26 avril 2014

Les Hommes de la mer (1940) de John Ford

Titre original : « The Long Voyage Home »

Les hommes de la merAprès une escale aux Antilles, le cargo Glencairn embarque une cargaison d’explosifs pour leur faire traverser l’Atlantique jusqu’en Angleterre alors en guerre… Les Hommes de la mer est adapté de quatre pièces d’Eugene O’Neill (1) mises presque bout à bout dans un même récit par Dudley Nichols. Assez curieusement pour un film traitant des marins, Les Hommes de la mer se déroule entièrement dans des lieux clos et resserrés, le plus souvent de nuit, avec une atmosphère assez lourde (les amateurs de grands espaces seront donc certainement déçus). Ce n’est pas en effet la mer qui intéresse John Ford mais plutôt la fatalité qu’elle génère pour ces marins qui sont condamnés à errer de vieux rafiots rouillés en vieux rafiots rouillés. On retrouve donc ici ce thème de l’errance que l’on retrouve dans beaucoup des films de John Ford, l’absence ou la perte de port d’attache. Le propos est assez sombre, presque cruel. Ce sentiment est renforcé par la photographie très contrastée et superbe de Gregg Toland qui a utilisé des éclairages très puissants. Dans certains plans, l’utilisation de l’ombre et de la lumière est époustouflante. Les Hommes de la mer ne fait pas partie des films les plus cités de John Ford. Il n’a rien d’un film spectaculaire, il est d’une perception indéniablement moins immédiate que celui qui l’a précédé Les Raisins de la Colère et avec lequel il a nombreux points communs.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: John Wayne, Thomas Mitchell, Ian Hunter, Barry Fitzgerald, Ward Bond
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Remarques :
* Le film est précédé d’un court texte qui résume parfaitement le propos : « Avec leurs haines et leurs appétits, les hommes changent la face de la terre. Ils ne peuvent changer la mer. Les gens de mer ne changent jamais. Ils vivent dans un monde à part, solitaires, passent d’un vieux rafiot rouillé à un autre aussi délabré. »

* John interprète un marin suédois. Pour restituer un accent assez authentique, il a pris des cours avec la (très belle) actrice danoise Osa Massen.

(1) Les quatre pièces d’Eugene O’Neill à la base du scénario de Les Hommes de la mer :
Début du film : The Moon of the Caribees
La mort de Yank : Bound East for Cardiff
Smitty soupçonné de trahison : In the Zone
Fin du film : The Long Voyage Home
Ces quatre pièces ont été écrites et jouées aux alentours de 1916, leur action se situaient donc pendant la Première Guerre mondiale. C’est Dudley Nichols qui les a transposées dans cette Seconde guerre mondiale naissante. A noter que les quatre pièces avaient déjà été réunies sur scène en 1937 pour former One Act Plays of the Sea (Pièces en un acte sur la mer).

24 avril 2014

Like Someone in Love (2012) de Abbas Kiarostami

Like Someone in LovePour payer ses études, Akiko se prostitue sans que son petit ami le sache. Fatiguée et en période d’examens, c’est à contrecoeur qu’elle accepte d’aller passer la nuit chez un client à l’autre bout de Tokyo… Abbas Kiarostami ne peut plus tourner dans son pays, l’Iran. Après avoir réalisé son film précédent en Italie, il tourne Like Someone in Love au Japon : ainsi on ne pourra l’accuser de s’être trop occidentalisé, dit-il. C’est un film plus profond qu’il n’en a l’air. On peut considérer que la clé est dans le titre car c’est un film sur les faux-semblants, sur l’illusion. Cela commence dès le début où Akiko parle au téléphone à son petit ami (belle scène en fausse caméra subjective) et reste ensuite une constante dans tous les rapports de la jeune fille avec les autres personnages. Le client, professeur âgé, est bien entendu lui aussi dans l’illusion. Le petit ami est le seul personnage incapable du moindre faux semblant, mais il est rétrograde. Il symbolise le Japon ancien dans cette opposition sous-jacente entre deux faces du Japon. La forme du film est assez remarquable. Kiarostami joue avec les trompe l’oeil et les reflets (quel plan superbe quand ils repartent le lendemain matin, les reflets de deux ponts sur le pare brise dévoilant tour à tour un personnage ou l’autre !) et utilise à merveille les lieux clos et étroits : une bonne partie du film se déroule à l’intérieur d’une voiture (lieu que Kiarostami affectionne et maitrise parfaitement, on peut même parler de virtuosité). Like Someone in Love est un très beau film, seule la fin paraît maladroite.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tadashi Okuno, Rin Takanashi, Ryô Kase
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Remarques :
* La chanson Like Someone in Love est un classique du jazz qui a été écrit par Jimmy van Heusen et Johnny Burke pour la comédie musicale Belle of the Yukon de William A. Seiter (1944) avec Randolph Scott. Quelques mois plus tard, Bing Crosby l’a reprise pour en faire un hit. Dans le film de Kiarostami, c’est la version d’Ella Fitzgerald (1957) que l’on entend (de l’album du même nom chez Verve).
Peinture de Chiyoji Yazaki
* Le choix du tableau, objet d’une discussion sur les ressemblances, n’est pas anodin : il s’agit d’une peinture de Chiyoji Yazaki de 1900 « Training a Parrot » (= leçon à un perroquet). Yazaki est un peintre japonais qui a voyagé en Europe et aux Amériques. Influencé par les impressionnistes, il a introduit le style occidental de la peinture à l’huile au Japon. Donc, le tableau se place bien dans les deux lignes directrices du film : l’illusion (le perroquet) et l’opposition entre deux mondes, deux cultures.

