3 septembre 2022

A la recherche de Garbo (1984) de Sidney Lumet

Titre original : « Garbo Talks »

À la recherche de Garbo (Garbo Talks)Estelle est une femme énergique toujours prête à se battre avec vigueur contre les injustices et les abus. Son fils Gilbert est tout à l’opposé : dans la société où il est employé, il est l’objet de brimades et il ne contrarie jamais ses supérieurs. Apprenant qu’elle a une tumeur au cerveau, Estelle demande à son fils de rencontrer son idole de toujours, Greta Garbo…
À la recherche de Garbo est un film américain écrit par Larry Grusin et réalisé par Sidney Lumet. Le réalisateur se lance dans un genre qu’il a peu ou pas exploré au cours des quelque 25 années de carrière qu’il a derrière lui : la comédie. Le récit a le mérite de l’originalité. Tout n’est pas réussi mais Anne Bancroft montre des talents surprenants pour la comédie. Certains moments sont savoureux comme la scène où elle grimpe sur un immeuble en construction pour aller réprimander un groupe d’ouvriers qui avaient lancé des paroles obscènes envers une passante. L’actrice se montre tout aussi parfaite dans les scènes émouvantes, son récit de ses émois cinématographies sur son lit d’hôpital en est le meilleur exemple. Le film est aussi, et surtout, un hommage au cinéma et à l’un de ses plus grands mythes, Greta Garbo. C’est toutefois un film en demi-teinte, mais inattendu de la part de Sidney Lumet.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Anne Bancroft, Ron Silver, Carrie Fisher, Catherine Hicks, Steven Hill, Howard Da Silva
Voir la fiche du film et la filmographie de Sidney Lumet sur le site IMDB.

Voir les autres films de Sidney Lumet chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Sidney Lumet

Remarques :
* Les producteurs n’ont pas réussi à trouver Greta Garbo pour lui demander d’apparaître dans le film (ce qu’elle aurait, bien entendu, très certainement refusé). A noter que Greta Garbo avait alors 79 ans. L’actrice est décédée en 1990. Son dernier film date de 1941.
* Le titre original fait référence au premier film parlant tourné par Greta Garbo, Anna Christie (1930). La MGM avait utilisé comme accroche publicitaire « Garbo Talks ».

À la recherche de Garbo (Garbo Talks)Ron Silver et Carrie Fisher dans À la recherche de Garbo (Garbo Talks) de Sidney Lumet.

À la recherche de Garbo (Garbo Talks)Anne Bancroft dans À la recherche de Garbo (Garbo Talks) de Sidney Lumet.

19 mars 2019

Taxandria (1994) de Raoul Servais

TaxandriaUn jeune prince, condamné à réviser ses examens dans un hôtel isolé en bord de la mer, s’ennuie. Il rencontre le gardien du phare qui lui ouvre les portes d’un monde imaginaire et hors du temps, Taxandria…
Taxandria est l’unique long métrage du belge Raoul Servais qui a signé par ailleurs une quinzaine de courts métrages d’animation. Il est très influencé par les surréalistes, notamment par Magritte et Delvaux qu’il connaît bien. Il s’est alloué ici les services du dessinateur de bandes dessinées François Schuiten pour les décors de ce projet qu’il a longuement couvé. Ce n’est pas un film d’animation à proprement parler : il s’agit (pour la partie dans le monde imaginaire) d’incrustation de personnages réels dans des décors dessinés. C’est un projet assez admirable mais hélas le résultat est un peu décevant car la magie n’opère pas vraiment. Il y a pourtant de très beaux moments mais ce monde post-apocalyptique où le temps est arrêté, où images et machines sont interdites, nous laisse un peu de marbre. Il n’en reste pas moins que Taxandria est une œuvre poétique et artistique assez remarquable, car elle est assez unique en son genre.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Armin Mueller-Stahl, Katja Studt, Daniel Emilfork, Cris Campion
Voir la fiche du film et la filmographie de Raoul Servais sur le site IMDB.

Voir les livres sur Raoul Servais

Voir le site :  Alta Plana  « Encyclopédie impossible et infinie du monde créé par Schuiten & Peeters »

Taxandria
François Schuiten a dessiné les décors de Taxandria de Raoul Servais.

