30 mai 2013

Les Aventures de Robinson Crusoé (1954) de Luis Buñuel

Titre original : « Robinson Crusoe »

Les aventures de Robinson CrusoéSeul rescapé d’un naufrage, Robinson Crusoé se retrouve seul sur une île de l’Atlantique. Il s’organise pour y vivre… Les Aventures de Robinson Crusoé est une oeuvre de commande. Luis Buñuel raconte dans ses mémoires avoir été peu enthousiasmé à l’idée d’adapter le roman de Daniel Defoe avant de s’intéresser à l’histoire. Le résultat est assez proche du livre mais on peut déceler la patte du cinéaste dans les scènes qu’il a ajoutées, les éléments de vie sexuelle et le rêve avec le père, et aussi dans certains passages sur la religion. Les Aventures de Robinson Crusoé est une belle réflexion sur la solitude, le besoin de vie en société. Le tournage prit plusieurs mois car la pellicule Pathécolor demandait une lumière particulière et Buñuel dit avoir été pratiquement aux ordres du chef opérateur. Le film eut beaucoup de succès et reste la meilleure adaptation de ce classique bien connu de la littérature.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Dan O’Herlihy, Jaime Fernández
Voir la fiche du film et la filmographie de Luis Buñuel sur le site IMDB.
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Principales autres adaptations en long métrage :
L’île du maître (Man Friday) de Jack Gold (1975) avec Peter O’Toole
Crusoe de Caleb Deschanel (1988) avec Aidan Quinn
Robinson Crusoé de Rod Hardy & John Miller (1997) avec Pierce Brosnan

5 août 2012

Medianeras (2011) de Gustavo Taretto

MedianerasMartin et Mariana vivent sans se connaître dans deux immeubles proches du centre de Buenos Aires. Bien qu’assez proches dans leurs goûts et sortant tous deux d’une longue liaison, ils n’ont aucune chance de se remarquer l’un l’autre dans l’immensité de cette métropole… Avec Medianeras (en français : « murs mitoyens »), l’argentin Gustavo Taretto réalise une comédie douce-amère fort plaisante. Certes, le sujet des problèmes existentiels de jeunes trentenaires n’est guère nouveau mais Taretto a un certain style pour le traiter qui n’est pas sans rappeler le Woody Allen d’Annie Hall ou Manhattan. Il définit ses personnages par rapport à la ville, presque un troisième personnage, qui, tout comme les médias de communication actuels, impose ses règles de sociabilité. Immédiate et directe, cette nouvelle communication peut éloigner plus qu’elle ne rapproche. La photographie est assez belle, notamment dans ses plans sur l’architecture urbaine qui ouvrent chacun des quatre grands chapitres (en réalité, quatre saisons) du film. L’humour est bien dosé, Medianeras est un film équilibré et très bien fait.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Javier Drolas, Pilar López de Ayala, Inés Efron
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Remarque :
Le film Medianeras existait déjà sous forme de court métrage de 28 minutes (2006) pour lequel Gustavo Taretto a reçu de nombreux prix.

12 juillet 2012

Dans ses yeux (2009) de Juan José Campanella

Titre original : « El secreto de sus ojos »

