16 novembre 2012

The villain still pursued her (1940) de Edward F. Cline

Titre alternatif (U.K.) : « He done her wrong »

The Villain Still Pursued HerUne veuve et sa jeune et jolie fille sont à la merci d’un homme fourbe et cupide qui cherche à récupérer à bon compte leur maison gravement hypothéquée… The Villain Still Pursued Her a l’originalité d’avoir Buster Keaton dans un second rôle ; le film est réalisé par son comparse Edward Cline. Bien que l’histoire se déroule en extérieurs et dans des décors différents, cette parodie de mélodrame prend la forme d’une pièce jouée (1), surtout pour faire intervenir le public qui conspue le vilain ou ovationne les moments positifs. Les acteurs forcent leur jeu et appuie leur dialogues de moult gestes à l’instar des pièces populaires de la fin du XIXe siècle. L’humour ne fonctionne pas toujours très bien, tous les plans sur le faux public sont bien inutiles, les farces des gamins étant bien répétitives. Ce n’est pas Buster Keaton qui alimente l’humour (Keaton qui rappelons-le n’a pas bien réussi à prendre le virage du parlant). Le plus amusant est incontestablement Hugh Herbert, comique alors très populaire, mais il n’a qu’un rôle très réduit. Cela ne l’empêche pas d’être placé en tête d’affiche. The Villain Still Pursued Her est une curiosité, guère plus.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Hugh Herbert, Anita Louise, Richard Cromwell, Buster Keaton
Voir la fiche du film et la filmographie de Edward F. Cline sur le site IMDB.

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(1) L’histoire est basée sur la pièce The Drunkard, une très célèbre pièce créée aux alentours de 1850.

1 novembre 2012

Un million clefs en mains (1948) de H.C. Potter

Titre original : « Mr. Blandings builds his dream house »

Un million clefs en mainsJim Blandings vit avec sa femme et ses deux enfants à Manhattan, dans un appartement trop étroit. Une publicité va lui donner envie d’aller vivre à la campagne. Il trouve une maison délabrée à acheter et à retaper dans le Connecticut, à une heure de train de son travail. Tout ne va pas être aussi simple qu’il l’aurait voulu… Adaptation d’un roman d’Eric Hodgins, Mr. Blandings Builds His Dream House ( = Mr Blandings construit la maison de ses rêves) joue avec les mésaventures rencontrées lors de l’achat et de la construction d’une maison : géologie récalcitrante, mauvaises surprises, luttes entre artisans et surtout imprévus qui font grossir la note. En ces années d’après-guerre, c’est aussi un film qui montre la face cachée du rêve américain en mettant en relief, avec beaucoup d’humour toutefois, les déconvenues diverses qui attendent les aspirants-propriétaires et le coût final : « Mais comment font ceux qui ne gagnent pas 15 000 dollars par an ? » (1) demande le personnage interprété par Cary Grant. Et aussi, la démesure des désirs du couple, ce qu’ils considèrent comme « l’indispensable » (le boudoir, les 4 salles de bains, etc.), est gentiment raillée. Le film est servi par un excellent trio d’acteurs et de bons dialogues. Mr. Blandings Builds His Dream House est une comédie plaisante qui remporta un bon succès.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Cary Grant, Myrna Loy, Melvyn Douglas
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(1) Il est beaucoup question de coûts dans Mr. Blandings Builds His Dream House. Il est intéressant de les actualiser. Mr Blandings est créatif dans une agence de publicité (profession qui revient souvent dans les films américains, c’est à cette époque l’archétype de la profession moderne et supérieure qui fait rêver les spectateurs). Il gagne 15 000 dollars par an, c’est à dire l’équivalent de 144 000 dollars actuels (110 000 euros) ce qui est très confortable. Il achète le terrain avec la maison en ruines 15 000 dollars, soit un an de son salaire, et la construction de sa maison (avec 4 salles de bains!) lui coûte 20 000 dollars (150 000 euros actuels).

