27 avril 2018

À double tour (1959) de Claude Chabrol

À double tourDans une grande maison entourée de vignes aux environs d’Aix-en-Provence, la famille Marcoux tente de garder une image respectable alors que le père a une liaison avec la jolie occupante de la villa voisine et que la fille a un fiancé particulièrement impertinent et sans-gêne…
Troisième long métrage de Claude Chabrol, À double tour est adapté d’un roman policier paru dans la Série Noire sous la plume de Stanley Ellin, l’un des auteurs majeurs de la littérature policière d’après-guerre. Mais visiblement, ce n’est pas l’intrigue qui a intéressé le jeune réalisateur mais plutôt la possibilité de dresser un portrait de la bourgeoisie où bienséance rime avec hypocrisie. Il le fait sans nuance, sans avoir peur de grossir le trait, parfois au-delà de la vraisemblance. Les personnages sont vraiment très typés. Claude Chabrol prend des libertés avec le déroulement de l’histoire, reprenant certaines scènes avec une vision différente. Il expérimente aussi sur la forme, adopte plusieurs angles de caméra sans parvenir à choisir, ignore parfois (volontairement ?) les raccords d’éclairage. Il soigne l’utilisation des couleurs et joue avec les ombres. Tous ces effets sont très appuyés, trop visibles sans aucun doute. À double tour fut très mal reçu par la critique et n’eut aucun succès auprès du public. Cela explique certainement que cette œuvre de jeunesse soit aujourd’hui si peu connue.
Elle: 3 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Madeleine Robinson, Antonella Lualdi, Jean-Paul Belmondo, Jacques Dacqmine, Jeanne Valérie, Bernadette Lafont, André Jocelyn, Mario David
Voir la fiche du film et la filmographie de Claude Chabrol sur le site IMDB.

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A double tourJeanne Valérie, Jean-Paul Belmondo, Jacques Dacqmine, Madeleine Robinson et André Jocelyn
dans À double tour de Claude Chabrol.

Remarques :
* L’adaptation a été écrite par Paul Guégauff.
* Le rôle du trublion était initialement dévolu à Jean-Claude Brialy qui, blessé sur le tournage du Beau Serge, a suggéré le nom de Jean-Paul Belmondo pour le remplacer. L’acteur n’avait alors tenu que des tout petits rôles. Ce choix ne fut pas du goût des producteurs. Les frères Hakim hurlèrent à Chabrol une phrase qui est restée dans l’Histoire du cinéma : « Comment voulez-vous qu’on veuille bien filmer quelqu’un d’aussi moche ! Qui peut imaginer qu’il va serrer dans ses bras une aussi jolie femme qu’Antonella Lualdi et qu’elle lui dise qu’elle l’aime ! ».

A Double TourMadeleine Robinson et (dans le miroir) Bernadette Lafont dans À double tour de Claude Chabrol.

A Double TourOn ne pourra pas dire que Chabrol n’a pas cherché des cadrages originaux et esthétiques…
Antonella Lualdi et André Jocelyn dans À double tour de Claude Chabrol.

23 avril 2018

Ça s’est passé en plein jour (1958) de Ladislao Vajda

Titre original : « Es geschah am hellichten Tag »

Ça s'est passé en plein jourDans le canton de Zurich en Suisse, un colporteur découvre le cadavre d’une fillette. Il est immédiatement soupçonné d’être coupable du meurtre mais tel n’est pas l’avis de l’officier de police Matthäi. Hélas, celui-ci doit partir le lendemain pour un poste lointain de fin de carrière… Es geschah am hellichten Tag est un film helvetico-hispano-allemand assez rare, réalisé par Ladislao Vajda, cinéaste d’origine austro-hongroise qui fit sa carrière dans plusieurs pays dont l’Espagne franquiste. Ce film semble être l’un des plus remarquables de sa filmographie. Il réunit un bon plateau d’acteurs avec Heinz Rühmann, alors l’un des acteurs les plus connus outre-Rhin, et Michel Simon qui joue non-doublé en allemand. La prestation la plus étonnante est toutefois celle de Gert Fröbe, acteur alors habitué aux seconds rôles, qui crée un personnage vraiment inquiétant. L’histoire peut paraître assez classique à nos yeux modernes mais le récit s’attache à décrire tout le processus de raisonnement du policier : nous « savons » dès le début que le colporteur n’est pas le coupable, celui-ci nous est clairement désigné par la suite bien avant que l’inspecteur ne le trouve. Le suspense réside donc dans la façon de  le débusquer. A noter que, pour ce faire, le policier n’hésite pas à employer des méthodes peu orthodoxes. La réalisation est sans doute un peu terne mais le film vaut la peine d’être découvert.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Heinz Rühmann, Siegfried Lowitz, Michel Simon, Gert Fröbe
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Ca s'est passé en plein jour
Sigfrit Steiner, Heinz Rühmann, Michel Simon et Siegfried Lowitz dans Ça s’est passé en plein jour de Ladislao Vajda.

