1 novembre 2016

Les Trois Mousquetaires (1948) de George Sidney

Titre original : « The Three Musketeers »
Autre titre français : « D’Artagnan au service de la reine »

Les trois mousquetaires Le jeune D’Artagnan arrive de sa Gascogne natale à Paris pour s’engager dans le régiment des mousquetaires du roi Louis XIII. A peine arrivé, il provoque malgré lui trois mousquetaires en duel : Athos, Porthos et Aramis. Devenus amis, ils vont déjouer les tortueux complots de Richelieu… Souvent décrite comme étant la meilleure adaptation du roman d’Alexandre Dumas, cette version des Trois Mousquetaires n’est toutefois pas sans défaut. Dans leur volonté de privilégier la comédie, les scénaristes ont un peu perdu toute tension dramatique et le choix de garder tous les épisodes du roman pénalise le rythme : l’ensemble paraît un peu décousu. En revanche, cette version restitue à merveille l’exaltation et le panache, par ses décors et ses costumes tout d’abord, magnifiés par le Technicolor, et aussi par une interprétation brillante. Gene Kelly est un D’Artagnan bondissant et joyeux qui rappelle Douglas Fairbanks (dont Kelly était un grand admirateur lorsqu’il était enfant). Son premier duel avec Jussac est une merveille de chorégraphie. L’acteur était ravi d’interpréter ce rôle. Lana Turner incarne la belle et vénéneuse Milady avec classe et Vincent Price est un Richelieu particulièrement intriguant. Il faut aussi souligner la belle performance de Van Heflin dans le personnage complexe d’Athos. Les Trois Mousquetaires fut un très grand succès, l’un des plus grands succès de la décennie pour la M.G.M.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lana Turner, Gene Kelly, June Allyson, Van Heflin, Angela Lansbury, Frank Morgan, Vincent Price, Keenan Wynn, John Sutton, Gig Young, Robert Coote, Reginald Owen
Voir la fiche du film et la filmographie de George Sidney sur le site IMDB.

Voir les autres films de George Sidney chroniqués sur ce blog…

Les Trois Mousquetaires
D’Artagnan (Gene Kelly) succombe aux charmes de Milady de Winter (Lana Turner) dans Les trois mousquetaires de George Sidney.

Les Trois Mousquetaires
Athos (Van Heflin), D’Artagnan (Gene Kelly), Porthos (Gig Young) et Aramis (Robert Coote), unis pour être au service de la reine dans Les trois mousquetaires de George Sidney.

Remarques :
* La musique composée par Herbert Stothart est basée sur des airs de Tchaïkovsky.
* Le premier duel de D’Artagnan contre Jussac était alors le plus long duel à l’écran. Il ne sera détrôné par le long duel de Scaramouche du même George Sidney.
* Une blessure à la cheville de Gene Kelly a retardé le début du tournage et obligé George Sidney à reporter toutes les scènes d’actions en fin de production.
* En faisant une belle prestation, Gene Kelly espérait pouvoir convaincre la M.G.M. de le laisser adapter Cyrano de Bergerac en comédie musicale. A son grand dam, il n’en fut rien.
* Lana Turner a d’abord refusé le rôle car elle n’était pas la star du film. La réponse de la MGM a alors été très ferme : suspension de contrat. Il a fallu des négociations et des aménagements de scénario pour qu’un accord soit trouvé.
* Code de censure oblige, Constance Bonacieux est devenue la fille du logeur de D’Artagnan (et non sa femme)… s’éprendre d’une femme mariée n’est, il est vrai, pas très convenable (on se demande où les écrivains vont chercher tout ça!)
* Tout aussi amusant : sous la pression de la National Catholic Legion of Decency qui demandait que le personnage soit supprimé, le Cardinal Richelieu a été promu Premier Ministre (à noter que, à proprement parler,  la France n’aura pas de Premier Ministre avant 1959).
* Dans Chantons sous la pluie (Singin’ in the Rain, 1952), l’extrait du film muet en noir et blanc (The Royal Rascal) utilise des scènes des Trois Mousquetaires. On peut même entrevoir Lana Turner dans l’embrasure d’une porte, plan enchaîné avec un gros plan sur Jean Hagen.

