5 décembre 2013

Jack l’éventreur (1944) de John Brahm

Titre original : « The Lodger »

Jack l'éventreurAlors que le Londres de 1888 est secoué par une série de meurtres sanglants, un mystérieux Mr. Slade arrive dans une maison bourgeoise pour louer une chambre… Cette version de John Brahm est la troisième des cinq adaptations du roman de l’anglaise Marie Belloc Lowndes The Lodger, l’un des romans inspirés par les crimes en série de Jack l’éventreur. Le film est assez remarquable par sa photographie. John Brahm joue beaucoup avec les ombres et aussi les perspectives (1). L’atmosphère est ainsi rendue plus forte, notamment dans les scènes d’extérieurs avec des volutes de brouillard qui semblent flotter dans les ruelles. Jack l'éventreur Sur le plan de l’interprétation, le film est dominé par la présence de Laird Cregar, acteur à la carrure immense et imposante. C’est hélas son avant-dernier film puisque l’acteur décédera peu après(2). Les autres acteurs font pâle figure à ses côtés, y compris un George Sanders quasi-inexistant et une Merle Oberon sans éclat en chanteuse légère de music hall. Ses deux numéros sur scène sont vraiment de très mauvais goût. Les studios ont heureusement pris soin de distribuer de nombreux seconds rôles à des acteurs anglais. Malgré tout, ce Jack l’éventreur reste un film assez fort.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Merle Oberon, George Sanders, Laird Cregar, Cedric Hardwicke, Sara Allgood
Voir la fiche du film et la filmographie de John Brahm sur le site IMDB.

Voir les autres films de John Brahm chroniqués sur ce blog…

(1) L’une des scènes les plus remarquables est celle où Mrs Bonting fait boire son locataire dans un verre pour avoir ses empreintes. Le plan utilise l’éclairage de façon très prononcée et joue avec les perspectives dans une contre-plongée : Mrs Bonting semble alors bien petite et vulnérable face à son impressionnant locataire.
(2) Laird Cregar décédera d’une crise cardiaque à la fin de 1944. Il avait alors 31 ans. Il a figuré dans seulement 16 films, entre 1940 et 1944.

Les cinq adaptations du roman The Lodger à l’écran :
1. Les cheveux d’or (The Lodger) d’Alfred Hitchcock (UK, 1927) avec Ivor Novello
2. The Lodger de Maurice Elveny (UK, 1932)avec à nouveau Ivor Novello
3. Jack l’éventreur (The Lodger) de John Brahms (USA, 1944) avec Laird Cregar
4. L’Etrange Mr Slade (Man in the Attic) de Hugo Fregonese (USA, 1953) avec Jack Palance
5. Jack l’éventreur: The Lodger (The Lodger) de David Ondaatje (USA, 2009) avec Alfred Molina.
Nota : Il existe d’autres films intitulés Jack l’éventreur, ou mettant en scène le tristement célèbre meurtrier, mais ce ne sont pas des adaptations du même roman.

4 décembre 2013

Le locataire (1976) de Roman Polanski

Titre anglais : « The Tenant »

Le locataireTrelkovsky, un employé timide, emménage dans un petit appartement dont la précédente locataire s’est jetée par la fenêtre. Intrigué, il cherche à comprendre les raisons de son geste et fait ainsi la connaissance de son amie Stella… Le locataire est l’adaptation d’un roman de Roland Topor. Après Répulsion et Rosemary’s baby, c’est le troisième film que tourne Roman Polanski sur le thème des appartements maléfiques. Il parvient parfaitement à recréer une atmosphère étrange et dérangeante. L’angoisse et la paranoïa enflent, alimentées par un environnement hostile. Le film devient de plus en plus terrifiant. Ce climat est bien soutenu par la musique de Philippe Sarde qu’il interprète sur un instrument dérivé du rarissime Glassharmonica, ici un assemblage de quatre-vingts verres d’eau. Aux côtés de quelques acteurs américains, les seconds rôles sont tenus par toute une pléiade d’acteurs français.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Roman Polanski, Isabelle Adjani, Melvyn Douglas, Jo Van Fleet, Shelley Winters, Bernard Fresson, Jacques Monod, Claude Piéplu, Rufus, Romain Bouteille, Josiane Balasko, Michel Blanc, Gérard Jugnot, Bernard-Pierre Donnadieu
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Voir les autres films de Roman Polanski chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Tous les acteurs français sont doublés en anglais à l’exception, me semble t-il, de Jacques Monod.
* Si l’on connait Roland Topor surtout comme dessinateur, il a aussi écrit plusieurs scénarios et adaptations (il a notamment adapté La Planète Sauvage de René Laloux d’après Stefan Wul) et aussi quelques romans dont Le Nouveau Locataire.
* Le Glassharmonica est un instrument inventé par Benjamin Franklin en 1761 et composé originellement de bols en cristal de différentes tailles empilés sur un axe horizontal qui est mis en rotation. Après s’être mouillé les doigts, on frotte le bord des verres qui émettent alors un son limpide. Mozart a composé pour cet instrument.
* Une nouvelle adaptation (moyen métrage) du roman de Topor est en cours de tournage par Marek Nurzynski. Voir fiche

