15 juillet 2012

Si douces, si perverses (1969) de Umberto Lenzi

Titre original : « Così dolce… così perversa »

Si douces, si perversesJean est un industriel parisien dont le mariage s’est affadi rapidement. Lorsque qu’une jeune femme emménage dans l’appartement situé juste au-dessus de celui du couple, il est intrigué et rapidement attiré par elle… Umberto Lenzi est un réalisateur italien qui a tourné de nombreux films de second ordre dans des genres très différents. Avec un titre très racoleur tel que Si douces, si perverses, il ne fait nul doute que nous sommes en plein dans le genre giallo (1) mais ce film-ci bénéficie à priori d’un bon casting. Il s’agit d’un film policier dont l’intrigue est fortement inspirée de Les Diaboliques (1955) de Clouzot (2). L’histoire n’est pas très bien traitée, le climat créé n’est pas très fort ; il ne faut surtout pas chercher à deviner ce qui va suivre car on y arrive un peu trop facilement. Le film utilise le charme de Carroll Baker et d’Erika Blanc avec tenues courtes (nous sommes en 69) et déshabillés vaporeux. On peut se demander ce que Trintignant (affublé d’un grand coup de soleil pendant tout le film) est venu faire ici. Le film n’est pas déplaisant en soi mais franchement anodin.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Carroll Baker, Jean-Louis Trintignant, Erika Blanc, Horst Frank
Voir la fiche du film et la filmographie de Umberto Lenzi sur le site IMDB.

Remarque :
Impossible d’avoir une version sans doublage : dans la version française, nous avons la voix de Trintignant mais les deux femmes sont doublées. Dans la version italienne, Trintignant et Caroll Baker sont doublés (sans compter que Horst Frank est allemand !)

(1) Le giallo est un genre cinématographique, essentiellement italien, qui eut son heure de gloire dans les années soixante et soixante-dix. Ce sont le plus souvent des films policiers teintés d’un peu d’érotisme avec parfois une dose d’horreur (« giallo » en italien signifie « jaune » et fait référence à la couverture d’une collection de romans policiers publiée par les éditions Mondadori).

(2) Il faut noter que Les Diaboliques est basé sur un roman de Boileau et Narcejac « Celle qui n’était plus », roman dont Alfred Hitchcock avait tenté d’acheter les droits. Or Umberto Lenzi tente ici de reproduire (entre autres) l’ambiance et la tension des films d’Hitchcock.

13 juillet 2012

La princesse de Montpensier (2010) de Bertrand Tavernier

La princesse de MontpensierEn 1566, à l’époque des guerres de religion sous la régence de Catherine de Médicis, Marie de Mezières aime depuis toujours Henri de Guise mais son père la contraint d’épouser le jeune et fade Prince de Montpensier. Lorsque son mari est appelé à la guerre, la princesse reste au château avec son précepteur, le comte de Chabannes… La princesse de Montpensier est une nouvelle de Madame de Lafayette sur la passion amoureuse que Bertrand Tavernier, grand féru d’Histoire, adapte ici brillamment. Il signe un film d’un grand classicisme, très beau, littéraire, mais aussi palpitant au gré de l’ardeur des sentiments, parfois haletant. Il y a beaucoup de fougue, avec un désir qui semble vouloir jaillir, exploser de toutes parts. Les dialogues sont remarquablement bien écrits, ils coulent joliment. A côté des belles prestations de Mélanie Thierry et de Lambert Wilson, Grégoire Leprince-Ringuet a un jeu plus fade mais c’est aussi son personnage qui veut cela. Les seconds rôles sont tous très bien tenus. La photographie est superbe exploitant magnifiquement des décors naturels de certains châteaux (1). Bertrand Tavernier montre que le film dit « à costumes » peut être moderne, enlevé, brillant.
Elle: 3 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Mélanie Thierry, Lambert Wilson, Grégoire Leprince-Ringuet, Gaspard Ulliel, Raphaël Personnaz, Michel Vuillermoz, Judith Chemla, Philippe Magnan
Voir la fiche du film et la filmographie de Bertrand Tavernier sur le site IMDB.
Voir les autres films de Bertrand Tavernier chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Le plan final, un plan moyen de Mélanie Thierry sur fond de neige, est de toute beauté.
* Tous les personnages sont historiques sauf, semble t-il, le comte de Chabannes qui aurait été imaginé par Madame de Lafayette.