Les Trois Mousquetaires
Milady de Winter (Lana Turner) complote pour le compte de Richelieu (Vincent Price) dans Les trois mousquetaires de George Sidney. Les costumes sont de Walter Plunkett, surtout connu pour son travail sur Autant en emporte le vent, mais sa filmographie est impressionnante.

Les Trois Mousquetaires
D’Artagnan (Gene Kelly) est prêt à en découdre dans la joie et la bonne humeur dans Les trois mousquetaires de George Sidney (en fait, on peut dire que D’Artagnan se comporte le plus souvent comme un gamin de dix ans…)

Principales adaptations au cinéma :
a) Versions de l’époque du muet :
1903: Les Mousquetaires de la reine (1903) de Georges Méliès (film perdu)
1909: I tre moschettieri de Mario Caserini (Italie, 16 mn)
1911: The Three Musketeers de J. Searle Dawley (USA, 2 x 10mn) (Edison)
1912: When Kings were the Law de D.W. Griffith (USA, 17 mn)
1912: Les trois mousquetaires de André Calmettes et Henri Pouctal (France, durée ?)
1914: The Three Musketeers de Charles V. Henkel (USA, 80 mn env.) avec Earl Talbot (film perdu?)
1916: The Three Musketeers de Charles Swickard (USA, 63 mn) avec Orrin Johnson
1921: The Three Musketeers de Fred Niblo (USA, 119 mn) avec Douglas Fairbanks
1921: Les Trois Mousquetaires de Henri Diamant-Berger (France, 720 mn) avec Aimé Simon-Girard
1922: L’étroit mousquetaire de Max Linder (USA, 58 mn) avec Max Linder (parodie)

b) Versions du parlant :
1932: Les Trois Mousquetaires de Henri Diamant-Berger (France, 246 mn) avec Aimé Simon-Girard
1935: The Three Musketeers de Rowland V. Lee (USA) avec Walter Abel
1939: The Three Musketeers de Allan Dwan (USA) avec Don Ameche (comédie)
1942: Los tres mosqueteros de Miguel M. Delgado (Mexique) (parodie)
1948: The Three Musketeers de George Sidney (USA) avec Lana Turner et Gene Kelly
1953: Les Trois Mousquetaires de André Hunebelle (France) avec Georges Marchal et Bourvil
1954: I cavalieri della regina de Mauro Bolognini (Italie)
1957: Les Trois Mousquetaires et demi de Gilberto Martínez Solares (Mexique)(parodie)
1961: Les Trois Mousquetaires de Bernard Borderie (France en 2 parties) avec Gérard Barray et Mylène Demongeot
1973: The Three Musketeers de Richard Lester (UK) avec Michael York et Raquel Welch
1974: The Four Musketeers de Richard Lester (UK) avec Michael York et Raquel Welch
1974: Les Quatre Charlots mousquetaires de André Hunebelle (France) (parodie)
1993: The Three Musketeers de Stephen Herek (USA) avec Charlie Sheen et Chris O’Donnell
2001: The Musketeer de Peter Hyams (UK) avec Justin Chambers et Catherine Deneuve
2005: Les Trois Mousquetaires de Pierre Aknine (France) avec Vincent Elbaz et Emmanuelle Béart
2011: The Three Musketeers de Paul W.S. Anderson (USA) avec Logan Lerman, Juno Temple, Orlando Bloom et Milla Jovovich
2023: Les Trois Mousquetaires: D’Artagnan de Martin Bourboulon avec François Civil
et d’innombrables versions TV…
… et beaucoup d’autres films d’un univers proche (suites, filiations, etc.)

