28 septembre 2022

Max mon amour (1986) de Nagisa Ôshima

Max mon amourPeter, diplomate anglais en poste à Paris soupçonne sa femme Margaret d’entretenir une liaison extra conjugale. Il engage un détective privé et apprend qu’elle loue un appartement. Après avoir réussi à s’en procurer la clé, il découvre que l’amant de sa femme est un chimpanzé prénommé Max…
Max mon amour est un film français réalisé par le japonais Nagisa Ôshima. Le scénario est issu de la collaboration de Nagisa Ôshima, connu pour explorer les excès de la passion (L’Empire des sens), avec Jean-Claude Carrière, connu pour sa complicité avec Luis Buñuel. Un tandem prometteur ! Précisons que leur idée n’était manifestement pas d’aborder la zoophilie mais de bousculer les conventions sociales et de créer des situations surréalistes. Le résultat est amusant mais on peut regretter que les scènes les plus savoureuses, par exemple le repas avec les invités, ou les plus farfelues, par exemple la descente des Champs-Elysées, ne soient pas plus nombreuses. Le récit garde toujours une certaine hauteur, grâce à l’absence de moments scabreux et aussi grâce à l’interprétation : le mari campé par Anthony Higgins est très british et retenu, Charlotte Rampling est impériale, froide et énigmatique. Et quel regard ! Trop déstabilisant, le film n’eut pas de succès. Il est certain que Max mon amour n’aurait pas déplu à Luis Buñuel.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Charlotte Rampling, Anthony Higgins, Victoria Abril, Nicole Calfan, Pierre Étaix, Sabine Haudepin, Fabrice Luchini, Bernard-Pierre Donnadieu
Voir la fiche du film et la filmographie de Nagisa Ôshima sur le site IMDB.

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Remarque :
* Max est interprété par la marionnettiste Ailsa Berk, connue pour ses interventions sur Star Wars, épisode VI : Le Retour du Jedi, Greystoke et Doctor Who. Elle n’est pas créditée au générique.

Max mon amourAnthony Higgins, Max et Charlotte Rampling dans Max mon amour de Nagisa Ôshima.

29 août 2020

Valmont (1989) de Milos Forman

ValmontElevée dans un couvent, la jeune Cécile de Volanges est promise en mariage au comte de Gercourt qui, de ce fait, rompt avec son amante la Marquise de Merteuil. Pour se venger, cette dernière fait appel au vicomte de Valmont…
Sorti seulement quelques mois après Les Liaisons dangereuses de Stephen Frears, Valmont lui est assez différent. Jean-Claude Carrière et Miloš Forman ont fortement simplifié le récit du roman de Choderlos de Laclos (dont ils n’avaient d’ailleurs pas les droits). Il en résulte un film plus léger, moins dramatique (notamment dans sa fin), plus joyeux. Le machiavélisme cruel a laissé la place au libertinage. Annette Bening est pétillante. La reconstitution est soignée, le réalisateur a pris le temps pour peaufiner ses scènes. L’écriture est parfaite et la grande maitrise de Forman dans la mise en scène est manifeste. Le résultat est séduisant : le film est à la fois un régal visuel et un divertissement élégant. Alors que le film de Frears a connu le succès, Valmont (doté d’un budget double) a été un échec commercial, une catastrophe même (1), beaucoup de critiques et de spectateurs ne pardonnant pas les libertés prises par rapport au roman (dont il n’est, rappelons-le, qu’inspiré). Il serait temps de le réhabiliter…
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Colin Firth, Annette Bening, Meg Tilly, Fairuza Balk, Siân Phillips, Jeffrey Jones, Henry Thomas
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(1) Claude Berri a déclaré qu’il s’agissait du plus grand échec financier de sa carrière de producteur.

ValmontAnnette Bening et Colin Firth dans Valmont de Milos Forman.

ValmontMeg Tilly et Annette Bening dans Valmont de Milos Forman.