Taxandria
Une ligne téléphonique façon Taxandria.

Taxandria

Taxandria
Taxandria de Raoul Servais.

20 mars 2018

Excalibur (1981) de John Boorman

ExcaliburGrâce à Merlin l’Enchanteur, le roi Uter Pendragon possède l’épée mythique Excalibur. Avant de mourir dans une bataille, il la plante dans un bloc de granit. Seul le jeune Arthur, son fils illégitime, parviendra plusieurs années plus tard à l’en extirper devenant par ce geste le nouveau roi d’Angleterre. Il parvient à rétablir la paix et crée la confrérie des Chevaliers de la Table ronde…
La Légende arthurienne a été porté plusieurs fois à l’écran mais la version de John Boorman est indéniablement la plus belle. Le scénario se base sur les écrits de Thomas Malory (milieu du XVe siècle) qui ont l’avantage de compiler légendes et écrits pour en faire un récit chronologique, comblant éventuellement les trous. John Boorman parvient à restituer tout le souffle épique de ces histoires où la magie se mêle aux luttes des humains. Il sait créer des images à la fois fortes et belles, sans démesure de moyens. Le film a été tourné en Irlande en évitant d’utiliser des acteurs connus pour concentrer l’attention sur le récit : bon nombre d’acteurs viennent de la scène shakespearienne anglaise ce qui donne une indéniable intensité à l’interprétation. Bien entendu, tout cela pourra paraître vieillot aux spectateurs nourris aux effets spéciaux et aux combats des productions plus récentes, mais rarement une telle ampleur a été donnée à la Légende arthurienne.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Nigel Terry, Helen Mirren, Nicholas Clay, Cherie Lunghi, Paul Geoffrey, Nicol Williamson, Gabriel Byrne
Voir la fiche du film et la filmographie de John Boorman sur le site IMDB.

Voir les autres films de John Boorman chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur John Boorman

 

Excalibur
Superbe plan : l’apparition de l’épée Excalibur dans Excalibur de John Boorman.

Excalibur
Gabriel Byrne (Uther, à cheval) et Nicol Williamson (Merlin) dans Excalibur de John Boorman.

Excalibur
Les Chevaliers de la Table ronde (presque) au grand complet dans Excalibur de John Boorman.

Excalibur
Patrick Stewart tente d’extirper l’épée prisonnière du roc dans Excalibur de John Boorman.

Excalibur
Nigel Terry (Arthur) et Cherie Lunghi (Guenevere) dans Excalibur de John Boorman. A l’arrière-plan à gauche : Nicholas Clay (Lancelot).

11 février 2018

Monseigneur (1949) de Roger Richebé

MonseigneurL’historien-archiviste Piétrefond découvre que le serrurier à deux pas de chez lui, Louis Mennechain, porte le nom de l’homme qui aurait participé à l’évasion de Louis XVII en 1795 : certains affirment qu’il aurait fait passer l’enfant royal pour son propre fils. Après recherches, Piétrefond est persuadé que Louis Mennechain est donc le descendant de Louis XIV. Il alerte un groupe de nobles, nostalgiques de la royauté ; cette découverte dépasse leurs plus folles espérances…
Basé sur un roman de Jean Martet, Monseigneur est comédie basée sur « l’énigme du Temple », ces rumeurs qui prétendaient que l’enfant retrouvé mort dans sa geôle en 1795 n’était pas le Dauphin qui avait survécu grâce à une substitution. Roger Richebé en fait un amusant divertissement en jouant sur le décalage entre la nature très simple et modeste du serrurier et le monde de nobles dans lequel il se retrouve propulsé. Il le fait sans exagération, avec une élégante parcimonie et un humour distillé à petites touches. Les royalistes sont ridiculisés mais sans trop de méchanceté. Les dialogues sont de Carlo Rim. Le film doit aussi sa réussite à la belle prestation de Bernard Blier qui montre ici l’étendue de sa palette, toujours très juste dans son interprétation. Depuis une analyse ADN en 2004, on sait aujourd’hui que c’est bien le Dauphin qui est mort dans sa geôle en 1795.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Fernand Ledoux, Bernard Blier, Yves Deniaud, Marion Tourès, Paul Frankeur
Voir la fiche du film et la filmographie de Roger Richebé sur le site IMDB.