23 avril 2014

La Bandera (1935) de Julien Duvivier

La banderaAprès avoir tué un homme, Pierre Gilieth s’enfuit à Barcelone où on lui vole tout son argent et ses papiers. Il s’engage dans la Légion espagnole, là où on ne lui posera aucune question sur son passé… La bandera est adapté d’un roman de Pierre Mac Orlan. Le sujet peut paraître assez conventionnel mais il est admirablement traité par Duvivier qui dirige là deux de ses acteurs fétiches : Jean Gabin et Robert Le Vigan. Son film a un petit aspect documentaire, nous montrant la vie des légionnaires envoyés en Afrique du Nord. On pourra reprocher au film son côté colonialiste, sentiment qui était assez courant à cette époque et n’a donc pas entravé la popularité du film (1). Le succès doit beaucoup à la remarquable mise en scène de Duvivier et la formidable présence de Jean Gabin qui interprète une fois de plus et avec panache un homme qui a fait de mauvais choix et en voit sa vie marquée à jamais. Le jeu des acteurs donne au film une indéniable force.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Annabella, Jean Gabin, Robert Le Vigan, Raymond Aimos, Pierre Renoir
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Remarque :
Le film a été tourné dans l’ex-zone espagnole du Maroc et également en studio. Des figurants ont été prêtés par l’armée espagnole, c’est-à-dire par … le Général Franco. A sa sortie, le film comportait même une dédicace au Général Franco, dédicace qui fut retirée au moment de la Guerre Civile espagnole qui éclata peu après.

(1) En revanche, lorsque La Bandera est ressorti à la fin des années cinquante, le film fut vivement critiqué pour la mise en avant d’un certain colonialisme.

21 avril 2014

Gengis Khan (1965) de Henry Levin

Titre original : Genghis Khan

Genghis KhanFils d’un chef de tribu mongol, Temüjin va réussir, après une enfance passée en esclavage, à unir les tribus mongoles pour aller conquérir, sous le nom de Gengis Kahn, la plus grande partie de l’Asie au début du XIIIe siècle… Genghis Kahn voulait avant tout être une grande fresque épique. La vérité historique n’était visiblement pas recherchée, les scénaristes ayant pris beaucoup de libertés pour créer un héros noble et sympathique. Le casting fait sourire : tous les acteurs principaux sont occidentaux, la très blonde Françoise Dorléac n’est guère crédible en princesse mongole mais la palme revient aux « chinois » James Mason, avec les yeux bridés et un accent caricatural, et Robert Morley qui semble vouloir jouer sur le registre de l’humour. L’égyptien/libanais Omar Sharif est le moins occidental du lot mais, même si on s’en rapproche un peu, on reste tout de même encore loin de la Mongolie. Plus gênant, l’acteur ne laisse à aucun moment entrevoir le charisme qui a certainement été nécessaire à Gengis Kahn pour s’allier tant de peuples. Les paysages sont assez beaux (le tournage a eu lieu en Yougoslavie) et les figurants fort nombreux dans les scènes de bataille ou dans la cité impériale.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Omar Sharif, James Mason, Eli Wallach, Françoise Dorléac, Stephen Boyd, Robert Morley
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Autres films sur Gengis Kahn :
Le Conquérant (The Conqueror) de Dick Powell (1956) avec John Wayne
Les Mongols (I Mongoli) de André de Toth (1961) avec Jack Palance
Mongol (2007) du russe Sergei Bodrov avec Tadanobu Asano.