16 décembre 2016

L’insoutenable légèreté de l’être (1988) de Philip Kaufman

Titre original : « The Unbearable Lightness of Being »

L'insoutenable légèreté de l'êtrePrague, printemps 1968. Un vent de liberté souffle sur la Tchécoslovaquie. Tomas est un jeune et séduisant chirurgien du cerveau qui multiplie les conquêtes féminines. Il cultive une forme d’amitié érotique avec une artiste, Sabina, et développe un amour plus sérieux pour Tereza, une jeune serveuse rencontrée lors d’un déplacement en province… L’insoutenable légèreté de l’être est un roman à succès de Milan Kundera, adapté ici pour le grand écran par Jean-Claude Carrière. Le thème principal est l’opposition entre légèreté et gravité : comment peut-on être léger et insouciant face à la pesanteur des destinées? Tereza finit par trouver insoutenable la légèreté de Tomas alors qu’ils assistent impuissants à l’écrasement de leur pays. Le récit de Kundera a en effet aussi un aspect historique, par son témoignage de l’irruption des chars et soldats soviétiques à Prague en août 1968 et du processus de « normalisation » qui a suivi. Kundera a orné son récit d’une sensualité érotique que l’on retrouve à l’écran. Elle contribue à l’équilibre général de l’ensemble en lui donnant une plus grande accessibilité (ou bien Kundera aurait-il cherché à privilégier une certaine légèreté ?) Bien qu’un peu trop long (près de 3 heures), le film de Philip Kaufman est une belle adaptation du roman.
Elle: 4 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Daniel Day-Lewis, Juliette Binoche, Lena Olin, Stellan Skarsgård
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Remarques :
* L’insoutenable légèreté de l’être a lancé la carrière internationale de Juliette Binoche.
* Roman (publié en 1984) et film précèdent la chute du Mur de quelques années. Kundera a écrit son roman juste après la mort de Brejnev (qui avait ordonné la « normalisation » de la Tchécoslovaquie en 1968).

 

L'insoutenable légèreté de l'être
Légèreté : Lena Olin et Daniel Day-Lewis dans L’insoutenable légèreté de l’être de Philip Kaufman.

L'insoutenable légèreté de l'être
Gravité : Juliette Binoche dans L’insoutenable légèreté de l’être de Philip Kaufman.

2 octobre 2016

L’Alliance (1971) de Christian de Chalonge

L'allianceUn homme s’adresse à une agence matrimoniale pour une demande un peu particulière : il n’a pas beaucoup d’exigences sur la personne mais insiste sur le fait qu’elle doit habiter un très grand appartement. Il est en effet vétérinaire et souhaite installer son cabinet. Le mariage a lieu très rapidement. Peu après, il commence à soupçonner sa femme, toujours mystérieuse et secrète… Jean-Claude Carrière a écrit lui-même l’adaptation de son roman L’Alliance et, plus inhabituel, il en tient le rôle principal. Servi par un excellent scénario, le film de Christian de Chalonge est original et surprenant. Pour ne rien dévoiler du développement de l’intrigue, disons simplement que les animaux (de toutes sortes) y tiennent une bonne place, ils sont très présents sans être nécessairement visible à l’écran, et que le dénouement se situe à la frontière de la science-fiction. Cette fin a d’ailleurs des interprétations multiples et amène à une reconsidération totale de tout ce qui précède. Certains plans sont vraiment très réussis. Le caractère étrange de l’ensemble devient parfois inquiétant par l’utilisation habile de la musique. L’Alliance est assez peu connu, il mériterait de l’être plus.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Anna Karina, Jean-Claude Carrière, Isabelle Sadoyan, Jean-Pierre Darras
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L'Alliance
Anna Karina dans L’Alliance de Christian de Chalonge.

L'Alliance
Jean-Claude Carrière dans L’Alliance de Christian de Chalonge.