Ca s'est passé en plein jour
María Rosa Salgado et Heinz Rühmann dans Ça s’est passé en plein jour de Ladislao Vajda.

Remarques :
* L’histoire est un scénario original écrit par Friedrich Dürrenmatt, Hans Jacoby et Ladislao Vajda.
Friedrich Dürrenmatt en tirera un roman policier La Promesse après la sortie du film. Ce roman policier sera adapté au cinéma presqu’un demi-siècle plus tard :
The Pledge (2001) de Sean Penn avec Jack Nicholson.

* C’est en voyant Gert Fröbe dans Es geschah am hellichten Tag que les producteurs de la série James Bond eurent l’idée de le faire jouer le rôle du vilain dans Goldfinger (1964). Gert Fröbe sera également particulièrement remarquable dans le film de Fritz Lang Le Diabolique docteur Mabuse (1960).

Ca s'est passé en plein jour
Gert Fröbe dans Ça s’est passé en plein jour de Ladislao Vajda.

7 janvier 2018

La Cité sans voiles (1948) de Jules Dassin

Titre original : « The Naked City »

La Cité sans voilesAlors que la ville de New York est assoupie, une jeune femme est assassinée par deux hommes dans son appartement. L’enquête est confiée à un lieutenant aguerri et à son adjoint, une jeune recrue prometteuse… The Naked City est au départ une volonté du producteur Mark Hellinger (connu pour avoir produit The Killers de Robert Siodmak) de faire un film sur sa ville, New York. Ce film policier a ainsi un parfum de documentaire qu’il présente lui-même en voix off comme tourné in situ, dans les rues de New York, avec de vrais newyorkais. Il fait partie de ces films qui cherchent à nous montrer sans fard le fonctionnement de la police. Nous suivons ainsi l’enquête avec ses tâtonnements, ses longues recherches sur le terrain avec une belle poursuite en bouquet final. Pour ne pas écorner son authenticité, il n’y a pas d’acteurs connus. Le contrôle de la version finale a échappé à Jules Dassin, le montage ayant été totalement refait : selon ses propres mots, « on a arraché le cœur du film ». Ce n’est donc pas un film aussi personnel que Brute Force ou Night and the City mais l’ensemble est plutôt prenant.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Barry Fitzgerald, Howard Duff, Dorothy Hart, Don Taylor, Frank Conroy, Ted de Corsia
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Remarques :
* Mark Hellinger décèdera quelques semaines avant la sortie du film ; il était âgé de 44 ans.

* The Naked City a reçu deux Oscars : l’un à Paul Weatherwax pour le montage (!) et l’autre pour le grand directeur de la photographie William H. Daniels (oui, celui qui a si bien photographié Greta Garbo… The Naked City n’est certainement pas son meilleur travail mais l’homme méritait bien un Oscar).

* The Naked City était le titre d’un livre sur New York du photographe Arthur ‘Weegee’ Fellig. Le producteur Mark Hellinger l’a engagé pour faire des photos sur le tournage en échange du droit d’utiliser le titre. C’est pour cette raison qu’elles sont si nombreuses. Voir sur Google Images


Barry Fitzgerald et Howard Duff dans La Cité sans voiles de Jules Dassin.

The Naked City
Images réelles de la sortie des bureaux dans La Cité sans voiles de Jules Dassin.

The Naked City
Tom Pedi, Don Taylor, Dorothy Hart et Barry Fitzgerald dans La Cité sans voiles de Jules Dassin (photo publicitaire).