Monseigneur
Bernard Blier dans Monseigneur de Roger Richebé.

9 février 2018

James Bond 007 contre Dr. No (1962) de Terence Young

Titre original : « Dr. No »

James Bond 007 contre Dr. NoLorsque deux agents britanniques disparaissent mystérieusement en Jamaïque, le chef des services secrets britanniques envoie l’agent spécial 007 James Bond pour enquêter. Dès son arrivée, il est espionné et se retrouve rapidement en grand danger…
Premier d’une longue série, James Bond 007 contre Dr No est adapté du roman Docteur No de Ian Fleming, publié en 1958. Il fut produit avec un budget modeste mais n’en établit pas moins les standards du genre avec un agent secret élégant et détaché personnifié à la perfection par Sean Connery, des James Bond girls  très avenantes, des méchants implacables et le fameux générique. Seuls, les gadgets ne sont pas encore là. Le propos est moderne, utilisant des thématiques comme la radioactivité et la conquête de l’espace. Terence Young donne le ton de la mise en scène avec une belle intégration de scènes d’action réalistes. Le succès fut immédiat, d’une ampleur inattendue. Les acteurs Sean Connery et Ursula Andress, alors quasi-inconnus, devinrent du jour au lendemain des stars mondiales. Terence Young signera encore deux autres films de la série.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Sean Connery, Ursula Andress, Joseph Wiseman, Jack Lord, Bernard Lee, Anthony Dawson, Eunice Gayson
Voir la fiche du film et la filmographie de Terence Young sur le site IMDB.

Voir les autres films de Terence Young chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur James Bond

James Bond contre Dr No
« Bond, James Bond »… Le premier plan de Sean Connery dans James Bond 007 contre Dr. No de Terence Young établit un style qui durera…

James Bond contre Dr No
L’une des scènes les plus célèbres du cinéma : l’apparition d’Ursula Andress dans James Bond 007 contre Dr. No de Terence Young. Ian Fleming avait écrit « elle sort de l’eau et apparaît telle la Vénus de Botticelli ». Terence Young parvient merveilleusement à recréer cet enchantement tout en restant très simple (après tout, comme l’actrice l’a répété, elle ne fait que marcher…) Belle utilisation de la lumière naturelle et des nuages (la même scène sur fond de ciel bleu aurait sans doute été plus anodine).
Du fait de son fort accent (Ursula Andress est originaire de la Suisse alémanique), l’actrice est doublée. Ce sera d’ailleurs le cas de beaucoup de James Bond Girls des années soixante.

James Bond contre Dr No
Le premier « méchant » des James Bond : Joseph Wiseman dans James Bond 007 contre Dr. No de Terence Young.

James Bond contre Dr No
Dans la salle à manger du Dr. No, James Bond remarque la présence d’un portrait du duc de Wellington par Goya. Le vol de ce tableau exposé à la National Portrait Gallery avait fait la une des journaux britanniques en 1961. La décision de faire ce clin d’œil à l’actualité n’a été prise que la veille du tournage de la scène. Le tableau ne sera retrouvé qu’en 1965.

14 avril 2014

La fureur de vivre (1955) de Nicholas Ray

Titre original : « Rebel Without a Cause »