L'Alliance
Anna Karina dans L’Alliance de Christian de Chalonge.

L'Alliance
Anna Karina dans L’Alliance de Christian de Chalonge.

19 juin 2016

Le Retour de Martin Guerre (1982) de Daniel Vigne

Le Retour de Martin GuerreDans un petit village paysan de l’Ariège au XVIe siècle, sous le règne de François 1er, Bertrande épouse à 12 ans Martin qui en a 13 dans un mariage arrangé par les familles. L’harmonie n’est pas totale mais ils se forcent à avoir un enfant. Lassé de cette vie et de ses mésententes avec son père, Martin un jour disparaît. Lorsqu’il réapparaît huit ans plus tard, il est devenu un homme séduisant mais tout le monde le reconnaît sans hésiter et l’accueille chaleureusement… Le retour de Martin Guerre est basé sur une histoire authentique que l’historienne américaine Natalie Zemon Davis a relatée dans un livre du même nom. Jean-Claude Carrière et Daniel Vigne l’ont adaptée pour en faire un film où l’intrigue se révèle assez prenante, où notre intérêt croît au fil des rebondissements. La reconstitution historique est soignée et met en lumière certains des codes sociaux du monde paysan de l’époque, où la notion d’héritage a une grande force. Le film montre bien l’organisation sociale d’une petite communauté d’individus et souligne les difficultés de s’assurer de l’identité d’une personne à cette époque. Gérard Depardieu fait une très belle prestation et montre une grande présence à l’écran. Face à lui, Nathalie Baye est d’une belle douceur ; elle est éclairée de telle sorte qu’elle semble souvent échappée d’un tableau de Georges de La Tour. Sans spectaculaire et sans académisme, Le retour de Martin Guerre fait montre de belles qualités.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gérard Depardieu, Nathalie Baye, Maurice Barrier, Bernard-Pierre Donnadieu
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Remarques :
* En 2014, Daniel Vigne a réalisé pour la télévision un documentaire de 52 minutes intitulé Martin Guerre, retour au village qui revient, trente ans après, à Balagué en Ariège où a été tournée une partie du film. Daniel Vigne vient rendre visite aux habitants du village qui, pour la plupart d’entre eux, s’étaient transformés en paysans du XVIe siècle pour son film.
* Tchéky Karyo est ici dans son premier rôle à l’écran, Dominique Pinon dans son second.

Remake américain (très réussi) :
Sommersby (1993) de Jon Amiel avec Jodie Foster et Richard Gere.

Le retour de Martin Guerre
Gérard Depardieu et Nathalie Baye dans Le Retour de Martin Guerre de Daniel Vigne.

Le Retour de Martin Guerre
?, Nathalie Baye et Gérard Depardieu dans Le Retour de Martin Guerre de Daniel Vigne. L’un de ces plans très inspirés des tableaux de Georges de La Tour.

30 octobre 2014

La Voie lactée (1969) de Luis Buñuel

La voie lactéeA l’époque actuelle, deux pèlerins se rendent à pied de Paris à Saint-Jacques-de-Compostelle (1). En chemin, ils font de nombreuses rencontres inattendues… Ecrit par Luis Buñuel et Jean-Claude Carrière, La Voie lactée est un film d’une grande audace : comment faire un film plutôt amusant, et en même temps profond, sur un sujet aussi rébarbatif que l’hérésie et les querelles dogmatiques dans la religion catholique tout au long de son histoire ? Par sa forme, il surprend le spectateur car Buñuel et Carrière s’affranchissent des contraintes de temps et d’espace : on peut, au détour d’un chemin, rencontrer un personnage d’une autre époque, même le Christ lui-même.

