2 juin 2022

La Dilettante (1999) de Pascal Thomas

La DilettantePierrette Dumortier décide un beau jour de quitter son second mari et sa vie bourgeoise en Suisse pour retourner vivre à Paris près de ses enfants. Elle s’installe dans l’appartement de son fils en banlieue, trouve du travail dans un collège, rencontre la riche famille reconstituée de sa fille, et beaucoup d’autres choses encore…
La Dilettante est une comédie réalisée par Pascal Thomas. Il en a co-écrit le scénario avec Jacques Lourcelles (1). Tout le film repose sur son personnage principal, toujours gaie et virevoltante, prenant toujours la vie du bon côté avec une certaine insouciance. Sa gaité est communicative et on ne peut que la trouver charmante, même dans les quelques moments où elle est odieuse. Catherine Frot tient merveilleusement le rôle, ajoutant un soupçon de candeur qui la rend plus attirante encore. Les seconds rôles sont tenus par d’excellents acteurs. Il s’agit d’une histoire suivie mais les ellipses sont parfois importantes pour donner des situations pittoresques et variées. L’ensemble est léger, mais pas insignifiant, et la qualité de l’écriture lui donne de grandes vertus divertissantes. Un film qui se déguste avec plaisir.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Catherine Frot, Barbara Schulz, Odette Laure, Jacques Dacqmine, Nathalie Lafaurie, Jean Desailly, Clément Thomas, Jean-François Balmer, Marie-Christine Barrault, Didier Bezace, Bernard Verley
Voir la fiche du film et la filmographie de Pascal Thomas sur le site IMDB.
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(1) On connait Jacques Lourcelles pour ses écrits sur le cinéma, notamment son fameux dictionnaire des films (Dictionnaire du cinéma Tome 3, les films) mais il est également l’auteur de 6 scénarios entre 1974 et 1999 : 5 pour Pascal Thomas et 1 pour Jean-Daniel Pollet.

La DilettanteCatherine Frot dans La Dilettante de Pascal Thomas.

1 juin 2022

L’oncle Harry (1945) de Robert Siodmak

Titre original : « The Strange Affair of Uncle Harry »

L'oncle Harry (The Strange Affair of Uncle Harry)Harry Quincey, surnommé « Oncle Harry », vit avec ses deux sœurs, Lettie et Hester, dans leur maison du New Hampshire, dernier vestige d’une fortune familiale perdue lors de la Grande Dépression. Un jour, Deborah Brown arrive de New York pour travailler dans la même entreprise que Harry. Très vite, ils tombent amoureux. Extrêmement jalouse, Lettie va tout faire pour empêcher leur union…
The Strange Affair of Uncle Harry est un film américain de Robert Siodmak. Il s’agit de l’adaptation d’une pièce de Thomas Job montée à Broadway en 1942. Juste avant ses films noirs les plus célèbres (dont le fameux Les Tueurs en 1946), Robert Siodmak a réalisé coup sur coup deux films à suspense, de thèmes assez proches : The Suspect et cet Uncle Harry. L’histoire, qui met en scène un homme sous l’emprise de ses deux sœurs, n’est sans doute pas remarquable par son écriture ; elle l’est plutôt par son climat assez trouble et sa peinture sarcastique de la bourgeoisie provinciale. Georges Sanders fait une bonne prestation, même s’il est meilleur quand fait preuve de duplicité, ce qui n’est pas le cas ici. L’épilogue paraît plaqué… C’est effectivement le cas : Universal a imposé ce dénouement ridicule par crainte de la censure du Code Hays. Heureusement cette ultime séquence ne dure qu’une minute à peine et n’empêche donc pas d’apprécier le film.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: George Sanders, Geraldine Fitzgerald, Ella Raines, Sara Allgood, Moyna MacGill
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Remarques :
* Furieuse de la fin imposée, la productrice Joan Harrison a claqué la porte d’Universal alors qu’elle devait encore deux films sous contrat. Siodmak n’a pu se permettre d’en faire autant.
* RKO et Republic avaient également manifesté leur intérêt d’adapter la pièce mais avaient renoncé par crainte de la censure.
* Epilogue initialement prévu : Harry, rongé par le remords, se laissait interner en hôpital psychiatrique.

L'oncle Harry (The Strange Affair of Uncle Harry)Geraldine Fitzgerald et George Sanders
dans L’oncle Harry (The Strange Affair of Uncle Harry) de Robert Siodmak.