La fureur de vivreLe jeune Jim Stark est arrêté pour ivresse au beau milieu de la nuit. Au policier psychologue pour adolescents qui l’interroge, il se désole du manque d’autorité de son père… Des trois grands films de James Dean, La fureur de vivre est le plus emblématique, celui qui a, plus que les autres, créé le mythe attaché à l’acteur. En ce milieu des florissantes années cinquante, toute une jeunesse en butte à des parents incapables de les comprendre s’est identifiée à ce personnage de « rebelle sans cause ». On peut même dire que cette identification a continué de fonctionner sur plusieurs générations, de façon plus ou moins diffuse. Ce qui étonnant, c’est qu’en réalité Jim Stark ne rejette pas vraiment l’image du père, il la cherche plutôt : il reproche au sien le manque d’autorité, son incapacité à lui dire comment il se doit se comporter pour être « un homme ». La petite bande de durs qui attire ces jeunes en manque de repères a, quant à elle, franchi nettement la ligne de la délinquance. Le propos semble donc plus s’adresser aux parents qu’aux enfants, leur intimant d’être présents et de se comporter comme des parents. Si le film est devenu emblématique d’une génération mal comprise, ce n’est donc pas tant par le fond du propos mais par l’angle de vue adopté par Nicholas Ray : de façon très inhabituelle pour l’époque, il adopte en effet le point de vue des jeunes et les parents sont sur le banc des accusés. Le lyrisme de Nicolas Ray donne une indéniable force au film, même si la théâtralité peut paraître excessive. Le clou est bien entendu la scène ultra célèbre de la course de voitures sur la falaise, face au vide. La photographie est assez belle avec une utilisation de la lumière qui évoque par moments l’expressionnisme et une belle utilisation de la couleur (superbe idée du blouson rouge). Le jeu des trois acteurs principaux est très juste : contrairement à ses autres films, le jeu de James Dean ne paraît excessif à aucun moment. La fureur de vivre continue de bénéficier d’une très forte aura. Ce n’est pas le meilleur film de Nicholas Ray mais c’est en tous cas (et de loin, hélas pour ses autres films) son plus grand succès populaire.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: James Dean, Natalie Wood, Sal Mineo
Voir la fiche du film et la filmographie de Nicholas Ray sur le site IMDB.

Voir les autres films de Nicholas Ray chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur James Dean

Remarques :
* Dennis Hopper, âgé alors de 19 ans à peine, tient le rôle de Goon (à noter que William Hopper, qui tient le rôle du père de Natalie Wood, n’a aucun lien de parenté avec lui).
* Sal Mineo, qui interprète Platon, est âgé de 16 ans au moment du tournage, Natalie Wood 17ans alors que James Dean a déjà 24 ans. Le film est sorti un mois après sa mort.
* La scène d’ouverture, pendant le générique, (James Dean au sol jouant avec le petit singe mécanique) n’était pas écrite. Elle a été improvisée par James Dean.
* Le scénario prévoyait une première scène où l’on voyait un père de famille se faire agresser par une bande de mauvais garçons. Pendant l’agression, il laissait tomber ses paquets de Noël dont un petit singe mécanique. Jugée trop violente par les studios, la scène fut coupée.
* Dans le plan final, l’homme qui marche vers l’entrée du planétarium est Nicholas Ray.

11 janvier 2014

Buffalo Bill et les indiens (1976) de Robert Altman

Titre original : « Buffalo Bill and the Indians, or Sitting Bull’s History Lesson »

Buffalo Bill et les IndiensEn 1885, Buffalo Bill dirige un grand spectacle sur l’Ouest dont il est la vedette. Pour pimenter le show, il achète à l’armée l’un de ses prisonniers les plus célèbres, le chef indien Sitting Bull… Après l’armée (MASH), le western (John McCabe), la music-business (Nashville), Robert Altman s’attaque à l’une des plus grandes figures mythiques de l’Amérique : Buffalo Bill. Alors qu’Hollywood a exploité jusqu’à la corde la légende du héros intrépide, Altman nous le montre comme un cabotin plutôt grotesque entouré de béni-oui-oui, maladroit au tir et piètre cavalier. Même s’il grossit un peu le trait, il est tout de même assez proche de la vérité historique et sait agrémenter l’ensemble d’une bonne dose d’humour. Au-delà de cette figure légendaire, Altman s’attaque à cette société du spectacle capable de créer l’Histoire (« J’ai le sens de l’Histoire » braille Buffalo Bill dans un moment d’énervement, « et c’est moi qui commande ! ») et ainsi s’interroge sur la façon dont se forge un imaginaire collectif, fondement d’une civilisation moderne. Altman maitrise parfaitement cette mise en scène d’une mise en scène, utilisant comme à son habitude de très nombreux personnages.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Paul Newman, Joel Grey, Kevin McCarthy, Harvey Keitel, Geraldine Chaplin, Burt Lancaster
Voir la fiche du film et la filmographie de Robert Altman sur le site IMDB.