Versions chroniquées sur ce blog :
1921: The Three Musketeers de Fred Niblo (USA, 119 mn) avec Douglas Fairbanks
1921: Les Trois Mousquetaires de Henri Diamant-Berger (France, 720 mn) avec Aimé Simon-Girard
1922: L’étroit mousquetaire de Max Linder (USA, 58 mn) avec Max Linder (parodie)
1948: The Three Musketeers de George Sidney (USA) avec Lana Turner et Gene Kelly
1961: Les Trois Mousquetaires de Bernard Borderie (France en 2 parties) avec Gérard Barray et Mylène Demongeot
2023: Les Trois Mousquetaires: D’Artagnan de Martin Bourboulon avec François Civil

26 août 2016

Le Château dans le ciel (1986) de Hayao Miyazaki

Titre original : « Tenkû no shiro Rapyuta »

Le Château dans le cielUne fillette nommée Sheeta possède une pierre magique également convoitée aussi bien par un mystérieux personnage officiel flanqué d’un bataillon militaire que par des pirates particulièrement intrépides. Cette pierre permettrait de retrouver Laputa, une île légendaire flottant dans le ciel. Pour échapper à ses poursuivants, Sheeta va être aidée par Pazu, un jeune garçon très débrouillard qui l’a recueillie… Tourné en 1986 mais découvert en Europe qu’en 2003, Le Château dans le ciel est la première production des Studios Ghibli. Hayao Miyazaki a déclaré qu’il s’agissait de son préféré. Le scénario est assez riche, on y trouve tous les thèmes chers au réalisateur : le monde de l’enfance, le fantastique, les machines volantes, la plénitude de la Nature, le rejet des armes et du totalitarisme. L’idée de l’île volante lui a été inspirée par un passage des Voyages de Gulliver de Jonathan Swift. Le rythme est très enlevé avec beaucoup de scènes d’action mais aussi de très belles scènes poétiques. Le Château dans le ciel est une petite perle de plus de la filmographie d’Hayao Miyazaki.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs:
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Le Château dans le cielSheeta et Pazu, les héros de Le Château dans le ciel de Hayao Miyazaki.

Le Château dans le cielLaputa, l’île volante dans Le Château dans le ciel de Hayao Miyazaki.

Le Château dans le cielDessin préparatoire pour Laputa, l’île volante dans Le Château dans le ciel de Hayao Miyazaki.
Laputa est dans son état initial ; l’arbre au sommet (qui a une grande importance par la suite) n’est pas encore présent.

19 janvier 2016

Meurtre au soleil (1982) de Guy Hamilton

Titre original : « Evil Under the Sun »

Meurtre au soleilChargé de retrouver un diamant de grande valeur, Hercule Poirot se retrouve dans un hôtel de luxe sur une île de l’Adriatique. C’est là que séjourne l’actrice Arlena Marshall à qui un milliardaire avait donné le bijou… Librement adapté par Anthony Shaffer du roman Evil Under the Sun, Meurtre au soleil permet de se replonger dans l’atmosphère si séduisante des histoires d’Agatha Christie. Et, comme souvent dans les productions anglaises, la qualité de l’interprétation y est excellente. Hélas, l’histoire semble avoir pâti de cette réécriture totale. La mise en place est interminable, le meurtre promis n’apparaissant qu’à la moitié du film, et lorsque l’on connait le fin mot de l’histoire, celle-ci paraît totalement improbable. Peter Ustinov appuie fortement le côté débonnaire de son personnage, Diana Riggs (ici dans l’une de ses rares apparitions au cinéma) est assez éblouissante dans son rôle de star égocentriste et Maggie Smith fait également une belle prestation en sémillante hôtelière. Meurtre au soleil est loin d’être aussi convaincant que Mort sur le Nil (1978) auquel il est censé faire suite.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Peter Ustinov, Diana Rigg, Jane Birkin, Nicholas Clay, Maggie Smith, Roddy McDowall, James Mason, Colin Blakely
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Remarque :
* Guy Hamilton est surtout connu pour avoir tourné plusieurs films de la série des James Bond : Goldfinger (1964) et plusieurs autres dans les années 70.
* Le film a été tourné à Majorque.