31 mai 2022

Sommaire de mai 2022

Nomadland1917EiffelLa Femme au tableauJosepPortier de nuitLa Conquête de l’espaceMichel-Ange

Nomadland

(2020) de Chloé Zhao

1917

(2019) de Sam Mendes

Eiffel

(2021) de Martin Bourboulon

La Femme au tableau

(2015) de Simon Curtis

Josep

(2020) de Aurel

Portier de nuit

(1974) de Liliana Cavani

La Conquête de l’espace

(1955) de Byron Haskin

Michel-Ange

(2019) de Andreï Konchalovsky

L’étoffe des hérosSept ans au TibetLooking for SallyLes GaminsDe sang-froidLes garçons et Guillaume, à table!Laurel et Hardy en croisièreLa souris qui rugissait

L’étoffe des héros

(1983) de Philip Kaufman

Sept ans au Tibet

(1997) de Jean-Jacques Annaud

Looking for Sally

(1925) de Leo McCarey

Les Gamins

(2013) de Anthony Marciano

De sang-froid

(1967) de Richard Brooks

Les garçons et Guillaume, à table!

(2013) de Guillaume Gallienne

Laurel et Hardy en croisière

(1940) de Gordon Douglas

La souris qui rugissait

(1959) de Jack Arnold

KundunLes GaspardsSons of PhiladelphiaLe Roman de RenardCity of LiesAu diable la richesse

Kundun

(1997) de Martin Scorsese

Les Gaspards

(1974) de Pierre Tchernia

Sons of Philadelphia

(2020) de Jérémie Guez

Le Roman de Renard

(1937) de Ladislas Starewitch et Irene Starewitch

City of Lies

(2018) de Brad Furman

Au diable la richesse

(1946) de Gennaro Righelli

Nombre de films présentés : 22

30 mai 2022

Nomadland (2020) de Chloé Zhao

NomadlandNomadland est un film américain écrit et réalisé par la réalisatrice chinoise (vivant aux Etats-Unis) Chloé Zhao. Il est basé sur le livre du même nom de la journaliste Jessica Bruder, paru en 2017, qui analysait le phénomène des Américains âgés qui, après la crise économique de 2008, ont adopté des modes de vie nomades en voyageant à travers les États-Unis à la recherche de travail saisonnier. Mais le film de Chloé Zhao n’est pas un documentaire puisque la cinéaste a centré son scénario sur un seul personnage, une femme sexagénaire, veuve depuis peu. Cette femme est peu expensive mais le récit nous fait découvrir peu à peu sa personnalité et nous laisse comprendre ses choix et ses motivations. Bien entendu, Nomadland a aussi des qualités d’étude sociologique, Frances Dormand (également productrice puisque c’est elle qui a acheté les droits du livre) s’est beaucoup investie personnellement en vivant plusieurs mois comme son personnage dans une camionnette aménagée. Presque toutes les personnes rencontrées jouent leur propre rôle, y compris Suanne Carlson et Bob Wells qui ont fondé une association pour aider les nomades. Le film a été couvert de récompenses dont trois Oscars.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Frances McDormand, Gay DeForest, Patricia Grier
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NomadlandFrances McDormand dans Nomadland de Chloé Zhao.

29 mai 2022

1917 (2019) de Sam Mendes

1917Pris dans la tourmente de la Première Guerre Mondiale, Schofield et Blake, deux jeunes soldats britanniques, se voient assigner une mission à proprement parler impossible. Porteurs d’un message qui pourrait empêcher une attaque dévastatrice et la mort de centaines de soldats, dont le frère de Blake, ils se lancent dans une véritable course contre la montre, à travers les lignes ennemies…
1917 est un film de guerre britannico-américain réalisé et produit par Sam Mendes, qui coécrit le film avec Krysty Wilson-Cairns. Le scénario est inspiré en partie par un récit raconté à Mendes par son grand-père paternel, Alfred Mendes. Le film est remarquable par sa forme : il se présente comme un long plan-séquence interrompu une fois seulement, pour quelques heures, lorsque le personnage perd connaissance. Certes, il s’agit d’un faux plan-séquence (en réalité le plan-séquence le plus long dure neuf minutes) mais ce n’en est pas moins un extraordinaire tour de force technique qui demande une préparation d’une rigueur absolue. La caméra est très mobile multipliant les déplacements et les angles de vue (avec, bien entendu, quelques 180°). Mais le plus remarquable finalement est que cette prouesse technique n’est pas gratuite. Bien qu’étant assez présente, ne parvenant pas à s’effacer totalement, elle permet de nous immerger dans l’action en donnant une impression de temps réel, collant aux personnages principaux. Ils ont beau être toujours devant nos yeux, nous avons l’impression d’être à leur place. Le film est de ce fait assez intense. Tourné en Grand Bretagne avec un budget important, 1917 a connu un grand succès.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Dean-Charles Chapman, George MacKay, Daniel Mays, Colin Firth, Mark Strong, Benedict Cumberbatch
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1917George MacKay et Dean-Charles Chapman dans 1917 de Sam Mendes.

