10 mai 2017

Lucrèce Borgia (1935) d’Abel Gance

Lucrèce BorgiaFin du XVe siècle à Rome. Fils du pape Alexandre VI, César Borgia, conseillé par Machiavel, complote pour détruire ses ennemis politiques et mettre la main sur les duchés voisins. Il n’hésite pas à utiliser sa jeune sœur, d’une grande beauté, pour sceller des alliances opportunes… Le personnage historique de Lucrèce Borgia, et la légende qui l’entoure, a été porté à l’écran, petit et grand, à de nombreuses reprises. Cette version d’Abel Gance reste l’une des plus remarquée, pas toujours pour ses qualités cinématographiques mais en tous cas pour le scandale qu’elle suscita : on y voit Edwige Feuillère batifoler nue dans un bassin dont, opportunément, la profondeur ne dépasse guère 1 mètre. A l’époque, cette scène de nudité était d’une grande audace. Ceci mis à part, le scénario présente Lucrèce Borgia comme une victime des manigances criminelles de son frère (thèse la plus souvent partagée aujourd’hui) mais épargne le pape Alexandre VI. L’interprétation est très inégale, assez outrée en ce qui concerne Gabriel Gabrio en César ou Antonin Artaud en Savonarola, plus subtile pour Aimé Clariond en Machiavel. La prestation d’Edwige Feuillère (qui ressemble ici étrangement à Claudette Colbert) est la plus convaincante, le film sera un tremplin pour l’actrice. Tourné sans grande conviction apparente, Lucrèce Borgia est loin d’être le film le plus remarquable dans la filmographie d’Abel Gance.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Edwige Feuillère, Gabriel Gabrio, Aimé Clariond, Jacques Dumesnil, Antonin Artaud
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Lucrèce Borgia
Edwige Feuillère (au centre) dans Lucrèce Borgia d’Abel Gance.

9 mai 2017

Lucrèce Borgia (1922) de Richard Oswald

Titre original : « Lucrezia Borgia »

Lucrèce Borgia1498 à Rome. César Borgia tue et assassine tous ceux qui approchent sa cousine (!?) Lucrèce qui est sur le point d’épouser en secondes noces Alphonse d’Aragon… Basé sur un roman d’Harry Scheff, ce film allemand de Richard Oswald est la première grande adaptation des Borgia au cinéma. Marqué par la forte présence de l’acteur Conrad Veidt, le film s’inscrit dans la vogue des films historiques allemands de la première moitié des années vingt. Le scénario est assez confus, prend d’importantes libertés historiques, fait totalement l’impasse sur les motivations politiques de César (d’ailleurs Machiavel est absent). Tout est centré sur le caractère vil et criminel de César Borgia. Conrad Veidt a un jeu très appuyé, prenant souvent des postures menaçantes mais il est incontestablement le pivot du film. La production semble importante. Les scènes de bataille notamment, l’attaque d’un château fortifié vers la fin du film, sont d’une rare ampleur par le décor et une figuration massive. Les quelque 2h10 paraissent toutefois bien longues. (film muet)
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Conrad Veidt, Liane Haid, Albert Bassermann
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Remarques :
* Etrangement, dans la version américaine visionnée, César et son frère ne sont pas les fils d’Alexandre VI mais ses neveux et, en outre, ils sont les cousins de Lucrèce. Il est probable que cette bizarrerie soit due aux intertitres américains. César n’est donc plus amoureux de sa soeur mais de sa cousine… ce qui est tout de même un peu plus convenable!

* Dans son livre L’écran démoniaque, Lotte H. Eisner souligne l’influence du metteur en scène de théâtre Max Reinhardt sur ces films historiques allemands des années vingt et sur celui-ci en particulier.

* Une scène est étrange par son anachronisme : César Borgia ordonne qu’une femme soit jetée aux lions dans une arène romaine pleine de spectateurs. Rien n’indique qu’il s’agisse d’une scène rêvée ou fantasmée. Sans doute, n’est-ce qu’une allégorie pour montrer la cruauté du personnage.

