22 décembre 2014

Livre : Hollywood dans les années 1930

de Daniel Kothenschulte et Robert Nippoldt – Editions Taschen 2014 – 162 pages – 39,99 €

Livre Hollywood dans les années 1930 - TaschenLorsque l’on prend en main le livre Hollywood dans les années 1930, c’est son apparence qui frappe en premier : un format en hauteur, une belle reliure, un papier très épais qui évoque le papier dessin et surtout les superbes illustrations pleines pages de Robert Nippoldt. La réalisation est parfaite… Mais le texte de Daniel Kothenschulte est tout autant digne d’intérêt. Il nous fait revivre la décennie des années trente à Hollywood par une cinquantaine de portraits : des acteurs, des réalisateurs, des producteurs et quelques autres qui ont marqué la première décennie du cinéma parlant. Ces portraits et autres petits articles sont très bien écrits, synthétiques, faciles à lire. Ils ne sont pas exhaustifs mais constituent une présentation émaillée de détails qui ont participé à la notoriété de chacun. Hollywood dans les années 1930 est à la fois beau et intéressant. Plus qu’un livre à offrir, c’est un livre à s’offrir… Personnellement, j’aime beaucoup.

Voir la fiche du livre sur Livres-cinema.info
Le livre sur le site de l’éditeur … (avec 15 exemples de pages)
Le livre sur Amazon, les librairies de Price Minister

 

Page du livre : Hollywood dans les années 1930

21 décembre 2014

Le Mouchard (1935) de John Ford

Titre original : « The Informer »

Le mouchardDans l’Irlande des années 20 sous domination anglaise, Gypo Nolan vit misérablement et rêve de pouvoir impressionner Katie qui désire tant partir en Amérique. Il est ami avec Frankie qui appartient à l’Armée Républicaine clandestine et dont la tête est mise à prix… Il n’est guère surprenant que John Ford ait eu des difficultés à faire accepter cette adaptation d’un roman de Liam O’Flaherty (1). Pour réaliser cette oeuvre anti-commerciale par excellence, John Ford n’eut finalement droit qu’à un plateau de second ordre, un « couloir » dont l’état de vétusté l’obligea à utiliser beaucoup de brouillard. Il demanda à son directeur de la photographie Joseph August de lui donner des tonalités similaires à celle de L’Aurore de Murnau. John Ford donne à cette histoire d’une belle simplicité une très grande force. Victor McLaglen a ici une présence phénoménale. Après des débuts difficiles, le film connut un grand succès et rafla quatre Oscars.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Victor McLaglen, Heather Angel, Preston Foster, Wallace Ford
Voir la fiche du film et la filmographie de John Ford sur le site IMDB.
Voir les autres films de John Ford chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur John Ford

Remarques :
* Anecdote célèbre rapportée par Robert Parrish (qui fut figurant et assistant-monteur sur ce film) :
Le premier jour de tournage, John Ford fit réunir toute l’équipe pour présenter le producteur délégué : « Le monsieur que voici est un producteur délégué ». Il lui fit doucement tourner la tête pour que tout le monde puisse le voir de face et de profil. « Regardez-le bien parce que vous ne le reverrez plus sur le plateau d’ici la fin du tournage ! ». Et il serra la main du producteur en lui disant : « Merci d’être venu, Cliff ! Nous nous reverrons au moment des rushes. » (in J’ai grandi à Hollywood de Robert Parrish, Stock 1980). A noter que le producteur en question est Cliff Reid.

* Autre anecdote tout aussi célèbre :
Lorsque, le dernier jour, le même producteur vint sur le plateau pour dire sa satisfaction que le tournage soit fini dans les temps et, chose très imprudente, qu’il trouvait les derniers rushes de la scène de l’interrogatoire fantastiques, John Ford (qui, lui, n’avait pas encore regardé les rushes en question) fit revenir l’équipe : « Ce n’est pas fini : on refait la scène de l’interrogatoire ! » Et le tournage dura deux jours de plus.

* On peut noter l’utilisation ponctuelle de la caméra subjective.

* Précision : 1 livre de 1920 équivaut environ à 50 euros actuel, ce qui met par exemple le prix de la traversée (10 £) à 500 euros.

