29 janvier 2024

I’m Your Man (2021) de Maria Schrader

Titre original : « Ich bin dein Mensch »

I'm Your Man (Ich bin dein Mensch)A Berlin, dans un futur proche, la chercheuse Alma travaille sur les inscriptions cunéiformes sumériennes. Pour obtenir des fonds pour ses recherches, elle accepte à contre-coeur de participer à un essai. Pendant trois semaines, elle doit vivre avec Tom, un robot humanoïde programmé pour lui convenir parfaitement : le compagnon idéal. Elle devra ensuite produire un rapport…
I’m Your Man (L’Homme idéal au Québec) est un film allemand co-écrit et réalisé par Maria Schrader, adaptation d’une nouvelle d’Emma Braslavsky. Il met en scène la cohabitation forcée d’une femme qui se jette dans son travail pour oublier son mal-être avec un androïde bien décidé à la rendre heureuse. Alma refuse d’abord la gentillesse et la prévention dont il fait preuve, un refus certainement un peu trop appuyé ce qui rend son personnage plutôt irritant. Toutefois, si le récit montre ses excès et maladresses (et des facilités de scénariste), il n’en soulève pas moins une vraie question : quel serait l’impact de ces compagnons androïdes parfaits sur notre sociabilité ? Accessoirement, il propose bien entendu une réflexion sur le bonheur. Maria Schrader a réalisé un film original, assez amusant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Maren Eggert, Dan Stevens, Sandra Hüller
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Dan Stevens et Maren Eggert dans I’m Your Man (Ich bin dein Mensch) de Maria Schrader.

12 janvier 2024

L’amour et les forêts (2023) de Valérie Donzelli

L'amour et les forêtsQuand Blanche croise le chemin de Grégoire, elle pense rencontrer celui qu’elle cherche. Les liens qui les unissent se tissent rapidement, ils sont emportés par la passion. Le couple déménage, Blanche s’éloigne de sa famille, de sa sœur jumelle, elle s’ouvre à une nouvelle vie. Mais fil après fil, elle se retrouve sous l’emprise d’un homme possessif et dangereux…
L’amour et les forêts est un film français réalisé par Valérie Donzelli, sorti en 2023. Le scénario est écrit par Audrey Diwan (réalisatrice de L’Évènement) et Valérie Donzelli, d’après le roman d’Éric Reinhardt publié en 2014. L’histoire commence comme un conte de fées mais peu à peu le séducteur change de visage et enferme son épousée dans une relation possessive. Le glissement progressif vers l’oppression est bien mis en scène avec notamment cette façon inimaginable dont le bourreau parvient à se poser en victime. L’atmosphère devient de plus en plus angoissante. Virginie Efira est parfaite, elle parvient à exprimer ce qu’elle ressent sans artifice de jeu, il n’y a aucun excès mélodramatique. Melvin Poupaud campe un personnage de plus en plus monstrueux, lui aussi sans excès. Particulièrement bien dosé, L’amour et les forêts se montre aussi très puissant.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Virginie Efira, Melvil Poupaud, Dominique Reymond, Romane Bohringer, Virginie Ledoyen, Marie Rivière
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Virginie Efira et Melvil Poupaud dans L’amour et les forêts de Valérie Donzelli.

14 décembre 2023

Venez voir (2022) de Jonás Trueba

Titre original : « Tenéis que venir a verla »

Venez voir (Tenéis que venir a verla)Alors qu’ils s’étaient perdus de vue, deux couples se retrouvent lors d’un concert de Chano Dominguez dans un bar de Madrid. Un couple invite l’autre à venir les voir dans leur maison à la campagne, ce qui sera fait six mois plus tard…
Venez voir est un film espagnol écrit et réalisé par Jonás Trueba. Il est rare de voir un film avec si peu de consistance. Il ne dure que 64 minutes et ses dix premières minutes sont déjà occupées par d’interminables plans fixes (sans dialogue) sur les quatre personnages. La suite est dans la même veine, de longues scènes vides et parfois quelques dialogues insignifiants. Les deux couples sont à un moment charnière de leur vie mais ce n’est visiblement pas l’objet du film. Le seul contenu un tant soit peu consistant, on le doit à la lecture par un personnage de quelques pages d’un livre du philosophe allemand Peter Sloterdijk. Le cinéaste assume le vide de son film : « Je voulais revendiquer, dans les temps qui courent, qu’on peut avoir envie d’aller au cinéma pour voir un film aussi simple que celui-ci. » Une partie de la Critique semble avoir apprécié cette simplicité.
Elle: 2 étoiles
Lui : 1 étoile

Acteurs: Itsaso Arana, Vito Sanz, Francesco Carril, Irene Escolar
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Francesco Carril, Itsaso Arana et Irene Escolar dans Venez voir (Tenéis que venir a verla) de Jonás Trueba.