18 décembre 2017

Toni (1935) de Jean Renoir

ToniAntonio est un immigré italien venu travailler dans une carrière à Martigues près de Marseille. Il vit chez Marie mais n’a d’yeux que pour Josépha, une belle espagnole qui se marie avec son contremaître, un parisien qui convoite la propriété de son oncle…
Toni est le premier film de Jean Renoir qui n’a pas d’origine littéraire. L’histoire s’inspire d’un fait divers que lui a raconté son ami Jacques Levert, commissaire à Martigues. Comme nous l’indique le carton qui ouvre le film (1), le but du cinéaste est d’œuvrer contre la xénophobie qui est alors dans tous les esprits du fait de la crise économique (y compris parmi ses amis du parti communiste). Il nous montre comment vivent ces travailleurs immigrés, avec leurs difficultés et aussi leurs passions. Renoir se veut proche du documentaire. Il adopte un style très réaliste, étonnamment précurseur de ce que sera le néoréalisme italien dans la décennie suivante. Tout est filmé sur place, en extérieurs, avec l’aide de Marcel Pagnol qui met à disposition toute une équipe de comédiens et qui assurera la distribution du film. L’interprétation est hélas très inégale, pas toujours aussi naturelle qu’il le faudrait. Cette impression est sans doute renforcée aujourd’hui, à nos yeux modernes qui trouvent l’ensemble un peu rude (2). En revanche, son caractère assez unique dans le cinéma français de l’époque est indéniable.
Elle: 3 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Charles Blavette, Celia Montalván, Édouard Delmont, Max Dalban, Andrex
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Toni
Charles Blavette et Celia Montalván dans Toni de Jean Renoir.

Remarques :
* Luchino Visconti (28 ans) est l’un des assistants-réalisateurs.
* Le pont est le viaduc ferroviaire de Candote. Cet ouvrage traverse le Canal de Caronte qui relie l’étang de Berre à la mer Méditerranée : 972 mètres de longueur, doté d’une section pivotante de 114 mètres, construit en 1908 et toujours actif aujourd’hui.

(1) « L’action se situe en pays latin, là où la nature, détruisant l’esprit de Babel, sait si bien opérer la fusion des races. »
(2) L’historien Jacques Lourcelles, très enthousiaste à propos de Toni, le décrit ainsi : « Faussement primitif, le film est à la recherche d’une certaine rugosité cosmique, sensible dans les personnages comme dans la nature. (…) Au terme de l’alchimie renoirienne, cette rugosité équivaut à un suprême raffinement. » C’est une approche certainement intéressante pour mieux apprécier le film.

Toni - Jean Renoir
Jean Renoir sur le tournage de Toni, à l’oeilleton de la caméra T Debrie avec le directeur de la photographie Claude Renoir (debout à gauche), fils de son frère Pierre Renoir. (Pour d’autres photos de tournage de Jean Renoir, voir le livre Tournages : Paris-Berlin-Hollywood)

14 novembre 2017

L’Homme irrationnel (2015) de Woody Allen

Titre original : « Irrational Man »

L'homme irrationnelProfesseur de philosophie en université, Abe Lucas arrive dans la ville où il vient d’être nommé. Il se lie rapidement d’amitiés avec Jill Pollard, une étudiante assez brillante fascinée par sa personnalité… Avec L’Homme irrationnel, Woody Allen renoue avec certains de ses thèmes favoris : la crise existentialiste et la futilité de la vie. « Peut-on, par un acte irrationnel, chercher à donner un sens à sa vie ? » semble t-il s’interroger. Son histoire évolue ensuite vers une comédie policière mâtinée d’un humour noir plutôt sérieux et où la vraisemblance n’est pas vraiment recherchée. Comme souvent, Woody Allen s’amuse à jouer sur plusieurs registres au prix de ne pas toujours trouver l’équilibre parfait. L’interprétation de Joaquin Phoenix en bedonnant quarantenaire montre une force certaine et Emma Stone possède une très grande présence à l’écran, elle sait donner de l’intensité à son personnage. Même si toutes ces réflexions n’aboutissent pas réellement sur grand chose, L’Homme irrationnel est plaisant.
Elle: 4 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Joaquin Phoenix, Emma Stone, Jamie Blackley, Parker Posey
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L'Homme irrationnel
Joaquin Phoenix et Emma Stone dans L’homme irrationnel de Woody Allen.

