5 juin 2012

Beginners (2010) de Mike Mills

BeginnersA 38 ans, Oliver vient de perdre son père, ce qui laisse un grand trou dans sa vie. Il se remémore les cinq dernières années passées avec lui, depuis que son père avait déclaré, à l’âge de 75 ans, qu’il était homosexuel. Oliver rencontre une jeune actrice mais il a bien du mal à se départir d’une certaine tristesse… L’histoire de Beginners peut paraître improbable ou exagérée, c’est néanmoins celle de Mike Mills qui signe ici son second long métrage. On se laisse gagner peu à peu par la richesse de cette histoire autobiographique d’un fils qui redécouvre son père et qui s’en trouve d’autant plus déstabilisé. C’est deux (voire trois) histoires que nous suivons en parallèle bien que séparées par plusieurs années. Mike Mills parvient à donner beaucoup de profondeur à son film. Il est interprété avec beaucoup de délicatesse par Ewan McGregor, Christopher Plummer (oscarisé pour ce rôle) et Mélanie Laurent, remarquable trio.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Ewan McGregor, Christopher Plummer, Mélanie Laurent, Goran Visnjic
Voir la fiche du film et la filmographie de Mike Mills sur le site IMDB.

24 mai 2012

Essential Killing (2010) de Jerzy Skolimowski

Essential KillingTraqué et capturé par les forces américaines, un afghan est envoyé dans un centre de détention secret en Europe de l’Est. Lors d’un transfert, un accident lui donne l’occasion de s’échapper. Il s’enfuit dans les immenses forêts enneigées… Avec Essential Killing, le réalisateur polonais Jerzy Skolimowski nous livre un film étonnant sur un homme traqué, une chasse à l’homme dont les forces sont bien inégales. Jerzy Skolimowski ne prend pas parti, ce n’est pas un film politique. D’ailleurs, rien ne montre que l’homme soit un Taliban, un terroriste, ni même seulement un militant. C’est seulement un homme traqué, diminué (une explosion lors de sa capture l’a rendu sourd), qui a des chances minimes de s’en sortir ou même de survivre. Il va aller jusqu’aux extrêmes de la résistance humaine. Il perd même le lien avec son passé qui devient diffus dans son esprit. Dans cette lutte pour la survie, c’est l’instinct animal qui prévaut. Le réalisateur a choisi Vincent Gallo car il le savait parfait pour exprimer cette animalité. Il fait ici une très belle performance. La mise en scène est remarquable. L’image est soignée avec des mouvements de caméra assez amples ; quelques scènes en caméra subjective sont en revanche volontairement plus heurtées. Il n’y a que peu de paroles intelligibles et la musique est superbement utilisée. Essential Killing est un film comme en voit peu.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Vincent Gallo, Emmanuelle Seigner
Voir la fiche du film et la filmographie de Jerzy Skolimowski sur le site IMDB.
Voir les autres films de Jerzy Skolimowski chroniqués sur ce blog…

Remarque :
Les superbes paysages du début du film n’ont pas été filmés en Afghanistan mais en Israël, dans les déserts proches de la Mer Morte.

21 mai 2012

Animal Kingdom (2010) de David Michôd

Animal KingdomA la mort de sa mère, le jeune Joshua (17 ans) est hébergé par sa grand-mère Janine dont il avait été tenu à l’écart jusqu’à présent. Celle-ci vit avec ses trois fils avec lesquels elle entretient une relation étroite. Tous trois sont, avec un ami, des gangsters spécialisés dans les attaques de banque… Pour son premier long métrage, l’australien David Michôd a écrit cette histoire qui prend place dans le Melbourne des années quatre-vingt. Il parvient à donner une grande dimension à ses personnages en les dotant d’une complexité et d’une ambivalence peu commune. Le personnage de la mère, étonnante matriarche sexagénaire, est sur ce point représentatif : débordante d’affection (avec même une certaine tendance incestueuse), elle apparaît comme une femme que nous pourrions côtoyer avec plaisir. Pourtant, elle est aussi une implacable chef de clan. La mise en scène David Michôd est très lyrique, avec une large utilisation de la musique. Animal Kingdom ressemble ainsi à une grande tragédie où les personnages se débattent avec leur destin.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: James Frecheville, Jacki Weaver, Ben Mendelsohn, Guy Pearce, Joel Edgerton, Luke Ford, Sullivan Stapleton
Voir la fiche du film et la filmographie de David Michôd sur le site IMDB.

Remarque :
Grand Prix du Jury à Sundance 2010.