27 mai 2022

Eiffel (2021) de Martin Bourboulon

EiffelÀ la fin des années 1880, Gustave Eiffel vient de collaborer à la construction de la statue de la Liberté. Pressé par le gouvernement français de créer quelque chose de spectaculaire pour l’Exposition universelle de Paris de 1889 et aiguillonné par un amour de jeunesse qui renaît, il propose de construire un tour en métal de 300 mètres de haut…
Eiffel est un film français écrit par Caroline Bongrand et réalisé par Martin Bourboulon. Dès le début, l’histoire d’amour paraît artificiellement plaquée et effectivement elle est entièrement inventée. Un amour de jeunesse qui reparaît vingt ans plus tard (la belle, qui n’a pas pris une ride, est maintenant mariée à l’un de ses meilleurs amis), une passion torride qui ne demande qu’à renaître mais restera sans lendemain par respect des conventions, tout cela évoque plutôt un mauvais roman-photo. Hélas cette romance de pacotille occupe la majeure partie du récit. Les scènes de construction de la tour sont bien plus intéressantes, principalement par les détails techniques donnés. En revanche, suggérer que Gustave Eiffel a donné à la tour la forme d’un « A » parce que son grand amour se prénomme Adrienne… on ne sait s’il faut en rire ou en pleurer. Le film a bénéficié d’un gros budget. La réalisation et la reconstitution sont assez soignées.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Romain Duris, Emma Mackey, Pierre Deladonchamps, Armande Boulanger
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Remarque :
* Dans la réalité, la tour Eiffel a été imaginée par Maurice Koechlin et Émile Nouguier, respectivement chef du bureau des études et chef du bureau des méthodes d’Eiffel & Cie. Le premier plan, réalisé en juin 1884, est ensuite amélioré par Stephen Sauvestre, l’architecte en chef des projets de l’entreprise, qui lui apporte plus d’esthétique : courbures des lignes plus prononcées, consolidation jusqu’au premier étage avec des arcs, réduction du nombre de plateformes. Gustave Eiffel n’a donc pas conçu le monument, mais s’est appliqué à faire connaître son projet auprès des gouvernants, des décideurs et du grand public.

EiffelEiffel de Martin Bourboulon.

26 mai 2022

La Femme au tableau (2015) de Simon Curtis

Titre original : « Woman in Gold »

La Femme au tableau (Woman in Gold)Maria Altmann, une Autrichienne juive qui s’est réfugiée en Californie peu avant la Seconde Guerre mondiale, se bat devant les tribunaux pour récupérer auprès du gouvernement autrichien les peintures de Gustav Klimt que sa famille possédait et qui avaient été volées par les nazis puis exposées au musée du Belvédère à Vienne…
La Femme au tableau est réalisé par le britannique Simon Curtis. Le scénario s’inspire d’une histoire vraie qui s’est déroulée au début des années 2000, la demande de restitution du tableau Portrait d’Adele Bloch-Bauer I de Gustav Klimt par sa propriétaire légitime. Elle est l’occasion de rappeler une période noire et la spoliation d’œuvres d’art par le régime nazi (qui aurait porté sur 100 000 à 400 000 œuvres selon les estimations). Le film est d’une facture assez plate mais se distingue néanmoins par la qualité de son interprétation et par les soins portés à la reconstitution des scènes se situant dans la Vienne la fin des années trente.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Helen Mirren, Ryan Reynolds, Daniel Brühl, Katie Holmes
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La Femme au tableau (Woman in Gold)Ryan Reynolds, Helen Mirren et Daniel Brühl dans La Femme au tableau (Woman in Gold) de Simon Curtis.

