15 juillet 2021

Viendra le feu (2019) de Oliver Laxe

Titre original : « O que arde »

Viendra le feu (O que arde)Amador Coro a été condamné pour avoir provoqué un incendie. A sa sortie de prison, il retourne dans son village niché dans les montagnes de la Galice où vivent sa mère, Benedicta, et leurs trois vaches. Leurs vies s’écoulent, au rythme apaisé de la nature…
Viendra le feu est le troisième long métrage du franco-espagnol Oliver Lake, dont les parents sont originaires de Galice. On peut le voir comme un film très original sur le thème de la nature et du monde rural : l’essentiel est en effet constitué de bribes de vie dans l’environnement vallonné, humide et verdoyant de la Galice. On peut aussi être rebuté par l’opacité du récit (par exemple, l’incompréhensible scène d’ouverture) et sa lenteur. Rien ne sera dévoilé sur le personnage principal, le taiseux Amador, ce qui a toutefois le mérite d’écarter toute possibilité de porter un jugement. Les plans généraux sont de toute beauté. Oliver Laxe a utilisé des comédiens non professionnels : Amador Arias est garde-forestier dans la vraie vie.

Elle: 3 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Amador Arias, Benedicta Sánchez
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* Explication de la scène d’ouverture :
L’eucalyptus est un arbre envahissant, considéré par certains Galiciens comme pernicieux et nuisible. Il assèche les terrains et croît au détriment des plantes indigènes. Le film s’ouvre sur une scène où d’énormes engins détruisent impitoyablement les eucalyptus les uns après les autres, comme s’il s’agissait de tondre un gazon. Oliver Laxe explique : « Mais ils tombent soudain en arrêt devant un eucalyptus centenaire, immense, sans doute figés par sa noblesse, entre respect et effroi. C’est la nature qui retourne leur regard aux hommes. Elle les renvoie à leur propre petitesse, les questionne. Viendra le feu montre les derniers vestiges d’un monde rural en voie de disparition. Cette séquence d’ouverture de l’eucalyptus et celle finale de l’incendie sont deux mêmes mouvements symphoniques incarnant une nature à l’agonie. » (Extrait du dossier de presse)

Viendra le feu (O que arde)Amador Arias et Benedicta Sánchez dans Viendra le feu (O que arde) de Oliver Laxe.

20 juin 2021

Voyage à Yoshino (2018) de Naomi Kawase

Titre original : « Vision »

Voyage à Yoshino (Vision)Dans la forêt de Yoshino vit Tomo, garde forestier taciturne. Il habite à proximité de la vieille Aki, aveugle. Tous deux vivent simplement, en symbiose avec cette forêt. Un jour, ils voient arriver une Française, Jeanne, à la recherche d’une plante médicinale nommée « Vision ». Cette plante, qui n’apparaît que tous les 997 ans, serait apte à guérir l’homme de tous ses maux…
Après deux films tournés dans des décors urbains (Les Délices de Tokyo et Vers la lumière), Naomi Kawase revient à son sujet de prédilection, la nature. La réalisatrice japonaise a une vision mystique de la nature :
« La forêt a un pouvoir mystique et mystérieux. Lorsque l’on y pénètre, on peut perdre tout repère temporel et glisser vers le passé. […] J’ai voulu observer une nouvelle fois ce que nous apprend le fait d’être plongé dans la nature. Comme dans mes oeuvres précédentes, j’ai souhaité saisir les choses que l’on enfouit, perdues au fond de notre mémoire.»
Hélas, le propos est très simpliste, plus ésotérique que métaphysique ; la réalisatrice montre un attrait pour les sciences occultes et les pouvoirs cachés qui culmine dans un épilogue « explicatif » assez délirant. Il n’y a finalement que peu de contenu mais les images de nature sont très belles.
Elle: 1 étoile
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Juliette Binoche, Masatoshi Nagase, Takanori Iwata
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Remarque :
* La forêt de Yoshino (au centre-sud du Japon, à 50 kms d’Osaka) est un parc national japonais. Le parc a été créé en 1936 et couvre une surface de 597 km2. Son nom fait référence au Mont Yoshino, connu pour la floraison de ses cerisiers et qui fait partie des sites sacrés et chemins de pèlerinage dans les monts Kii, classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Voyage à Yoshino (Vision)Takanori Iwata dans Voyage à Yoshino (Vision) de Naomi Kawase.

5 mars 2019

Makala (2017) de Emmanuel Gras

MakalaUn jeune congolais se rend dans la brousse au pied d’un arbre monumental. Armé d’une simple hache, il entreprend de l’abattre. Ce n’est que le début de la tâche qu’il s’est assignée afin de pouvoir acheter des tôles ondulées pour renforcer son toit…
Réalisé par le français Emmanuel Gras, Makala est un documentaire scénarisé qui a de quoi frapper nos esprits occidentaux : on ressent un véritable choc de civilisations à sa vision, de ceux qui nous « recadrent ». Le cœur du film est centré sur le périlleux trajet du jeune homme, chargé de façon inimaginable, pour se rendre à la ville vendre sa production. Mais c’est là que le film d’Emmanuel Gras montre ses limites : il crée un suspense très fort autour de cette phase la plus spectaculaire alors qu’il a éclipsé toutes les semaines (mois?) de travail fastidieux qui précèdent. Certes, le réalisateur se situe dans la lignée de l’ethnofiction chère à Jean Rouch mais il pousse la scénarisation peut-être un peu loin. D’autre part, l’absence de tout commentaire rend certaines scènes un peu obscures. Cela ne signifie pas que son film manque d’intérêt, ne serait-ce que par les multiples questions qu’il suscite. Il a d’ailleurs reçu le Grand prix de la semaine de la critique au Festival de Cannes 2017.
Elle: 3 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Kabwita Kasongo
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Makala
Kabwita Kasongo dans Makala de Emmanuel Gras.