3 décembre 2013

Magic Mike (2012) de Steven Soderbergh

Magic MikeMike a trente ans et une double vie : le jour, il travaille dans la construction comme couvreur mais la nuit, il est strip-teaseur. Sur scène, il devient Magic Mike et fait hurler les clientes d’une petite boite de Tampa. Il prend sous son aile Adam, bien plus jeune que lui et l’introduit dans sa troupe ce qui n’est guère apprécié par sa soeur Joanna… Soderbergh s’inspire de la propre vie de son acteur principal, Channing Tatum. Le scénario est signé Reid Carolin. Le problème de ces films qui dénoncent le culte du corps et l’attrait de la vie facile est qu’ils sont souvent assez ambigus : le sujet est difficile à traiter sans tomber dans les travers que l’on veut dénoncer. Et c’est ici plutôt le cas. Soderbergh a mis en scène les shows de manière assez spectaculaire et percutante, les stripeurs faisant de véritables prouesses athlétiques. Ces spectacles forment le corps principal du film et deviennent un peu répétitifs. Le reste du scénario est léger, plutôt classique, et nous conduit en filigrane à la conclusion que cette vie facile est un piège dont il est difficile de s’extraire. Toutefois, le film peut sans aucun doute être vu à différents niveaux. A ne vouloir porter aucun jugement (et incidemment plaire à tout le monde), on risque de devenir inconsistant. Magic Mike serait-il ainsi un film qui manque de corps ?
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Matthew McConaughey, Channing Tatum, Olivia Munn, Alex Pettyfer
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2 décembre 2013

Les Portes de la nuit (1946) de Marcel Carné

Les portes de la nuitA Paris, un soir de l’hiver qui a suivi la Libération, Jean Diego retrouve l’un de ses anciens camarades de Résistance. Alors qu’ils fêtent leurs retrouvailles dans un petit restaurant, un homme étrange qui prétend être le Destin, lui prédit qu’il va rencontrer la femme la plus belle du monde… Les Portes de la nuit est souvent considéré le dernier des « grands films » de Marcel Carné. C’est en tous cas, le dernier représentant de ce courant du « réalisme poétique » typique du cinéma français des années trente et le dernier film du tandem formé par Marcel Carné et Jacques Prévert. La gestation du film fut difficile (budget, acteurs) mais si le film est plutôt en deçà des grandes créations de ce merveilleux duo, c’est principalement du fait de l’interprétation. Au lieu du couple Marlene Dietrich / Jean Gabin initialement prévu, ce furent deux débutants qui tinrent les rôles principaux, Yves Montand et Nathalie Nattier ; assez logiquement, ils manquent de présence pour cette histoire très forte, superbement écrite, et qui mêle un amour impossible à l’épineuse question de la recherche des collabos. La musique de Joseph Kosma est remarquable avec, en point d’orgue, la chanson Les Feuilles mortes qui deviendra un impérissable classique. Les Portes de la nuit fut accueilli assez fraîchement et ce n’est que bien plus tard qu’il sera mieux considéré. Même si l’on peut regretter l’absence de grands acteurs qui l’auraient certainement propulsé au niveau de chef d’oeuvre, le film reste un grand film, à la fois beau et marquant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Pierre Brasseur, Serge Reggiani, Yves Montand, Nathalie Nattier, Saturnin Fabre, Raymond Bussières, Jean Vilar, Julien Carette
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Voir les autres films de Marcel Carné chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* La collaboration Carné/Prévert avait débuté dix ans plus tôt avec Jenny (1936). Elle a engendré des grands classiques du cinéma français : Drôle de drame (1937), Le Quai des brumes (1938), Le jour se lève (1939), Les Visiteurs du soir (1942), Les enfants du Paradis (1945). La seule infidélité de Carné à Prévert fut Hôtel du Nord (1938).
* « Ouvrir les portes de la nuit, autant rêver d’ouvrir les portes de la mer, le flot effacerait l’audacieux. » (Paul Eluard)
* Marlene Dietrich a refusé tout net interpréter la fille d’un collabo et Jean Gabin préférait tourner Martin Roumagnac, un rôle qui lui tenait à coeur.