Précédente adaptation :
The Informer de Arthur Robison (1929) avec Lars Hanson, film anglais mi-muet, mi-parlant.
Remake :
Point noir (Uptight) de Jules Dassin (1968) avec Raymond St. Jacques, l’histoire étant transposée dans le milieu des militants révolutionnaires noirs.

(1) Le film a finalement été financé par Joe Kennedy, le père du futur président, pour la RKO qui pensait que le film pouvait faire office d’oeuvre de prestige.

The Informer de John Ford
Victor McLaglen est le mouchard dans le film The Informer de John Ford.

20 décembre 2014

Le Survivant (1971) de Boris Sagal

Titre original : « The Omega Man »

Le survivantAu volant de sa décapotable, Robert Neville sillonne les rues désertes de Los Angeles. Une guerre bactériologique a décimé la population mais il n’est pas le seul survivant : un groupe de mutants le chasse inlassablement, la nuit seulement car leurs yeux se sont modifiés et ne supportent pas la pleine lumière…
The Omega Man est la seconde tentative d’adapter le célèbre roman post-apocalyptique de Richard Matheson Je suis une légende (I am Legend) . « Le premier film était très mal fait mais était fidèle au livre, le second ne ressemble en rien à mon livre » a déclaré Matheson. Le propos est effectivement simplifié à l’extrême pour privilégier l’action et Charlton Heston est armé jusqu’aux dents pour tenir tête à une bande de va-nu-pieds hostiles et passablement teigneux. Tout autre propos a été évacué.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Charlton Heston, Anthony Zerbe, Rosalind Cash
Voir la fiche du film et la filmographie de Boris Sagal sur le site IMDB.

Remarques :
* Le baiser entre Charlton Heston et Rosalind Cash serait l’un des premiers baisers interraciaux sur grand écran.
* Les scènes de rues désertes ont été tournées principalement dans le quartier des affaires de Los Angeles le dimanche matin.

* Précédente adaptation :
Je suis une légende (The Last Man on Earth) de Sidney Salkow et Ubaldo Ragona (1964) avec Vincent Price. Richard Matheson avait contribué au scénario (sous le pseudonyme Logan Swanson).
* Adaptation ultérieure :
Je suis une légende (I am Legend) de Francis Lawrence (2007) avec Will Smith

Le Survivant
Evitez de vous promener dans la rue lorsque Charlton Heston pense être le dernier survivant…

18 décembre 2014

Le crime était presque parfait (1954) de Alfred Hitchcock

Titre original : « Dial M for Murder »

Le crime était presque parfaitAyant découvert que sa femme le trompe, un ancien champion de tennis a projeté de la tuer. Il a mis au point un plan qui lui permet d’avoir un alibi parfait et pour lequel il recrute les services d’un ancien camarade de collège au passé trouble… Bien qu’il soit l’un des films les plus connus d’Alfred Hitchcock, Le crime était presque parfait n’est guère apprécié du cinéaste (1). En panne sur un nouveau scénario alors qu’il devait un film à la Warner, il n’a en effet choisi de faire cette adaptation d’une pièce de théâtre que par défaut. Plutôt que d’en gommer les origines théâtrales, il les accentue : il situe tout le film dans une seule et unique pièce et va jusqu’à utiliser un plancher en bois pour garder l’impression d’une scène. Le plus extraordinaire est que l’on ne ressent jamais cet espace limité tant le scénario se déroule à la perfection. Le crime était presque parfait est un film de dialogues. La scène où Ray Milland prend au piège son ancien camarade de collège pour le forcer à exécuter son plan est assez remarquable : très longue et extrêmement passionnante, on ne raterait une phrase pour rien au monde. Le crime était presque parfait est sans aucun doute l’une des plus belles réussites de « théâtre filmé ». Il se revoit toujours avec le même plaisir.
Elle: 5 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Ray Milland, Grace Kelly, Robert Cummings, John Williams, Anthony Dawson
Voir la fiche du film et la filmographie de Alfred Hitchcock sur le site IMDB.