* Certains critiques américains de l’époque affirment que le film a été tourné en Italie mais, en réalité, il a été tourné en Allemagne, dans les studios de l’UFA principalement.

* C’est William Dieterle qui interprète le rôle de Sforza. Le futur réalisateur a en effet beaucoup tourné en tant qu’acteur dans les années vingt.

Lucrèce Borgia
« Je te maudis César » : Conrad Veidt et Albert Bassermann dans Lucrèce Borgia de Richard Oswald.

Lucrèce Borgia
Liane Haid et Conrad Veidt dans Lucrèce Borgia de Richard Oswald.

26 avril 2017

La Grande Muraille (1933) de Frank Capra

Titre original : « The Bitter Tea of General Yen »
Autre titre français (TV) : « Muraille chinoise »

La Grande murailleShanghai, fin des années vingt. Missionnaire dans une Chine en pleine guerre civile, la jeune Megan est sauvée in extremis d’une foule de réfugiés par l’énigmatique Général Yen. Il la mène dans sa vaste résidence d’été d’où elle ne peut repartir car les routes sont bien trop dangereuses… The Bitter Tea of General Yen est un film franchement inhabituel dans la filmographie de Frank Capra dont les mélodrames sont le plus souvent purement américains. Il est ici plus proche de Josef von Sternberg dont le superbe Shanghai Express était sorti quelques mois plus tôt. Loin de reproduire les stéréotypes raciaux de l’époque, le film n’épargne guère les missionnaires, montre les différences de culture et surtout aborde de front la question des amours interraciaux, sujet tabou. Tout cela est fait de façon subtile, sans profusion de dialogues. Le point fort, et presque son pivot central, est cette étonnante (et célèbre) scène du rêve où le tabou est transgressé. Cette scène est remarquable car elle met en images ce mélange d’attirance/répulsion que ressent l’américaine et la scène qui suit nous met plutôt en empathie avec le général qui n’a bien entendu pas connaissance du rêve qu’elle vient de faire. Capra trouve là une façon remarquable de faire basculer son public. Pour le rôle du général, Capra a intelligemment écarté l’idée de prendre un acteur connu et a porté son choix sur le suédois Nils Asther dont la grande stature rend le personnage très imposant. Barbara Stanwyck n’était sans doute pas l’actrice idéale mais fait une bonne prestation. Le film fut un échec commercial. C’est pourtant une petite merveille.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Barbara Stanwyck, Nils Asther, Toshia Mori, Walter Connolly
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Remarques :
* En Angleterre, le film n’a été accepté par la censure qu’après certaines coupes. Aux Etats-Unis, il a réussi à passer la censure (le Code Hays n’était pas encore systématiquement appliqué). En revanche, la censure à réussi à bloquer sa ressortie dans les années cinquante. La scène du rêve était bien entendu au centre de toutes ces réticences.
* Dans son autobiographie, Frank Capra attribue l’insuccès du film au fait qu’il n’est jamais sorti en Angleterre et dans tout le Commonwealth… ce qui n’est pas tout à fait exact.
* Fassbinder a rendu hommage à Capra en donnant à son très beau film le titre Les larmes amères de Petra von Kant (ce qui en anglais donne The Bitter Tears of Petra von Kant).

The Bitter Tea of General Yen
Barbara Stanwyck, Nils Asther et Toshia Mori dans le train du Général Yen dans The Bitter Tea of General Yen de Frank Capra.

The Bitter Tea of General Yen
Walter Connolly et Nils Asther dans The Bitter Tea of General Yen de Frank Capra.

The Bitter Tea of General Yen
Barbara Stanwyck et Nils Asther dans The Bitter Tea of General Yen de Frank Capra.