13 décembre 2023

Liza (1972) de Marco Ferreri

LizaDessinateur de bandes dessinées, Giorgio s’est retiré de la vie parisienne, où il a femme et enfants, pour aller vivre avec son chien Melampo sur un îlot rocheux au sud de la Corse. Sa vie se voit perturbée par l’arrivée de Liza, une belle jeune femme assez snob. Ne supportant pas l’indifférence de Giorgio, en un étrange jeu cruel, elle tue le chien. Désormais seule en face de Giorgio, elle décide de prendre la place de l’animal…
Liza est un film franco-italien réalisé par Marco Ferreri. Adaptation du roman Melampo d’Ennio Flaiano, le scénario a été écrit par Jean-Claude Carrière et Marco Ferreri. L’histoire met en scène une relation d’amour à sens unique très inhabituelle. Contrairement à ce que l’affiche laisse supposer, il n’y a rien de scabreux, ce n’est pas une relation sadomasochiste (la laisse de l’affiche ci-dessus a été ajoutée par les commerciaux). Non, c’est juste une relation étrange et l’on ne perçoit pas toutes les motivations de deux protagonistes. Ferreri était hanté par l’idée de bestialité à l’époque et (d’après Jean-Claude Carrière) il avait surtout très envie de tourner avec Mastroianni et Deneuve. Le couple s’était formé peu auparavant sur le tournage de Ça n’arrive qu’aux autres de Nadine Trintignant au grand bonheur des tabloïds. Pour Mastroianni, c’est une nouvelle occasion de tourner en français, langue qu’il maitrise parfaitement. Le décor est assez magique : les Îles Lavezzi au sud de la Corse, désertiques, avec des superbes rochers et un soleil éblouissant. Liza est un film original, étrange, d’une belle personnalité.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Catherine Deneuve, Marcello Mastroianni, Corinne Marchand, Michel Piccoli
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Catherine Deneuve et Marcello Mastroianni dans Liza de Marco Ferreri.

29 août 2023

L’histoire de ma femme (2021) de Ildikó Enyedi

Titre original : « A feleségem története »

L'histoire de ma femme (A feleségem története)Dans les années 1920, Jakob est capitaine de cargos. Après être tombé malade en mer, son cuisinier lui conseille de prendre femme. Revenu à terre, Jakob, indifférent à l’idée, informe un ami qu’il a l’intention de se marier, peu importe qui sera sa femme. Il fait le pari qu’il épousera la première femme qui franchira le seuil du café où ils se trouvent. Voyant la belle Lizzy arriver, il lui propose de se marier dès le lendemain. Elle lui demande d’attendre une semaine…
L’histoire de ma femme est un film hongrois réalisé par Ildikó Enyedi. Il s’agit de l’adaptation du roman du même nom paru en 1942 de l’écrivain hongrois Milán Füst, son roman le plus connu. Il se propose d’explorer les rapports hommes/femmes à travers une relation assez étrange où le détachement règne. Tout le récit est vue par les yeux de l’homme qui, en essayant de comprendre sa femme, cherche à donner un sens à sa vie. La réalisation est élégante et l’ensemble montre un esthétisme raffiné qui séduit au premier abord. Hélas, le propos n’est pas aussi riche qu’attendu, l’histoire est à la fois embrouillée et donne l’impression de tourner en rond. La longueur du film (2h40) paraît inappropriée. La plupart des scènes trainent en longueurs inutiles et l’on se désintéresse rapidement de l’ensemble. Elégant mais ennuyeux. La critique a réservé un bon accueil au film.
Elle: 2 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Léa Seydoux, Gijs Naber, Louis Garrel, Sergio Rubini, Jasmine Trinca, Luna Wedler, Josef Hader, Ulrich Matthes, Romane Bohringer
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L'histoire de ma femme (A feleségem története)Léa Seydoux, Gijs Naber et Louis Garrel dans L’histoire de ma femme (A feleségem története) de Ildikó Enyedi.