Voir les autres films de Alfred Hitchcock chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Alfred Hitchcock

Remarques :
* La pièce originale a été écrite par Frederick Knott. Elle a été jouée 552 fois (10/1952 – 02/1954) ce qui en fait un franc succès. John Williams (le policier) et Anthony Dawson (le tueur) y tenaient le même rôle.
* Alfred Hitchcock a quelque peu modifié l’histoire : sans doute pour la rendre plus troublante, le cinéaste a rendu le mari plus sympathique que dans la pièce où il tuait sa femme surtout pour l’argent, la liaison de sa femme avec son amant étant terminée. De plus, le personnage de l’amant paraît ici bien superficiel et moins intelligent que le mari. La femme est particulièrement hypocrite. Sans doute, Hitchcock voulait-il faire germer en nous l’idée troublante que le mari méritait peut-être de réussir un plan si bien préparé…
* Cameo : Alfred Hitchcock est visible sur la photographie du banquet (environ à 12’30). A noter qu’il est assez net que les visages de Ray Milland, d’Anthony Dawson et d’Alfred Hitchcock ont été collés après coup sur une photo…
* Hitchcock souligne que les robes portées par Grace Kelly sont de couleurs vives au début du film et deviennent de plus en plus foncées au fur et à mesure que l’intrigue devient plus sombre.
* Dans certaines scènes, Hitchcock a placé la caméra dans une fosse pour accentuer l’effet de contre-plongée.
* Le crime était presque parfait a été tourné en 3D, version qui fut peu visible avant qu’elle ressorte en 1980.

Remake :
Meurtre parfait (A Perfect Murder) de Andrew Davis (1998) avec Michael Douglas et Gwyneth Paltrow.

Homonyme :
Le crime était presque parfait (The Unsuspected) de Michael Curtiz (1947) avec Claude Rains, Joan Caulfield et Audrey Totter.

(1) Lors de ses entretiens avec François Truffaut, Alfred Hitchcock dit « Nous pouvons passer rapidement sur ce film car il n’y a pas grand-chose à en dire » et ce n’est qu’à l’insistance de Truffaut qu’il consent à en parler un peu.

Le crime était presque parfait
La scène la plus célèbre du film Le Crime était presque parfait d’Alfred Hitchcock (de g. à d.: Anthony Dawson et Grace Kelly)

16 décembre 2014

Unter der Laterne (1928) de Gerhard Lamprecht

Unter der Laterne(Film muet) La jeune Else est interdite de sortie par son père qui l’enferme dans sa chambre. Elle parvient à s’enfuir avec son petit ami. Tous entreprennent de monter un numéro de music-hall. Son père la fait rechercher par la police ce qui va la pousser dans la rue… Gerhard Lamprecht est un cinéaste allemand dont le film le plus connu est un parlant : Émile et les Détectives (Emil und die Detektive, 1931). Il ne s’inscrit pas dans le courant expressionniste mais s’attache à décrire la vie des plus pauvres de l’Allemagne de l’Entre-deux guerres. Unter der Laterne raconte ainsi la descente d’une jeune fille bourgeoise vers les bas-fonds et le film est aussi une mise en garde des parents contre les excès de sévérité. Le développement est certes assez classique mais l’interprétation de bonne facture, même si on peut trouver que Lissy Arna manque un peu de présence. Le film ne manque pas de charme et même de surprises, comme cette longue scène originale où l’on nous suggère la vie facile et aisée de l’héroïne uniquement en nous en montrant les objets et les attributs. Auparavant impossible à voir, Unter der Laterne a été magnifiquement restauré en 2013.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Lissy Arna, Mathias Wieman, Paul Heidemann
Voir la fiche du film et la filmographie de Gerhard Lamprecht sur le site IMDB.

Remarque :
* Gerhard Lamprecht fut également un grand collectionneur d’objets en rapport avec le cinéma. Sa très grande collection a constitué la base de la Cinémathèque de Berlin en 1962.

Unter der Laterne
Dans Unter der Lanterne, Lissy Arna (au centre avec la tête penchée) se réfugie dans un bar après avoir résisté aux avances plus qu’insistantes de son protecteur.