Sur le fond, qualifier le film d’anticlérical est très réducteur, d’ailleurs il ne l’est pas vraiment. Le propos de Buñuel va beaucoup plus loin que cela : ses questionnements portent sur la notion de dogme. Sur sa formation d’abord : lorsque l’on formalise une croyance en dogme, le réel et le rationnel s’échappent, les « mystères » apparaissent et, avec eux, les interprétations différentes et donc les querelles, celles qui poussent au fanatisme. Et ensuite, sur la façon dont une doctrine peut se nourrir de ses déviations : elle en sort souvent renforcée. Au delà de la religion, catholique en l’occurrence, Buñuel parle de tous les dogmes : dans une courte scène, on voit un groupe de partisans anarcho-marxistes (ils ont un drapeau bicolore, rouge et noir) venir de façon froide et décidée fusiller le pape… Il semble ainsi nous dire : « Attention, je vous parle de religion mais tout ce que je dis s’applique tout aussi bien à une idéologie politique » (2).

Le propos de Buñuel n’est pas destructeur, il questionne. Il n’apporte pas de réponses, il laisse la place au doute comme en témoigne la scène finale de la « guérison » des aveugles. Sont-ils guéris ou pas ? On ne le saura pas. Faut-il y voir là un certain respect du mystère (sur lequel se construisent les croyances et les doctrines) ou encore un refus de la rationalisation ? Peut-être… Comme on le voit, il y a là beaucoup de matière à réflexion. La Voie lactée est certainement l’un des films les plus profondément philosophiques de Luis Buñuel.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Paul Frankeur, Laurent Terzieff, Alain Cuny, Edith Scob, François Maistre, Michel Piccoli, Pierre Clémenti
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(1) La Voie lactée était autrefois utilisée comme point de repère par les pèlerins se dirigeant vers Saint-Jacques de Compostelle, à tel point qu’elle était désignée dans plusieurs pays d’Europe sous le nom de Chemin de saint Jacques. Quand elle est haute dans le ciel, la Voie lactée suit en effet un axe allant du nord-est au sud-ouest. Autrefois, elle était en outre bien plus visible qu’aujourd’hui car il n’y avait pas tous les éclairages publics actuels.

(2) Dans son autobiographie, Buñuel cite également l’idéologie artistique… Cela peut surprendre mais il faut se souvenir que Buñuel a été l’une des grandes figures des surréalistes qui, il faut bien le reconnaitre, donnaient souvent dans l’intransigeance. Dans le cinéma, on pourrait également citer l’exemple des « jeunes turcs » des Cahiers du Cinéma qui déclaraient certains réalisateurs comme « hérétiques »…
Pour revenir à ce parallèle religion / idéologie marxiste, rappelons que nous sommes en pleine époque Mai 68 : l’écriture a été faite juste avant Mai 68 mais le tournage s’est déroulé pendant et juste après.

Homonyme :
The Milky Way (Soupe au lait, titre fr DVD = La Voie lactée) de Leo McCarey (1936) avec Harold LLoyd.

La Voie lactée (1969) de Luis Buñuel
Laurent Terzieff et Paul Frankeur dans La Voie lactée de Luis Buñuel (1969)

29 octobre 2014

Le Fantôme de la liberté (1974) de Luis Buñuel

Le fantôme de la libertéDes condamnés à mort qui crient « Vive les chaînes » au moment d’être fusillés (1)… dès la scène du générique, le ton est donné : la logique et les conventions vont être bien malmenées dans Le Fantôme de la liberté et Luis Buñuel et Jean-Claude Carrière sont ici allés encore plus loin que dans Le Charme discret de la bourgeoisie. La structure est inhabituelle : selon le principe des « cadavres exquis » des surréalistes, chacune des petites histoires qui composent le film est reliée à la suivante par un personnage ou une situation qui nous emmènent sur un thème totalement différent. Buñuel nous surprend sans arrêt, il retourne les usages, prend des directions inattendues. Il chamboule nos certitudes, nous faisant prendre parfois un énorme recul sur ce que nous voyons. On peut ainsi dire que le film a une dimension philosophique dans le sens où il nous fait voir de façon nouvelle des évènements ou des comportements les plus anodins, il bouscule ce que nous tenons pour acquis. L’humour, quant à lui, est toujours présent. Aujourd’hui comme il y a quarante ans, Le Fantôme de la liberté est un petit bijou.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Monica Vitti, Jean-Claude Brialy, Paul Frankeur, Michael Lonsdale, François Maistre, Michel Piccoli, Claude Piéplu, Jean Rochefort, Julien Bertheau, Marie-France Pisier, Adolfo Celi
Voir la fiche du film et la filmographie de Luis Buñuel sur le site IMDB.