19 mai 2012

Au fond des bois (2010) de Benoît Jacquot

Au fond des boisEn 1865, un jeune vagabond reçoit l’hospitalité chez un docteur et sa fille dans un petit village de l’Ardèche. L’homme semble avoir un étrange pouvoir de magnétisme sur les objets et les personnes… Basé sur les écrits de l’historienne Marcella Iacub, Au fond des bois nous entraîne dans une histoire où la nature tient une grande place. L’animalité des personnages est également très présente. Mais c’est surtout un film sur la manipulation, qui est rendue d’autant plus prégnante par le choix des acteurs, notamment de Nahuel Pérez Biscayart avec ses yeux globuleux et son regard troublant. L’histoire a cependant bien du mal à se développer et la répétition de certaines scènes devient pesante. La réalisation est parfaite et on remarque également la belle musique de Bruno Coulais. Au fond des bois a le mérite d’être original et déroutant mais cela ne le rend pas pour autant intéressant.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Isild Le Besco, Nahuel Pérez Biscayart, Jérôme Kircher, Mathieu Simonet
Voir la fiche du film et la filmographie de Benoît Jacquot sur le site IMDB.

Voir les autres films de Benoît Jacquot chroniqués sur ce blog…

15 mai 2012

Avant l’aube (2011) de Raphaël Jacoulot

Avant l'aubeLe jeune Frédéric est en stage de réinsertion dans un luxueux hôtel isolé dans les montagnes pyrénéennes enneigées. Sans le vouloir, il comprend que le patron de l’hôtel cache le fait que son fils a percuté mortellement l’un des clients… Avant l’aube est le deuxième long métrage de Raphaël Jacoulot. Cet étrange rapprochement entre une famille bien bourgeoise et un jeune au passé trouble n’est pas sans rappeler Chabrol. Il est original pour au moins deux raisons : d’abord une belle utilisation des splendides décors enneigés des Hautes-Pyrénées, cette neige qui elle aussi cache et se fait complice, et ensuite, la relation étroite qui se noue entre le patron de l’hôtel (Jean-Pierre Bacri) et son employé (Vincent Rottiers). La complicité muette évolue en une relation de plus complexe, avec d’un côté un père déçu par son fils et de l’autre un enfant qui n’a jamais eu de père. Le rythme, très lent dans la première moitié, s’accélère peu à peu. Avant l’aube n’est pas un film parfait, il y a beaucoup d’imprécisions, mais il est porté par une atmosphère et même une délicatesse qui le rend assez attirant.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean-Pierre Bacri, Vincent Rottiers, Ludmila Mikaël, Sylvie Testud
Voir la fiche du film et la filmographie de Raphaël Jacoulot sur le site IMDB.

Remarque :
Les dialogues sont hélas assez souvent à la limite de l’intelligible.

5 mai 2012

Greenberg (2010) de Noah Baumbach

GreenbergProfitant de la maison de son frère parti avec sa famille à l’autre bout du monde, Roger Greenberg revient de New York passer quelque temps à Los Angeles pour musarder quelque peu. Il rencontre Florence qui travaille chez son frère comme assistante personnelle… Production à petit budget, Greenberg est une comédie mélancolique, vaguement existentielle. Si la base de départ est intéressante, le film pêche par son manque de consistance, les personnages n’ayant finalement que bien peu de profondeur. On reste au niveau de la simplicité. Le parallèle entre Roger et Florence, deux personnages censés se ressembler malgré une génération de différence, n’est guère convaincant. Ben Stiller, que l’on a l’habitude de voir dans des rôles simples et comiques, peine à apporter un peu de complexité dans son jeu. Greta Gerwig, dont la prestation a enchanté les critiques, montre pourtant ses limites dans les scènes qui auraient mérité une certaine intensité. De l’intensité, le film n’en a d’ailleurs à aucun moment.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Ben Stiller, Greta Gerwig, Rhys Ifans
Voir la fiche du film et la filmographie de Noah Baumbach sur le site IMDB.

20 avril 2012

Somewhere (2010) de Sofia Coppola

SomewhereJohnny Marco, acteur célèbre, réside à l’hôtel Château Marmont à Hollywood. Seulement tenu à faire quelques rares apparitions pour la promotion de son dernier film, il ne sait pas quoi faire de ses journées. Son ex-femme lui demande de s’occuper de sa fille de 11 ans pendant quelques jours… Somewhere est presque une expérience cinématographique : pour nous faire toucher du doigt, le vide profond de la vie cet acteur, Sofia Coppola dépouille son film de tout récit et allonge des scènes où il ne se passe rien. On a l’impression d’atteindre un point ultime : nous sommes au-delà du minimalisme, on ne pourra sans doute pas aller plus loin dans la création du vide. Son personnage est plutôt un peu dépressif mais sans l’être vraiment : non, il n’est tout simplement rien, une simple marionnette que l’on utilise. Comme on le sait, Sofia Coppola s’inspire de sa propre enfance, de son propre ressenti mais cela ne rend pas le film plus intéressant pour cela, mais nombriliste, certainement… Du côté de la photographie, rien de remarquable non plus, du moins pour nous sauver de l’ennui.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Stephen Dorff, Elle Fanning
Voir la fiche du film et la filmographie de Sofia Coppola sur le site IMDB.
Voir les autres films de Sofia Coppola chroniqués sur ce blog…