14 février 2023

Bergman Island (2021) de Mia Hansen-Løve

Bergman IslandUn couple de cinéastes s’installe pour écrire, le temps d’un été, sur l’île suédoise de Fårö où vécut Bergman. A mesure que leurs scénarios respectifs avancent, et au contact des paysages sauvages de l’île, la frontière entre fiction et réalité se brouille…
Bergman Island est un film suédo-germano-belgo-français écrit et réalisé par la française Mia Hansen-Løve. La réalisatrice a elle-même loué la maison de Bergman, occupée par le couple dans le film, pour écrire ce script (1). Son histoire nous montre le visage actuel de cette île connue des cinéphiles du monde entier et aujourd’hui visitée par les touristes. Mais son histoire est bien plus que cela, elle se situe à plusieurs niveaux qui finissent par se mêler : il y a le passé avec l’héritage bergmanien, le présent avec le couple de cinéastes, et l’imaginaire avec les personnages du scénario écrit par l’un des deux. Mia Hansen-Løve nous parle du processus de l’écriture, de l’inspiration et de l’interaction avec la vie de couple, elle nous parle de l’amour aussi et de sa réciprocité. Le propos est assez subtil et la cinéaste fait preuve de sensibilité. La construction est intelligente et même élégante, l’ensemble a indéniablement du style. Bergman Island est un beau film (et il n’est pas nécessaire, je pense, de connaître le cinéma de Bergman pour l’apprécier).
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Vicky Krieps, Tim Roth, Mia Wasikowska, Anders Danielsen Lie
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(1) À la mort d’Ingmar Bergman, son héritage fut racheté par un homme d’affaires norvégien, permettant de ne pas le disperser. Il a par ailleurs créé avec Linn Ullmann (la fille de Bergman et Liv Ullmann) une fondation permettant, selon le souhait de Bergman, à des artistes ou à des chercheurs de tous horizons de résider dans une de ses maisons pour y développer un projet, sans obligation de lien avec son œuvre. C’est via cette fondation que Bergman Island est né : « À ma connaissance, je suis la seule à y avoir travaillé sur un scénario ayant un rapport direct avec Bergman ».

Bergman IslandVicky Krieps et Tim Roth dans Bergman Island de Mia Hansen-Løve.

Bergman IslandMia Wasikowska et Anders Danielsen Lie dans Bergman Island de Mia Hansen-Løve.

18 janvier 2023

Etrange Séduction (1990) de Paul Schrader

Titre original : « The Comfort of Strangers »

Étrange Séduction (The Comfort of Strangers)En vacances à Venise pour la seconde fois de leur vie, de jeunes Anglais, Mary et Colin, font sereinement du tourisme jusqu’au soir où ils se perdent dans une rue déserte. Robert, un étrange inconnu vêtu de blanc, les guide vers un bar discret et commence à leur raconter l’histoire de sa famille…
Étrange Séduction est un film américain réalisé par Paul Schrader. Le scénario est signé par l’écrivain et dramaturge anglais Harold Pinter (parmi ses scénarios le plus notables, citons The Servant de Losey, Le Limier de Mankiewicz, La Maîtresse du lieutenant français de Karel Reisz, …) d’après le roman Un bonheur de rencontre (The Comfort of Strangers) du britannique Ian McEwan paru en 1981. C’est un film très étrange à la fois par son histoire de manipulation perverse et par son atmosphère trouble qu’apporte la mise en scène de Schrader. Il est toutefois un peu décevant par le peu de clefs qu’il nous donne sur les personnages et l’obscur dénouement est bien trop rapide. De ce fait, l’ensemble paraît assez artificiel et donne une impression d’exercice de style. La photographie est assez belle, les ruelles de Venise et ses crépuscules sont splendides.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Christopher Walken, Rupert Everett, Natasha Richardson, Helen Mirren
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Étrange Séduction (The Comfort of Strangers)Rupert Everett et Natasha Richardson
dans Étrange Séduction (The Comfort of Strangers) de Paul Schrader.

Étrange Séduction (The Comfort of Strangers)Christopher Walken dans Étrange Séduction (The Comfort of Strangers) de Paul Schrader.