Meurtre au soleil
Nicholas Clay et Diana Riggs dans Meurtre au soleil de Guy Hamilton

Autre adaptation du même roman :
Agatha Christie’s Poirot – Evil Under the Sun de Brian Farnham (2002) pour la télévision (dans le cadre d’une série).

8 décembre 2015

L’aventure commence demain (1948) de Richard Pottier

L'aventure commence demainDans un palace parisien, un monte-en-l’air s’allie avec une femme du monde désargentée pour escroquer un explorateur qui séjourne incognito dans l’hôtel. Bien entendu, rien ne va vraiment se passer comme prévu… L’aventure commence demain est un film de divertissement de l’Après-guerre qui semble fait de façon peu appliquée. Censé faire rêver le spectateur, l’environnement d’un grand palace n’est qu’à peine esquissé et, surtout, l’intrigue peine vraiment à se développer. Isa Miranda, l’une des très rares stars du cinéma mussolinien à avoir acquis un statut international, est l’atout de charme du film (on pourrait définir l’actrice comme une Joan Crawford européenne). Elle est la seule vraiment crédible dans cette histoire. Face à elle, Raymond Rouleau et André Luguet sont assez fades et à côté de leur personnage. Il y a pourtant de bonnes choses ici et là, quelques bonnes répliques, un ou deux revirements amusants, mais l’ensemble n’est pas vraiment convaincant.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Isa Miranda, Raymond Rouleau, André Luguet
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L'aventure commence demain
Axelino, Raymond Rouleau, Isa Miranda et André Luguet dans L’aventure commence demain de Richard Pottier.

Remarque :
Richard Pottier, réalisateur d’origine autrichienne mais qui a fait toute sa carrière en France, est connu des cinéphiles pour avoir réalisé Fanfare d’amour (1935), comédie que Billy Wilder a refait sous le titre Some like it hot. Il a réalisé près de 40 films entre 1934 et 1964.

 

30 mai 2015

Complot de famille (1976) de Alfred Hitchcock

Titre original : « Family Plot »

Complot de familleBlanche Tyler passe pour avoir des talents de médium auprès de vieilles dames crédules. L’une d’elles, secouée par l’une de ses séances, lui confie la charge de retrouver le fils de sa soeur abandonné par sa faute à sa naissance. Blanche et son ami se mette à sa recherche… Complot de famille est le dernier film d’Alfred Hitchcock qui avait 76 ans au début du tournage et fêtait ses 50 ans de réalisation (son premier film date de 1925). C’est l’adaptation d’un roman de Victor Canning. Il est de bon ton de prendre Complot de famille de haut et d’annoncer que le Maitre du suspense avait perdu la main. Pourtant, c’est un film très réussi. Certes il n’est pas très hitchcockien : c’est une comédie policière où l’atmosphère est plutôt détendue, les scènes de suspense y sont moins intenses qu’à l’accoutumée et l’histoire n’est pas centrée sur un personnage principal mais sur plusieurs. L’intrigue est un peu tortueuse avec deux histoires juxtaposées mais Hitchcock adopte un style très limpide, il prend tout son temps pour nous l’expliquer ce qui rend le film très accessible. La musique de John Williams contribue à rendre Complot de famille particulièrement plaisant. Hitchcock s’amuse et nous aussi. Sa filmographie se clôt ainsi joliment sur une petite note espiègle.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Karen Black, Bruce Dern, Barbara Harris, William Devane, Ed Lauter
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Complot de famille
Barbara Harris et Bruce Dern dans Complot de famille de Alfred Hitchcock

Complot de famille
Karen Black et William Devane dans Complot de famille de Alfred Hitchcock

Remarques :
* Cameo d’Alfred Hitchcock : (très visible) en ombre chinoise, dans la porte du bureau du registre des naissances et des décès.