1 décembre 2013

Fureur apache (1972) de Robert Aldrich

Titre original : « Ulzana’s Raid »

Fureur apacheA la tête d’un petit groupe, l’indien apache Ulzana s’échappe du fort de l’Arizona où il était consigné. Il pille les fermes isolées à l’entour et massacre leurs occupants. Une petite escouade de soldats est chargée de le mettre hors d’état de nuire. Elle est dirigée par un jeune officier idéaliste et sans expérience, aidé par un éclaireur blanc aguerri (Burt Lancaster) et un scout indien… Sur un scénario remarquablement écrit par Alan Sharp, Fureur apache est un western qui, malgré les apparences, s’écarte plutôt des sentiers battus et c’est probablement l’un des westerns les plus importants des années soixante dix. Il s’agit d’une traque où chacun chasse l’autre. Comme souvent avec Robert Aldrich, les scènes d’action sont percutantes, assez directes, mais ce sont les scènes de discussions qui sont les plus étonnantes, lorsque le jeune officier cherche à comprendre les raisons de cette violence du chef indien. L’explication donnée ne peut nous faire aboutir qu’à la conclusion que toute cohabitation est impossible. C’est donc une vision assez dure que nous offre Robert Aldrich, nous sommes loin de la bienveillance envers les indiens de Little Big Man sorti deux ans plus tôt. Que l’on approuve ou pas le propos, force est de reconnaitre la perfection du déroulement du scénario et de sa mise en scène. Fureur apache est un film particulièrement prenant d’un bout à l’autre.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Burt Lancaster, Bruce Davison, Jorge Luke, Richard Jaeckel, Joaquín Martínez
Voir la fiche du film et la filmographie de Robert Aldrich sur le site IMDB.
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Voir les autres films de Robert Aldrich chroniqués sur ce blog…

Lire aussi l’analyse d’Olivier Bitoun sur DVD Classik qui approfondit le parallèle avec Bronco Apache (Apache) qu’Aldrich a tourné 18 ans plus tôt, en 1954.

30 novembre 2013

Sommaire de novembre 2013

The SwimmerDes Hommes sans loiLes grands ducsMacbethLes Hommes contreJournal intimeGildaLe Désert rouge

The Swimmer

(1968) de Frank Perry

Des Hommes sans loi

(2012) de John Hillcoat

Les grands ducs

(1996) de Patrice Leconte

Macbeth

(1948) de Orson Welles

Les Hommes contre

(1970) de Francesco Rosi

Journal intime

(1962) de Valerio Zurlini

Gilda

(1946) de Charles Vidor

Le Désert rouge

(1964) de Michelangelo Antonioni

Pépé le MokoChérie, je me sens rajeunirNoblesse obligeBienvenue à GattacaIls attrapèrent le bacVampyrAu nom du peuple italienHoly Motors

Pépé le Moko

(1937) de Julien Duvivier

Chérie, je me sens rajeunir

(1952) de Howard Hawks

Noblesse oblige

(1949) de Robert Hamer

Bienvenue à Gattaca

(1997) de Andrew Niccol

Ils attrapèrent le bac

(1948) de Carl Theodor Dreyer

Vampyr

(1932) de Carl Theodor Dreyer

Au nom du peuple italien

(1971) de Dino Risi

Holy Motors

(2012) de Leos Carax

Le Gang AndersonAntoine et AntoinetteL'aigle vole au soleilL.627La Nuit de VarennesContes immorauxParis, TexasQui a tué Vicky Lynn?

Le Gang Anderson

(1971) de Sidney Lumet

Antoine et Antoinette

(1947) de Jacques Becker

L’aigle vole au soleil

(1957) de John Ford

L.627

(1992) de Bertrand Tavernier

La Nuit de Varennes

(1982) d’Ettore Scola

Contes immoraux

(1974) de Walerian Borowczyk

Paris, Texas

(1984) de Wim Wenders

Qui a tué Vicky Lynn?

