1 septembre 2012

Le fils prodigue (1955) de Richard Thorpe

Titre original : « The prodigal »

Le fils prodigueEn l’an 70 avant Jésus Christ, le fils d’un riche propriétaire hébreu quitte le domaine familial après avoir été ébloui par la beauté d’une grande prêtresse païenne… Le fils prodigue est basé sur la (courte) parabole homonyme de la Bible ; elle est donc très largement étendue et développée. Il s’agit d’une importante production avec de somptueux et couteux décors mais dont l’histoire est particulièrement manichéenne et le traitement très hollywoodien. Les dialogues sont étonnamment pauvres. Même la vision de Lana Turner en grande prêtresse de rites païens déçoit quelque peu car les scènes prêtent plutôt à sourire par leur côté kitsch vraiment marqué. L’actrice, qui n’appréciait guère de tourner dans des films à costumes, reste tout de même le meilleur atout de ce film. On notera aussi quelques bons seconds rôles.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Lana Turner, Edmund Purdom, Louis Calhern, Neville Brand, Francis L. Sullivan
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30 juillet 2012

Le grand alibi (1950) de Alfred Hitchcock

Titre original : « Stage fright »

Le grand alibiUne jeune élève-actrice tente de prouver l’innocence de son ami qui est accusé d’avoir assassiné le mari d’une chanteuse de music hall… Même s’il a été beaucoup critiqué (1) et s’il n’est pas à classer parmi les meilleurs films d’Hitchcock, Le grand alibi n’est pas sans attrait. Il y a cette atmosphère délicieusement anglaise apportée par les seconds rôles, le jeu constant avec le mensonge et une belle interprétation de Jane Wyman, empreinte de candeur et de délicatesse (2)(3). Après un projet ambitieux mais de tournage difficile, Les amants du Capricorne, Le grand alibi Hitchcock a décidé de mettre en scène cette histoire qui manque un peu d’ampleur et dont l’une des erreurs est, selon sa propre analyse a posteriori, qu’à aucun moment les personnages ne sont en danger. Le grand alibi se regarde toutefois sans déplaisir et comporte de belles scènes comme celle du taxi, la fête de patronage ou encore toute la scène finale dans le théâtre.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jane Wyman, Marlene Dietrich, Michael Wilding, Richard Todd, Alastair Sim
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Remarque :
* On remarquera la présence de Patricia Hitchcock, la fille du réalisateur, qui interprète l’une des élèves comédiennes amies de Jane Wyman. C’est sa première apparition à l’écran, avant donc son rôle bien plus connu (la binoclarde Barbara) dans L’inconnu du Nord Express. Elle a également tourné dans Psychose.

(1) – NE LISEZ PAS ce qui suit si vous avez l’intention de voir le film –
Alfred Hitchcock a été beaucoup critiqué pour le flash-back en début de film dans lequel il a enfreint une règle d’or du cinéma : « l’image ne peut mentir ». Hitchcock a admis par la suite qu’il n’aurait pas du le tourner.

(2) Hitchcock raconte avoir eu toutefois du mal à diriger Jane Wyman pour les scènes où elle était censée s’enlaidir pour se faire passer pour l’habilleuse de Marlene Dietrich. L’actrice ne supportait pas de paraître sous un jour défavorable à côté de Marlene et a tout fait pour améliorer peu à peu son apparence.

(3) On a beaucoup critiqué le choix d’Alastair Sim, acteur anglais alors très populaire, pour le rôle du père qui apporte une note comique, il est vrai, plutôt inutile.

Homonyme :
Le grand alibi de Pascal Bonitzer (2008) avec Miou-Miou et Lambert Wilson.