6 janvier 2023

L’amour, l’après-midi (1972) de Eric Rohmer

L'amour, l'après-midiFrédéric, associé dans un cabinet d’affaires, marié et père d’un enfant, aime sa femme Hélène, professeure d’anglais. Pourtant depuis quelque temps, il médite sur son rapport aux femmes, à la sienne et à celles qu’il croise dans sa vie quotidienne. Il ressent aussi une angoisse discrète l’après-midi. Un jour, Chloé, ancienne maîtresse d’un de ses amis de jeunesse, reprend contact avec lui…
L’Amour l’après-midi est un film français écrit et réalisé par Éric Rohmer. Il s’agit du sixième et dernier des Six contes moraux. Le dilemme ici exposé est celui d’un trentenaire, à la vie bien rangée, perturbé par l’irruption d’une jeune femme très libre, tout à l’opposé de son mode de vie. La jeune Chloé incarne l’irrégularité, le désordre, alors que la vie de Frédéric est d’une régularité presque monacale (Chloé est l’archétype séduisant de la jeune femme soixante-huitarde, qui peut paraître un peu daté aujourd’hui). Comme dans les autres Contes moraux, l’ensemble est très écrit, très littéraire, d’un beau classicisme, avec des personnages qui semblent au dessus de toute préoccupation matérielle. Le dénouement très moral peut surprendre mais Rohmer ne cherche pas à nous convaincre dans ses Contes moraux, il se place (et nous place) en observateur. De plus, il ne faut pas considérer cette fin sur le plan de la moralité dite bourgeoise mais plutôt sur un aboutissement du schéma récurrent dans ces Contes,  un homme plutôt solitaire, qui s’est formé une sorte de carapace pour dominer sa vie (et, dans une certaine mesure, les autres), se retrouve victime d’une attirance qui est contraire à ses choix. S’il est question de moralité, c’est donc d’une moralité personnelle dont il est question.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Bernard Verley, Zouzou, Françoise Verley
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Remarques :
* Dans la « séquence du rêve », Éric Rohmer fait appel à des acteurs qui avaient tenu les rôles principaux des précédents Contes moraux avec une référence directe au film en question. Il s’agit de Françoise Fabian (de Ma nuit chez Maud), Marie-Christine Barrault (de Ma nuit chez Maud), Haydée Politoff (de La Collectionneuse), Laurence de Monaghan (de Le Genou de Claire), Gérard Falconetti (de Le Genou de Claire), Aurora Cornu (de Le Genou de Claire), Béatrice Romand (de Le Genou de Claire).
* On remarquera Claude-Jean Philippe dans un petit rôle (le mari du couple d’amis invité à dîner).
* Le scénario de Je crois que j’aime ma femme (I Think I Love My Wife, 2007), produit et réalisé par l’acteur comique américain Chris Rock, a été librement adapté de L’Amour l’après-midi, avec la participation du comique Louis C.K.

L'amour, l'après-midiZouzou et Bernard Verley dans L’amour, l’après-midi de Éric Rohmer.

Six Contes moraux d’Eric Rohmer :
1963 : La Boulangère de Monceau
1963 : La Carrière de Suzanne
1967 : La Collectionneuse
1969 : Ma nuit chez Maud
1970 : Le Genou de Claire
1972 : L’Amour l’après-midi

4 septembre 2022

Les Tueurs de la lune de miel (1970) de Leonard Kastle

Titre original : « The Honeymoon Killers »

Les tueurs de la lune de miel (The Honeymoon Killers)Martha Beck est une infirmière-chef au tempérament maussade, complexée en raison de son surpoids. Elle fait la rencontre de Raymond Fernandez grâce à un club de rencontres et le suit à New York. Il lui révèle qu’il est un escroc qui gagne sa vie en séduisant des femmes seules…
Initialement, The Honeymoon Killers était prévu pour être dirigé par Martin Scorsese (cela aurait été son second long métrage) mais il fut renvoyé dès le début du tournage parce qu’il travaillait trop lentement. Leonard Kastle, qui en a écrit le scénario, se retrouva en charge de le réaliser. Ce sera l’unique réalisation de ce compositeur d’opéra. L’histoire est basée sur des faits réels survenus à la fin des années quarante. L’approche choisie par Kastle est neutre. Il a tourné en noir et blanc, avec un budget réduit, dans un style qui évoque par moments un documentaire. Le résultat est assez dérangeant. Alors que nombre de films nous offre une vision idéalisée du banditisme (pensons par exemple à Bonnie & Clyde sorti trois ans plus tôt), The Honeymoon Killers nous présente ce couple criminel dans sa réalité, sans concessions ni artifice, et cette réalité est sordide, moche, sans éclat… et dérangeante. Le film n’a pas connu un grand succès à sa sortie mais a acquis le statut de film culte au fil des ans. Un groupe de punk-rock américain a pris le nom The Honeymoon Killers en 1983, en hommage au film. Le film est ressorti en 1992.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Shirley Stoler, Tony Lo Bianco
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Remarque :
* Texte en prologue : « Ce drame incroyable et choquant que vous êtes sur le point de voir est probablement l’affaire la plus bizarre des annales du crime américain. Les événements incroyables montrés sont basés sur des comptes rendus de journaux et des archives judiciaires. C’est une histoire vraie. »