21 février 2017

Contes italiens (2015) de Paolo Taviani et Vittorio Taviani

Titre original : « Maraviglioso Boccaccio »

Contes italiensEn 1348, alors que la peste frappe cruellement Florence, sept demoiselles et trois jeunes hommes décident de quitter la ville et de s’isoler à la campagne. Là, pour tromper l’ennui, ils décident que chaque jour, l’un d’entre eux devra raconter une histoire… Librement inspiré du Décaméron de Boccace, Contes italiens est un superbe hymne à l’amour, à la beauté et à la vie. Après un préambule sur les dégâts de la peste, les frères Taviani reprennent cinq contes, parmi les cent que compte le roman. Trois sont à caractère plutôt dramatiques sur le thème de la force de l’amour ; ce sont les plus beaux, les plus émouvants, les plus déchirants même pour le dernier. On est transportés par leur puissance évocatrice. Deux contes plus légers, et un peu plus courts, servent en quelque sorte d’intermède récréatif. La réalisation est parfaite, l’image est d’une grande beauté et la musique tient une grande place, apportant une dimension supplémentaire. Il est un peu désolant de voir la critique laminer un tel film, le qualifiant hâtivement d’ « académique ». Il ne faut pas les écouter : à plus de quatre-vingts ans, les frères Taviani ont signé un film étonnamment jeune ; il est en outre assez féminin (Paolo Taviani, lui-même, le confirme). Contes italiens est une petite merveille.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Carolina Crescentini, Flavio Parenti, Kim Rossi Stuart, Riccardo Scamarcio, Kasia Smutniak, Jasmine Trinca
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Précédente adaptation :
Le Décaméron (Il Decameron) de Pier Paolo Pasolini (1971), comportant dix contes et bien entendu très différent. Le réalisateur l’a renié par la suite.

Contes italiens
Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani.

Contes italiens
Conte 1 : Riccardo Scamarcio et Vittoria Puccini dans Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani.

Contes italiens
Conte 2 : Kim Rossi Stuart dans Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani.

Contes italiens
Conte 3 : Michele Riondino et Kasia Smutniak dans Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani.

Contes italiens
Conte 4 : Carolina Crescentini et Leonardo Santini Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani.

Contes italiens
Conte 5 : Jasmine Trinca dans Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani.

20 février 2017

The Bigamist (1953) de Ida Lupino

Titre français parfois utilisé : « Bigamie »

BigamieA San Francisco, Harry et Eve font une demande pour adopter un enfant et acceptent donc que l’on enquête sur leur vie privée. L’enquêteur découvre qu’Harry a une autre vie à Los Angeles où il doit souvent se rendre pour affaires… S’écartant franchement des normes hollywoodiennes classiques, Ida Lupino aborde cette histoire de bigamie de façon vraiment non conventionnelle : d’une part, le bigame est montré comme non condamnable, comme s’il s’était embourbé malgré lui en voulant faire le bien, et d’autre part les deux femmes sont traitées avec la même bienveillance (alors que les conventions scénaristiques hollywoodiennes auraient voulu qu’il y ait une femme profiteuse antipathique et une femme victime sympathique). Il n’y a d’ailleurs pas de victime à proprement parler dans cette histoire. Le regard que porte Ida Lupino sur ces trois personnages est empreint de délicatesse et de compassion. Il n’y a aucune lourdeur, aucun effet scénaristique trop appuyé, simplement une description de sentiments, des forces et des faiblesses que tout être humain peut avoir. Elle aborde indéniablement la question avec sa sensibilité féminine mais sans aucun esprit de revanche. The Bigamist ne manque pas de qualités.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Joan Fontaine, Ida Lupino, Edmund Gwenn, Edmond O’Brien
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Remarque :
* Ida Lupino est l’une des très rares femmes réalisatrices du cinéma hollywoodien classique.

The Bigamist
Ida Lupino et Edmond O’Brien dans Bigamie de Ida Lupino.

The Bigamist
Edmond O’Brien et Joan Fontaine dans Bigamie de Ida Lupino.

