18 septembre 2016

Smoking/No Smoking (1993) de Alain Resnais

Smoking/No SmokingDans une petite ville du nord de l’Angleterre, Celia Teasdale est la femme du directeur d’école, un homme renfrogné et alcoolique. Miles Coombes est le meilleur ami de son mari, sa femme volage Rowena alimente les commérages. Le jardinier de l’école, Lionel Hepplewick, propose d’arranger le jardin des Teasdale. Il fréquente Sylvie Bell, l’employé de maison des Teasdale… Smoking/No Smoking est adapté d’une pièce de l’anglais Alan Ayckbourn dont il conserve les deux grandes originalités : tous les rôles sont interprétés par seulement deux acteurs (5 pour Sabine Azéma et 4 pour Pierre Arditi) et l’histoire explore de nombreuses variantes suivant les grandes décisions prises par tel ou tel personnage. Pendant les quelque 5 heures que totalisent les deux films (qui peuvent être vus dans un ordre quelconque), il y a ainsi 14 variations. Smoking/No Smoking Elles aboutissent à des situations très différentes avec, à chaque fois, un développement intermédiaire (5 jours ou 5 semaines plus tard) et un épilogue (5 ans plus tard) toujours assez fort. Les dialogues écrits par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri apportent beaucoup d’humour à l’ensemble. Sabine Azéma et Pierre Arditi font tous deux une superbe performance, interprétant des personnages de styles très différents. L’ensemble est élégant et très plaisant. Smoking/No Smoking était indéniablement une entreprise hasardeuse mais se révèle être parfaitement réussi.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Sabine Azéma, Pierre Arditi
Voir la fiche du film et la filmographie de Alain Resnais sur le site IMDB.

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Remarques :
* La pièce d’Alan Ayckbourn comportait seize variations et était prévue pour être jouée sur huit soirs consécutifs, deux variations par soir. Alain Resnais n’en a gardé que quatorze, deux variations jugées trop british ayant été écartées (une partie de cricket et une pièce médiévale).
* Alain Resnais adaptera deux autres pièces d’Alan Ayckbourn par la suite : Coeurs (2006) et Aimer, boire et chanter (2014).

Smoking / No smoking
Sabine Azéma et Pierre Arditi dans Smoking de Alain Resnais.

Smoking / No smoking
Pierre Arditi et Sabine Azéma dans No Smoking de Alain Resnais.

Smoking / No smoking
Sabine Azéma et Pierre Arditi dans No Smoking de Alain Resnais.

7 novembre 2015

Good Morning, Vietnam (1987) de Barry Levinson

Good Morning, VietnamUn nouveau disc jockey, connu pour son humour, arrive au Vietnam pour animer la radio des forces armées. Son ton irrévérencieux va le rendre instantanément populaire chez les soldats au grand dam de ses supérieurs directs… Les films abordant la guerre du Vietnam sous un angle humoristique ne sont pas légion et Barry Levinson parvient à trouver le juste équilibre grâce à une belle utilisation des talents comiques de Robin Williams. Tout le film repose sur la performance assez spectaculaire de l’acteur où l’improvisation, a-t-on affirmé, tient une place importante : certains trouveront qu’il en fait beaucoup mais c’est justement quand il en fait trop qu’il excelle… Hormis cela, le film a des ressorts assez classiques, le gentil trublion en prise à des chefs bornés et imbéciles, et se charge d’une intrigue sentimentale assez inutile qui relève d’un certain idéalisme. Sur la guerre en elle-même, le propos est finalement assez édulcoré, teinté d’une ironie bienveillante, jamais mordante. Si le film met en évidence la censure des informations diffusées (ce qui est difficilement qualifiable de révélation), il n’atteint vraiment une dimension que lors de la scène emblématique où l’on voit des bombardements de villages alors que Louis Armstrong chante « It’s a wonderful world » : ce spectaculaire télescopage crée une image forte. Pour le reste, Good Morning, Vietnam est un surtout un excellent divertissement, assez unique en son genre toutefois.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Robin Williams, Forest Whitaker, Bruno Kirby
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Good morning Vietnam
Robin Williams et Forest Whitaker dans Good Morning, Vietnam de Barry Levinson.

12 novembre 2013

Holy Motors (2012) de Leos Carax

Holy MotorsUn homme est conduit dans une immense limousine à différents endroits de Paris pour une dizaine de « rendez-vous » où il tient un rôle à chaque fois différent… En préambule, Leos Carax se met en scène en dormeur qui se réveille, sort de sa chambre pour se retrouver dans une immense salle de spectacle où des spectateurs figés attendent. Holy Motors est en effet le premier long métrage depuis Pola X (1999). Le film a été qualifié de chef d’oeuvre par la critique avec une unanimité dont elle a le secret. On peut être un peu plus nuancé face à cet OVNI cinématographique. Certes, il montre de belles fulgurances et des moments d’une beauté envoutante. Certes, il sait nous surprendre, nous déstabiliser, casser nos repères, questionner sur les rapports entre spectacle et réalité et, par là même, sur notre vie (qui pourrait n’être qu’une succession de rôles)… mais ces réflexions ne sont finalement qu’effleurées. Holy Motors donne parfois l’impression d’être plus un film de performance (celle de Denis Lavant est évidente), une performance hélas assez froide et même déshumanisée. Holy Motors reste toutefois très intéressant, ne serait-ce que par le foisonnement d’idées cinématographiques de Leos Carax.
Elle: 2 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Denis Lavant, Edith Scob, Eva Mendes, Kylie Minogue, Michel Piccoli
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8 septembre 2012

