24 juillet 2018

L’étrange histoire de Benjamin Button (2008) de David Fincher

Titre original : « The Curious Case of Benjamin Button »

L'étrange histoire de Benjamin ButtonAlors que l’ouragan Katrina s’approche de la Nouvelle-Orleans, Daisy est dans son lit d’hôpital, sur le point de mourir. Elle demande à sa fille de lui lire le journal de Benjamin Button. La narration commence en 1918 lorsque Benjamin est né avec les déformations physiques d’un vieil homme…
Inspirée de la nouvelle homonyme de F. Scott Fitzgerald, L’étrange histoire de Benjamin Button repose sur l’idée originale d’une vie « à l’envers » : que se passerait-il pour une personne qui naîtrait vieux pour ensuite rajeunir au lieu de vieillir ? A la fois par son contenu et par le ton général, le film de David Fincher fait furieusement penser à Forrest Gump, ce qui n’est guère étonnant puisque le scénario est du même Eric Roth. On retrouve ici la même philosophie simpliste, la narration est parsemée de « maximes de vie » qui offrent au spectateur une vision faussement sécurisée de la vie. Tout cela est très hollywoodien, un feel-good movie fait pour plaire et qui plaît puisque le succès fut au rendez-vous. Comme il se doit, les effets spéciaux et maquillages furent nombreux et particulièrement couteux. Le film est long (2h45), trop long mais reste plaisant.
Elle: 2 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Cate Blanchett, Brad Pitt, Julia Ormond, Faune Chambers Watkins, Jason Flemyng, Tilda Swinton, Jared Harris, Elias Koteas
Voir la fiche du film et la filmographie de David Fincher sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Voir les autres films de David Fincher chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur David Fincher

Benjamin Button
Brad Pitt et Cate Blanchett dans L’étrange histoire de Benjamin Button de David Fincher.

Benjamin Button
Brad Pitt et Tilda Swinton dans L’étrange histoire de Benjamin Button de David Fincher.

22 juillet 2018

Maxime (1958) de Henri Verneuil

MaximeMaxime est un cinquantenaire sans le sou qui enseigne les bonnes manières à Hubert. Ce dernier le charge d’intervenir en sa faveur auprès de la belle Jacqueline…
Adapté d’un roman d’Henri Duvernois, Maxime est un film qui ne manque pas d’attraits : l’histoire, sans être très originale, est fort bien développée, les dialogues d’Henri Jeanson sont particulièrement brillants, la réalisation d’Henri Verneuil est solide et l’interprétation de tout premier ordre : Charles Boyer et Michèle Morgan apportent le charme et Arletty est vraiment exceptionnelle dans un second rôle très original de femme de général. Alors, on se demande bien pourquoi, avec de tels atouts, le film fut si mal accueilli par la critique et par le public. Peut-être était-il anachronique à sa sortie à la fin des années cinquante, paraissant trop classique, mais aujourd’hui nous pouvons l’apprécier sans parti-pris.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Michèle Morgan, Charles Boyer, Arletty, Félix Marten, Jane Marken
Voir la fiche du film et la filmographie de Henri Verneuil sur le site IMDB.

Voir les autres films de Henri Verneuil chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Henri Verneuil

Maxime
Charles Boyer et Michèle Morgan dans Maxime de Henri Verneuil.

Maxime
Felix Marten et Michèle Morgan dans Maxime de Henri Verneuil.

20 juillet 2018

Adua et ses compagnes (1960) de Antonio Pietrangeli

Titre original : « Adua e le compagne »

Adua et ses compagnesAprès la fermeture de la maison close qui les employait (1), quatre femmes s’associent pour monter un petit restaurant de campagne où elles continueront à vendre leurs charmes à l’étage…
Ex-critique influent qui a contribué à jeter les bases du néoréalisme avant-guerre, Antonio Pietrangelli est un cinéaste italien peu connu en France, sans doute parce que ses films ne se sont pas toujours montré très convaincants. Adua et ses compagnes est considéré comme l’un des plus aboutis ; en outre, c’est celui avec lequel il a connu un certain succès. Il s’agit de portraits de femmes sur lesquelles il porte un regard à la fois délicat, bienveillant et réaliste. Dans la mise en ouvre de leur projet, ces quatre femmes vont apprendre à se découvrir d’autres qualités que celles où elles étaient cantonnées. Les personnages sont complexes et les scénaristes (parmi lesquels figure Ettore Scola) leur ont donné une belle profondeur. Le machisme de la société italienne des années cinquante est mis en relief. Le casting est franco-italien, le film mettant particulièrement en valeur Simone Signoret. La musique jazzy de Piero Piccioni donne une note de modernité à l’ensemble. Le film a été récemment restauré.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Simone Signoret, Sandra Milo, Emmanuelle Riva, Gina Rovere, Marcello Mastroianni
Voir la fiche du film et la filmographie de Antonio Pietrangeli sur le site IMDB.

