Delannoy montre un indéniable savoir-faire dans la mise en scène de cette histoire peuplée d’individus très différents, allant de l’informateur interlope de la mafia locale jusqu’à la jeune fille naïve. Il semble vouloir retrouver l’atmosphère de certains films de Josef von Sternberg (tels Agent X27 ou Shanghai Express, tous deux avec Marlene Dietrich). Le couple formé par Stroheim et Mireille Balin est assez remarquable, cette dernière ayant un jeu très naturel qui complète parfaitement la dignité du premier. On remarque aussi la belle prestation de l’acteur japonais Sessue Hayakawa, transfuge d’Hollywood. Le film est assez moderne dans le sens où il n’a pas vraiment de héros. Les personnages sont victimes de circonstances malheureuses et, avant tout, veulent survivre.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Erich von Stroheim, Mireille Balin, Sessue Hayakawa, Henri Guisol
Voir la fiche du film et la filmographie de Jean Delannoy sur le site IMDB.

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Remarque :
Tourné en 1939 dans les studios de la Victorine à Nice, le film ne put sortir sur les écrans de la France occupée qu’en 1942 après que toutes les scènes avec Erich von Stroheim aient été refaites avec Pierre Renoir (Stroheim étant interdit d’écran par l’occupant). La version initiale fut rétablie à la Libération.

Macao l'enfer du jeu
Mireille Balin et Sessue Hayakawa dans Macao, l’enfer du jeu de Jean Delannoy.

Macao, l'enfer du jeu
Erich von Stroheim et Mireille Balin dans Macao, l’enfer du jeu de Jean Delannoy.

9 mai 2018

Si j’étais le patron (1934) de Richard Pottier

Si j'étais le patronOuvrier dans une usine automobile, Henri Janvier a inventé chez lui un silencieux révolutionnaire. Il a ainsi réussi là où l’ingénieur de son usine échoue depuis des années. Son intention est de montrer son invention à la direction mais ce n’est pas si facile…
Si j’étais le patron est le premier long métrage de Richard Pottier, alors âgé de 28 ans. C’est aussi l’un des premiers scénarios de Jacques Prévert pour le cinéma, co-signant ici avec André Cerf et René Pujol. Il s’agit d’une comédie légère se déroulant dans le monde du travail, mettant en vedette « le sens commun », un thème que l’on retrouve beaucoup dans les comédies américaines de la même époque. L’ensemble est un peu inégal : de nombreuses scènes sont parfaitement écrites et se révèlent assez jubilatoires mais la grande scène de la fête et de la soulographie qui suit paraît bien longue. La réalisation de Richard Pottier est classique mais sans faille et l’interprétation est excellente, avec des seconds rôles vraiment savoureux. Un beau début pour un réalisateur qui sera en suite quelque peu inégal.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Fernand Gravey, Max Dearly, Mireille Balin, Charles Dechamps, Palau, Pierre Larquey
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Si J'étais le patron
Mireille Balin et Fernand Gravey dans Si j’étais le patron de Richard Pottier.

Si j'étais le patron
Georges Vitray et Max Dearly dans Si j’étais le patron de Richard Pottier.

12 octobre 2014

Gueule d’amour (1937) de Jean Grémillon

Gueule d'amourUn beau militaire du régiment des spahis (1) d’Orange collectionne les aventures féminines ce qui lui vaut le surnom de Gueule d’amour. Venu à Cannes en permission, il tombe sous le charme d’une femme mondaine… Adaptation d’un roman d’André Beucler, Gueule d’amour de Jean Grémillon permet de retrouver le couple formé par Jean Gabin et Mireille Balin qui avait tant séduit les spectateurs de Pépé le Moko de Julien Duvivier, sorti quelques mois auparavant. Le fond est assez similaire, une histoire d’amour rendu impossible par les différences de classe, à ceci près que la femme est ici une courtisane, incapable de sentiments, irrémédiablement pourrie par l’argent. Mireille Balin en femme fatale est assez convaincante. Elle et Jean Gabin forment un vrai couple de cinéma, d’une forte présence à l’écran. Le scénario peut certainement paraître trop prédictible, surtout à nos yeux actuels, mais il y a de très belles scènes, notamment dans la première partie du film, lorsque l’alchimie entre les deux acteurs est vraiment manifeste à l’écran.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Mireille Balin, René Lefèvre, Jean Aymé
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Remarques :
* Le surnom de Gueule d’amour restera attaché à Jean Gabin l’acteur, surnom dont il n’arrivera à se débarrasser que dans les années cinquante.
* Avec son image de vamp, Mireille Balin aurait pu faire une belle carrière mais, hélas, elle n’aura vraiment connu le succès qu’avec Pépé le Moko et Gueule d’amour.

(1) Les spahis étaient des unités de cavalerie appartenant à l’Armée d’Afrique du Nord, branche de l’armée de terre française.

Gueule d'amourMireille Balin et Jean Gabin dans Gueule d’amour de Jean Grémillon.