Voir les autres films de Robert Altman chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Loin du mythe largement accepté comme vérité historique, le chasseur de bisons William Frederick Cody (alias Buffalo Bill) a été un showman qui s’est forgé un personnage de légende en créant un spectacle mettant en scène des scènes de la vie dans l’Ouest et des batailles contre les indiens. Buffalo Bill faisait jouer à de vrais indiens leurs propres rôles ce qui contribua à l’immense popularité de son spectacle. Le cinéma, juste naissant, lui a permis d’accentuer davantage son image. Il a ainsi créé et répandu dans l’imaginaire collectif le mythe du Far-West et ses codes vestimentaires (on lui doit les chapeaux, les chemises, les foulards, les coiffes de plumes pour les indiens, etc.) Son spectacle a même tourné en Europe : ses représentations à Paris en 1905 ont attiré plus de 3 millions de spectateurs ! Le mythe de Buffalo Bill a été ensuite largement entretenu par le cinéma. C’est un superbe exemple de « légende qui dépasse la réalité »…

* Dès 1894, William Frederick Cody apparaît dans de petits films où il joue son propre rôle, le plus souvent des extraits de son show. IMDB liste ainsi 20 films où il apparait entre 1894 et 1917, l’année de sa mort.

22 septembre 2013

Faust (1926) de F.W. Murnau

Titre original : « Faust – Eine deutsche Volkssage »

FaustLe démon Méphistophélès se targue auprès de l’archange Gabriel de pouvoir corrompre l’esprit du vieux docteur Faust et l’asservir. Pour le prouver, il descend lui-même sur terre et va proposer à Faust de retrouver sa jeunesse… Le Faust de Murnau est l’adaptation la plus remarquable de cette légende créée par Goethe. C’est le dernier film allemand de Murnau (1), pour lequel il a bénéficié de moyens colossaux de la part de l’UFA qui désirait frapper un grand coup sur le marché américain. Le perfectionnisme du réalisateur se ressent à tous les niveaux. L’image est assez remarquable, avec de superbes scènes en clair-obscur et de très beaux effets de brumes qui créent une atmosphère forte. Les effets spéciaux montrent aussi une certaine perfection (pour l’époque, bien entendu) ; certaines scènes sont particulièrement saisissantes, telle celle où Méphistophélès étend sa grande cape noire sur la ville de Faust ; Faust la scène de vol (réalisée avec des maquettes) est, quant à elle, magique. L’histoire est un peu réduite, sans doute un peu trop centrée sur l’histoire d’amour entre Faust et Gretchen. On peut aussi regretter le jeu parfois excessif d’Emil Jannings (2) et se demander si le personnage de la tante était bien nécessaire (3). Mais cela n’altère en rien sa valeur : Faust est, par la puissance évocatrice de son atmosphère fantastique, l’un des films les plus importants du cinéma muet.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gösta Ekman, Emil Jannings, Camilla Horn, Wilhelm Dieterle, Yvette Guilbert
Voir la fiche du film et la filmographie de F.W. Murnau sur le site IMDB.

Voir les autres films de F.W. Murnau chroniqués sur ce blog…

Remarque :
Lorsque Wilhelm Dieterle (qui interprète ici le frère de Gretchen) émigrera aux Etats Unis en 1930, il prendra le nom de William Dieterle pour faire une belle carrière de réalisateur (voir les films de William Dieterle chroniqués sur ce blog).

(1) Murnau ira s’installer aux Etats Unis avant même la sortie du film.
(2) A noter que Emil Jannings avait déjà interprété le rôle de Méphistophélès au théâtre.
(3) Le personnage de la tante de Gretchen est interprété par l’actrice française Yvette Guilbert et son inclusion était surtout destinée au public français. L’UFA voulait vraiment faire de Faust un succès international.