Dans ses yeuxEn 1974, à Buenos Aires, Benjamin Esposito enquête pour le parquet dans une affaire de viol suivi de meurtre d’une jeune femme. Vingt cinq ans plus tard, alors qu’il vient de prendre sa retraite, il décide d’écrire un roman sur cette affaire qui l’a marqué durablement… En adaptant un roman d’Eduardo Sacheri, l’argentin Juan José Campanella a réalisé un film policier d’un très beau classicisme. L’histoire de Dans ses yeux est rapidement prenante avec des personnages très proches de nous. Le film est une subtile combinaison, à la fois intimiste et spectaculaire, faisant même preuve parfois de grande virtuosité comme dans cet époustouflant plan-séquence du stade (1). Mais si le film fait montre de beaucoup de perfection, c’est probablement dans le déroulement du récit qu’elle est la plus manifeste, avec des ruptures qui relancent constamment notre intérêt et maintiennent une certaine tension. Dans ses yeux impressionne vraiment par sa réalisation et par son irréprochable dosage.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Ricardo Darín, Soledad Villamil, Guillermo Francella, Pablo Rago, Javier Godino
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(1) Le plan démarre par un vue aérienne en approche à 500 m d’un stade que l’on va survoler en rase-mottes alors que le match est en cours. La caméra continue au dessus des tribunes pour « atterrir » juste à côté du personnage principal. C’est époustouflant car aucune coupure n’est détectable. Et ce n’est pas fini car la scène continue par une course poursuite dans les couloirs, toujours sans changement de plan. En tout, ce plan, dont la réalisation est vraiment parfaite, dure 5 minutes ½.
Détails de réalisation sur le site CG Society (en anglais)…

7 juillet 2012

Biutiful (2010) de Alejandro González Iñárritu

BiutifulPour permettre à ses enfants de survivre, Uxbal se livre à tout un tas de trafics dans les quartiers polyethniques de Barcelone, aidant des immigrés clandestins à travailler au noir, monnayant de prétendus talents de medium pour communiquer les dernières paroles de défunts. Il découvre qu’il est atteint d’une maladie grave… Contrairement aux précédents films d’Alejandro González Iñárritu, Biutiful est centré sur un seul personnage. Il l’a écrit pour Javier Bardem qui signe ici une belle performance qui ne parvient que partiellement à contrebalancer les excès de style du réalisateur. Très (trop) long, Biutiful est un film très noir dont le personnage semble devoir porter toutes dérives du monde. A vouloir trop en faire, Iñárritu nous détache et nous éloigne.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Javier Bardem, Maricel Álvarez, Hanaa Bouchaib, Eduard Fernández
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4 avril 2012

Los olvidados (1950) de Luis Buñuel

Los olvidadosDans la banlieue la plus pauvre de Mexico, un groupe d’adolescents traine dans les rues. L’un deux, El Jaibo, récemment évadé d’une maison de redressement, possède un ascendant sur les autres et les entraîne à commettre des méfaits. Le jeune Pedro se retrouve impliqué malgré lui… Los olvidados (les oubliés) marque le retour de Luis Buñuel sur le devant de la scène. Il s’est immergé plusieurs mois dans les bidonvilles de Mexico pour observer et voir la réalité de très près. Il signe ainsi un film proche du néo-réalisme italien (1), un film fort, sans sensationnalisme ni excès de misérabilisme mais dont les images sont marquantes. Luis Buñuel ne porte pas de jugement, il n’accuse pas la société qui tente d’apporter des solutions, il rend compte d’une situation sans issue. Il n’y a aucun manichéisme : fourbe et traitre, El Jaibo est la figure du mal et pourtant Buñuel le rend attachant dans une courte scène. Le seul jugement vraiment sévère est porté sur la mère de Pedro, incapable de donner la moindre parcelle d’amour. Los olvidados fut d’abord très mal reçu au Mexique. Déjà pendant le tournage, l’équipe était hostile mais, à sa sortie, Buñuel dut faire face à de nombreuses critiques acerbes : on lui reprochait de donner une mauvaise image du pays. Ce n’est qu’après un accueil triomphal à Cannes (en partie grâce à ses amis surréalistes) que le film put être plus largement distribué (2). Los olvidados a été inscrit par l’Unesco au Registre Mémoire du Monde en 2003.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Roberto Cobo, Estela Inda, Miguel Inclán, Alfonso Mejía, Alma Delia Fuentes
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Remarques :
* En France, les distributeurs sortirent le film sous le titre Los olvidados, Pitié pour eux, sous-titre qualifié de « ridicule » par Buñuel.
* Une autre fin, tournée par sécurité par Buñuel qui craignait la censure, a été redécouverte 50 ans après la sortie. Ce happy-end n’a heureusement jamais été utilisé. Il est présent sur certaines versions en DVD.