28 juillet 2012

Fripouillard et Cie (1959) de Steno

Titre original : « I tartassati »

Fripouillard et CieHector (Louis de Funès) est « conseiller fiscal ». L’un de ses clients, le commerçant Pezzella (Totò), reçoit la visite d’un contrôleur des impôts (Aldo Fabrizi) qui vient vérifier sa comptabilité… Dans ce Fripouillard et Cie, un spectateur français pourra penser voir « un De Funès » mais en réalité il s’agit d’un film surtout marqué par Totò : ce fabuleux comique italien était d’ailleurs alors au sommet de sa gloire (1) alors que De Funès en était encore loin. Le duo ainsi formé est assez réussi, même si le revers de la médaille de ces productions internationales est d’avoir la moitié des acteurs doublés (le film était vu ici en français, hélas). Heureusement, Totò c’est surtout un visage et il est ici en assez bonne forme dans la peau de ce commerçant qui cherche à tout prix à se faire bien voir de son contrôleur des impôts. De Funès avait alors un jeu bien plus sage que celui qu’il développera par la suite. Fripouillard et CieDe plus, on le sent impressionné par Totò : dans les scènes communes, De Funès est assez retenu alors qu’il se lâche un peu plus dans celles où il n’est pas face à Totò. Et il ne faut pas oublier Aldo Fabrizi, grande personnalité du cinéma italien, très populaire lui aussi : l’acteur-réalisateur a cosigné le scénario en plus d’interpréter avec toute sa bonhommie cet inflexible contrôleur des impôts. Steno a dirigé de nombreuses fois Totò (il est toutefois probable que c’est plus Totò qui dirigeait Totò…) Ce Fripouillard et Cie reste très amusant, classique certes mais amusant, assurément.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Totò, Aldo Fabrizi, Louis de Funès, Jacques Dufilho
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Remarque :
Louis De Funès tournera la même année un autre film avec Totò :
Un coup fumant (Totò, Eva e il pennello proibito) également réalisé par Steno (1959).

(1) Immensément populaire en Italie, Totò a tourné dans plus de 100 films entre 1937 et 1967.

3 juin 2012

Le pont de la rivière Kwai (1957) de David Lean

Titre original : « The bridge on the river Kwai »

Le pont de la rivière KwaiEn 1943, en pleine jungle birmane, un régiment anglais prisonnier des japonais est affecté à la construction d’un pont. Le Colonel anglais s’oppose au commandant japonais du camp de prisonnier car ce dernier veut faire travailler tous les prisonniers, y compris les officiers… Adapté d’un roman de Pierre Boulle (également l’auteur de La Planète des Singes), Le pont de la rivière Kwai est la première des cinq superproductions de David Lean. Le budget alloué par Sam Spiegel fut important, l’image en technicolor est particulièrement soignée. David Lean parvient à insuffler toute une palette de sentiments et même une certaine sensibilité. Le fond du propos est de montrer comment la guerre exacerbe les situations absurdes, ici générée par le comportement archaïque de deux officiers, l’un japonais, l’autre anglais. L’absurdité atteint son paroxysme dans une fin ambigüe, qui ouvre le champ à la réflexion. Le succès fut immense.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: William Holden, Alec Guinness, Jack Hawkins, Sessue Hayakawa
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Remarques :
* Les scénaristes Michael Wilson et Carl Foreman étaient alors sur la liste noire pour de supposées sympathies communistes et leurs noms n’apparaissaient pas au générique. L’Oscar de la meilleure adaptation fut donc attribué à Pierre Boulle! Il fallut attendre 1984 pour que l’Académie leur en attribue la paternité.
* L’histoire est librement inspirée de faits réels : le Lieutenant Colonel Philip Toosey a construit deux ponts sur la rivière Kwai qui furent détruits en 1945, deux ans après leur construction.
* Pierre Boulle a été lui-même prisonnier de guerre en Thaïlande.
* Comme on s’en doute, le personnage du soldat américain ne figurait pas dans le roman de Pierre Boulle. Il a été ajouté pour le public américain.
* L’acteur Sessue Hayakawa a eu une longue carrière d’acteur puisqu’il a tourné dans de très nombreux films muets entre 1914 et 1925.