Voir les autres films de Antonio Pietrangeli chroniqués sur ce blog…

(1) En 1958, la loi Merlin a interdit la réglementation de la prostitution en Italie et  entrainé la fermeture des maisons closes. Cette loi est aujourd’hui (juillet 2018) remise en cause par le projet de loi Spilabotte.

Adua et ses compagnes
Marcello Mastroianni et Simone Signoret dans Adua et ses compagnes de Antonio Pietrangeli.

Adua et ses compagnes
Emmanuelle Riva, Sandra Milo et Gina Rovere dans Adua et ses compagnes de Antonio Pietrangeli.

18 juillet 2018

Le Secret de la chambre noire (2016) de Kiyoshi Kurosawa

Le Secret de la chambre noireLe jeune Jean devient l’assistant d’un ancien photographe de mode veuf, qui vit seul avec sa fille dans une grande maison de banlieue. Perfectionniste, il cherche à recréer le daguerréotype parfait en utilisant sa fille comme modèle… Sur une histoire qu’il a lui-même écrite, Kiyoshi Kurosawa (qui, rappelons-le, n’a aucun lien de parenté avec Akira Kurosawa) réalise son premier film hors du Japon, en France avec une équipe entièrement française. Le Secret de la chambre noire mêle avec beaucoup de subtilité le mélodrame et le fantastique qui se manifeste par petites touches, sans esbroufe, tout en étant très présent. L’atmosphère est à la fois très particulière et très prégnante et le jeune Tahir Rahim apporte une touche de charme et de légèreté face à un Olivier Gourmet toujours aussi puissant, tandis que Constance Rousseau contribue à donner cette sensation d’être hors du temps. Le plus enthousiasmant dans le film est sa beauté formelle : l’image est très belle, jouant le plus souvent sur la pénombre d’intérieurs sombres et la musique est absolument merveilleuse, elle nous transporte et donne une grande dimension à l’ensemble. Le film n’a pourtant pas enthousiasmé publics et critiques.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tahar Rahim, Constance Rousseau, Olivier Gourmet, Mathieu Amalric, Malik Zidi
Voir la fiche du film et la filmographie de Kiyoshi Kurosawa sur le site IMDB.

Voir les livres sur Kiyoshi Kurosawa

Remarques :
* Procédé inventé par Louis Daguerre en 1837, le daguerréotype produit une image sans négatif sur une surface d’argent pur, polie comme un miroir et exposée directement à la lumière au moyen d’une chambre photographique. Le développement de l’image s’effectue à la vapeur de mercure. Le grand avantage du procédé était d’obtenir une image assez stable dans le temps. Les temps de pose étaient d’une ou plusieurs dizaines de minutes ce qui exigeait une immobilité parfaite des modèles. Comme le montre le film, des systèmes plus ou moins élaborés de maintien permettaient de garder la pose.

Le secret de la chambre noireOlivier Gourmet et Tahir Rahim dans Le Secret de la chambre noire de Kiyoshi Kurosawa.

Le secret de la chambre noireConstance Rousseau et Tahir Rahim dans Le Secret de la chambre noire de Kiyoshi Kurosawa.

16 juillet 2018

Ma femme en feu (1938) de Garson Kanin

Titre original : « Next Time I Marry »

Ma femme en feuLa riche héritière Nancy Fleming aborde un inconnu dans la rue et lui offre de l’argent pour l’épouser. Son père décédé a en effet mis comme condition d’épouser un vrai américain pour éviter qu’un gigolo étranger ne s’empare de son cœur et de son argent. Elle cherche aussitôt à se débarrasser de son nouveau mari en allant divorcer à Reno mais ce dernier veut surtout récupérer son chien qu’elle a emmené par inadvertance…
Le formidable succès de It Happened One Night (New York – Miami, 1934) de Frank Capra a engendré beaucoup de copies ou variations diversement réussies. Deuxième réalisation de Garson Kanin, Next Time I Marry, (il est préférable d’oublier le titre français racoleur)  figure parmi les meilleures. La base du scénario est la même : une jeune femme riche et un jeune homme pauvre se retrouvent forcés de cohabiter le temps d’un voyage. Là encore, l’homme américain est idéalisé : il a beau être pauvre, il n’en est pas moins désintéressé et surtout il est particulièrement malin et débrouillard. Cette comédie screwball est très plaisante, mais bien entendu, moins mémorable que le film de Capra, son modèle.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Lucille Ball, James Ellison, Lee Bowman
Voir la fiche du film et la filmographie de Garson Kanin sur le site IMDB.