9 février 2017

Her (2013) de Spike Jonze

HerDans un futur proche, Theodore est un trentenaire légèrement dépressif après la séparation de sa femme. Il se laisse convaincre par une publicité pour un nouveau système d’exploitation de son ordinateur, un système décrit comme « intelligent »… Pourra-t-on un jour tomber amoureux d’une intelligence artificielle ? La question est loin d’être anodine et Spike Jonze l’aborde de façon très pertinente. Contrairement à ce que l’on lire un peu partout, son Theodore ne tombe pas amoureux d’une voix (ce qui donnerait au mieux un film puéril), il tombe amoureux d’une intelligence auto-évolutive, qui va s’adapter à sa situation particulière, à son caractère. Théodore lui demande en premier de mettre de l’ordre dans ses emails mais, au final, elle va remettre de l’ordre dans sa vie et au passage lui faire découvrir le véritable sens de l’amour. Rien de moins! Bien entendu, on pourra relever des incohérences techniques ici et là mais cela n’a pas d’importance, Spike Jonze aborde la question sous le bon angle. En plus d’être séduisant sur le fond, le film est séduisant dans sa forme par la douceur de la photographie aux couleurs chaudes (le bleu a été banni par le directeur de la photographie Hoyte Van Hoytema) et par ses superbes gros plans à faible profondeur de champ. L’environnement futuriste est assez sobre mais très bien rendu. L’interprétation est au niveau de l’ensemble : Joaquim Phoenix excelle pour exprimer toutes les nuances de son personnage. Her est un merveilleux film.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Joaquin Phoenix, Scarlett Johansson, Amy Adams, Rooney Mara
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Remarques :
* Spike Jonze dit avoir été inspiré par les films de Woody Allen, notamment Crimes et Délits.
* Steven Soderbergh a aidé Spike Jonze en lui proposant un montage fait en une nuit. certaines idées de coupe ont été gardées.
* La voix du « gamin » malpoli holographique est celle de Spike Jonze.
* Her n’est que le quatrième long métrage de Spike Jonze qui est prolixe en matière de courts métrages (IMDB lui attribue 48 réalisations).

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Joaquin Phoenix et Amy Adams dans Her de Spike Jonze.

Her
Joaquin Phoenix, heureux d’être sur la plage avec Samantha dans la poche, dans Her de Spike Jonze.

17 janvier 2017

Anna Karenine (1927) de Edmund Goulding

Titre original : « Love »

Anna KarenineUn soir de tempête de neige, dans une auberge isolée, le comte russe Vronsky fait la connaissance d’une femme à la fois mystérieuse et très belle qu’il tente de séduire de force. Elle le repousse. Quelque temps plus tard, lors d’une réception organisée par le député Karénine, Vronsky est présenté à l’épouse de celui-ci, Anna… Au cours de sa trop courte carrière, Greta Garbo a interprété par deux fois Anna Karenine. Ce film muet d’Edmund Goulding est la première. Il s’agit d’une version très simplifiée du roman de Tolstoï, avec même une fin en happy-end (une version avec une fin dramatique sera toutefois distribuée à l’international). Le film est bien entendu surtout remarquable par la présence du couple Greta Garbo / John Gilbert. Ce dernier fait un Vronsky très séduisant, très prévenant. Greta Garbo, qui sortait d’un bras de fer de plusieurs mois avec la MGM pour obtenir un meilleur contrat, est magnifique, remarquablement filmée par la caméra de William Daniels. Lorsqu’elle soulève sa voilette pour la première fois, nous sommes, à l’instar de Vronsky, nous aussi suffoqués par sa beauté. Garbo est unique. Il lui suffit d’esquisser un demi-sourire pour exprimer une quinzaine de sentiments. En revanche, elle moins convaincante quand elle joue beaucoup : sa crise de nerfs lorsque Vronsky chute de cheval est à la limite du grotesque. Malgré la simplification de l’histoire qui perd beaucoup de son caractère dramatique, cet Anna Karenine montre une certaine intensité grâce à ses deux interprètes. (Film muet)
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: John Gilbert, Greta Garbo, George Fawcett, Brandon Hurst
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Love
Greta Garbo et John Gilbert dans Anna Karenine de Edmund Goulding.