* Très inhabituel pour le cinéaste : le passage d’une histoire à l’autre à la 12e minute à la façon « cadavres exquis » (ou façon Fantôme de la Liberté ?).

28 décembre 2013

Taxi, roulotte et corrida (1958) de André Hunebelle

Taxi, roulotte et corridaC’est l’été. Maurice, chauffeur de taxi parisien, accroche sa caravane et emmène toute la famille en Espagne. Les vacances vont être quelque peu mouvementées… Taxi, roulotte et corrida fait partie de ces innombrables films où De Funès forgeait son personnage de français râleur mais coriace. Bien sûr, on peut regarder avec une nostalgie bienveillante cette France des années cinquante, s’amuser des trésors d’inventivité déployés pour passer la douane, sourire dans les meilleurs passages, mais l’ensemble n’est pas très relevé, le scénario se révélant être assez simplet. Il y a pourtant de nombreux bons acteurs dans les seconds rôles et aussi une courte apparition de Jacques Dufilho et même de Michel Galabru (en douanier, paraît-il, très difficile à repérer). La jeune Véra Valmont, en pseudo-Marilyn, est chargée d’apporter un peu de sensualité à l’ensemble. Taxi, roulotte et corrida est en réalité plus amusant par le regard qu’il nous permet de porter sur la France de cette époque.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Louis de Funès, Raymond Bussières, Annette Poivre, Guy Bertil, Véra Valmont, Paulette Dubost
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Remarque :
On remarquera, dans la liste des acteurs, Annette Poivre et Sophie Sel… En réalité, Raymond Bussières et Annette Poivre sont mari et femme (comme dans le film donc) et Sophie Sel est leur fille. Poivre et Sel sont bien entendus des noms de scène…

28 septembre 2013

Adieu, ma belle (1944) de Edward Dmytryk

Titre original : « Murder, My Sweet »
Autre titre : « Farewell, My Lovely » (UK)
Autre titre français : « Adieu ma jolie »
Autre titre français : « Le crime vient à la fin »

Adieu, ma belleLe détective Philip Marlowe est interrogé par la police. Blessé, il porte un bandage sur les yeux. Il raconte que tout a commencé lorsqu’un homme récemment sorti de prison lui a demandé de retrouver une femme… Adieu, ma belle est l’adaptation du deuxième roman policier de Raymond Chandler qui avait déjà servi de base à The Falcon Takes Over, deux ans auparavant. Cette fois, l’idée est de rester très proche du roman et de son univers. Edward Dmytryk y parvient merveilleusement. Tout d’abord, il prend soin à créer une atmosphère en soignant ses éclairages (1) et surtout il restitue ce sentiment de faire corps avec le détective : en plaçant tout le film dans un flashback et en faisant parler Marlowe en voix-off, il est ainsi très proche de l’esprit du roman qui est écrit à la première personne. Adieu, ma belle De plus, Dick Powell rend le détective très humain : il est notamment beaucoup plus fragile que ne le sera Bogart. L’histoire est bien entendu assez alambiquée, et si elle présente de petits points communs avec The Big Sleep et même The High Window (ses 1er et 3e romans), ce sont les thèmes récurrents des romans de Chandler. On remarquera les scènes hallucinogènes, fort bien rendues. Adieu, ma belle est aujourd’hui un peu dans l’ombre du Grand Sommeil de Hawks mais le film n’en est pas moins une superbe adaptation et mérite bien d’être classé parmi les meilleurs films noirs.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Dick Powell, Claire Trevor, Anne Shirley, Otto Kruger, Mike Mazurki
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Remarques :
* Raymond Chandler a déclaré que Murder, My Sweet était la meilleure adaptation cinématographique d’un de ses romans et que Dick Powell était l’incarnation la plus fidèle de son détective Philip Marlowe.
* Le titre du roman de Chandler, Farewell, My Lovely, n’a pas été conservé par la RKO pour le film : le public américain pouvait penser avoir affaire à une comédie musicale, genre dans lequel Dick Powell s’était déjà illustré.
* Connu pour ses comédies, Dick Powell désirait changer de registre : RKO l’avait mis sous contrat pour qu’il tourne des comédies musicales et Dick Powell n’avait accepté que s’il avait la possibilité de d’avoir un rôle dramatique dans au moins un film.
* Murder, My Sweet est le premier film où apparaît le personnage Philip Marlowe (le personnage principal de la précédente adaptation du roman était The Falcon, justicier/enquêteur d’une série de films de la RKO).