(1941) de H. Bruce Humberstone

Rivière sans retourMontparnasse 19Dollars

Rivière sans retour

(1954) de Otto Preminger

Montparnasse 19

(1958) de Jacques Becker

Dollars

(1971) de Richard Brooks

Nombre de billets : 27

29 novembre 2013

The Swimmer (1968) de Frank Perry

Titre français parfois utilisé : « Le Plongeon »

Le plongeonPar un bel après-midi d’été, un homme sort des bois en maillot de bain pour plonger dans la piscine d’une belle propriété du Connecticut. L’homme connait visiblement les propriétaires qui l’accueillent chaleureusement, véritablement heureux de le revoir. De leur terrasse qui domine une petite vallée, il lui prend l’idée de passer de propriété en propriété jusque chez lui, nageant de piscine en piscine… Basé une histoire écrite par John Cheever, The Swimmer est un film très original, un peu déroutant sans aucun doute mais franchement remarquable. Il surprend par sa forme et son contenu, cachant bien son jeu dans le premier tiers du film pour ensuite se dévoiler peu à peu (d’ailleurs, je conseillerais d’en lire le moins possible sur le film avant de le visionner). Pour ne pas trop en dire, disons que l’histoire est en réalité une belle allégorie sur la réussite sociale et le rêve américain ; sur le fond, The Swimmer n’est d’ailleurs sans rappeler d’autres films de la même époque comme Le Lauréat. Si le déroulement du scénario est parfait, le film n’est pas sans défaut sur le plan de la forme : ralentis, transitions, les effets sont souvent trop appuyés. La fin est ratée, l’insistance mélodramatique la rend presque risible. A 55 ans, Burt Lancaster passe tout le film en maillot de bain (quand ce n’est pas moins…) Avec son corps athlétique allié à une séduisante maturité, il porte le film beaucoup plus haut que ne l’aurait fait un autre acteur. Trop déroutant, The Swimmer n’a connu que peu de succès à sa sortie. Il fait aujourd’hui partie de ces films méconnus qui méritent vraiment d’être découverts. Original et étonnant.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Burt Lancaster, Janet Landgard, Janice Rule
Voir la fiche du film et la filmographie de Frank Perry sur le site IMDB.

Remarques :
* Le scénario a été écrit par Eleanor Perry, la femme du réalisateur (elle a écrit le scénario de tous ses films).
* Le film n’est, semble t-il, pas sorti en France à l’époque. IMDB donne bien une date de sortie française en 1968 mais les revues de cinéma de l’époque ne le mentionnent pas. Quoiqu’il en soit, The Swimmer est ressorti en 2010.
* Sydney Pollack a été appelé à la rescousse par le producteur pour retourner une scène avec Janice Rule (l’ancienne amante de Ned).

Lire aussi (mais plutôt après avoir vu le film) l’analyse d’Olivier Bitoun sur DVDClassik.

28 novembre 2013

Des Hommes sans loi (2012) de John Hillcoat

Titre original : « Lawless »

Des hommes sans loiDans les montagnes des Appalaches dans les années vingt, de nombreux paysans distillent de l’alcool malgré la prohibition et le revendent à l’entour. C’est la grande spécialité des trois frères Bondurant. Une légende prétend qu’ils sont invincibles… Des Hommes sans loi est adapté d’un roman écrit par l’un des descendants de la famille, Matt Bondurant. Selon ses propres dires certains faits sont réels, d’autres sont inventés. Le scénario a été écrit par Nick Cave (oui, le Nick Cave de Nick Cave & The Bad Seeds) qui signe également la musique, excellente bien entendu. L’originalité de ce film de gangsters est de se dérouler à la campagne, et qui plus est la campagne la plus reculée qui soit. Les Appalaches étaient en effet à cette époque d’une extrême pauvreté. On peut rapprocher Des Hommes sans loi des films de western et la réalisation de l’australien John Hillcoat est d’un beau classicisme. Hélas, le scénario est plutôt réduit, tape-à-l’oeil et se complait à étaler une violence d’une grande sauvagerie.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Shia LaBeouf, Tom Hardy, Jason Clarke, Guy Pearce, Jessica Chastain, Gary Oldman
Voir la fiche du film et la filmographie de John Hillcoat sur le site IMDB.