15 décembre 2014

Valse d’amour (1990) de Dino Risi

Titre original : « Tolgo il disturbo »

Valse d'amourAncien directeur de banque, Augusto sort de l’hôpital psychiatrique où il a passé plus de dix-huit ans. Il revient habiter dans son ancienne maison qui est maintenant occupée par sa belle-fille Carla et sa petite fille Rosa avec laquelle il se sent rapidement plus proche…
Le thème de la complicité entre un enfant et son grand-père a été déjà plusieurs fois traité au cinéma mais Dino Risi inverse ici les rôles : c’est la fillette qui incarne l’ordre et la raison face à un grand-père sans repère, qui peine à retrouver ses marques dans un monde qui n’est plus le sien et qui accepte mal les codes sociaux des adultes. S’il ne peut se mesurer aux meilleurs films de Dino Risi, Valse d’amour ne manque tout de même pas de charme et de délicatesse. La belle prestation de Vittorio Gassman y contribue grandement. Parmi les seconds rôles, Elliott Gould est certainement le plus remarquable.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Vittorio Gassman, Dominique Sanda, Valentina Holtkamp, Elliott Gould
Voir la fiche du film et la filmographie de Dino Risi sur le site IMDB.
Voir les autres films de Dino Risi chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Dino Risi

Remarques :
* Les distributeurs français ont affublé le film d’un titre, Valse d’amour, assez éloigné du sujet ou du moins anecdotique (parfois Augusto entend dans sa tête une valse). Le titre original, Tolgo il disturbo qui peut se traduire par « Je ne vous dérangerai plus », a bien plus de sens.
* Fils de médecin, Dino Risi a suivi des études de médecine et même soutenu une thèse en psychiatrie avant de renoncer pour devenir cinéaste.
* On peut considérer que Valse d’amour est le dernier vrai film de Dino Risi qui avait alors soixante-treize ans et qui ne tournera que fort peu par la suite et principalement pour la télévision. Dino Risi s’est éteint en 2008 à l’âge de quatre-vingt-onze ans.

Vittorio Gassman dans Valse d'Amour de Dino Risi
Vittorio Gassman est un ex-banquier en partie amnésique dans Valse d’amour (Tolgo il disturbo) de Dino Risi (1990)

Valse d'amour de Dino Risi
Valentina Holtkamp est la petite-fille de Vittorio Gassman dans Valse d’amour (Tolgo il disturbo) de Dino Risi (1990).

14 décembre 2014

Le Jardin des délices (1970) de Carlos Saura

Titre original : « El jardín de las delicias »

Le jardin des délicesA la suite d’un accident, un industriel se retrouve handicapé et amnésique. Sa famille s’efforce de lui faire retrouver la mémoire pour qu’il donne le nom de la banque suisse où il a déposé de grandes sommes d’argent ou encore la combinaison du coffre dans sa chambre. Pour cela, ils n’hésitent pas à recréer certaines scènes de sa vie passée… Le Jardin des délices est un film à plusieurs niveaux de lecture. Tourné sous la dictature du général Franco et de sa censure, la signification de cette allégorie est nécessairement masquée. Il peut se voir comme une simple fable sur la cupidité où Carlos Saura manie l’humour et le cocasse à la manière d’un Buñuel, mais il est truffé de références politiques et historiques (1), cette famille très franquiste symbolisant le régime. Cette comédie noire apparaît alors comme une charge contre la répression qui sclérose les esprits.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: José Luis López Vázquez, Luchy Soto, Francisco Pierrá, Charo Soriano
Voir la fiche du film et la filmographie de Carlos Saura sur le site IMDB.
Voir les autres films de Carlos Saura chroniqués sur ce blog…
Voir les livres sur Carlos Saura

Remarques :
* Pour certains, le personnage du paralytique serait Franco lui-même. Il serait étonnant que ce fut l’intention de Carlos Saura car il y a une empathie du spectateur avec cette personne. Cette empathie est suscitée dès le début du film : nous le voyons réduit à l’impuissance, sans expression, vulnérable, aussi innocent qu’un enfant.
* La signification du titre ne paraît pas immédiate. Il s’agit certainement d’une référence au célèbre tableau de Jérôme Bosch et l’étonnante dernière scène du film peut certainement en être vue comme une interprétation appliquée à l’Espagne de Franco.

(1) Les références historiques sont loin d’être évidentes à moins de connaitre parfaitement l’histoire de l’Espagne. Par exemple, l’accident automobile serait une référence à Juan March Ordinas, banquier au passé trouble et financier du général Franco en 1936, qui trouva la mort en 1962 dans un accident de voiture.

Le Jardin des délices de Carlos Saura
José Luis López Vázquez est un industriel amnésique dans Le Jardin des délices de Carlos Saura.