Voir les autres films de Garson Kanin chroniqués sur ce blog…

Voir les livres de Garson Kanin

Next time I marry
James Ellison et Lucille Ball dans Ma femme en feu de Garson Kanin.

14 juillet 2018

Le Dibbouk (1937) de Michal Waszynski

Titre original : « Der Dibuk »

Le DibboukPologne, XIXe siècle. Deux amis d’enfance, Sender et Nisson, promettent devant le rabbin de marier leurs futurs enfants qui doivent naître presque le même jour. Mais Nisson décède le jour de la naissance de son fils et Sender oublie vite la promesse. Vingt ans plus tard, les deux enfants se rencontrent…
Le Dibbouk est adapté d’une pièce rédigée en yiddish par l’ethnographe russe Shalom Anski en 1917. C’est l’un des rares films tournés en yiddish qui soient parvenus jusqu’à nous. L’histoire s’inspire d’une légende ancienne, assez proche de Roméo et Juliette, où les rites et la religion juive côtoient le fantastique. Outre la préservation du folklore et de la culture yiddish, la description de la vie d’une communauté juive d’Europe Centrale donne au film des qualités ethnologiques certaines. Tourné à Varsovie, le film réunit les plus grands artistes du théâtre yiddish de l’époque. Le climat, les lieux, les lumières et sa dimension poétique évoquent l’expressionnisme allemand. Si le film a des qualités historiques évidentes, il faut bien reconnaitre que les rites religieux ou sociaux si soigneusement montrés peuvent paraître un peu longs au spectateur étranger à cette culture.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Avrom Morewski, Ajzyk Samberg, Lili Liliana
Voir la fiche du film et la filmographie de Michal Waszynski sur le site IMDB.

Le dibbouk
Lili Liliana dans Le Dibbouk de Michal Waszynski.

Remarque :
* Sens du titre : selon la légende, dans la tradition juive kabbaliste, lorsque qu’un être meurt avant son heure, son âme revient errer parmi les vivants. Certains entrent dans le corps d’une personne qui leur fût proche. On appelle la personne ainsi possédée un dibbouk.

Le Dibbouk
Lili Liliana, Ajzyk Samberg et Leon Liebgold dans Le Dibbouk de Michal Waszynski.

12 juillet 2018

Ikarie XB 1 (1963) de Jindrich Polák

Ikarie XB 1En 2163, le vaisseau spatial Ikarie XB-1 est lancé vers Alpha du Centaure autour de laquelle orbite une « planète blanche » supposée abriter la vie. A son bord, une quarantaine de scientifiques de plusieurs pays doivent apprendre à vivre ensemble…
Alors que les USA et l’URSS sont en pleine compétition pour la conquête spatiale, un budget important est consacré par le bloc de l’Est pour la production de cette adaptation d’un roman du polonais Stanislas Lem (l’auteur de Solaris). Film de hard SF (1) par excellence, Ikarie XB-1 met en scène certains principes ou théories scientifiques et aborde de façon très réaliste tous les problèmes pouvant se poser à bord d’un tel vaisseau. La vie quotidienne est ainsi minutieusement décrite, jusque dans les loisirs possibles. Tout cela est très crédible. Mais le plus étonnant est son aspect précurseur : impossible de ne pas penser à 2001 en voyant les intérieurs géométriques, les combinaisons spatiales ou l’ordinateur central, à Star Trek en voyant le poste de commande ou encore à Alien lors de l’exploration de la station abandonnée. Ikarie XB-1 a manifestement été une source d’inspiration pour bon nombre de films ou séries de science-fiction sur plusieurs décennies. La musique est, elle aussi, étonnante, une superbe tentative de créer une musique du futur, proche de la musique concrète ; elle contribue à créer un climat très puissant. Récemment restauré dans sa version d’origine tchèque qui avait été très peu vue en Occident avant 2005, Ikarie XB-1 est vraiment une petite merveille à découvrir.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Zdenek Stepánek, Frantisek Smolík, Dana Medrická, Irena Kacírková
Voir la fiche du film et la filmographie de Jindrich Polák sur le site IMDB.