(1) Lieux de tournage :
* Château du Plessis-Bourré, Écuillé (Maine-et-Loire) : le château entouré d’eau du Marquis de Mézières où vit Marie au début du film.
* Abbaye de Noirlac (Cher) : scène avec le Cardinal de Lorraine.
* Château de Messilhac, Raulhac (Cantal) : censé être le château de Champigny-sur-Veude, la demeure des Montpensier
* Château de Blois (Loir-et-Cher) : la cour censée être celle du Louvre, lors du duel entre Montpensier et De Guise.
* Palais Jacques-Cœur, Bourges (Cher)
* Rues de Chinon (Indre-et-Loire) : massacre de la Saint-Barthélemy.
* Château de Meillant (Cher) : le château censé être Blois tout à la fin, où s’entraine Henri de Guise.

12 juillet 2012

Dans ses yeux (2009) de Juan José Campanella

Titre original : « El secreto de sus ojos »

Dans ses yeuxEn 1974, à Buenos Aires, Benjamin Esposito enquête pour le parquet dans une affaire de viol suivi de meurtre d’une jeune femme. Vingt cinq ans plus tard, alors qu’il vient de prendre sa retraite, il décide d’écrire un roman sur cette affaire qui l’a marqué durablement… En adaptant un roman d’Eduardo Sacheri, l’argentin Juan José Campanella a réalisé un film policier d’un très beau classicisme. L’histoire de Dans ses yeux est rapidement prenante avec des personnages très proches de nous. Le film est une subtile combinaison, à la fois intimiste et spectaculaire, faisant même preuve parfois de grande virtuosité comme dans cet époustouflant plan-séquence du stade (1). Mais si le film fait montre de beaucoup de perfection, c’est probablement dans le déroulement du récit qu’elle est la plus manifeste, avec des ruptures qui relancent constamment notre intérêt et maintiennent une certaine tension. Dans ses yeux impressionne vraiment par sa réalisation et par son irréprochable dosage.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Ricardo Darín, Soledad Villamil, Guillermo Francella, Pablo Rago, Javier Godino
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(1) Le plan démarre par un vue aérienne en approche à 500 m d’un stade que l’on va survoler en rase-mottes alors que le match est en cours. La caméra continue au dessus des tribunes pour « atterrir » juste à côté du personnage principal. C’est époustouflant car aucune coupure n’est détectable. Et ce n’est pas fini car la scène continue par une course poursuite dans les couloirs, toujours sans changement de plan. En tout, ce plan, dont la réalisation est vraiment parfaite, dure 5 minutes ½.
Détails de réalisation sur le site CG Society (en anglais)…

11 juillet 2012

8 fois debout (2009) de Xabi Molia

8 fois deboutJeune femme instable, Elsa passe des entretiens d’embauche et fait des petits boulots au noir en attendant. Elle espère pouvoir regagner le droit d’avoir son fils de 10 ans. Elle rencontre Matthieu, son voisin de palier qui est dans la même situation qu’elle… Le titre est tiré d’un proverbe japonais « 7 fois à terre, 8 fois debout », ce qui laisse à penser que le film de Xabi Molia est plutôt optimiste. Ce n’est pas exactement le cas même si le ton reste assez léger. En fait, l’ensemble paraît être entre deux chaises. En outre, Xabi Molia a pris le parti de ne rien nous dire sur ses personnages. De ce fait, 8 fois debout peut nous apparaître comme un film un peu superficiel dont on reste plutôt en dehors. Julie Gayet est charmante (peut-être un peu trop pour le rôle d’ailleurs) mais cela ne suffit pas…
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Julie Gayet, Denis Podalydès, Mathieu Busson
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10 juillet 2012