Remarques :
* Le titre américain fut choisi pour donner « John Gilbert et Greta Garbo in love » sur les affiches, une trouvaille du service des relations publiques de la M.G.M.

* La version avec la fin Tolstoïenne (dramatique donc) fut distribuée à l’étranger. Aux Etats-Unis, les exploitants avaient le choix et il semble que les exploitants de la Côte Est et californiens choisirent souvent la fin dramatique, alors que les exploitants de l’Amérique profonde choisirent la fin heureuse.

Anna Karenine* Actuellement, la version la plus courante de ce film est l’enregistrement d’une projection publique à l’Université de Los Angeles dans les années 2000 avec un grand orchestre accompagnant en direct. Le seul problème est que l’on entend parfois les réactions du (vaste) public, des ricanements ou gloussements qui surviennent, et c’est là le plus étonnant, à des moments vraiment inattendus, parfois dramatiques même. Le public était sans doute très jeune. C’est assez gênant parce que cela déconcentre mais la solution est facile à trouver : il suffit de baisser la musique… A noter que cette version est celle qui se termine bien (les enfants ont dû être contents).

* Certaines affiches du film Love utilisent une photo du film précédent du couple Garbo/Gilbert : La Chair et le Diable ! (voir exemple ci-contre) Il est vrai que John Gilbert porte le même costume dans les deux films.

* John Gilbert peut être considéré comme co-réalisateur car Greta Garbo refusait de passer à la scène suivante tant que la précédente n’avait pas été validée par John Gilbert.

* En 1935, Garbo jouera de nouveau Anna Karenine, sous la direction de Clarence Brown, avec Fredric March dans le rôle de Vronsky.

Love
Photo de tournage : Edmund Goulding, Greta Garbo et John Gilbert dans Anna Karenine de Edmund Goulding.

Love
Photo de tournage plus étonnante : l’acteur aux côtés de Greta Garbo est n’est pas John Gilbert, c’est Ricardo Cortez, le caméraman est Merritt B. Gerstad, le réalisateur au centre est Dimitri Buchowetzki. La MGM débuta en effet le tournage de Anna Karenine avec Ricardo Cortez dans le rôle de Vronsky. Mécontent du résultat, Irving Thalberg changea toute l’équipe.

Adaptations du roman de Tolstoï :
Love de Edmund Goulding (1927) avec Greta Garbo et John Gilbert
Anna Karénine de Clarence Brown (1927) avec Greta Garbo et Fredric March
Anna Karénine de Julien Duvivier  (1948) avec Vivien Leigh
Anna Karénine de Aleksandr Zarkhi (1967) avec Tatyana Samojlova
Anna Karénine de Bernard Rose (1997) avec Sophie Marceau
Anna Karénine de Joe Wright (2012) avec Keira Knightley

21 décembre 2016

Capitaine sans peur (1951) de Raoul Walsh

Titre original : « Captain Horatio Hornblower »