(1) Luis Buñuel dit avoir beaucoup aimé Sciuscià de Vittorio de Sica.
(2) Dans ses mémoires, Luis Buñuel raconte que Georges Sadoul avait reçu ordre du Parti Communiste français de ne pas parler du film, jugé film bourgeois (à cause de l’intervention de l’agent de police dans la scène du pédophile et de l’angélisme de la ferme/maison de redressement). Ce n’est que lorsque Poudovkine écrivit un article louangeur sur Los olvidados dans La Pravda quelques mois plus tard, que le PCF révisa instantanément son jugement.

11 mars 2012

L’ange exterminateur (1962) de Luis Buñuel

Titre original : « El ángel exterminador »

L'ange exterminateur Dans une vaste demeure, les participants à un dîner de la haute bourgeoisie sont invités à passer au salon. Plus tard, au moment de partir, personne ne parvient à quitter la pièce alors que les portes sont pourtant grandes ouvertes. Ils en semblent empêchés par une force invisible, leur volonté s’effrite dès qu’ils approchent du seuil… L’interprétation de L’ange exterminateur a fait couler beaucoup d’encre. L’explication du phénomène physique ou psychique qui retient les invités n’a qu’une importance secondaire. Ce qui intéresse Luis Buñuel, c’est d’observer un petit groupe de personnes, liées par pure convenance sociale, mis dans une situation extrême. Empêchés de faire un acte le plus simple qui soit, sortir d’une pièce, ils se montrent sous un autre jour ; tout le vernis social s’écaille, des tensions apparaissent, L'ange exterminateur les puissances protectrices invoquées (religion, franc-maçonnerie, sorcellerie) sont ici inopérantes (1). Dès le début du film, nous observons des phénomènes étranges : les domestiques quittent la maison, des scènes se répètent (2), la maitresse des lieux, pourtant guindée, a préparé des plaisanteries saugrenues (3). Tourné avec peu de moyens au Mexique, L’ange exterminateur est une puissante fable sociale aux multiples interprétations possibles.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Silvia Pinal, Lucy Gallardo, Enrique Rambal, Claudio Brook, Tito Junco
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(1) Dans ses mémoires, Luis Buñuel en parle ainsi : « Ce que j´y vois, c`est un groupe de gens qui ne peuvent pas faire ce qu´ils ont envie de faire : sortir d´une pièce. Impossibilité inexplicable de satisfaire un désir simple. Cela arrive souvent dans mes films. Dans L’âge d’or, un couple veut s’unir sans y parvenir. Dans Cet obscur objet du désir, il s’agit du désir sexuel d’un homme vieillissant qui ne se satisfait jamais. Archibald de la Cruz essaie vainement de tuer. Les personnages du Charme Discret veulent à toute force dîner ensemble et n’y parviennent pas. Peut-être pourrait-on trouver d’autres exemples. »
(Luis Buñuel « Mon dernier soupir »)

(2) « Je me suis toujours senti attiré, dans la vie comme dans mes films, par les choses qui se répètent. Je ne sais pas pourquoi, je ne cherche pas à l’expliquer. On compte au moins une dizaine de répétitions dans L’ange exterminateur. » (Luis Buñuel « Mon dernier soupir »)

(3) Luis Buñuel dit s’être inspiré d’un grand dîner à New York où la maitresse de maison avait imaginé de faire exécuter certains gags pour surprendre et amuser ses invités. Le maître d’hôtel qui s’étale de tout son long en apportant un plat est ainsi véridique. Dans L’ange exterminateur, elle avait également prévu un gag (que l’on ne connaitra jamais) avec un ours et des moutons ! Certains « critiques fanatiques de symbolisme » (dixit Buñuel) ont vu dans l’ours le bolchevisme qui guettait la société en ce début des années soixante… alors que, si symbole il y a (et il y en a certainement un) c’est plutôt celui du retour à une certaine animalité : le groupe observe l’ours d’ailleurs avec une sorte de fascination et de respect. Les brebis symbolisent la fraîcheur et la vulnérabilité de l’être. Avec ces brebis, Buñuel fait aussi une petite pique amusante à la religion (ça manquait!) à la toute fin : l’église recueille les brebis égarées… mais on sait quel sera leur sort!