Homonymes :
Le jardin des délices (Il giardino delle delizie) de l’italien de Silvano Agosti (1967)
Le jardin des délices (Ogród rozkoszy ziemskich) du polonais Lech Majewski (2004)
et aussi
Le jardin des délices de Jérôme Bosch, court-métrage de Jean Eustache (1980).

12 décembre 2014

L’Impératrice rouge (1934) de Josef von Sternberg

Titre original : « The Scarlet Empress »

L'impératrice rougeJeune princesse prussienne, Sophie Frédérique d’Anhalt, a été choisie par l’impératrice de toutes les Russies Elisabeth pour épouser son neveu, grand duc et futur empereur. Après un long voyage, elle arrive à la cour de Russie où elle découvre que son futur époux n’est qu’un simple d’esprit… Réponse de la Paramount à La Reine Christine avec Greta Garbo (grande rivale de Marlene), L’Impératrice rouge raconte le parcours de Catherine II de Russie jusqu’à son arrivée au pouvoir. Plus qu’un film historiquement fidèle, c’est surtout l’oeuvre d’un grand créateur qui modèle l’Histoire pour en faire un spectacle assez unique, d’un esthétisme très personnel. Par les décors, Josef von Sternberg a créé un univers tourmenté, morbide, extravagant dans sa démesure, peuplé de statues grimaçantes tout en contraste avec la beauté des visages, particulièrement celui de Marlene Dietrich magnifié par un éclairage travaillé. Entre les mains de son pygmalion, l’actrice est absolument superbe, L'impératrice rouged’une grande prestance qui semble naturelle. Son personnage se joue des hommes. L’érotisme sous-jacent de certaines scènes est patent. La mise en scène baroque et très personnelle a dérouté : L’Impératrice rouge fut mal reçu par la critique à sa sortie, jugé trop extravagant. Si les opinions ont changé depuis, il ne fait toujours pas l’unanimité, loin de là. C’est certainement pourtant le plus beau (avec Shanghai Express) des sept films que Josef von Sternberg a tourné avec Marlene Dietrich…
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Marlene Dietrich, John Lodge, Sam Jaffe, Louise Dresser, C. Aubrey Smith
Voir la fiche du film et la filmographie de Josef von Sternberg sur le site IMDB.

Voir les autres films de Josef von Sternberg chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Josef von Sternberg

Remarques :
* Dans les toutes premières scènes, Sophie enfant est interprétée par Maria Riva, la propre fille de Marlene Dietrich. Elle avait alors neuf ans (en outre, la fillette travaillait déjà avec sa mère au choix de ses robes). Maria Riva raconte le tournage dans son (volumineux) livre Marlene Dietrich (Flammarion, 1993).

Marlene Dietrich dans L'Impératrice Rouge, The Scarlet Empress de Josef von Sternberg (1934)
Marlene Dietrich et les sculptures tourmentées conçues par Josef von Sternberg pour L’Impératrice Rouge (The Scarlet Empress, 1934)

L'impératrice rouge
Sam Jaffe (l’à demi-fou grand-duc Pierre III de Russie) et Marlene Dietrich (Catherine II de Russie) dans L’Impératrice rouge de Josef von Sternberg (The Scarlet Empress, 1934)

Marlene Dietrich dans Scarlet Empress
Marlene Dietrich (Catherine II passant en revue d’un oeil gourmand sa garde personnelle…) dans L’Impératrice rouge de Josef von Sternberg (The Scarlet Empress, 1934)

11 décembre 2014

Alice (1990) de Woody Allen

AliceAlice est une jeune quarantenaire de la haute bourgeoisie new yorkaise qui mène une vie aisée mais futile. Elle consulte le Docteur Yang pour un vague mal de dos. Ce docteur qui a des ressources étonnantes et la rencontre fortuite d’un homme vont l’amener à reconsidérer sa vie… Le thème d’Alice n’est pas original en soi mais son traitement l’est beaucoup plus. Non seulement, Woody Allen choisit la légèreté et l’humour mais en plus il fait intervenir une bonne dose d’irrationnel dans ce portrait de femme, nouvelle preuve de cet amour du cinéaste pour la magie (1). Il parvient à mêler les genres et c’est ce mélange qui rend le film attrayant malgré la grande superficialité de son personnage principal. En filigrane, on retrouve cette même recherche de la vraie vie que l’on trouvait dans plusieurs de ses films précédents : Alice est finalement assez proche sur le fond de Une autre femme, même si les formes sont bien différentes : ici, c’est la satire et l’humour qui soutiennent le propos.
Elle: 4 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Mia Farrow, William Hurt, Joe Mantegna, Keye Luke, Judy Davis
Voir la fiche du film et la filmographie de Woody Allen sur le site IMDB.