18 mai 2012

Casque d’or (1952) de Jacques Becker

Casque d'orAu tout début du XXe siècle à Belleville, Marie, une jeune prostituée surnommée Casque d’or à cause de sa chevelure blonde, est avec Roland, un petit malfrat qui fait ses mauvais coups au sein d’une bande dirigée par un petit caïd respectable. Dans une guinguette, Marie rencontre Manda, un ancien voyou devenu honnête. Entre eux, c’est le coup de foudre… Jacques Becker recrée merveilleusement l’atmosphère des faubourgs de Paris des années 1900. Il s’attache surtout à décrire les hommes, les lieux qu’ils fréquentent (où la bonne bourgeoisie vient parfois s’encanailler), la force de l’appartenance à un clan. Simone Signoret et Serge Reggiani sont magnifiques, d’une beauté empreinte de naturel. Leur prestation est d’une grande force. Tous les seconds rôles sont parfaitement tenus, Jacques Becker montrant là une très grande maitrise. Il y a de très belles scènes : la guinguette, le combat et bien entendu ce superbe plan final sur le visage de Simone Signoret. A sa sortie, Casque d’or fut très mal accueilli par la critique française (en Angleterre, il fut en revanche porté aux nues). Devant cet insuccès, Jacques Becker déclara même qu’il trouvait que son film avait trop de temps morts. Les choses ont bien changé depuis puisqu’il est aujourd’hui classé parmi les meilleurs films du cinéma français. A juste titre.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Simone Signoret, Serge Reggiani, Claude Dauphin, Raymond Bussières, Loleh Bellon, Dominique Davray
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Remarque :
Le film est librement inspiré d’une affaire réelle datant de janvier 1902 : deux bandes rivales s’affrontent en une véritable bataille rangée dans le 20e arrondissement de Paris. L’objet de la querelle est une prostituée, Amélie Elie surnommée Casque d’or en raison de son abondante chevelure blonde ramenée sur le sommet de la tête. L’affaire est montée en épingle par la presse et c’est à cette occasion qu’un journaliste du Petit Journal crée le mot « apache » pour désigner les voyous qui agissent en bande : « Ce sont là des mœurs d’Apaches, du Far West, indignes de notre civilisation. Pendant une demi-heure, en plein Paris, en plein après-midi, deux bandes rivales se sont battues pour une fille des fortifs, une blonde au haut chignon, coiffée à la chien ! »
(« Fortifs » est un mot familier, tombé aujourd’hui en désuétude, qui désigne les fortifications qui ont entouré Paris jusqu’en 1919.)

13 mai 2012

Barbe-Noire le pirate (1952) de Raoul Walsh

Titre original : « Blackbeard, the pirate »

Barbe-Noire le pirateDans les Caraïbes, le pirate Barbe Noire est poursuivi par Sir Henry Morgan, ancien flibustier reconverti. Le jeune Edward Maynard cherche à prouver que Morgan est toujours dans la piraterie… Le scénario de Barbe-Noire le pirate est plutôt complexe sur les relations entre les personnages mais, hélas, il manque d’équilibre. Conformément au titre, le personnage majeur de ce film est le truculent Barbe Noire : il est le plus intelligent, rusé et malin, parfaitement amoral mais plein d’humour. Il est interprété de façon très démonstrative par Robert Newton qui éclipse un peu tous les autres acteurs. Le justicier Maynard paraît comparativement bien fade. Linda Darnell a, comme toujours, une forte présence à l’écran, apportant une belle touche de sensualité, mais son rôle reste hélas limité. Barbe-Noire le pirate est un film souvent bien mal considéré. Certes, il n’est pas à classer parmi les grands films de Raoul Walsh mais il reste plaisant à regarder : un divertissement haut en couleur.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Robert Newton, Linda Darnell, William Bendix, Keith Andes, Torin Thatcher
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Remarque :
Les personnages sont réels. Mais dans la réalité, Sir Henry Morgan est mort alors que Barbe Noire n’avait que 8 ans. Il n’a donc jamais pourchassé le célèbre pirate.