Ikarie XB 1
Ikarie XB 1

Remarques :
* Titrée Voyage to the End of the Universe, la version occidentale américaine est amputée d’environ dix minutes et la fin est totalement différente (attention : la fin est révélée ci-après, ne pas lire si vous préférez ne pas savoir à l’avance). La version tchèque montre la brève vision d’une planète densément peuplée et industrialisée. La version américaine montre… une vue de Manhattan, ce qui change complètement l’histoire puisque cela signifie que l’Ikarie était en réalité d’origine extra-terrestre. La version américaine ne parle d’ailleurs pas d’une « planète blanche » à trouver mais d’une « planète verte » (rappelons qu’avant les images par satellite, on pensait que la Terre vue de l’espace serait verte).

* L’exploration de la station abandonnée fournit l’occasion d’une caricature vraiment grossière du capitalisme, tellement ridicule qu’elle en devient amusante (à noter que la version américaine a coupé une bonne partie de ces scènes).

Ikarie XB1Beau clin d’oeil à Planète interdite (1955) : l’un des scientifiques a emporté un robot vieille génération auquel il est attaché malgré ses nombreux dysfonctionnements dans Ikarie XB 1 de Jindrich Polák.

(1) Le terme Hard SF désigne la science-fiction particulièrement conforme aux connaissances scientifiques du moment.

10 juillet 2018

Un faux mouvement (1992) de Carl Franklin

Titre original : « One False Move »

Un faux mouvementAprès le braquage particulièrement sanglant de trafiquants de drogue, la police de Los Angeles cherche une piste pour traquer les meurtriers en fuite. Deux enquêteurs se rendent dans une petite ville de l’Arkansas où ils ont des attaches familiales. Le shérif de la bourgade voit leur arrivée d’un bon œil, il y voit là un espoir de promotion…
Sur un scénario écrit par Billy Bob Thornton et Tom Epperson, Un faux mouvement est la première grande réalisation de Carl Franklin qui a débuté comme acteur de télévision. La force du film est dans ses personnages, assez bien définis quoiqu’un peu typés, et dans son rythme, relevé par de soudaines poussées de tension. Même s’il fournit quelques scènes savoureuses, ce n’est pas le trio des braqueurs qui est au centre du film, c’est plutôt le personnage du jeune shérif local envieux de ses confrères de la grande ville ; la confrontation entre police des villes et des champs en quelque sorte. La réalisation est efficace et soignée. A noter que la scène d’ouverture est particulièrement violente. L’ensemble peut évoquer certains films des frères Coen, sans toutefois être aussi abouti. Un faux mouvement a été remarqué et a reçu plusieurs prix mais sa distribution est restée limitée.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Bill Paxton, Cynda Williams, Billy Bob Thornton, Michael Beach, Jim Metzler, Earl Billings
Voir la fiche du film et la filmographie de Carl Franklin sur le site IMDB.

Voir les autres films de Carl Franklin chroniqués sur ce blog…

Remarque :
* Ne pas confondre ce film avec Faux Mouvement (Falsche Bewegung), film allemand réalisé par Wim Wenders en 1975.

Un faux mouvement
Bill Paxton est un shérif pittoresque dans Un faux mouvement de Carl Franklin.

One false move
Michael Beach, Cynda Williams et Billy Bob Thornton, les trois braqueurs de Un faux mouvement de Carl Franklin.

8 juillet 2018

Une place au soleil (1951) de George Stevens

Titre original : « A Place in the Sun »

Une place au soleilNeveu pauvre d’un magnat de l’industrie, George Eastman (Montgomery Clift) est embauché comme simple ouvrier dans une usine de son oncle. Malgré les interdictions, il a une liaison avec une ouvrière, Alice (Shelley Winters). Mais au même moment, il rencontre Angela (Elizabeth Taylor), une jeune femme de la haute société…
Le roman de Theodore Dreiser, Une tragédie américaine, avait déjà été porté à l’écran par Josef von Sternberg en 1931, version qui sans être pleinement réussie en restituait bien le commentaire social et une certaine critique de l’ascension sociale, le fameux rêve américain. George Stevens a une approche plus romantique et enrobe l’ensemble dans un grand mélodrame hollywoodien. Il faut mettre une certaine bonne volonté pour déceler le propos initial. Bien entendu, on peut admirer la mise en scène très précise (1), la photographie, la présence et le jeu des trois acteurs principaux, mais la pesanteur des symbolismes et la lourdeur de certaines scènes rend tout cela très ennuyeux. Même la superbe musique composée par Franz Waxman (2) paraît trop souvent inutilement insistante.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Montgomery Clift, Elizabeth Taylor, Shelley Winters
Voir la fiche du film et la filmographie de George Stevens sur le site IMDB.