Voir les autres films de Woody Allen chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Woody Allen

(1) Si Alice est l’un des plus marqué sur ce plan, il est facile de remarquer que la plupart de ses films comportent une ou plusieurs petites touches de magie. Cet amour de la magie remonte à son adolescence : Woody Allen était alors très habile et impressionnait tout son entourage par ses tours de cartes et de magie.

Mia Farrow et Keye Luke dans Alice (1990)
(ci-dessus) Mia Farrow et Keye Luke dans Alice
Mia Farrow et Joe Mantegna dans Alice (1990)
(ci-dessus) Mia Farrow et Joe Mantegna dans Alice.

9 décembre 2014

La Déesse (1958) de John Cromwell

Titre original : « The Goddess »

La déesseLa Déesse (The Goddess) raconte le parcours d’une jeune fille en manque d’amour qui devient une actrice adulée mais extrêmement perturbée psychiquement. Bien entendu, la production a nié toute ressemblance avec une actrice existante mais tout le monde a reconnu Marilyn Monroe dans ce portrait. Le choix du sujet est étrange car, rappelons-le, Marilyn était alors toujours en vie et on peut se demander s’il n’y avait pas de la part de la Columbia une volonté délibérée d’éreinter l’image de la grande star qui lui avait échappée (1). Le choix de l’interprète principale est tout aussi étrange : Kim Stanley est alors une actrice assez inconnue (elle l’est d’ailleurs restée, hélas) qui n’a ni l’âge ni le physique pour le rôle. Malgré ces handicaps, sa performance est franchement remarquable. Kim Stanley est passée par l’Actors Studio et cela se sent : elle se donne à fond et montre une palette étonnamment riche de sentiments. Les seconds rôles sont en outre très bien tenus. The Goddess est structuré en trois parties, bien séparées avec des titres : l’enfance, l’adolescence et la starification. L’histoire montre comment l’accession au statut de star n’a fait qu’amplifier les manques de la jeune femme qui se retrouve comme enfermée dans son mal-être, sans issue possible. Le film est étrangement prémonitoire du futur destin de Marilyn, quelque quatre années plus tard. Pour sa particularité et pour la performance de Kim Stanley, The Goddess mérite notre intérêt.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Kim Stanley, Lloyd Bridges, Steven Hill, Betty Lou Holland
Voir la fiche du film et la filmographie de John Cromwell sur le site IMDB.
Voir les autres films de John Cromwell chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* John Cromwell est avant tout un réalisateur de mélodrames. Il a débuté avec le parlant à la toute fin des années vingt. Les cinéphiles le connaissent surtout pour The Goddess et pour Dead Reckoning, un film noir très classique de 1947 avec Humphrey Bogart et Lizabeth Scott mais on lui doit aussi une des versions du Prisoner of Zenda, celle de 1937, une biographie de Lincoln, Abe Lincoln in Illinois (1940), et l’intéressant Of Human Bondage avec Bette Davis (1935).

* Le scénario a été écrit par Paddy Chayefsky, à qui l’on doit également The Americanization of Emily (1964).

* John Cromwell a déclaré que son film avait été massacré au montage par Paddy Chayefsky qui a supprimé de nombreuses scènes montrant la réaction des personnages.

* The Goddess est le premier long métrage de Kim Stanley qui avait auparavant beaucoup joué à Broadway et à la télévision. Après ce film, elle y retournera pour continuer sa carrière, ne tournant que très peu de films (5 en tout, le dernier étant L’Etoffe des Héros (1983) où elle tient le bar des pilotes). Au moment du tournage de The Goddess, elle a presque 33 ans, soit le double de son personnage dans la partie « adolescence », ce qui est un peu beaucoup…

(1) La Columbia a eu Marilyn Monroe sous contrat en 1948 mais ne l’a pas gardée, une bévue de plus pour le rustre et borné Harry Cohn (patron de la Columbia) qui l’avait alors déclarée avec sa délicatesse habituelle « pataude et sans aucun talent ».

The Goddess
Kim Stanley dans The Goddess de John Comwell