L’homme aux mille visages (1957) de Joseph Pevney

Titre original : « Man of a thousand faces »

L'homme aux mille visagesVingt sept ans après la mort de Lon Chaney, Universal décide de consacrer un film à la vie de cet acteur hors normes et tourmenté, l’un des plus populaires du studio dans les années vingt. L’homme aux mille visages n’échappe pas à hélas aux clichés et travers hollywoodiens notamment en mettant fortement l’accent sur les déboires conjugaux de Lon Chaney et sur sa lutte pour récupérer son fils mais le film est rendu remarquable par la performance de James Cagney qui réalise de véritables prouesses pour faire revivre le talentueux acteur. Trois scènes de films sont brièvement recréées : The Miracle Man de 1919 où ce que fait Cagney est même plus spectaculaire que dans l’original(1), Notre-Dame de Paris de 1923 et Le Fantôme de l’opéra de 1925, trois films Universal(2).
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: James Cagney, Dorothy Malone, Jane Greer
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Remarques :
* Le jeune Irving Thalberg est interprété par Robert J. Evans, jeune homme découvert au bord d’une piscine par Norma Shearer et qui deviendra ensuite… producteur et directeur de production à la Paramount.
* La scène-clé du début du film, où la femme de Lon Chaney découvre ses parents et les rejette, est une invention de scénariste. Dans la réalité, elle les connaissait avant leur mariage.
* L’actrice qui joue la soeur de Lon Chaney est Jeanne Cagney, soeur de James Cagney.

(1) The Miracle Man de George Loane Tucker (1919) est un film perdu dont seules quelques scènes subsistent. La scène de la fausse guérison est l’une d’elle. Elle est en réalité plus rapide et vue de plus loin que celle de L’homme aux mille visages où James Cagney est vraiment étonnant. En revanche, Cagney ne parvient pas à ramper sur le sol comme Lon Chaney.
(2) Après Le Fantôme de l’Opéra (1925), Lon Chaney a quitté Universal pour passer à la M.G.M. (tout comme Irving Thalberg d’ailleurs). D’autre part, The penalty (1920), qui a été un formidable tremplin pour la carrière de Lon Chaney, est un film Goldwyn ; c’est pourquoi il n’est ici qu’à peine évoqué.

12 juin 2012

Satan (1920) de Wallace Worsley

Titre original : « The Penalty »

SatanA la suite d’un accident, un jeune garçon est inutilement amputé des deux jambes à cause de la précipitation d’un docteur. Des années plus tard, nous le retrouvons à la tête de la pègre et bien décidé à se venger… The Penalty est le film qui a fait éclater au grand jour le talent de Lon Chaney (1). C’est l’un de ses plus grands rôles. Il joue ici avec ses deux jambes repliées, mollet contre cuisse. Il ne pouvait ainsi jouer que quelques minutes à la fois, avant que la douleur ne soit intolérable. Les muscles de ses jambes ne s’en remettront jamais tout à fait. Et pourtant, il semble se déplacer avec grande aisance. Mais Lon Chaney, ce n’est pas qu’une performance physique, c’est aussi un visage qu’il peut modeler de mille et une façons pour créer autant d’expressions. The Penalty est globalement assez terrifiant, avec un climat assez lourd qui nous met mal a l’aise mais le plus remarquable réside dans la palette de sentiments que nous inspire le personnage joué par Lon Chaney : tantôt il nous fait frémir, tantôt il nous fait pitié, tantôt on le comprend, tantôt on le hait. Il montre un subtil mélange de cruauté et d’humanité. Les seconds rôles sont très bien tenus. La fin gentillette est (hélas) en contraste total avec le reste du film.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lon Chaney, Jim Mason, Ethel Grey Terry, Claire Adams
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Remarques :
* Un plan montrant Lon Chaney descendant un escalier sur ses deux jambes (entières) fut inséré à la fin du film pour prouver au public que l’acteur n’était pas lui-même amputé. Il fut enlevé lors d’une ressortie en 1926 et il est depuis perdu.

* On notera quelques touches assez ostensibles d’anticommunisme. Cela peut étonner pour 1920 mais il faut se rappeler que le Parti Communiste américain a été créé en 1919 et que ses premières années furent assez agitées.

* L’auteur du livre, Gouverneur Morris (1876-1953), est l’arrière petit fils de Gouverneur Morris (1752-1816), homme politique, père fondateur des Etats-Unis d’Amérique. Cet illustre aïeul avait d’ailleurs perdu une jambe à l’âge de 28 ans, dans un accident disait-on (en réalité, il semble qu’il ait sauté par une fenêtre pour échapper à un mari trompé). Serait-ce cette infirmité qui a inspiré l’arrière petit-fils pour son roman ?

(1) Bien que Lon Chaney ait tourné dans de très nombreux films à partir de 1913, il a été principalement remarqué dans un film de 1919, The Miracle Man, (film dont seules quelques minutes sont parvenues jusqu’à nous). The Penalty a ensuite vraiment démontré qu’il était un acteur totalement unique.

Homonyme (sans autre lien que le nom) :
The Penalty de Harold S. Bucquet (1941) avec Lionel Barrymore