28 février 2012

Tourments (1953) de Luis Buñuel

Titre original : « El »

TourmentsEn pleine cérémonie du Jeudi saint dont il est l’un des officiants laïques, un quadragénaire de la haute société remarque une belle jeune femme qui éveille son désir. Il la suit et découvre qu’elle est fiancée à l’un de ses amis. Mais cela ne va pas l’arrêter pour autant… El est un film de la période mexicaine de Luis Buñuel assez comparable en thème et en qualité à La vie criminelle d’Archibald de la Cruz (1955). Librement inspiré d’un roman autobiographique de Mercedes Pinto, il s’agit d’un film psychologique montrant comment la jalousie extrême d’un homme va le conduire à l’impuissance et à la paranoïa (1). Le film est remarquable par le basculement en son milieu : alors que toute la première partie nous fait adopter le point de vue de l’homme prédateur, nous faisant partager son désir, la seconde partie nous fait adopter le point de vue de la femme, nous faisant partager ses souffrances (2). Si Buñuel mêle quelques piques habituelles au clergé et à la bourgeoisie, elles restent assez secondaires, le réalisateur apportant plus de soin à décrire les méandres psychologiques qui transforment le désir en névrose. La tension devient de plus en plus forte pour atteindre un certain paroxysme avec la superbe scène de la machine à écrire. La photographie de Gabriel Figueroa est très belle, les éclairages sont particulièrement travaillés et mettent en relief la beauté de Delia Garcés. El n’eut aucun succès à sa sortie que ce soit en France ou au Mexique (3). Ce n’est que plus tard qu’il sera reconnu comme l’un des tous meilleurs de Buñuel.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Arturo de Córdova, Delia Garcés, Manuel Dondé
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Remarque :
C’est Buñuel lui-même qui joue le rôle du personnage principal devenu franciscain, notamment dans cette fameuse scène ultime (et symbolique) où il s’éloigne en zigzag.

(1) Jacques Lacan a présenté le film à ses élèves à plusieurs reprises.
(2) Pour ce changement de point de vue (et aussi pour la scène du clocher), El a souvent été rapproché de Vertigo qu’Hitchcock tournera quelques années plus tard. Il est vrai que le climat général évoque de nombreux films d’Hitchcock et que Delia Garcés ne déparerait pas parmi les « beautés froides » qu’affectionnait le réalisateur anglais.
(3) Les critiques furent mauvaises. Buñuel raconte dans ses mémoires que Cocteau a déclaré qu’avec El, Buñuel s’était « suicidé ». Il ajoute que Cocteau a changé d’avis quelques années plus tard…

20 janvier 2012

Une femme sans amour (1952) de Luis Buñuel

Titre original : « Una mujer sin amor »
Autre titre français (DVD) : « Pierre et Jean »

Una mujer sin amorMariée à un homme plus âgé qu’elle n’aime pas, une femme a une aventure avec un ingénieur des forêts. Il lui demande de quitter son mari mais elle hésite à abandonner son petit garçon de 5 ans… Une femme sans amour est adapté du roman de Guy de Maupassant « Pierre et Jean » qui avait déjà été porté à l’écran par André Cayatte 8 ans auparavant. Il fut même demandé à Luis Buñuel de reproduire le film de Cayatte plan par plan, ce que Buñuel refusa. Il qualifie lui-même dans ses mémoires le résultat de médiocre et déclare que Une femme sans amour est sans doute son plus mauvais film. C’est un jugement certainement un peu sévère. Certes le film manque d’intensité et paraît bien conventionnel mais la mise en scène est sans défaut et le mélodrame garde un certain attrait.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Rosario Granados, Tito Junco, Julio Villarreal
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C’est un remake de :
Pierre et Jean d’André Cayatte (1943) avec Renée Saint-Cyr et Noël Roquevert.