Adaptation précédente :
The Falcon Takes Over d’Irving Reis (1942) avec Georges Sanders
Adaptation suivante :
Adieu, ma jolie (Farewell, My Lovely) de Dick Richards (1975) avec Robert Mitchum et Charlotte Rampling

(1) En matière d’éclairage, la scène où Marlowe voit son visiteur en reflet sur sa fenêtre est assez remarquable (à noter qu’Edward Dmytryk a obtenu l’effet en plaçant une vitre entre la caméra et la fenêtre afin d’avoir une tête suffisamment grande pour faire son effet). Tout aussi remarquable à mes yeux est cette scène où Claire Trevor éteint la lumière après avoir passé une robe de chambre : elle se retrouve alors plus éclairée qu’avant et pourtant cela paraît naturel (l’éclairage est alors très focalisé sur elle).

28 août 2012

Cagliostro (1929) de Richard Oswald

Titre allemand : « Cagliostro – Liebe und Leben eines großen Abenteurers »

Cagliostro - Liebe und Leben eines großen Abenteurers(Film muet) L’aventurier italien Cagliostro s’introduit au sein de la noblesse française et même à la Cour du roi Louis XIV grâce à ses tours de magie. Disgracié, il met sur pied l’escroquerie du collier de la reine pour se venger… Cagliostro est un film perdu qui a été partiellement reconstitué récemment par la Cinémathèque Française. Des 2 heures initiales, il ne reste que 58 minutes reconstruites à partir d’une version Pathé Baby amputée pour projections familiales et de chutes (passages censurés pour leur nudité). Le film que nous pouvons voir est donc très déséquilibré, aucun personnage n’est correctement développé. Les scènes à la Cour de Versailles ont certes une belle ampleur mais l’ensemble apparaît plutôt mineur comparé aux autres films de son époque. Cagliostro est l’une des dernières productions Albatros.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Hans Stüwe, Renée Héribel, Illa Meery, Alfred Abel
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Remarque :
Les jeunes Jean Dréville et Marcel Carné sont assistants.
>> Lire un compte-rendu intéressant écrit par Carné lui-même sur le site Marcel Carné…  Le futur réalisateur mentionne trois scènes fortes à ses yeux : la Cour de Versailles, l’arrestation  de Cagliostro (qui a effectivement un rythme très curieux mais dont le résultat n’est hélas guère convainquant) et enfin la fête au village (scène hélas perdue, le « clou » du film d’après lui).

Homonymes :
Cagliostro (Black Magic) de Gregory Ratoff (1949) avec Orson Welles
Cagliostro de Daniele Pettinari (1975) avec Bekim Fehmiu et Curd Jürgens
et sur l’affaire du collier de la reine :
L’affaire du collier de la reine de Marcel L’Herbier (1946) avec Viviane Romance
Si versailles m’était conté de Sacha Guitry (1954)
The Affair of the Necklace de Charles Shyer (2001) avec Christopher Walken et Hilary Swank

24 juillet 2012

A scandal in Paris (1946) de Douglas Sirk

Titre français parfois utilisé : « Scandale à Paris »