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Remarques :
* La Voie lactée, Le Charme discret de la bourgeoisie et  Le fantôme de la liberté forment une trilogie surréaliste. Buñuel préfère le terme de triptyque, « comme au Moyen Âge » ajoute t-il. « Les même thèmes, quelquefois même les mêmes phrases se retrouvent dans les trois films. Ils parlent de la recherche de la vérité, qu’il faut fuir dès que l’on croit l’avoir trouvée, du rituel social implacable. Ils parlent de la recherche indispensable, du hasard, de la morale personnelle, du mystère qu’il faut respecter. » (Extrait de l’autobiographie de Luis Buñuel « Mon dernier soupir »)

* Cameo : Au tout début du film, Luis Buñuel est l’un des quatre fusillés : le moine portant une barbe. A sa gauche, l’homme avec un bandeau sur le front est son producteur Serge Silberman.

(1) Luis Buñuel précise dans son autobiographie que cette scène est authentique : par haine des idées libérales introduites par Napoléon, le peuple espagnol criait « Vive les chaînes » au retour des Bourbons.
A noter que ces exécutions sont le sujet du tableau de Goya Tres de Mayo dont une reproduction ouvre le film.

Le Fantôme de la liberté (1974) de Luis Buñuel
La maitresse de maison (Alix Mahieux) place les invités à table…
Les rituels de notre société sont malmenés : ici, on défèque tout en discutant et on s’absente discrètement quelques minutes pour aller manger dans la cuisine.
(avec Marie-France Pisier, Jean Rougerie, …)

15 octobre 2014

Le Charme discret de la bourgeoisie (1972) de Luis Buñuel

Le charme discret de la bourgeoisieLes Thévenot arrivent pour dîner chez les Sénéchal mais il y a eu méprise : ils n’étaient attendus que le lendemain. Le maitre de maison est même absent. Avec sa femme, ils décident alors d’aller dîner dans un restaurant proche mais, alors qu’ils s’apprêtent à commander, ils réalisent que la pièce voisine est une chambre funéraire où repose le propriétaire décédé… Pour écrire Le Charme discret de la bourgeoisie, Luis Buñuel et Jean-Claude Carrière sont partis du thème de la répétition (un repas impossible) pour broder une série de variations surréalistes. C’est un emboitement de mini-récits où l’inattendu est roi, où les positions sociales ne sont pas tenues, où la réalité et le rêve s’entremêlent. C’est un festival de créativité qui bouscule toutes les conventions et où la vraisemblance n’est pas considérée comme nécessaire. On peut, bien entendu, y voir une satire de la bourgeoisie mais ce ne semble pas être l’essentiel du propos (1). En revanche, on ne peut que remarquer que le film est profondément imprégné de son époque, c’est un reflet de cette période post-68. Empreint d’un humour constant, Le Charme discret de la bourgeoisie est un divertissement vraiment plaisant.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Fernando Rey, Paul Frankeur, Delphine Seyrig, Bulle Ogier, Stéphane Audran, Jean-Pierre Cassel, Claude Piéplu
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(1) A ce sujet, Luis Buñuel raconte dans ses mémoires (Mon dernier soupir) comment Jean-Claude Carrière et lui-même ont écrit le scénario sans trop penser au thème de la bourgeoisie, le titre n’étant venu qu’à la toute fin du processus d’écriture qui fut assez long. Effectivement, on pourra noter que, si on retrouve bien bourgeois, membres du clergé et militaires dans ce film, ils ne sont pas franchement égratignés.