Capitaine sans peurEn 1807, alors que l’Angleterre est en guerre contre Napoléon, le Capitaine Horatio Hornblower appareille pour une destination secrète connue de lui seul. Après sept mois de navigation, son navire de guerre arrive près des côtes mexicaines, côté Pacifique. Le capitaine est proche de son but mais les évènements vont se précipiter… L’écrivain britannique C.S. Forester (également auteur de L’Odyssée de l’African Queen) a imaginé les aventures du Capitaine Hornblower pour en faire une dizaine de romans publiés entre 1937 et 1966. Capitaine sans peur est l’adaptation des trois premiers volumes de cette saga. Sous la direction de Raoul Walsh, c’est un film d’aventures maritimes de fort belle facture qui se déroule presque entièrement en mer. Le spectateur a l’impression d’être à bord tant la vie sur ces navires est bien recréée (en studio). Gregory Peck compose un héros assez inhabituel, raide et imperturbable, ne montrant aucune émotion, mais doté d’une belle présence. Les scènes de batailles navales sont assez réalistes et prenantes. L’ensemble forme un très bon divertissement. Le film fut un succès, le plus gros succès de l’année 1951 pour la Warner.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gregory Peck, Virginia Mayo, Robert Beatty, James Robertson Justice
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Remarques :
* La ville de Nantes a étrangement comme un petit air méditerranéen… En fait, les scènes d’extérieurs ont été tournées à Villefranche-sur-Mer et à l’entour.
* C.S. Forester ne cite aucun personnage réel comme source d’inspiration pour son Capitaine Hornblower. Certains pensent à Thomas Cochrane (1775-1860), surnommé « le loup des mers ».

Captain Horatio Hornblower
Robert Beatty et Gregory Peck dans Capitaine sans peur de Raoul Walsh.

Captain Horatio Hornblower
Scène de bataille navale dans Capitaine sans peur de Raoul Walsh.

Captain Horatio Hornblower
Gregory Peck et Virginia Mayo dans Capitaine sans peur de Raoul Walsh.

22 novembre 2016

Dernier Round (1937) de Michael Curtiz

Titre original : « Kid Galahad »

Le Dernier roundUn manager de boxe se sépare de son meilleur poulain qui s’était laissé acheter par son concurrent aux méthodes de gangster. Il ne tarde pas à lui trouver un remplaçant, un groom de son hôtel, jeune garçon naïf et séduisant… Kid Galahad mêle deux genres de prédilection de la Warner : le film de gangsters et le film de boxe. Il retient l’attention par son beau plateau d’acteurs sous la direction efficace de Michael Curtiz. Edward G. Robinson et Bette Davis ne se sont pas très bien entendu, l’acteur tentant dès le premier jour de la faire remplacer et persistant jusque dans ses mémoires à déclarer qu’elle ne savait pas jouer. L’actrice fait pourtant preuve de beaucoup de présence à l’écran avec une indéniable personnalité. Elle illumine le film. Humphrey Bogart a son rôle habituel, d’avant sa notoriété du moins (qui viendra deux ou trois ans plus tard), celui d’un gangster antipathique, destiné à mourir sans gloire. Warner mettait alors beaucoup d’espoir dans le jeune Wayne Morris dont la carrière sera stoppée par la guerre pour rester ensuite cantonnée dans les rôles mineurs. La censure fut très vigilante pour que soit gommé tout ce qui aurait laissé supposer une relation entre le jeune boxeur et l’amie de son manager. Le déroulement de l’histoire est sans grande surprise, l’intérêt du film étant plus dans son interprétation.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Edward G. Robinson, Bette Davis, Humphrey Bogart, Wayne Morris, Jane Bryan, Harry Carey
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Remakes :
The Wagons Roll at Night de Ray Enright (1941) avec Humphrey Bogart et Sylvia Sydney (histoire transposée dans le monde du cirque, Bogart ayant un meilleur rôle)
Kid Galahad (Un direct au coeur)de Phil Karlson (1962) avec Elvis Presley en boxeur.
Après ce film Paramount, Warner a renommé le sien The Battling Bellhop pour éviter toute confusion entre les deux films.

Homonyme français :
Le dernier round (Battling Butler) de Buster Keaton (1926) vec Buster Keaton, adaptation d’une comédie musicale anglaise.

Kid Galahad
Harry Carey, Wayne Morris et Edward G. Robinson dans Dernier Round de Michael Curtiz.

Kid Galahad
Bette Davis et Edward G. Robinson dans Dernier Round de Michael Curtiz.

Kid Galahad
Humphrey Bogart face à Edward G. Robinson dans Dernier Round de Michael Curtiz (au centre : William Haade).