4 octobre 2012

Les chaussons rouges (1948) de Michael Powell et Emeric Pressburger

Titre original : « The red shoes »

Les chaussons rougesLe célèbre impresario Lermontov engage un jeune compositeur talentueux et la jeune Victoria Page pour en faire une danseuse étoile. Il crée un ballet inspiré du conte d’Andersen Les chaussons rouges… Auréolés du succès de leurs films précédents, Michael Powell et Emeric Pressburger avaient alors une certaine liberté de choix de leur sujet, heureusement car faire un film sur le ballet et sans acteur connu était une entreprise plutôt osée. De manière plus générale, Les chaussons rouges est un film sur l’Art : le processus de création, on assiste ainsi à la genèse artistique d’un ballet, et aussi ses exigences, son caractère exclusif. Le talent de Powell et Pressburger est d’en avoir fait un grand spectacle en utilisant une vraie danseuse à l’avenir prometteur, Moira Shearer, et en donnant une large place au ballet avec une scène centrale très travaillée qui dure près de vingt minutes. La judicieuse utilisation du Technicolor et de vastes mouvements de caméra ajoutent à la féerie et au caractère fantastique de l’histoire. L’autre point fort du film réside dans le personnage de Lermontov, ce metteur en scène entièrement dévoué à son art, un personnage charismatique, fort et marquant. A sa sortie, Les chaussons rouges connut un immense succès (sauf en Angleterre toutefois) ; au lendemain de la guerre et de ses laideurs, le film apportait une réconfortante vague de beauté.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Anton Walbrook, Moira Shearer, Marius Goring, Léonide Massine
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Remarques :
* Le scénario avait été écrit dès 1937 par Emeric Pressburger qui travaillait alors pour Alexander Korda. L’idée de Michael Powell fut de tourner le film avec de vrais danseurs et d’avoir une longue scène centrale de ballet.
* Michael Powell eut toutes les peines du monde pour convaincre Moira Shearer d’accepter le rôle. La jeune danseuse craignait d’oblitérer ses chances de devenir une grande danseuse (ces craintes se révélèrent être justifiées mais elle fut plutôt victime du succès du film).
* Michael Powell raconte très longuement la production et la réalisation du film Les chaussons rouges dans la première partie de son autobiographie A life in Movies.
* On peut considérer que Les chaussons rouges préfigure ce que seront An American in Paris de Minnelli (1951) et Singing’ in the rain de Stanley Donen (1952).

22 septembre 2012

Le troisième homme (1949) de Carol Reed

Titre original : « The third man »

Le troisième hommePeu après la fin de la guerre, l’écrivain de romans populaires Holly Martins arrive à Vienne sans un sou en poche pour retrouver son ami Harry Lime qui lui a promis un emploi. Il apprend que son ami vient juste d’être tué dans un accident. Les circonstances de sa mort lui paraissent bien obscures… Adaptation d’un roman de Graham Greene, Le troisième homme a connu un grand succès populaire et cinéphilique : c’est l’un des films les plus célèbres de l’histoire du cinéma et certainement le film anglais le plus connu. Ce succès, il le doit à son atmosphère si particulière, pleine de mystère avec ses scènes nocturnes et ses coins sombres, beaucoup de scènes ayant été tournées sur place dans la Vienne à demi-dévastée. Il le doit aussi et surtout à la musique jouée la cithare d’Anton Karas qui eut un succès immense à l’époque, devenant ainsi un grand atout publicitaire pour le film ; elle reste aujourd’hui l’une des musiques de film les plus connues. Auprès des cinéphiles, l’aura du Troisième homme fut encore plus forte à la suite de rumeurs liées à la présence d’Orson Welles : l’acteur/réalisateur aurait, disait-on, fortement influencé le tournage et même modelé le scénario, le style général du film et la présence de Joseph Cotten appuyant ces croyances. En réalité, l’action d’Orson Welles est limitée à quelques répliques, dont sa fameuse sur le coucou suisse(1), et l’idée du plan des doigts à travers la grille. Le troisième homme montre des influences diverses, reprend certains des codes du film noir, évoque beaucoup les films d’Hitchcock dans sa période anglaise. Carol Reed fait ici un usage assez immodéré du Dutch angle(2). Même si sa réputation peut paraître excessive, Le troisième homme est un très bon film.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Joseph Cotten, Alida Valli, Orson Welles, Trevor Howard
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Remarque :
Le troisième homme est produit par Alexandre Korda et David O. Selznick. Ce sera la seule collaboration entre ces deux grands producteurs. Carol Reed est également coproducteur.