19 juin 2017

Le Sacrifice (1986) de Andreï Tarkovski

Titre original : « Offret »

Le Sacrifice(Exceptionnellement, le synopsis qui suit couvre tout le film car il est, à mon avis, préférable de le connaitre avant de voir de film) Ex-comédien célèbre, Alexandre s’est retiré avec sa famille pour vivre isolé sur une île au large des côtes suédoises. Le jour de son anniversaire, une guerre nucléaire mondiale est déclenchée. Alexandre fait le vœu à Dieu de renoncer à ce qui lui est le plus cher et de ne plus prononcer une parole si tout redevient comme avant. Le facteur, passionné des phénomènes paranormaux, lui conseille d’aller chez sa voisine qui est un peu sorcière (ou un ange, au choix) et qui saura exaucer son vœu. C’est le cas. Il détruit alors sa maison et sacrifie sa liberté… Le Sacrifice est l’ultime film d’Andrei Tarkovski qui décèdera hélas quelques mois plus tard. Il s’agit d’une longue parabole dont plusieurs aspects restent assez obscurs. Le premier tiers (avant le passage des bombardiers) m’a personnellement le plus enchanté : de longs monologues d’Alexandre qui s’interroge sur sa vie et son rapport à la société. Autant ses réflexions sont intéressantes, autant les autres personnages paraissent futiles, le cas le plus extrême étant sa femme, une anglaise nostalgique de la vie mondaine (qui symbolise certainement la futilité de notre monde moderne mais on peut se demander comment Alexandre a pu vivre tant d’années avec elle). Le reste m’a paru inutilement imagé et lent, disons qu’Alexandre doit éprouver lui-même sa capacité à désirer le bien. On peut ne pas partager l’attrait du réalisateur pour le paranormal (mais toute l’histoire n’est peut-être qu’un rêve, aucun indice ne permet de trancher). La spectaculaire scène finale est devenue l’un des plans-séquences les plus célèbres de Tarkovski. Le film est une production franco-suédoise (le réalisateur a quitté sa Russie natale pour la Suède), plusieurs acteurs sont doublés, y compris la française Valérie Mairesse qui est plutôt inattendue dans un tel film. Le Sacrifice est, en tous cas, visuellement très beau.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Erland Josephson, Susan Fleetwood, Allan Edwall, Sven Wollter, Valérie Mairesse
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Remarques :
* Tarkovski fait un hommage appuyé à Bergman : Erland Josephson est l’un des acteurs fétiches de Bergman ; Sven Nykvist, le directeur de la photographie attitré de Bergman, est derrière la caméra ; les décors sont signés Anna Asp, oscarisée pour les décors de Fanny et Alexandre ; le tournage a eu lieu sur l’île de Gotland où Bergman a tourné plusieurs de ses films ; pour couronner le tout, Daniel Bergman, fils du réalisateur, est un assistant.

* Bergman n’aimait pas vraiment le film, disant en quelque sorte que Tarkovski avait surtout fait du Tarkovski.

* Le Sacrifice a été sélectionné par le Vatican dans la catégorie « Religion » de sa liste de « 45 grands films ».

 

Le Sacrifice
Allan Edwall, Erland Josephson, Filippa Franzén et Susan Fleetwood dans Le Sacrifice de Andrei Tarkovski.

Le Sacrifice
Tournage de la scène finale de Le Sacrifice de Andrei Tarkovski. (Il s’agit vraisemblablement de la première prise car la fumée est bien plus verticale que dans le film. La caméra s’étant enrayée au beau milieu du plan-séquence, la maison a en effet été reconstruite pour faire une seconde prise.)

Le Sacrifice
La maison et sa miniature dans Le Sacrifice de Andrei Tarkovski.

20 juillet 2012

L’arbre (2010) de Julie Bertuccelli

Titre original : « The Tree »

L'arbrePeter et Dawn vivent avec leurs quatre enfants dans le bush australien. La mort brutale de Peter met un terme à leur bonheur. Simone, la fillette, imagine que l’esprit de son père est passé dans le grand arbre qui domine la maison, un gigantesque figuier qui semble doté de vie… L’arbre est la chronique assez émouvante d’une famille frappée par un décès que Julie Bertuccelli a su filmer sans forcer le trait. Le film oscille entre le conte et le réalisme sans vraiment choisir, ce qui le prive de développer sa personnalité. On peut ainsi certainement reprocher au film de manquer un peu profondeur et aussi d’être un peu trop consensuel. Charlotte Gainsbourg trouve le ton juste pour interpréter ce rôle avec beaucoup de sensibilité.
Elle: 3 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Charlotte Gainsbourg, Morgana Davies, Marton Csokas
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