Homonyme :
Hommes sans loi (King of the Underworld) de Lewis Seiler (1939) avec Humphrey Bogart

27 novembre 2013

Les grands ducs (1996) de Patrice Leconte

Les grands ducsTrois comédiens refusant de prendre leur retraite parviennent à se faire engager pour jouer dans une comédie de boulevard dont le producteur est au bord de la faillite. La troupe part en tournée en province… Il faut faire preuve de bonne volonté et laisser son côté « bon public » prendre le dessus pour apprécier au moins un peu Les grands ducs. Le scénario ne présentant aucune originalité, cette comédie de Patrice Leconte repose entièrement sur le trio formé par Philippe Noiret, Jean-Pierre Marielle et Jean Rochefort qui ont tendance à jouer la surenchère et à se déchaîner en roue libre. Catherine Jacob interprète une star hystérique et charge également beaucoup la barque. Quant au personnage joué par Michel Blanc, il est préférable de ne pas en parler. Tout l’humour repose sur la démesure.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jean-Pierre Marielle, Philippe Noiret, Jean Rochefort, Catherine Jacob, Michel Blanc, Clotilde Courau
Voir la fiche du film et la filmographie de Patrice Leconte sur le site IMDB.

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26 novembre 2013

Macbeth (1948) de Orson Welles

MacbethAlors qu’il rentre de la guerre avec son ami Banquo, Macbeth rencontre trois sorcières qui lui prédisent qu’il sera roi et que les descendants de Banquo lui succèderont. Quand elle prend connaissance de cette prédiction, Lady Macbeth le presse d’agir au plus vite… Orson Welles, dans tous ses films, aime explorer l’âme humaine au plus profond. On comprend aisément que Macbeth, cette fable puissante sur l’ambition dans son expression la plus destructrice, ait tant fasciné le cinéaste. A l’âge de 21 ans, en 1936, il l’avait déjà monté sur les planches de façon innovante… avec uniquement des acteurs noirs. Le fait d’avoir un budget excessivement réduit n’était pas pour l’arrêter dans sa détermination : il tourne l’ensemble en vingt et un jours pour la Republic, une compagnie plus habituée à tourner des westerns et dont il utilise studios et costumes. Les décors paraissent faits en carton (et ils le sont…) mais, paradoxalement, cette épure lui permet de porter son adaptation beaucoup plus haut, donnant une grandeur et une abstraction naturelle à son film. Elle fait encore mieux ressortir la fureur dévorante de son ambitieux personnage qu’il interprète magistralement. Le public anglo-saxon accueillit cette adaptation très froidement, reprochant à Welles d’avoir utilisé des acteurs à l’accent écossais (1). Le film fut ainsi beaucoup plus apprécié dans les autres pays, notamment en France, tout en souffrant de la comparaison avec le Hamlet de Laurence Olivier, tourné avec un budget beaucoup plus important et sorti simultanément. Ce Macbeth d’Orson Welles est assez unique, c’est une adaptation pleine de noirceur et de rage meurtrière qui nous traverse et nous engloutit.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Orson Welles, Jeanette Nolan, Dan O’Herlihy, Roddy McDowall
Voir la fiche du film et la filmographie de Orson Welles sur le site IMDB.

Voir les autres films de Orson Welles chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* En guise de répétition grandeur nature, Welles donna une représentation de Macbeth sur scène à Salt Lake City en 1947.
* Afin de pouvoir tourner plus rapidement, Welles enregistra d’abord les textes seuls. Les acteurs n’eurent ensuite qu’à mimer la parole pendant le tournage, permettant ainsi aux techniciens (selon les propres dires du cinéaste) de brailler leurs ordres et de faire moult bruits intempestifs en maniant leurs appareils.
* Orson Welles dit toutefois avoir postsynchronisé les dialogues après le tournage pour atténuer le « scottish burr » à la demande de Charles Feldman, ami de Welles et coproducteur (entretiens avec Peter Bogdanovich).
* Le film n’a longtemps été visible que dans sa version réduite à 89 minutes. La version initiale de 107 minutes n’a refait surface que dans les années quatre-vingt. Un placard en début de film précise que 8 minutes d’introduction musicale ont été enlevées.
* Janette Nolan (Lady Macbeth), dont c’est ici le premier film, était alors une actrice de radio. Elle aura ensuite une longue carrière au cinéma à la télévision (197 films d’après IMDB), sa participation ultime étant à 86 ans dans L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux de Redford, quelques mois avant sa mort.
* Il est difficile de lister les autres adaptations de Macbeth au cinéma (et plus encore à la télévision) tant elles sont nombreuses. Deux des plus remarquables sont toutefois le Macbeth de Roman Polanski (1971) et Kumonosu jô d’Akira Kurosawa (1957).

(1) Rappelons que Macbeth se déroule en Ecosse… C’est pour être plus près de l’esprit de Shakespeare qu’Orson Welles avait tenu à ce fameux « scottish burr ». On désigne sous ce terme la façon de prononcer les « r » de façon gutturale qui est si typique de l’accent écossais.