L'Homme Irrationnel
Woody Allen, Emma Stone et Joaquin Phoenix sur le tournage de L’homme irrationnel de Woody Allen.

6 octobre 2017

L’inquiétante dame en noir (1962) de Richard Quine

Titre original : « The Notorious Landlady »

L'inquiétante dame en noirUn jeune diplomate américain (Jack Lemmon) muté à Londres postule pour louer un appartement auprès d’une ravissante jeune femme (Kim Novak). Il ignore qu’elle est suspectée d’avoir assassiné son mari qui a disparu sans que l’on ait jamais retrouvé le corps… Blake Edwards a co-écrit le scénario de ce Notorious Landlady, une comédie qui rassemble Kim Novak et Jack Lemmon pour la troisième fois (après Phffft en 1954 et Bell, Book and Candle en 1958). Fred Astaire est le troisième larron sur l’affiche, ici dans un rôle non dansant qui apporte une petite touche de classicisme à l’ensemble. Jack Lemmon joue avec sa nonchalance habituelle et assure à lui seul tout l’humour. Le film peut être décrit comme une parodie des films de suspense à la Hitchcock. Cette amusante comédie n’eut bizarrement que peu de succès à sa sortie et c’est sans doute pour cette raison qu’il est très rarement cité dans les filmographies. Assez injustement.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Kim Novak, Jack Lemmon, Fred Astaire, Lionel Jeffries
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The Notorious Landlady
Jack Lemmon et Kim Novak (qui n’est à aucun moment habillée en noir) dans L’inquiétante dame en noir de Richard Quine.

The Notorious Landlady
Lionel Jeffries, Fred Astaire et Jack Lemmon dans L’inquiétante dame en noir de Richard Quine.

The Notorious Landlady
Jack Lemmon, Richard Quine et Kim Novak sur le tournage de L’inquiétante dame en noir de Richard Quine.

Remarque :
* A cette époque, Jack Lemmon aidait son père dont le cancer était dans un stade très avancé. John Uhler Lemmon II a un petit rôle de figuration. Lors du concert en plein air à la fin du film, il est l’un des hommes âgés en chaise roulante, on le voit dans un rapide gros plan. Il décèdera quelques semaines plus tard.

26 septembre 2017

Trois enterrements (2005) de Tommy Lee Jones

Titre original : « The Three Burials of Melquiades Estrada »

Trois enterrementsAu Texas, près de la frontière mexicaine, le vaquero Melquiades Estrada est tué par erreur par un jeune garde-frontière plutôt tête brulée. Son contremaître et ami n’accepte pas qu’il soit enterré rapidement sans aucune enquête, d’autant plus qu’il lui avait fait une promesse… Sur un scénario écrit par Guillermo Arriaga (scénariste de plusieurs films d’Iñárritu), ce premier long métrage du comédien Tommy Lee Jones ne manque pas d’intérêt. A la fois western moderne et fable humaniste, il prend place dans une région que l’acteur connaît bien : il y est né et y possède un ranch où certaines scènes du film ont été tournées. Il campe un personnage qui n’est pas sans rappeler ceux que personnifiait Clint Eastwood, c’est-à-dire un personnage avec de grandes valeurs morales, un grand sens de l’amitié et de la parole donnée. Son film démontre comment, dans ces régions qui paraissent si peu favorisées par la nature, ces valeurs humaines deviennent primordiales. Il souligne la différence de mentalités avec « ceux du nord » (le nord étant pris dans un sens très large, soit tout ce qui est au-dessus de la moitié sud du Texas). Débutant avec une construction habile en flashbacks, le déroulement devient ensuite plus linéaire dans un long cheminement. La belle photographie et l’excellente musique génèrent un certain envoutement. Un film d’une belle puissance.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tommy Lee Jones, Barry Pepper, Julio Cesar Cedillo, Dwight Yoakam, January Jones, Melissa Leo
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Remarques :
* Tout le film (y compris la partie mexicaine) a été tourné dans le sud du Texas, notamment dans le Big Bend National Park qui jouxte la frontière mexicaine. La ville de Van Horn se situe à environ 40 kms de la frontière, non loin de El Paso, la ville la plus à l’ouest du Texas.
* Prix du meilleur acteur pour Tommy Lee Jones et Prix du meilleur scénario pour Guillermo Arriaga au Festival de Cannes 2005.