9 mai 2012

Souvenirs perdus (1950) de Christian-Jaque

Souvenirs perdusAux Objets trouvés, on rencontre des objets très inattendus. C’est l’histoire de quatre d’entre eux qui nous est ici contée… Souvenirs perdus est un film à sketches, conçu pour avoir à son affiche un grand nombre d’acteurs connus. Adaptées par Christian-Jaque et Jacques Companéez, ces quatre histoires n’ont pas vraiment de lien entre elles : deux jouent la carte de l’humour, les deux autres sont plus mélancoliques. Le film souffre des défauts du genre et paraît superficiel. L’objet à la source de chaque histoire n’a souvent qu’un rôle négligeable. L’histoire avec Gérard Philipe est certainement la plus originale et la plus forte mais, au final, pêche par sa brièveté. La dernière, écrite par Prévert, est la plus amusante avec un jeune Yves Montand terriblement charmeur. Souvenirs perdus nous laisse hélas sur notre faim.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Bernard Blier, Pierre Brasseur, Suzy Delair, Danièle Delorme, Edwige Feuillère, Yves Montand, François Périer, Gérard Philipe, Armand Bernard, Gilberte Géniat
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Les sketches :
1. Une statuette d’Osiris
écrit par Jacques Prévert
avec Pierre Brasseur et Edwige Feuillère
Deux anciens amants se rencontrent un soir de Noël, chacun faisant croire à l’autre qu’il mène une belle vie…
2. La couronne mortuaire
écrit par Henry Jeanson et Pierre Véry
avec Suzy Delair, François Périer et Armand Bernard
Alors qu’il doit se rendre à l’enterrement de son oncle, un coureur de jupons reçoit la visite inattendue d’une de ses anciennes conquêtes. Son majordome lui fait croire que c’est lui qui est mort…
3. Une cravate de fourrure
écrit par Henry Jeanson et Pierre Véry
avec Danièle Delorme et Gérard Philipe
Un homme désespéré tue pour se venger d’une sombre histoire familiale. Il rencontre une jeune fille sur le point de ses suicider…
4. Le violon
écrit par Jacques Prévert et Pierre Prévert
avec Bernard Blier, Yves Montand et Gilberte Géniat
Amoureux de l’épicière, un agent de police feint de s’intéresser aux talents de violoniste de son jeune garçon…

1 mai 2012

La maison Bonnadieu (1951) de Carlo Rim

La maison BonnadieuFélix Bonnadieu sait que sa femme Gabrielle le trompe avec un jeune garçon de 19 ans. Mais il aime profondément sa femme et va tenter de la reconquérir… Avant d’être réalisateur, le français Carlo Rim a d’abord été scénariste et l’on ne sera donc pas étonné que le point fort de La maison Bonnadieu soit plutôt du côté de son scénario. Carlo Rim s’amuse avec l’adultère dans cette histoire où toutes les femmes trompent leur mari. Il y a beaucoup d’humour dans les dialogues. Très bonne interprétation avec Danielle Darrieux, toujours aussi belle, et Bernard Blier parfait en mari désespéré et un peu gauche. Les seconds rôles sont également très bien définis et tenus. La chanson La complainte des infidèles, ici interprétée par Mouloudji lui-même, est devenue célèbre. La maison Bonnadieu est un film très plaisant.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Danielle Darrieux, Bernard Blier, Françoise Arnoul, Michel François, Yves Deniaud, Berthe Bovy
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29 avril 2012

Mogambo (1953) de John Ford

MogamboVictor Marswell est installé dans la brousse africaine. Son métier est de capturer des animaux sauvages qu’il revend aux zoos et d’organiser des safaris pour de riches touristes ou chercheurs. Un jour, il voit arriver Eloise Kelly, invitée par un maharadja qui était en fait reparti prématurément chez lui, puis un anthropologue anglais et sa femme… Mogambo est l’adaptation d’une pièce de Wilson Collison qui avait été portée à l’écran vingt ans auparavant avec déjà Clark Gable dans le rôle principal (1). Au début des années cinquante, Hollywood redécouvre l’attrait de l’Afrique. De superbes plans de nature africaine sont insérés et une bonne partie du film a été tournée sur place. L’histoire repose sur beau trio de personnages aux caractères très différents. L’atmosphère est électrique, Ava Gardner apporte une sensualité presque animale et le film est rempli de sous-entendus et d’allusions sexuelles. Le film fut un succès à l’époque mais personnellement, Mogamboje n’ai jamais compris pourquoi Mogambo était, depuis, si mal jugé. Je le trouve toujours aussi intense et enthousiasmant, doté d’une luxueuse mise en scène parfaitement maitrisée et d’un superbe trio d’acteurs. Le seul défaut que l’on puisse lui reprocher est sa fin : les deux dernières minutes sont bâclées et guère convaincantes. Peut-être était-ce là l’endroit des fameuses trois pages de scénario arrachées… (2)
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Clark Gable, Ava Gardner, Grace Kelly, Donald Sinden, Philip Stainton
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(1) La Belle de Saigon (Red dust) de Victor Fleming (1932) avec Clark Gable, Jean Harlow et Mary Astor. L’action se déroulait dans la forêt indochinoise. Voir nos commentaires sur ce film
(2) C’est sur le tournage de Mogambo qu’eut lieu une célèbre anecdote…
Un jour, John Ford voit arriver sur le plateau le producteur qui se dit inquiet des trois jours de retard du tournage. Irrité, John Ford lui demande :
« Trois jours, ça fait trois pages de scénario, non ? »
« Euh, oui, sans doute. »
John Ford prend alors le scénario, l’ouvre au hasard dans la partie non encore tournée et en arrache trois pages avant de lancer au producteur interloqué : « Voilà, maintenant on n’est plus en retard ! Si vous voulez bien nous laisser, on a du travail. »