Principales autres adaptations du mythe de Faust :
Faust et Marguerite de Georges Méliès (1897)
La Damnation du Docteur Faust de Georges Méliès (1904)
La beauté du diable de René Clair (1950) avec Gérard Philipe et Michel Simon
Doctor Faustus de Richard Burton et Nevill Coghill (1967) avec Richard Burton et Elizabeth Taylor
Faust d’Alexandre Sokurov (2011)

20 septembre 2013

La Vie privée de Sherlock Holmes (1970) de Billy Wilder

Titre original : « The Private Life of Sherlock Holmes »

La vie privée de Sherlock HolmesCinquante ans après la mort du Docteur Watson, certains de ses documents restés secrets sont dévoilés. Ils promettent de nous faire connaitre la vraie nature de Sherlock Holmes. Nous les suivons dans deux aventures… Face à l’échec commercial de ses deux derniers films (1) et au puritanisme de la critique américaine, Billy Wilder décide de tourner son film suivant en Europe. Avec La Vie privée de Sherlock Holmes, il s’attaque à un mythe très britannique. Toutefois, en grand amateur des écrits de Conan Doyle, il retourne le mythe de Sherlock Holmes mais ne le détruit pas. Certes, le détective est devenu prisonnier de son image publique par la popularité des récits du Docteur Watson, certes il est trop souvent dominé par les évènements, mais le personnage est suffisamment humain et humaniste pour rester attachant. Largement amputé par les studios (sur les quatre aventures, seules deux seront conservées dans la version commercialisée), le film n’en est pas moins remarquable, d’une mise en scène parfaite de simplicité et d’une réalisation sans faille. L’humour est toujours présent, souvent en petites touches, parfois plus truculent (comme cette scène où Watson se retrouve à danser avec des danseurs russes au lieu de danseuses !) Les parties coupées semblent hélas être perdues à jamais. On se prend à rêver qu’elles puissent être un jour retrouvées afin de voir, enfin, la version complète de La Vie privée de Sherlock Holmes.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Robert Stephens, Colin Blakely, Geneviève Page, Christopher Lee
Voir la fiche du film et la filmographie de Billy Wilder sur le site IMDB.

Voir les autres films de Billy Wilder chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* La première aventure coupée prenait place dans un bateau qui ramenait Holmes et Watson d’Istanbul où ils avaient enquêté dans un harem. Fatigué, Holmes laissait Watson résoudre le cas de la mort étrange de jeunes mariés à sa place, Watson endossant l’habit de Holmes.
* La seconde aventure coupée concernait le cas étrange d’un chinois retrouvé mort dans une pièce où tous les meubles étaient cloués au plafond. Cette affaire était en réalité montée de toutes pièces par Watson pour tenter d’éloigner son ami de la drogue.
* Une scène coupée importante expliquait pourquoi Holmes était si mal à l’aise avec les femmes. Pendant dans la partie écossaise, un flashback nous montrait comment le jeune étudiant Holmes avait été écoeuré de voir que la fille dont il était secrètement amoureux avait accepté d’être l’enjeu d’une tombola.

(1) Embrasse-moi idiot (Kiss Me Stupid, 1964) et La grande combine (The Fortune Cookie, 1966)

3 janvier 2013

Le retour de l’enfant prodigue (1976) de Youssef Chahine

Titre original : « Awdat al ibn al dal »
Autre titre français : « Le retour du fils prodigue »

Le retour de l'enfant prodigueDans un village égyptien vit une grande famille. Le fils aîné fait tourner un pressoir où il emploie une partie du village alors que le fils cadet est parti depuis douze ans au Caire à la conquête de nouveaux horizons. Tout le monde, sauf son frère, le voit comme un « Mehdi » par qui le bonheur arrive et espère donc son retour… Ecrit par Youssef Chahine et le poète caricaturiste Salah Jahine, Le retour de l’enfant prodigue est un film assez difficile à cerner. Que ce soit sur le fond ou sur la forme, il offre de multiples facettes, souvent contradictoires, qui obscurcissent quelque les peu les intentions de Chahine. Le propos n’est de ce fait pas très clair. S’agirait-il d’une simple bouffonnerie ? Après tout, le générique de début est un clown qui se grime et la dernière image deux clowns dansant. La présence des parties musicales et de ballets assez saugrenus irait également dans ce sens. La seule chose certaine est que le film brocarde les croyances, les mythes, en premier celui du fils prodigue qui se révèle ici n’être en aucun point à la hauteur de son image.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Mahmoud El-Meliguy, Hoda Soltan, Shukry Sarhan
Voir la fiche du film et la filmographie de Youssef Chahine sur le site IMDB.

Voir les autres films de Youssef Chahine chroniqués sur ce blog…