Les tueurs de la lune de miel (The Honeymoon Killers)Tony Lo Bianco et Shirley Stoler dans Les tueurs de la lune de miel (The Honeymoon Killers) de Leonard Kastle

Autre adaptation de la même affaire réelle :
Coeurs perdus (Lonely Hearts) de Todd Robinson (2006) avec John Travolta et Salma Hayek.

5 décembre 2021

Les Dents du diable (1960) de Nicholas Ray

Titre original : « The Savage Innocents »
Titre original italien : « Ombre bianche »

Les dents du diable (The Savage Innocents)Inuk est un inuit. Robuste et excellent chasseur, il a toujours de quoi manger et se vêtir mais il sait qu’il doit maintenant trouver une femme…
The Savage Innocents (on peut oublier le titre français qui doit être une erreur car on ne voit vraiment pas à quoi il se rapporte) est une production anglo-franco-italienne. Il s’agit de l’adaptation du roman Top of the World de l’écrivain suisse Hans Ruesch qui se déroule dans le monde polaire des Inuits. Ce film assez méconnu étonne à priori dans la filmographie de l’américain Nicholas Ray. La première moitié du film est une description presque ethnologique du mode de vie d’un chasseur inuit, montrant les pratiques pour chasser, manger, se mettre en couple et les autres habitudes de la vie courante. Anthony Quinn est étonnamment crédible en Inuit, il se donne entièrement et, hormis la langue (ils parlent anglais), l’immersion est totale. Ensuite, à la moitié du récit, notre héros va se retrouver confronté à la société moderne, sous la forme d’une poignée d’occidentaux venus acheter des peaux et d’un missionnaire. Leur méconnaissance des traditions Inuits va engendrer une situation dramatique. On retrouve là l’un des thèmes chers à Nicholas Ray, une approche très rousseauiste (« l’homme est bon par nature, c’est la société qui le corrompt ») que l’on peut trouver certainement un peu simplificatrice dans son application ici, sans que cela enlève aux qualités du film. Il est non seulement intéressant mais aussi très beau avec ses belles images tournées dans le Grand Nord canadien. Les scènes tournées en studio sont aisément identifiables, certes, mais elles restent très crédibles. Une intéressante découverte.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Anthony Quinn, Yôko Tani, Peter O’Toole, Carlo Giustini, Anna May Wong
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Remarques :
* Hans Ruesch, auteur du roman, n’a en réalité jamais vu un seul inuit de sa vie. Il a basé son récit en partie sur le film Eskimo de W.S. Van Dyke (1933).
* Bob Dylan admirateur du film, a écrit en 1967 la chanson Quinn the Eskimo (The Mighty Quinn) en hommage à l’interprétation d’Anthony Quinn. La chanson a été reprise par Manfred Mann en 1968 qui en a fait un tube planétaire (« Come on without, come on within, you’ll not see nothing like the Mighty Quinn« ).
* Peter O’Toole (qui interprète l’un des deux policiers blancs) a demandé que son nom soit retiré du générique car sa voix est doublée. A noter que l’acteur n’était pas encore connu, il tournera Lawrence d’Arabie deux ans plus tard.
* Une séquence supplémentaire de chasse à l’ours a été perdue dans un accident d’avion.
* Le réalisateur de la seconde équipe est l’italien Baccio Bandini.

Les dents du diable (The Savage Innocents)Anthony Quinn dans Les dents du diable (The Savage Innocents) de Nicholas Ray.

Les dents du diable (The Savage Innocents)Yôko Tani, Anthony Quinn et Kaida Horiuchi dans Les dents du diable (The Savage Innocents) de Nicholas Ray.