La fiancée des ténèbres (1945) de Serge de Poligny

La fiancée des ténèbresA Carcassonne, un ancien instituteur octogénaire recherche dans de vieux manuscrits le moyen d’accéder au lieu secret des Cathares. Il espère ainsi faire renaître leur religion. Il a pour assistante une jeune fille qu’il a recueillie. Elle se croit victime d’une malédiction qui l’empêche d’aimer. Roland, un jeune compositeur en mal d’inspiration, est attirée par elle… Adaptation d’une nouvelle de Gaston Bonheur « La mort ne reçoit que sur rendez-vous » publiée en 1943, La fiancée des ténèbres illustre bien cette vogue du cinéma français sous l’Occupation pour les films fantastiques, sujets que l’on pouvait tourner sans crainte de sanctions. Il s’agit ici de faire revivre la légende cathare des Albigeois. Le tournage fut rendu difficile par le manque de moyens et la surveillance constante d’un officier allemand. On ne peut s’empêcher d’avoir l’impression que le résultat aurait pu être bien supérieur. Néanmoins, le film reste assez fort ; il parvient à distiller une certaine atmosphère qui nous rappelle celle des Visiteurs du Soir ou des films de Cocteau (1). Sorti après la Libération, La fiancée des ténèbres fut mal compris, toute la partie idyllique se déroulant à Tournebelle fut, semble t-il, plutôt mal perçue. Le film reste, assez injustement, aujourd’hui méconnu.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Pierre Richard-Willm, Jany Holt, Édouard Delmont, Fernand Charpin, Palau, Robert Dhéry, Simone Valère
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Remarque :
Jean Anouilh aurait participé à l’écriture de La fiancée des ténèbres pour une scène d’amour entre Sylvie et Roland.

(1) Jean Cocteau a d’ailleurs collaboré avec Serge de Poligny à l’écriture de son film précédent Le baron fantôme (1943) qui avec La fiancée des ténèbres constituent les deux films notables de ce réalisateur.

8 juillet 2012

Soul Kitchen (2009) de Fatih Akin

Soul KitchenAllemand d’origine grecque, Zinos Kazantsakis est propriétaire d’un petit restaurant appelé Soul Kitchen, dans une zone industrielle à Hambourg. C’est un ancien hangar qu’il a reconverti de ses propres mains. Le départ de sa petite amie pour la Chine et sa rencontre avec un cuisinier brillant mais un peu fantasque vont changer beaucoup de choses… Soul Kitchen n’est pas le troisième film de la trilogie commencée avec Head-on et De l’autre côté. C’est un film que Fatih Akin qualifie lui-même de « plus léger ». Il en a écrit le scénario avec son ami Adam Bousdoukos qui tient le rôle principal. Nous sommes dans l’univers de la débrouille mais aussi de l’amitié, de la complicité et des aventures qui peuvent se transformer en réussite humaine. Fatih Akin crée l’humour en jouant avec les obstacles et les revers. Même si le film pêche par quelques longueurs en son milieu, il se dégage de Soul Kitchen une chaleur qui rend le film attachant.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Adam Bousdoukos, Moritz Bleibtreu, Birol Ünel, Anna Bederke
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7 juillet 2012

Biutiful (2010) de Alejandro González Iñárritu

BiutifulPour permettre à ses enfants de survivre, Uxbal se livre à tout un tas de trafics dans les quartiers polyethniques de Barcelone, aidant des immigrés clandestins à travailler au noir, monnayant de prétendus talents de medium pour communiquer les dernières paroles de défunts. Il découvre qu’il est atteint d’une maladie grave… Contrairement aux précédents films d’Alejandro González Iñárritu, Biutiful est centré sur un seul personnage. Il l’a écrit pour Javier Bardem qui signe ici une belle performance qui ne parvient que partiellement à contrebalancer les excès de style du réalisateur. Très (trop) long, Biutiful est un film très noir dont le personnage semble devoir porter toutes dérives du monde. A vouloir trop en faire, Iñárritu nous détache et nous éloigne.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Javier Bardem, Maricel Álvarez, Hanaa Bouchaib, Eduard Fernández
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6 juillet 2012

Andreï Roublev (1966) de Andreï Tarkovski

Titre original : « Andrey Rublyov »