Voir les autres films de George Stevens chroniqués sur ce blog…

(1) A noter que George Stevens avait pour habitude de filmer une scène sous tous les angles possibles.
(2) La musique a été reprise dans les années quatre-vingt pour le magazine Cinéma Cinémas de Claude Ventura et il est difficile de l’écouter sans repenser au générique de cette émission…

A place in the sun
Elizabeth Taylor et Montgomery Clift dans Une place au soleil de George Stevens.

Version précédente :
Une tragédie américaine (An American Tragedy) de Josef von Sternberg (1931) avec Phillips Holmes et Sylvia Sidney.

6 juillet 2018

Fièvre sur Anatahan (1953) de Josef von Sternberg

Titre original : « Anatahan »
Titre international : « The Saga of Anatahan »

Fièvre sur AnatahanEn juin 1944, un groupe de soldats japonais se retrouvent sur une île isolée du Pacifique après la destruction de leur navire par un avion ennemi. L’île n’est habitée que par un japonais et une jeune femme qui, eux aussi, y ont trouvé refuge. Coupés du reste du monde, ils vont y rester sept ans, ignorant que la guerre est terminée…
Fièvre sur Anatahan est le dernier film (1) du grand réalisateur Josef von Sternberg basé sur un épisode authentique et resté célèbre de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il l’a réalisé au Japon avec une liberté totale dans un immense hangar où il a reconstitué la jungle de l’île. La forme qu’il a choisie est minimaliste, épurée de tous artifices : une voix off (Josef von Sternberg lui-même) qui raconte les évènements et explique le contenu des dialogues japonais qui restent non traduits. Les interprètes sont tous étrangers au cinéma, certains viennent du kabuki et ce jeu particulier contribue à donner un petit caractère d’étrangeté au film. Comme on peut s’y attendre avec Josef von Sternberg, les lumières sont assez belles mais, là aussi, sans esbroufe. Sur le fond, le réalisateur profite de cette situation si particulière pour sonder la nature profonde de l’homme et explore essentiellement la notion de pouvoir sous ses différentes formes. Le film n’eut hélas que peu de succès, au Japon comme dans le reste du monde.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Akemi Negishi, Tadashi Suganuma, Kisaburo Sawamura, Shôji Nakayama
Voir la fiche du film et la filmographie de Josef von Sternberg sur le site IMDB.

Voir les autres films de Josef von Sternberg chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Josef von Sternberg

Remarques :
* Une version avec une voix-off dite par un acteur japonais sans se superposer aux dialogues a été distribuée dans certains pays, notamment au Japon.
* Une version existe avec une fin alternative où Heiko est devenue cireuse de chaussures à l’aéroport où revient le groupe de soldats.

* L’île d’Anatahan est une île volcanique de 32 km2 qui fait partie de l’archipel des Îles Marianne du Nord, env. 1500 kms à l’ouest des Philippines. Elle a fait partie de l’Empire du Japon jusqu’en 1945 où elle devint américaine. L’île est inhabitée depuis 1990 du fait de risques élevés d’éruption qui survinrent effectivement en 2003 et 2007, cette dernière durant une année.

* Les polémiques autour de ces évènements ont été relancés en 1998 par l’écrivain et universitaire japonais Kaoru Ohno avec son roman Cage on the Sea, et en 2008 par Natsuo Kirino avec une nouvelle « Tôkyô-jima », qui est devenue un film du même nom réalisé par Makoto Shinozaki en 2010 (non distribué en dehors du Japon).

* Lire aussi une remarquable étude sur le film par Sachiko Mizuno et Emmanuel Burdeau :
https://cafedesimages.fr/auteur/sachiko-mizuno/ (il y a 4 volets, le troisième est particulièrement riche en informations sur la production et le tournage du film)

Anathan
Tadashi Suganuma (au centre) dans Fièvre sur Anatahan de Josef von Sternberg.

Anatahan
Akemi Negishi dans Fièvre sur Anatahan de Josef von Sternberg.

(1) A noter que le film Jet Pilot (Les espions s’amusent) avec John Wayne tourné en 1951 par Josef von Sternberg  sous la surveillance étroite d’Howard Hughes ne sortira qu’en 1957, film qui ne ressemble en rien au réalisateur qui a déclaré le détester.