Le Charme discret de la bourgeoisie de Luis Buñuel
Fernando Rey, Delphine Seyrig, Bulle Ogier et Paul Frankeur dans Le Charme discret de la bourgeoisie de Luis Buñuel.

25 septembre 2013

La Piscine (1969) de Jacques Deray

La piscineMarianne et Jean-Paul passent l’été dans une belle villa sur les hauteurs de Saint-Tropez. Ils ne sont pas enclins à sortir, préférant lézarder au bord de la piscine. Lorsqu’ils reçoivent la visite inopinée de leur ami Harry accompagné de sa fille Pénélope, Marianne les invite à rester plusieurs jours… Sur une histoire de Jean-Emmanuel Conil (Alain Page) adaptée par Jean-Claude Carrière, La Piscine est un huis clos en plein air qui réunit un couple mythique qui avait fait le bonheur de la presse populaire : Alain Delon et Romy Schneider (1). Ils sont beaux, jeunes et bronzés et Jacques Deray ne se prive pas d’exploiter au maximum la plastique des deux acteurs, les montrant longuement tels deux félins dans leurs jeux amoureux. Il faut reconnaître que ces deux « monstres sacrés » ont une formidable présence à l’écran et tiennent leur rôle avec magnificence. Outre l’attrait dû aux acteurs, le film est remarquable par la progression parfaitement maitrisée de son scénario qui glisse peu à peu vers la prévisible tragédie. On ne peut toutefois parler vraiment de suspense.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Alain Delon, Romy Schneider, Maurice Ronet, Jane Birkin
Voir la fiche du film et la filmographie de Jacques Deray sur le site IMDB.

Remarque :
Il faut également saluer la présence de Maurice Ronet, le film permettant de le voir à nouveau opposé à Alain Delon, neuf ans après le superbe Plein Soleil de René Clément.

(1) Romy Schneider et Alain Delon se sont fiancés en 1959 après s’être rencontrés sur le tournage de Christine. Le couple a été ensuite très largement suivi par la presse populaire jusqu’à leur séparation en 1964… Inutile de dire que cette même presse populaire s’en est donné à coeur joie pour laisser croire que le couple allait se reformer après le tournage de La Piscine.

11 juin 2012

Taking Off (1971) de Milos Forman

Taking OffUne adolescente participe à une audition et ne rentre pas chez elle. Ses parents la recherchent et tentent de comprendre… Taking Off est le premier film américain de Milos Forman. Il en a écrit le scénario avec Jean-Claude Carrière, c’est donc une vision assez européenne qu’il nous donne ici de la civilisation américaine en proie à un fort conflit de générations. Il a choisi le registre de l’humour, le film étant presque une série de saynètes, hélas assez inégales. Le regard est surtout porté sur les parents, coincés et maladroits, totalement déstabilisés par les fugues de leurs enfants mais qui ne demandent qu’à se laisser aussi happer par cette vague d’émancipation et d’apparente liberté. Taking Off a le défaut de rester en surface de tout cela pour simplement jouer sur le burlesque. La meilleure scène est celle du cours très formel donné (par Vincent Schiavelli) à un groupe de parents guindés pour leur apprendre à fumer un joint (dans le but de mieux comprendre leurs enfants). C’est un grand moment! En revanche, les scènes d’audition sont particulièrement longues et pénibles. A noter, une apparition de Ike & Tina Turner sur scène.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Lynn Carlin, Buck Henry, Georgia Engel, Audra Lindley, Paul Benedict, Vincent Schiavelli
Voir la fiche du film et la filmographie de Milos Forman sur le site IMDB.
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