20 avril 2014

Ocean’s Twelve (2004) de Steven Soderbergh

Ocean's TwelveTrois ans après le spectaculaire braquage du Bellagio à Las Vegas, Danny Ocean et ses associés sont retrouvés par l’homme qu’ils ont dévalisé qui leur ordonne de restituer le magot… Donner une suite à un film à succès est un exercice périlleux. Les motivations commerciales entrainent plus facilement vers la facilité que vers la qualité. Steven Soderbergh ne parvient pas vraiment à éviter cet écueil. Ocean 12 reste un thriller élégant mais la mise en place est un peu longue et la suite pas toujours très prenante. Les effets de camera sont un peu appuyés. Le plus notable est certainement cette façon qu’a Soderbergh de jouer avec la distanciation du spectateur : le personnage interprété par Julia Roberts doit se faire passer pour Julia Roberts afin d’accéder à un lieu et rencontre à son hôtel Bruce Willis qui joue… Bruce Willis (et non un personnage). Dans le même ordre d’idée, le personnage joué par Georges Clooney interroge ses comparses sur l’âge qu’ils lui donnent (à noter que George Clooney a alors 44 ans) et d’autre part, Soderbergh joue bien avec le fait que nous savons qu’ils vont réussir (puisque c’est un film) pour les placer dans une situation la plus bloquante qui soit quelques minutes avant la fin.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Brad Pitt, Catherine Zeta-Jones, George Clooney, Julia Roberts, Matt Damon, Vincent Cassel
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19 avril 2014

Les Habitants (1992) de Alex van Warmerdam

Titre original : « De noorderlingen »

Les habitantsNous sommes en 1960. Ce devait être le lotissement du bonheur, ce ne seront au final que quelques maisons plantées le long d’une rue qui ne mène nulle part. Tout autour, ce n’est qu’un vaste terrain vague à l’exception d’une petite forêt taillée au cordeau et très dense… Les Habitants a été écrit et réalisé par le hollandais Alex van Warmerdam, il s’agit de son second long métrage. Assez difficile à définir, Les Habitants est une comédie surréaliste empreinte d’un bel humour légèrement teinté de noir : insolite, baroque, fantaisiste, original, saugrenu,… tous ces adjectifs peuvent s’appliquer au film et, surtout, à ses personnages. Il y a de belles trouvailles, l’écriture est précise et on comprend aisément que la préparation ait nécessité de nombreux mois. Au-delà de l’humour, Alex van Warmerdam porte un regard sur notre faculté à vivre ensemble, il oppose le monde de l’enfance et le monde des adultes, ou plus exactement fait un parallèle entre les deux. Le réalisateur utilise l’excentricité pour mieux faire ressortir certains traits de caractère qui peuvent s’appliquer à tout un chacun. La photographie est assez belle, très épurée et aux couleurs vives. Les Habitants donne vraiment envie de découvrir les autres films de ce cinéaste néerlandais.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jack Wouterse, Annet Malherbe, Rudolf Lucieer, Loes Wouterson
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Remarques :
* Le réalisateur Alex van Warmerdam interprète le facteur.
* Fat Willy (l’homme à la mobylette) est interprété par Theo Van Gogh, arrière petit-fils du frère du peintre, réalisateur polémiste qui a été assassiné en 2004 par un extrémiste musulman.
* Les habitants est sorti en avril 1992 aux Pays-Bas mais seulement en septembre 1995 en France. Le film a bénéficié d’une nouvelle sortie en copie numérique fin 2012.