Moralité : Il faut éviter d’aller embêter John Ford sur un tournage!

Remarques :
* La signification du titre n’est pas évidente : l’explication selon laquelle le producteur Sam Zimbalist aurait déformé le nom d’un night club de Los Angeles, Le Mocambo, est certainement farfelue. Ailleurs, on peut lire que Mogambo signifie « passion » en langue swahili, pour d’autres cela signifie « grand gorille ». Ailleurs encore, c’est un signal d’alerte utilisé par une tribu du Kenya…
* Pendant le tournage, une passion s’est réellement développée entre Clark Gable et Grace Kelly (malgré les quelque 30 ans de différence) et l’aventure a duré ensuite plusieurs mois.

4 avril 2012

Los olvidados (1950) de Luis Buñuel

Los olvidadosDans la banlieue la plus pauvre de Mexico, un groupe d’adolescents traine dans les rues. L’un deux, El Jaibo, récemment évadé d’une maison de redressement, possède un ascendant sur les autres et les entraîne à commettre des méfaits. Le jeune Pedro se retrouve impliqué malgré lui… Los olvidados (les oubliés) marque le retour de Luis Buñuel sur le devant de la scène. Il s’est immergé plusieurs mois dans les bidonvilles de Mexico pour observer et voir la réalité de très près. Il signe ainsi un film proche du néo-réalisme italien (1), un film fort, sans sensationnalisme ni excès de misérabilisme mais dont les images sont marquantes. Luis Buñuel ne porte pas de jugement, il n’accuse pas la société qui tente d’apporter des solutions, il rend compte d’une situation sans issue. Il n’y a aucun manichéisme : fourbe et traitre, El Jaibo est la figure du mal et pourtant Buñuel le rend attachant dans une courte scène. Le seul jugement vraiment sévère est porté sur la mère de Pedro, incapable de donner la moindre parcelle d’amour. Los olvidados fut d’abord très mal reçu au Mexique. Déjà pendant le tournage, l’équipe était hostile mais, à sa sortie, Buñuel dut faire face à de nombreuses critiques acerbes : on lui reprochait de donner une mauvaise image du pays. Ce n’est qu’après un accueil triomphal à Cannes (en partie grâce à ses amis surréalistes) que le film put être plus largement distribué (2). Los olvidados a été inscrit par l’Unesco au Registre Mémoire du Monde en 2003.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Roberto Cobo, Estela Inda, Miguel Inclán, Alfonso Mejía, Alma Delia Fuentes
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Remarques :
* En France, les distributeurs sortirent le film sous le titre Los olvidados, Pitié pour eux, sous-titre qualifié de « ridicule » par Buñuel.
* Une autre fin, tournée par sécurité par Buñuel qui craignait la censure, a été redécouverte 50 ans après la sortie. Ce happy-end n’a heureusement jamais été utilisé. Il est présent sur certaines versions en DVD.

(1) Luis Buñuel dit avoir beaucoup aimé Sciuscià de Vittorio de Sica.
(2) Dans ses mémoires, Luis Buñuel raconte que Georges Sadoul avait reçu ordre du Parti Communiste français de ne pas parler du film, jugé film bourgeois (à cause de l’intervention de l’agent de police dans la scène du pédophile et de l’angélisme de la ferme/maison de redressement). Ce n’est que lorsque Poudovkine écrivit un article louangeur sur Los olvidados dans La Pravda quelques mois plus tard, que le PCF révisa instantanément son jugement.