Scandale à ParisCette biographie romancée de la première partie de la vie de Vidocq nous raconte comment, après s’être évadé de prison, il est devenu chef de la police… A Scandal in Paris est le troisième film américain de Douglas Sirk. Pour ce film, il a bénéficié d’une totale liberté qui compense largement le budget réduit. Ainsi, il s’agit d’un film assez personnel et Douglas Sirk dira plus tard que c’est là son film préféré. Il est assez européen par son style et par les talents utilisés. A Scandal in Paris est une fantaisie élégante qui utilise avec bonheur les talents naturels de George Sanders pour ce type de rôle, montrant un subtil mélange d’intelligence et de raffinement. Douglas Sirk est surtout connu pour les grands mélodrames de sa fin de carrière. Le méconnu A Scandal in Paris nous montre que le reste de sa filmographie est loin d’être inintéressant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: George Sanders, Signe Hasso, Carole Landis, Akim Tamiroff, Gene Lockhart
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Remarque :
Jacques Lourcelles a une très belle formule pour décrire A Scandal in Paris : un « film d’esthète où la gravité affleure sans cesse sous les scintillements d’un divertissement très raffiné. »

10 juin 2012

Ninotchka (1939) de Ernst Lubitsch

NinotchkaEnvoyés à Paris pour négocier des bijoux confisqués à une aristocrate, trois commissaires soviétiques succombent au luxe et à la facilité de la vie parisienne. Arrive alors un émissaire spécial chargé de tout remettre en ordre… C’est à un grand maître de la comédie que revint la tâche délicate de faire tourner Greta Garbo dans sa première comédie. Ninotchka de Lubitsch atteint une certaine perfection : tout y est brillant à commencer par le scénario et les dialogues, savoureux d’un bout à l’autre. L’écriture fut assurée par le fameux tandem Billy Wilder et Charles Brackett Ninotchka avec l’aide de Walter Reisch. La mise en scène est vive et enlevée, sans aucun temps mort. Même si ce n’est pas l’un des ses plus grands rôles, Greta Garbo montre comme toujours une grande présence. Ninotchka fut parfois un peu boudé du fait de son anticommunisme caricatural (on pourra aussi remarquer que les trois commissaires si sensibles aux charmes de la vie occidentale montrent une certaine ressemblance avec les pères fondateurs du communisme, Lénine, Trotski et Staline…) Avec le recul, nous pouvons laisser cela de côté et profiter pleinement de l’humour et de la vivacité de cette comédie.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Greta Garbo, Melvyn Douglas, Ina Claire, Bela Lugosi, Sig Ruman, Felix Bressart, Alexander Granach
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Remarques :
« Mon prochain film sera une comédie. Serai-je autorisé par le scénariste à garder mon amant jusqu’à la fin ? Je l’espère sincèrement. Ne croyez-vous pas qu’il est grand temps de me laisser finir un film par un heureux baiser ? J’ai trop souvent perdu mes séduisants partenaires dans la séquence finale ! » Ainsi parlait Gerta Garbo à la fin 1937. Elle s’était alors retirée dans son pays natal, en Suède. Elle ne signera un nouveau contrat avec la MGM qu’un an plus tard, en décembre 1938.
Ninotchka* Vouloir tourner une comédie a-t-il été une erreur pour sa carrière ? On peut le voir ainsi. Ninotchka a sans aucun doute cassé l’image de la star distante, intouchable et lointaine. Le fameux slogan publicitaire de la MGM, « Garbo Laughs » (Garbo rit) a, dans un sens, détruit un mythe. Son film suivant (son dernier), La femme aux deux Visages, sera aussi une comédie et ira encore plus loin dans la normalisation de l’actrice, la montrant totalement américanisée.

Remake :
La Belle de Moscou (Silk Stocking) de Rouben Mamoulian (1957), comédie musicale bien fade.