Trois enterrements
Barry Pepper et Tommy Lee Jones dans Trois enterrements de Tommy Lee Jones.

Levon Helm - Trois enterrements
Nota : Le vieil homme aveugle est interprété par Levon Helm, bien connu pour avoir été le batteur (et chanteur) du groupe The Band. A gauche, Levon Holm dans Trois enterrements de Tommy Lee Jones. A droite, Levon Helm dans les années soixante-dix. Levon Helm est certainement vieilli par maquillage puisqu’il n’avait que 65 ans au moment du tournage. Le musicien est décédé en 2012. 

9 septembre 2017

Chantage (1929) de Alfred Hitchcock

Titre original : « Blackmail »

ChantageAlice White se dispute avec son fiancé Frank dans un salon de thé et part avec un artiste qu’elle a accepté de rencontrer. Elle le suit jusqu’à son appartement où ils flirtent apparemment en toute innocence… Dernier film muet d’Hitchcock, ou premier film parlant du réalisateur, Blackmail est un peu les deux. Tourné d’abord en muet, Hitchcock retournera de nombreuses scènes en sonore, anticipant la demande de ses producteurs. Adaptation d’une pièce de Charles Bennett, cette histoire finalement assez simple permet au réalisateur de mettre en opposition l’amour et le devoir, et surtout de renverser les rôles établis. Les personnages se retrouvent malgré eux à tenir un rôle auquel rien ne les destinait. Le réalisateur nous gratifie de quelques scènes très « hitchcockienne », la plus remarquable étant la scène du meurtre où le spectateur devine l’action par le mouvement d’un rideau. A sa sortie, Blackmail fut le premier film sonore britannique et le succès fut très important.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Anny Ondra, John Longden, Donald Calthrop, Cyril Ritchard
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Blackmail
John Longden, Anny Ondra et Donald Calthrop dans Chantage de Alfred Hitchcock (photo publicitaire).

Remarques :
* Quelques mois après la sortie de la version parlante, une version muette fut diffusée auprès des cinémas qui n’étaient pas encore équipés pour le parlant.

* Hitchcock utilise une technique assez élaborée à base de miroirs pour les scènes dans le British Museum. Il était en effet impossible de tourner sur les lieux même à cause du manque de lumière. Il prit donc des photos en pause longue et s’en servit comme fond.

* Hitchcock a toujours dit avoir conçu une fin différente qui aurait été le miroir de la scène du début : la jeune fille se fait arrêter et les policiers discutent en se lavant les mains « tu vois ta petite amie, ce soir ? » « Ah non, ce soir, je rentre chez moi tour seul ». Les producteurs ne voulurent pas de cette fin jugée trop triste et préférèrent une fin (assez immorale) en happy-end.

Hitchcock's Blackmail
Anny Ondra, actrice autrichienne, était dotée d’un accent bien trop fort pour dire elle-même le texte. Elle mime donc les paroles pendant que Hitchcock écoute avec attention l’actrice Joan Barry placée dans une cabine insonorisée à part (la technique du doublage à postériori ne sera mise au point que quelques années plus tard).

Blackmail
Le caméo d’Hitchcock dans Blackmail est l’un des plus célèbres (et des plus longs) de sa filmographie : Alfred Hitchcock, John Longden, et Anny Ondra (et le petit garçon espiègle qui va embêter le gentil monsieur).

Blackmail
La célèbre scène finale sur le toit du British Museum dans Chantage de Alfred Hitchcock.