15 avril 2012

The Artist (2011) de Michel Hazanavicius

The ArtistA Hollywood à la fin des années vingt, la star du cinéma muet George Valentin refuse de croire à l’avènement du cinéma parlant. La jeune et pétillante Peppy Miller y croit et sa célébrité ne fait que grandir… The Artist est avant tout un pari audacieux : il faut oser réaliser en 2011 un film muet, en noir et blanc, en format 4:3 et filmé en focales fixes (pas de zooms) (1). Michel Hazanavicius fait ainsi la symbiose entre le sujet et la forme ce qui rend déjà la démarche séduisante. La reconstitution est minutieuse, la photographie est remarquable avec un superbe travail sur l’éclairage et les contrastes pour faire un vrai noir et blanc. Par rapport à un vrai film muet de l’époque, la différence est surtout au niveau du jeu des acteurs (moins expressif) et le faible nombre d’intertitres (les films muets sont généralement bien plus « bavards »). Mais, cela n’empêche pas l’histoire d’être très compréhensible, ce qui témoigne de la réussite de l’ensemble. Le personnage joué par Jean Dujardin est très inspiré de Douglas Fairbanks. Le film comporte de nombreux clins d’œil cinématographiques. The Artist est un bel hommage à ces grandes années du cinéma à Hollywood, même s’il donne une vision faussée, ou au moins réductrice, du cinéma de cette époque. The Artist est aujourd’hui le film français le plus primé de toute l’histoire du cinéma, il est allé chasser sur les terres américaines avec succès. C’est incontestablement une belle réussite.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jean Dujardin, Bérénice Bejo, John Goodman, James Cromwell, Penelope Ann Miller
Voir la fiche du film et la filmographie de Michel Hazanavicius sur le site IMDB.
Voir les autres films de Michel Hazanavicius chroniqués sur ce blog…

Remarques :
A noter la petite apparition de Malcom McDowell (le majordome assis à l’extérieur à qui parle Peppy lors de sa première audition).

(1) Le film muet précédent de grande ampleur est La dernière folie de Mel Brooks (Silent Movie) de Mel Brooks (1976) mais il s’agissait d’un film parodique et il était en couleurs et en format large.

13 avril 2012

Blanc comme neige (2010) de Christophe Blanc

Blanc comme neigeA la tête d’une concession de vente de voitures de luxe, Maxime voit sa vie basculer lorsque son associé meurt assassiné. Il se retrouve alors en prise directe avec une petite bande de malfrats qui semblent vouloir lui demander des comptes… Blanc comme neige est un film noir à la française. La première scène dans la neige et l’enchainement de catastrophes et de mauvais plans font penser à Fargo des Frères Coen mais le film de Christophe Blanc n’en a pas hélas les qualités. Son problème principal réside certainement au niveau du scénario : il est truffé d’incohérences et, dans son ensemble, l’histoire n’est guère passionnante. La mise en scène est plus convaincante, Christophe Blanc contrôle très bien son film et certaines scènes sont très réussies. L’interprétation est parfaite. Ces deux éléments sauvent le film.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: François Cluzet, Olivier Gourmet, Jonathan Zaccaï, Bouli Lanners, Louise Bourgoin
Voir la fiche du film et la filmographie de Christophe Blanc sur le site IMDB.

Homonyme :
Blanc comme neige de André Berthomieu (1948) avec Bourvil.

1 avril 2012

True Grit (2010) de Joel Coen et Ethan Coen

True GritFermement décidée à venger le meurtre de son père, une jeune adolescente de quatorze ans engage un vieux briscard de la chasse aux criminels, connu pour avoir du cran (grit en anglais) et la gâchette facile… True Grit est un roman de Charles Portis déjà adapté au cinéma en 1969 (1) que les frères Coen ont voulu rendre plus fidèlement en replaçant le récit à la première personne (la jeune fille). Mais surtout, ils le font dans la grande veine des westerns des années cinquante, redonnant un nouveau souffle au genre : personnages forts, longue traque, sentiments simples mais puissants, histoire simple mais prenante. Aux côtés de l’excellent Jeff Bridges, il faut noter la remarquable interprétation de la jeune Hailee Steinfeld, très convaincante de ce rôle de jeune fille très déterminée. Belle mise en scène des frères Coen, comme toujours.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Jeff Bridges, Hailee Steinfeld, Matt Damon, Josh Brolin
Voir la fiche du film et la filmographie de Joel Coen et Ethan Coen sur le site IMDB.
Voir les autres films des frères Coen chroniqués sur ce blog…

Remarques :
En ouverture et sur le générique de fin, et aussi en leitmotiv orchestré en cours de film, les frères Coen ont choisi le gospel Leaning on the Everlasting Arms, chanson bien connue au cinéma pour figurer largement dans le film de Charles Laughton La Nuit du Chasseur (The Night of the hunter, 1955), également un film sur une longue traque, mais d’un tout autre genre.

(1) Précédente adaptation :
True Grit (100 dollars pour un shérif) de Henry Hathaway (1969) qui valut un Oscar à John Wayne.