18 avril 2014

Au-delà des collines (2012) de Cristian Mungiu

Titre original : « Dupa dealuri »

Au-delà des collinesAlina rend visite à sa grande amie Voichita. Elles ont grandi ensemble à l’orphelinat. Alina espère convaincre Voichita de quitter le petit couvent où elle est devenue nonne… L’histoire de Au-delà des collines est tirée d’un fait divers qui a ébranlé la Roumanie en 2005. Cristian Mungiu s’est inspiré de deux livres écrits par Tatiana Niculescu sur les faits et le procès qui a suivi pour élargir le propos et dresser le portrait de son pays qui sort difficilement de plusieurs décennies de communisme. Le résultat est assez remarquable car, malgré une certaine austérité, le film nous captive par la force de ses personnages et cette situation extrême d’amour impossible : les quelque 2h30 semblent passer rapidement. La perfection de la mise en scène et l’interprétation y sont certainement pour beaucoup. Le contexte de fanatisme religieux pèse de tout son poids, jusqu’à certains extrêmes, faisant alors presque basculer le film dans un autre registre et laissant le spectateur assez suffoqué par l’issue (du moins, le spectateur qui, comme moi, a l’avantage de n’avoir rien lu sur le film avant de le regarder).
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Cosmina Stratan, Cristina Flutur, Valeriu Andriuta
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17 avril 2014

Une vie de chien (1918) de Charles Chaplin

Titre original : « A Dog’s Life »

Une vie de chien(Court métrage, 3 bobines, 33mn) Après avoir dormi dans un terrain vague, Charlot essaie en vain de trouver du travail. Il prend la défense d’un petit chien errant et ils deviennent inséparables… Une vie de chien est le premier film de Chaplin pour la First National. C’est aussi le premier film dans son tout nouveau studio de La Brea. Par rapport aux films de la Mutual, Chaplin franchit un pas. Louis Delluc dira de ce film que c’est « la première oeuvre d’art complète du cinéma ». En effet, Une vie de chien préfigure Le Kid de façon étonnante : Chaplin joue toujours sur le registre burlesque mais il prend, plus que jamais, la défense des laissés pour compte. Son personnage n’est pas à proprement parler un marginal, il désire s’insérer dans la société mais n’y parvient pas. Ce contenu social ne l’empêche pas de placer de très nombreux gags : il faut le voir échapper à un policeman, ingurgiter en catimini les beignets du marchand ambulant, la scène la plus mémorable étant celle où après avoir assommé un voleur, il passe les mains sous ses aisselles pour parler par gestes au complice assis en face. Un petit bijou.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Charles Chaplin, Edna Purviance, Bud Jamison, Albert Austin, Tom Wilson
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Remarques :
* Fin 1917, Charlie Chaplin a signé à la First National pour 8 films de 2 bobines à réaliser en 16 mois. De plus en plus perfectionniste, allongeant la durée de ses films, il lui faudra plus de 4 années pour venir à bout de son engagement. C’est grâce à ce contrat que Chaplin a pu faire construire son propre studio, sur La Brea Avenue dans un champ de citronniers… (Voir l’emplacement actuel sous Google Maps… aujourd’hui, ce sont les locaux de la Jim Henson Co. et le quartier est passablement plus construit…)

16 avril 2014

Witness (1985) de Peter Weir

Titre français parfois utilisé : « Témoin sous surveillance »

Witness: Témoin sous surveillanceDe passage dans la gare de Philadelphie, un enfant de la communauté Amish est témoin du meurtre d’un homme. Lorsqu’il découvre que des policiers sont impliqués, l’inspecteur John Book (Harrison Ford) doit se réfugier chez les Amish… Pour son premier film américain, on peut dire que l’australien Peter Weir a réussi un coup de maître : tout en adoptant l’enveloppe très hollywoodienne d’un film policier, il a su conserver une approche toute personnelle et son attrait pour les civilisations perdues ou isolées. L’idée de départ toutefois est celle du producteur Edward S. Feldman qui eut bien du mal à imposer son projet (1). L’intrigue policière est rapidement délaissée pour se concentrer sur cette communauté Amish qui vit de manière identique depuis le XVIIIe siècle. L’approche de cette vaste communauté puritaine et austère est très respectueuse, nous montrant une partie de son fonctionnement et la formidable entraide entre ses membres (superbe scène de la construction d’une grange). Leur non violence est tout en contraste avec celle du monde extérieur mais l’approche de Peter Weir n’est aucunement manichéenne : il met en parallèle plus qu’il n’oppose. Witness, c’est aussi l’histoire d’un amour impossible. Harrison Ford est remarquable. L’acteur sortait de plusieurs films à succès (Star Wars, Indiana Jones) qui l’enfermaient dans un certain type de rôles. Witness lui a permis de prouver qu’il pouvait interpréter des rôles d’une certaine profondeur. Sa présence a certainement contribué au succès populaire du film. Face à lui, Kelly McGillis montre beaucoup de sensibilité avec un visage presque angélique. Witness fut un très grand succès. Même s’il n’y a plus aujourd’hui cet aspect de la découverte d’une communauté étonnante, Witness est, trente ans plus tard, toujours aussi enthousiasmant.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Harrison Ford, Kelly McGillis, Lukas Haas, Alexander Godunov, Danny Glover
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Remarques :
* Lukas Haas, âgé de 8 ans au moment du tournage, a maintenant presque 40 ans et plus de 80 films à son actif.
* La communauté Amish n’a pas trop apprécié être propulsée ainsi sur le devant de la scène, estimant que le film donnait d’eux une image fausse. En outre, ils ont du faire face à un afflux de curieux.