Homonymes :
Chantage (Blackmail) de H.C. Potter (1939) avec Edward G. Robinson
Blackmail de Lesley Selander (1947) avec Adele Mara et Ricardo Cortez

14 février 2017

Le Chien des Baskerville (1959) de Terence Fisher

Titre original : « The Hound of the Baskervilles »

Le Chien des BaskervilleEn l’an 1790, Sir Hugo Baskerville, un aristocrate cruel, est attaqué par un énorme chien alors qu’il vient de poignarder une paysanne sur la lande. De là naît la légende du chien des Baskerville. Plusieurs décennies plus tard, Charles Baskerville meurt sur la lande dans des circonstances mystérieuses. Son neveu, Sir Henry hérite du domaine familial. Le détective Sherlock Holmes est contacté pour veiller sur lui… Le Chien des Baskerville de Terence Fisher est la deuxième grande adaptation du célèbre roman de Conan Doyle. Cette version prend quelques libertés par rapport au roman, sans le dénaturer toutefois. Le film étant issu des studios Hammer, on peut s’attendre à ce que le côté terrifiant soit développé mais il n’en est rien. Même l’apparition de la bête ne fait pas frémir. Le film est plutôt remarquable par son atmosphère, vraiment inquiétante, due à la précision du scénario, au jeu des acteurs et à leur forte présence. Le film joue beaucoup plus sur les nuances que sur le démonstratif. C’est sans doute pour cette raison que le film a plutôt déçu les amateurs des films de la Hammer et les suites prévues ne furent pas mises en chantier. Aujourd’hui, il est mieux considéré. A juste titre.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Peter Cushing, André Morell, Christopher Lee, John Le Mesurier
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Le Chien des Baskerville
André Morell (Watson) et Peter Cushing (Sherlock Holmes) dans Le Chien des Baskerville de Terence Fisher.

Le Chien des Baskerville
Peter Cushing (Sherlock Holmes) et Christopher Lee (Sir Henry Baskerville) dans Le Chien des Baskerville de Terence Fisher.

Les plus grandes adaptations du roman à l’écran :
1. Le Chien des Baskerville (The Hound of the Baskervilles) de Sidney Lanfield (USA 1939) avec Basil Rathbone, Nigel Bruce et Richard Greene
2. Le Chien des Baskerville (The Hound of the Baskervilles) de Terence Fisher (UK 1959) avec Peter Cushing et Christopher Lee
3. Priklyucheniya Sherloka Kholmsa i doktora Vatsona: Sobaka Baskerviley d’Igor Maslennikov (TV russe, 1981) avec Vasiliy Livanov et Nikita Mikhalkov
4. The Hound of the Baskervilles de Douglas Hickox (TV UK, 1983) avec Ian Richardson et Denholm Elliott
5. The Hound of the Baskervilles de Brian Mills (TV UK, 1988) avec Jeremy Brett et Edward Hardwicke
6. The Hound of the Baskervilles de Dave Attwood (TV UK, 2002) avec Richard Roxburgh et Ian Hart

22 décembre 2016

Gone Girl (2014) de David Fincher

Gone GirlNick Dunne signale la disparition de sa femme Amy, auteur connue de livres pour enfants. Les médias s’emparent de l’affaire, des zones d’ombre apparaissent. Une affaire qui va devenir de plus en plus étrange… Gone Girl est l’adaptation de l’excellent roman homonyme de Gillian Flynn (Les Apparences en français). Le film est très fidèle au livre, ce qui n’est guère étonnant quand on sait que c’est l’auteure elle-même qui en a écrit l’adaptation. C’est indéniablement le scénario qui fait la force de ce thriller. L’apport de David Fincher semble plus mineur mais il sait trouver le ton juste avec une réalisation simple, sans esbroufe, servie par la bonne interprétation de Ben Affleck. L’histoire met à mal l’image du couple parfait, fustige les médias, met en relief les défauts d’une société trop souvent basée sur les apparences. Comme dans le livre, la fin (ou devrais-je dire l’absence de fin ?) est surprenante ; elle n’en est que plus terrifiante.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Ben Affleck, Rosamund Pike, Neil Patrick Harris, Tyler Perry, Carrie Coon, Kim Dickens
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Remarques :
Gone Girl est le premier long métrage tourné avec des caméras numériques 6K. (En vidéo, les termes 2K, 4K, 6K, 8K indiquent la largeur en nombre de pixels avec K=1024 : la caméra utilisée ici capte des images en 6144 x 3160 soit presque 20M de pixels. On estime généralement que le 35mm classique équivaut en qualité à 12M de pixels, donc proche du 4K. Au-delà, les différences vont être de plus en plus difficiles à détecter, du moins pour un œil humain.)

Gone Girl
Ben Affleck et Rosamund Pike dans Gone Girl de David Fincher.