Andreï RoublevPour évoquer la vie du peintre Andreï Roublev, Tarkovski ne pouvait se baser sur des faits historiques puisque nous ne savons rien de la vie de ce moine russe du XVe siècle. Il s’est donc attaché à retranscrire l’âme du peintre. Il le fait en huit tableaux plus un prologue (1) et un épilogue où le film passe en couleurs pour nous montrer son œuvre (2). Il nous dépeint un Andreï Roublev tourmenté par l’idée de la vengeance du Jugement dernier, refusant ainsi l’image d’un Dieu implacable et même cruel, une idée qui aidait les seigneurs de cette époque à garder les paysans en semi-esclavage. En filigrane, Tarkovski nous fait partager ses propres interrogations sur le rôle de l’artiste sous un régime totalitaire, une lecture qui n’a pas échappé aux autorités et lui valu blocages et interdictions. Pour Andreï Roublev, Dieu ne peut qu’insuffler l’amour et ne peut que s’opposer à la cruauté omniprésente dans cette société du XVe siècle. Le film est superbe aussi dans sa forme, assez proche du cinéma d’Eisenstein. Certaines scènes sont d’une rare ampleur ; de nombreux plans sont superbes. Empreint d’un grand mysticisme, Andreï Roublev est un très beau film, puissant, profond et doté d’une grande énergie. (Film de 3h03)
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Anatoliy Solonitsyn, Ivan Lapikov, Nikolay Grinko, Nikolai Sergeyev
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Remarque :
Andreï Roublev Le scénario a été cosigné par Andreï Tarkovski et Andreï Konchalovsky.

(1) Le prologue reprend l’idée que le ballon à air chaud aurait été inventé en Russie bien avant les frères Montgolfier. Sauf que cette théorie attribue l’invention à Furvin Kryakutnoi en l’an 1731. Tarkovski va donc encore plus loin en créant une invention encore antérieure, au XVe siècle.
(2) Les icones montrées dans l’épilogue ne sont pas toutes d’Andreï Roublev mais datent toutes de son époque.

5 juillet 2012

Copacabana (2010) de Marc Fitoussi

CopacabanaLa cinquantaine pimpante, Babou est une femme un peu fantasque qui ne se conforme à aucune norme. Lorsque sa fille refuse de l’inviter à son mariage parce qu’elle lui fait honte, elle décide de travailler pour regagner l’estime de sa fille… Marc Fitoussi nous dresse un portrait de cette femme plutôt inconséquente, en apparence extravertie voire tapageuse avec son maquillage souvent outrancier, qui révèle une personnalité assez complexe en dehors de tous stéréotypes. C’est un rôle assez délicat que ce soit à l’écriture ou à l’interprétation, car il serait facile de forcer le trait et de jouer la surenchère. Il est admirablement tenu par Isabelle Huppert qui montre toute la sensibilité du personnage avec une aisance et un naturel époustouflant (on peut se demander s’il y a un type de rôle qu’Isabelle Huppert ne pourrait tenir!) Face à elle, sa fille est interprétée par… sa fille dans la vraie vie, Lolita Chammah. Même si on peut lui reprocher un petit excès d’optimisme voire d’angélisme, Copacabana est un beau portrait d’une « originale », réalisé avec justesse et sensibilité.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Isabelle Huppert, Aure Atika, Lolita Chammah, Noémie Lvovsky, Luis Rego
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4 juillet 2012

Le nom des gens (2010) de Michel Leclerc

Le nom des gensFille d’une militante radicale et d’un immigré algérien, la jeune et volubile Bahia a décidé de convaincre les « gens de droite » à ses idées en couchant avec eux. Elle rencontre Arthur qui a un tempérament tout à fait opposé, très mesuré dans tout ce qu’il fait… Qualifier Le nom des gens de comédie politique est certainement un peu exagéré ; disons qu’il s’agit d’un divertissement assez racoleur, doté de bonnes intentions et qui joue sur la surenchère et l’outrance pour créer l’humour. Michel Leclerc a typé ses personnages à l’extrême, à commencer par son héroïne jouée par Sara Forestier dont le jeu tonitruant peut lasser assez rapidement. Il y a bien quelques traits d’humour bien trouvés, souvent sur des petits détails, mais l’ensemble apparaît très inégal avec, pour seule cohérence, une ostensible légèreté plutôt forcée. Le plus inattendu est la participation de Lionel Jospin dans une scène qui apporte une surprenante bulle de civilité.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jacques Gamblin, Sara Forestier, Zinedine Soualem, Carole Franck, Jacques Boudet, Michèle Moretti
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