16 novembre 2016

Un cottage dans le Dartmoor (1929) de Anthony Asquith

Titre original : « A Cottage on Dartmoor »

Un Cottage dans le DartmoorDans les landes du Devon, un homme court dans la pénombre. Il vient de s’évader de la prison voisine et va tout droit jusqu’à un petit cottage où une jeune femme berce un enfant. Apeurée, elle le reconnaît. Ils étaient employés dans le même salon de coiffure et il était éperdument amoureux d’elle. Elle revoit leur histoire… Un Cottage dans le Dartmoor est l’un des derniers films muets britanniques. Dans son quatrième long métrage, le jeune Anthony Asquith (26 ans) intègre d’ingénieuses recherches techniques et fait preuve d’une grande virtuosité. Il va indéniablement plus loin que son compatriote Hitchcock (le film peut être comparé à Blackmail, sorti à la même époque). Non seulement Anthony Asquith soigne ses éclairages à l’extrême mais il montre une inventivité de tous les instants. C’est un festival : il joue avec la profondeur de champ, multiplie les angles de vues étonnants, insère des scènes surréalistes de suggestion, pratique un montage audacieux. La scène la plus impressionnante dans sa perfection est celle de la tentative de meurtre où tout se met idéalement en place. On peut regretter que cette beauté formelle place le récit au second plan ; Asquith ne l’oublie pas toutefois, mais il se situe plutôt sur un plan intimiste (et en ce sens, il se démarque des grands cinéastes russes qu’il évoque immanquablement, Eisenstein, Poudovkine, … qui sont plus au service d’une certaine grandeur). Le film marque la fin d’une époque, celle du muet. Asquith n’y croyait pas. Dans une longue et étonnante scène dans un cinéma, sa condamnation du parlant est sans appel. Contrairement à Blackmail d’Hitchcock, Un Cottage dans le Dartmoor se révèlera impossible à transformer en film sonore. Cela lui sera fatal. On le redécouvre avec bonheur aujourd’hui. Le film a été restauré en 2016 par le British Film Institute (BFI). La qualité de la restauration est impressionnante et sa très grande beauté n’en est que plus séduisante.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Hans Adalbert Schlettow, Uno Henning, Norah Baring
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Un cottage dans le Dartmoor
Uno Henning et Hans Adalbert Schlettow dans Un cottage dans le Dartmoor de Anthony Asquith.

Remarques :
* La longue scène du cinéma montre la réaction des spectateurs (l’écran est hors champ) face à un film muet puis face à un film parlant. La première partie est un film muet accompagné par un orchestre dans la fosse. Les spectateurs s’esclaffent, réagissent abondamment (on peut supposer qu’il s’agit d’un film avec Harold Lloyd puisque deux gamins se moquent d’un spectateur qui a les mêmes lunettes). La seconde partie est un film parlant, les musiciens ne jouent plus et boivent une bière pendant que les spectateurs prennent une attitude cataleptique, ils semblent atterrés, totalement amorphes.

* Un Cottage dans le Dartmoor a très peu d’intertitres car Anthony Asquith multiplie les trouvailles pour ne pas en avoir besoin. Par exemple, dans le salon de coiffure, il insère quelques secondes d’un match de cricket au milieu d’un plan sur le garçon-coiffeur pour montrer qu’il parle de sport au client qu’il est en train de coiffer.

* Norah Baring est anglaise, Uno Henning est suédois, Hans Schlettow est allemand.

Un cottage dans le Dartmoor

Un cottage dans le Dartmoor
Jeux de miroir : Norah Baring dans Un cottage dans le Dartmoor de Anthony Asquith.

Un cottage dans le Darmoor
Plan aussi efficace que brillant : deux employées du salon de coiffure cancanent en champ-contrechamp au sujet de sa bien aimée alors que le futur meurtrier, placé entre les deux, affute son rasoir. Superbe scène de Un cottage dans le Dartmoor de Anthony Asquith.