(1) Initialement, Edward S. Feldman a proposé le projet à la Fox qui lui a répondu que la Fox ne faisait pas de « rural movies ». Le projet a ensuite plus ou moins fait le tour de tous les studios avant d’être accepté in extremis par la Paramount.

14 avril 2014

La fureur de vivre (1955) de Nicholas Ray

Titre original : « Rebel Without a Cause »

La fureur de vivreLe jeune Jim Stark est arrêté pour ivresse au beau milieu de la nuit. Au policier psychologue pour adolescents qui l’interroge, il se désole du manque d’autorité de son père… Des trois grands films de James Dean, La fureur de vivre est le plus emblématique, celui qui a, plus que les autres, créé le mythe attaché à l’acteur. En ce milieu des florissantes années cinquante, toute une jeunesse en butte à des parents incapables de les comprendre s’est identifiée à ce personnage de « rebelle sans cause ». On peut même dire que cette identification a continué de fonctionner sur plusieurs générations, de façon plus ou moins diffuse. Ce qui étonnant, c’est qu’en réalité Jim Stark ne rejette pas vraiment l’image du père, il la cherche plutôt : il reproche au sien le manque d’autorité, son incapacité à lui dire comment il se doit se comporter pour être « un homme ». La petite bande de durs qui attire ces jeunes en manque de repères a, quant à elle, franchi nettement la ligne de la délinquance. Le propos semble donc plus s’adresser aux parents qu’aux enfants, leur intimant d’être présents et de se comporter comme des parents. Si le film est devenu emblématique d’une génération mal comprise, ce n’est donc pas tant par le fond du propos mais par l’angle de vue adopté par Nicholas Ray : de façon très inhabituelle pour l’époque, il adopte en effet le point de vue des jeunes et les parents sont sur le banc des accusés. Le lyrisme de Nicolas Ray donne une indéniable force au film, même si la théâtralité peut paraître excessive. Le clou est bien entendu la scène ultra célèbre de la course de voitures sur la falaise, face au vide. La photographie est assez belle avec une utilisation de la lumière qui évoque par moments l’expressionnisme et une belle utilisation de la couleur (superbe idée du blouson rouge). Le jeu des trois acteurs principaux est très juste : contrairement à ses autres films, le jeu de James Dean ne paraît excessif à aucun moment. La fureur de vivre continue de bénéficier d’une très forte aura. Ce n’est pas le meilleur film de Nicholas Ray mais c’est en tous cas (et de loin, hélas pour ses autres films) son plus grand succès populaire.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: James Dean, Natalie Wood, Sal Mineo
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Remarques :
* Dennis Hopper, âgé alors de 19 ans à peine, tient le rôle de Goon (à noter que William Hopper, qui tient le rôle du père de Natalie Wood, n’a aucun lien de parenté avec lui).
* Sal Mineo, qui interprète Platon, est âgé de 16 ans au moment du tournage, Natalie Wood 17ans alors que James Dean a déjà 24 ans. Le film est sorti un mois après sa mort.
* La scène d’ouverture, pendant le générique, (James Dean au sol jouant avec le petit singe mécanique) n’était pas écrite. Elle a été improvisée par James Dean.
* Le scénario prévoyait une première scène où l’on voyait un père de famille se faire agresser par une bande de mauvais garçons. Pendant l’agression, il laissait tomber ses paquets de Noël dont un petit singe mécanique. Jugée trop violente par les studios, la scène fut coupée.
* Dans le plan final, l’homme qui marche vers l’entrée du planétarium est Nicholas Ray.