5 décembre 2011

La montée au ciel (1952) de Luis Buñuel

Titre original : « Subida al cielo »

La montée au cielDans un village isolé du Mexique, un jeune homme se voit forcé d’interrompre son voyage de noces pour aller au chevet de sa mère mourante. A sa demande expresse, il doit aller par delà les montagnes quérir un avocat pour enregistrer ses dernières volontés… La montée au ciel (c’est le nom d’un col que le héros doit passer) est un film tourné assez rapidement dans des conditions assez précaires. Le scénario s’inspire d’aventures survenues au producteur du film, le poète espagnol Altolaguirre. Le film est donc le récit d’un voyage en autobus, passablement mouvementé et constamment retardé. Le manque de moyens se sent sur certaines scènes où des maquettes simplettes ont été utilisées. Deux scènes célèbres : la petite fille conduisant les deux bœufs que personne n’arrivait à contrôler et la scène onirique où une démesurément longue épluchure de pomme de terre symbolise le cordon ombilical avec sa mère. Si l’on retrouve l’image de plusieurs sentiments forts, la symbolique et la caricature sont bien mois abouties que dans ses autres films.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Lilia Prado, Esteban Márquez, Luis Aceves Castañeda, Manuel Dondé
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19 août 2011

Simon du désert (1965) de Luis Buñuel

Titre original : « Simón del desierto »

Simon du désertDepuis de nombreuses années, Simon s’est isolé au sommet d’une colonne en plein désert pour prier Dieu et se repentir de ses péchés. Le diable vient le tenter sous différentes formes… Inspiré de la vie de Siméon le Stylite (1), Simon du désert n’a hélas pu être achevé par Luis Buñuel : après 18 jours de tournage, le producteur se retira du projet à la suite d’un revers financier. Le film est ainsi interrompu à la moitié (2). Luis Buñuel s’attaque au dogmatisme religieux. En soulignant la futilité de l’ascèse de Simon, il démontre que tout ce qui s’éloigne de l’amour des hommes est vain et même contraire au sens de la religion. C’est même son Satan qui se charge de replacer Simon parmi les hommes dans l’époque actuelle, une position qu’il refuse. Malgré son caractère inachevé, Simon du désert reçut un bon accueil critique (3). Il fut par la suite programmé en salles avec Une Histoire Immortelle d’Orson Welles.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Claudio Brook, Silvia Pinal
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(1) Siméon le Stylite (ou Siméon l’Ancien) est un saint chrétien du Ve siècle qui se retira du monde en se tenant au sommet d’une colonne en Syrie pour prier. Il était nourri par des pèlerins qui venaient lui apporter des victuailles (quelques feuilles de salade et de l’eau) qu’il hissait avec une corde. Il a ainsi passé près de 40 années au sommet d’un pilier, le dernier était haut de 15 mètres. Son ascèse inspira d’autres pénitents pendant plusieurs siècles.
(2) Dans son autobiographie Mon dernier soupir, Luis Buñuel précise qu’il avait prévu une scène sous la neige, des pèlerinages et même la visite (historique) de l’Empereur de Byzance. Luis Buñuel dut abandonner toutes ces scènes et imaginer la scène de la boîte de nuit new yorkaise pour donner une fin cohérente.
(3) Luis Buñuel souligne, non sans ironie, que Simon du désert est le seul de ses films qui obtint cinq prix au festival de Venise (et qu’il n’y eut personne pour recevoir ces prix).