20 mai 2014

La femme que j’ai le plus aimée (1942) de Robert Vernay

La femme que j'ai le plus aiméeUn jeune homme vient de voir la femme qu’il aime le quitter. Il rentre chez lui avec l’intention de se suicider. Mais c’est le jour où son oncle organise un repas avec ses cinq meilleurs amis, tous célibataires. Comprenant sa détresse, ils lui racontent tour à tour qu’eux aussi ont envisagé d’en finir avec la vie le jour où ils ont perdu la femme qu’ils ont le plus aimée… Réalisé sous l’Occupation (pour Regina Films), cette comédie légère tout à la glorification du célibat est composée de cinq sketches sur le thème de l’amour déçu. Ecrites par Yves Mirande, les histoires sont un peu trop prévisibles. A aucun moment, le film ne s’envole ; il comporte bien quelques bons dialogues mais ils sont un peu trop rares. Le film à sketches est l’occasion de réunir de nombreux acteurs connus sur un même plateau et c’est ici le cas, avec les limites des disponibilités sous l’Occupation.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Arletty, Mireille Balin, Lucien Baroux, René Lefèvre, André Luguet, Noël-Noël, Raymond Rouleau, Jean Tissier, Michèle Alfa, Simone Berriau, Renée Devillers
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Détail des 5 histoires :
1. La première histoire (le chirurgien et la chanteuse) met Arletty et Noël-Noël face à face sans qu’il y ait de réelle alchimie entre les deux acteurs (notons qu’à l’instar de son personnage, Arletty n’a jamais voulu, dans la vie réelle, se laisser emprisonner par le mariage).
2. La seconde (l’industriel et la dactylo) voit une belle prestation de Raymond Lefèvre face à Renée Devillers et Charles Granval ; ce sketch est finalement terriblement noir dans son propos.
3. La troisième (la sculptrice et l’avocat) voit Michèle Alfa et André Luguet dans une histoire plutôt fade.
4. La quatrième est un triangle amoureux : Raymond Rouleau et Jean Tissier sont tous deux amoureux de Mireille Balin. L’idée de base est la plus originale du lot, bien développée mais trop terne dans son aboutissement.
5. Le cinquième sketch (le mort) est le plus amusant, avec Lucien Baroux et Simone Berriau (et Bernard Blier dans un petit rôle). Ce mort qui entend ce qu’on dit de lui est d’un humour assez jouissif. Il serait parfait avec une fin plus relevée.

19 novembre 2013

Pépé le Moko (1937) de Julien Duvivier

Pépé le MokoLe gangster Pépé le Moko s’est réfugié dans la casbah d’Alger. Séducteur, il a su mettre la population de son côté et la police ne peut aller le dénicher dans ce dédale de maisons et de ruelles étroites. Mais l’inspecteur Slimane s’est juré d’avoir sa peau… Adaptation d’un roman d’Henri La Barthe avec des dialogues d’Henri Jeanson, Pépé le Moko fait partie des perles du cinéma français d’avant-guerre. Non sans un certain exotisme, il nous plonge littéralement dans la casbah, le film débutant par une habile description presque documentaire des lieux. L’histoire en elle-même a cette simplicité que l’on retrouve si souvent dans les récits les plus puissants. Ce sont ses personnages qui lui donnent cette force, avec en tout premier celui de ce gangster au coeur tendre, Pépé le Moko admirablement interprété par Jean Gabin qui sait donner vie à ce subtil mélange de dureté et de fragilité. Face à lui, Mireille Balin est superbement belle et tous les seconds rôles sont remarquablement bien tenus, des personnages certes typés mais magnifiés par les dialogues d’Henri Jeanson. Pépé le Moko fait partie des mythes du cinéma français. Il le mérite.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Mireille Balin, Lucas Gridoux, Line Noro, Gabriel Gabrio, Saturnin Fabre, Fernand Charpin, Marcel Dalio
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Remarques :
* Henri La Barthe est un ancien fonctionnaire de police qui a écrit sous les pseudonymes Roger d’Ashelbé, Détective Ashelbé ou Ashelbé tout court, variation phonétique autour de ses initiales HLB. Un autre de ses romans a été porté l’écran : Dédée d’Anvers d’Yves Allégret (1948).
* Marcel Dalio raconte dans ses mémoires que le rôle de l’Inspecteur Slimane lui été réservé, Henri Jeanson ayant écrit les dialogues dans cet esprit. N’ayant pu se libérer d’un autre tournage, il dut laisser la place à Lucas Gridoux. Il raconte aussi à quel point il était, en tant que jeune acteur, très impressionné de tourner face à Gabin qui l’aida à se détendre.

2 remakes américains :
Casbah (Algiers) de John Cromwell (1938) avec Charles Boyer et Hedy Lamarr
Casbah de John Berry (1948) avec Tony Martin, Yvonne De Carlo et Peter Lorre
1 satire italienne :
Totò le Moko de Carlo Bragaglia (1949) avec Totò