(1) Pour justifier ses actes odieux, Harry Lime (Orson Welles) a cette formule restée célèbre : « En Italie, pendant trente ans sous les Borgia, ils ont eu guerre, terreur, meurtres et massacres mais cette période a produit Michel-Ange, Léonard de Vinci et la Renaissance. En Suisse, ils ont eu cinq cent ans d’amour fraternel, de démocratie et de paix et qu’ont-ils produit ? Le coucou ! »
Dans ses entretiens avec Bogdanovitch, Orson Welles raconte qu’à la sortie du film, des suisses lui ont gentiment fait remarquer que le coucou n’avait pas été inventé en Suisse mais en Bavière.
On pourrait aussi lui faire remarquer qu’à l’époque de la Renaissance, l’armée suisse était l’une des plus redoutables et redoutées d’Europe (il suffit de lire Machiavel qui mentionne souvent son efficacité dans L’art de la guerre).

(2) Le terme Dutch angle (ou Dutch tilt ou German angle) désigne la technique qui consiste à pencher légèrement la caméra sur le côté pour faire un cadrage oblique et créer ainsi un sentiment d’insécurité, de léger malaise (en français, plan hollandais peut être parfois utilisé, ou même cadrage oblique).

13 août 2012

Rashômon (1950) de Akira Kurosawa

RashômonDans le Japon médiéval, trois hommes se sont abrités de la pluie battante dans les ruines d’une ancienne porte de la ville de Kyoto. Deux ont témoigné dans un procès qu’ils racontent au troisième, une affaire étrange de meurtre où chacun des protagonistes raconte une version différente des faits…
Rapporté du Japon presque clandestinement en 1951 par une admiratrice italienne, Rashômon fit sensation au Festival de Venise. La puissance du récit et la perfection de la forme furent un choc pour les occidentaux qui découvraient alors le cinéma japonais. Le récit est à la fois simple et complexe. L’important n’est pas tant de savoir où est la vérité (nous ne le saurons d’ailleurs pas) que d’observer comment chacun modèle son récit, non pas pour se disculper mais pour préserver son honneur ; « nous avons tous de bonnes raisons pour être égoïstes ». Kurosawa clôt tout de même ce portrait assez pessimiste de la nature humaine sur une petite note d’espoir. Sur le plan de forme, Rashômon avait également de quoi surprendre : avec peu de moyens, un bout de forêt et une ruine en pleine nature, Kurosawa réussit à atteindre un esthétisme au caractère très naturel.  Il utilise superbement la lumière et les ombres projetées par le soleil à travers les arbres. Sur ce plan, Rashômon se rapproche des grands films muets. Et c’est aussi un film très physique, nous sommes presque au contact des personnages dont il se dégage une fougue et une ardeur parfois maladroite qui rend l’ensemble très authentique. Le succès de Rashômon en occident permettra à Kurosawa d’être considéré à sa juste valeur dans son pays et ainsi d’obtenir de bonnes conditions pour tourner ses films suivants.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Toshirô Mifune, Machiko Kyô, Masayuki Mori, Takashi Shimura
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Remarque :
Rashômon est adapté de deux nouvelles d’Akutagawa Ryunosuke, « Dans le fourré » et « Rashômon », elles-mêmes inspirées de légendes médiévales nipponnes. Rashômon est le nom d’une porte de Kyoto : « La porte du dieu Rashô ».

6 août 2012

Les bourreaux meurent aussi (1943) de Fritz Lang

Titre original : « Hangmen also die! »

Les bourreaux meurent aussiEn 1942, le chef nazi Heyrich, « le boucher de Prague », est mortellement blessé par un résistant tchèque. Police et Gestapo recherchent activement l’auteur de l’attentat… C’est l’actualité qui a fourni à Fritz Lang et Bertolt Brecht un point de départ pour écrire le scénario de Les bourreaux meurent aussi. La collaboration ne déroulera pas sans heurt, les deux auteurs s’opposant sur de très nombreux points. Sous la forme d’un film policier, le film met en alerte et exhorte à faire front contre la barbarie. Si le déroulement du scénario peut paraître manquer parfois de rigueur, la tension et l’intensité montent progressivement dans une atmosphère oppressante bien rendue. On retrouve le thème du mensonge cher à Fritz Lang. Le film n’eut hélas que peu de succès. En France, il sortit (après la Libération bien entendu) dans une version écourtée (117mn au lieu de 134).
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Brian Donlevy, Walter Brennan, Anna Lee, Dennis O’Keefe, Gene Lockhart
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Remarques :
* Le dénouement du film est (hélas) très différent de la réalité.
* Deux mois après Les bourreaux meurent aussi, un autre film sur l’assassinat de Heydrich est sorti sur les écrans : Hitler’s Madman (1943) de Douglas Sirk (son premier film aux Etats-Unis) avec John Carradine.

2 août 2012

The Memphis Belle: a story of a flying fortress (1944) de William Wyler

The Memphis Belle: A Story of a Flying Fortress(Court métrage en couleurs de 40 minutes) Pour participer à l’effort de guerre, William Wyler réalise un film pour le Ministère de la Guerre sur le bombardier B-17 Memphis Belle, alors qu’il effectue sa 25e et ultime mission sans dommage en mai 1943. C’est pratiquement le premier B-17 à y parvenir (1). Nous montons dans l’avion avec l’équipage (âgé de 19 à 27 ans) pour participer à une mission de vaste envergure dont les cibles sont des complexes industriels en Allemagne. Les combats et scènes de vol sont à 90% des scènes réelles (2). Le film est unique en son genre et a une grande valeur historique. Très didactique, il explique les différentes phases de vol, les tirs ennemis. Il nous montre les dangers encourus et met en avant, de façon simple et non ostensible, l’héroïsme ordinaire de ces équipages. C’est un film d’une très grande intensité naturelle.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs:
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Remarque :
Après avoir survécu aux combats, le Memphis Belle a miraculeusement échappé aux mises au rebut de l’après-guerre. Après avoir été exposé à Memphis, il est actuellement en cours de restauration pour être placé au Wright Patterson AFB Air Museum à Dayton, Ohio.

(1) En réalité, un autre B-17, le Hell’s Angels, est parvenu à cet exploit huit jours avant le Memphis Belle.
(2) Certaines scènes ne sont toutefois pas tournées depuis le Memphis Belle mais depuis un autre B-17, le Jersey Bounce lors d’une mission de février 1943. A noter que les images ont été tournées sans le son qui a été reconstitué ensuite avec l’équipage.

Autre film :
Memphis Belle (1990) de Michael Caton-Jones avec Matthew Modine, long métrage qui met en scène cette même 25e et ultime mission de mai 1943.

1 août 2012

The Moon and Sixpence (1942) de Albert Lewin

Titre original : « The moon and sixpence »

The Moon and SixpenceCharles Strickland abandonne sa vie bien rangée, sa femme et ses enfants pour s’installer à Paris afin d’assouvir sa passion jusque là secrète, la peinture… The Moon and Sixpence est fidèlement adapté du roman homonyme de William Somerset Maugham. Le personnage du roman évoque Gauguin par certains aspects (1) mais ce n’est en aucun cas une biographie de Paul Gauguin. Non, le sujet est tout autre : il s’agit de la confrontation entre une passion qui élève avec un réalisme qui abaisse (2). Strickland se forge une carapace de cynisme et devient même asocial pour se protéger et éviter de retourner à sa morne vie antérieure. De même, sa méfiance envers les femmes (il refuse l’amour car il sent que c’est un piège) se transforme en profonde misogynie. Le film est élégant dans sa forme et ses dialogues, très anglais, George Sanders apportant cette dose d’intelligence et de raffinement qui empêche son personnage d’être odieux. Cette élégance est certes coutumière à Albert Lewin mais il s’agit ici de son premier film. Le réalisateur américain traite déjà de son sujet favori : la peinture.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: George Sanders, Herbert Marshall, Steven Geray, Eric Blore, Albert Bassermann, Florence Bates
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Remarque :
Le film n’a été restauré dans sa forme originale que très récemment : la partie à Paris est en noir et blanc, la partie à Tahiti est teintée en sépia avec un court passage en couleurs pour nous montrer les peintures murales.

(1) Il y a des similitudes : le changement de vie, Paris, Tahiti. Mais si Charles Strickland rencontre bien un peintre hollandais à Paris, ce dernier est sans talent, il n’a rien à voir avec Van Gogh. Et ensuite, Gauguin n’était pas cynique ou malveillant comme peut l’être Strickland.

(2) La signification du titre The Moon and Sixpence n’est donnée ni dans le roman ni dans le film. On peut la trouver dans une lettre de Somerset Maugham datée de 1956 : « If you look on the ground in search of a sixpence, you don’t look up, and so miss the moon. » (« Si vos yeux sont tournés vers le sol pour chercher une pièce de 6 pences, vous ne pourrez voir la lune. ») Le titre illustre ainsi parfaitement le fond du propos.

27 juillet 2012

La bataille de Midway (1942) de John Ford

Titre original : « The battle of Midway »

La bataille de Midway(Court métrage de 18 minutes) Ayant appris par ses relations dans la marine que les japonais allaient attaquer les îles Midway(1)(2), John Ford se rend sur l’île pour filmer la bataille. The Battle of Midway est donc ainsi tout d’abord un documentaire historique de tout premier ordre : tous les plans montrés sont réels et John Ford fut même blessé au bras gauche par un éclat d’obus lors du tournage. Mais le film est plus que cela car Ford y insuffle un grand souffle épique empreint de patriotisme. Il désire montrer aux mères américaines comment le pays commençait à répondre coup pour coup (3). Il supervise le montage fait par Robert Parrish dans le plus grand secret pour éviter que l’armée ne se saisisse de la pellicule. Ce montage est assez puissant, parsemé de nombreuses images fortes (comme ce drapeau flottant devant un rideau de fumée noire) et de plans qui nous placent au cœur de la bataille (4). Il met en avant les hommes, héros ordinaires qui pourraient être nos voisins. Pour éviter tout problème, il accorde un temps égal aux différents corps des armées et John Ford a le trait de génie d’ajouter un plan du Major James Roosevelt, fils du président, saluant les cercueils des tués au combat (en réalité, il n’était pas présent à Midway). Lorsque que le film lui fut projeté, le président Roosevelt déclara : « Je veux que toutes les mères des Etats Unis voient ce film ! ». On en tira 500 copies et le film obtint un Oscar.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: (voix) Henry Fonda
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(1) Les américains venaient de casser le code japonais et étaient donc au courant en grande partie du plan d’attaque japonais.

(2) Les îles Midway sont un atoll de 6 km2 situé au beau milieu de l’océan Pacifique et appartenant aux Etats Unis d’Amérique. Le 5 juin 1942, les japonais lancent une attaque très importante sur Midway. Les américains la repoussent en infligeant aux japonais de lourdes pettes en hommes et en matériel. En mettant fin à la suprématie de la flotte japonaise, cette bataille marquera un tournant dans la guerre du Pacifique et dans la Seconde Guerre mondiale.

(3) C’est ainsi qu’il aurait défini le but du film à Robert Parrish.

(4) A noter que le montage utilise beaucoup de répétitions de plans pour générer l’idée de force importante en marche (défilé, décollage d’avions, etc.)

Homonyme (ou presque) :
La bataille de Midway (The battle of Midway) de Jack Smight (1976) avec Charlton Heston et Henry Fonda
Midway de Roland Emmerich (2019).

26 juillet 2012

Le mensonge d’une mère (1949) de Raffaello Matarazzo

Titre original : « Catene »

Le mensonge d'une mèreRosa vit à Naples avec son mari Amadeo, garagiste. Ils ont deux enfants. La venue fortuite d’un ancien fiancé de Rosa qui est devenu voleur de voitures va perturber leur bonheur… Le mensonge d’une mère (Catene en italien signifie « Chaines », c’est le nom d’une des chansons napolitaines du film) est le premier mélodrame de Raffaello Matarazzo qui s’était auparavant essayé à plusieurs genres. Le succès sera tel qu’il tournera six autres mélodrames dans les années cinquante avec le même duo d’acteurs. Ces films furent généralement très mal reçus par la critique qui les trouvait trop conventionnels. Et pourtant, il se dégage de ce Catene une grande force, une puissance émotionnelle rare. Tout y est bien dosé. Les scènes avec les enfants sont par exemple particulièrement réussies, sans jeu excessif, la détresse se lit dans leurs yeux. Voir la petite fille réclamer sa maman est un véritable tire-larmes, le fils de dix ans est lui aussi très bien interprété, extraordinairement émouvant. Actrice d’origine grecque, Yvonne Sanson (la mère, Rosa) a une grande présence à l’écran, une beauté naturelle et sans artifices ; les plans rapprochés de Matarazzo sont puissants. L’environnement est ancré dans un certain réalisme italien (même s’il correspond plus à un réalisme d’avant-guerre que d’après-guerre) sans être très présent toutefois car toute la place est donnée au récit. Donc, oui, Le mensonge d’une mère est un mélodrame qui peut paraître conventionnel par certains aspects mais sa puissance émotionnelle balaie tous les reproches possibles et le film enthousiasme.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Amedeo Nazzari, Yvonne Sanson, Aldo Nicodemi
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Remarque :
Dans Cinema Paradiso, le film de Giuseppe Tornatore (1988), le film qui est montré dans deux villes en même temps et qui oblige Toto à enfourcher son vélo pour porter les bobines est Catene.