Le Portrait d’Adele Bloch-Bauer I (également appelé La Dame en or ou La Femme en or)
est un tableau du peintre symboliste autrichien Gustav Klimt, réalisé entre 1903 et 1907.

25 mai 2022

Josep (2020) de Aurel

JosepFévrier 1939. Submergé par le flot de Républicains fuyant la dictature franquiste, le gouvernement français les parque dans des camps. Deux hommes séparés par les barbelés vont se lier d’amitié. L’un est gendarme, l’autre est dessinateur…
Josep est un film d’animation français réalisé par Aurel, dessinateur de presse (Le Monde et Le Canard enchaîné) et auteur de bandes dessinées. Ce n’est pas un film d’animation classique, il serait plus exact de le décrire comme étant un « film dessiné » : une succession de dessins en ligne claire avec des pulsations pour leur donner vie et parfois quelques animations sommaires pour les personnages. De temps à autre, de simples esquisses crayonnées (censées avoir été dessinées par le personnage) sont intercalées. Car le sujet principal est le parcours (plus exactement une partie du parcours) de Josep Bartoli, dessinateur caricaturiste et militant communiste catalan : son enfermement en France et son séjour au Mexique où il s’est lié avec Frida Kahlo. Le film d’Aurel nous laisse entrevoir une petite partie de son travail mais surtout lève le voile sur une partie très mal connue de notre histoire, l’existence de ces camps français d’internement de réfugiés espagnols, enfermés dans des conditions vraiment révoltantes. Le film n’est pas sans défaut, il est parfois un peu confus dans son déroulement et certains de ses traits paraissent trop appuyés. Mais il a aussi de grandes qualités et une personnalité forte.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs (voix) : Sergi López, Bruno Solo, François Morel
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JosepJosep de Aurel.

24 mai 2022

Portier de nuit (1974) de Liliana Cavani

Titre original : « Il portiere di notte »

Portier de nuit (Il portiere di notte)Vienne, 1957. Max (Dick Bogarde), un ancien officier SS, est portier de nuit dans un palace hébergeant d’anciens nazis. Lorsque Lucia Atherton (Charlotte Rampling) vient loger avec son mari chef d’orchestre dans cet hôtel, Max reconnaît immédiatement en elle une ancienne déportée avec qui il eut une ardente passion sadomasochiste…
Portier de nuit est un film italien coécrit et réalisé par Liliana Cavani. A sa sortie, le film suscita de nombreuses polémiques tant dans le milieu du cinéma que chez les intellectuels. Il fut critiqué pour son « esthétique nazie » et la mise en scène malsaine et théâtrale à caractère sexuel d’une victime et de son bourreau (1). Aujourd’hui, l’argument reste recevable mais l’attrait de la nudité est bien moindre que dans les années soixante-dix. Le film a donc perdu tout (éventuel) pouvoir attractif sur ce plan (« attractif » dans le sens « capable d’attirer l’attention et de frapper les esprits »). En revanche, il reste très perturbant. Le sujet n’est pas en soi le nazisme mais plutôt une passion sadomasochiste extrême placée dans un environnement monstrueux, le nazisme. Les flashbacks sont assez glaçants, peu démonstratifs ; Liliana Cavani suggère plus qu’elle ne montre et il paraît difficile de l’accuser d’une fascination envers ces SS statufiés, dénués d’humanité. Elle n’a aucune indulgence non plus pour son personnage principal, Max, qui est clairement défini comme un monstre. Si l’ensemble est dérangeant, il est aussi doté d’une grande force. La comparaison a été souvent faite avec Les Damnés de Visconti (1969) mais il n’atteint pas son équilibre et il n’a pas son style remarquable.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Dirk Bogarde, Charlotte Rampling, Philippe Leroy, Gabriele Ferzetti, Giuseppe Addobbati, Isa Miranda
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(1) En particulier, Michel Foucault critiqua sévèrement cette vision sexualisée du nazisme : si pour lui, « le pouvoir a une charge érotique », il s’étonne que tout un « imaginaire érotique de pacotille [soit] placé maintenant sous le signe du nazisme ».

Portier de nuit (Il portiere di notte)Dirk Bogarde et Charlotte Rampling dans Portier de nuit (Il portiere di notte) de Liliana Cavani.

22 mai 2022

La Conquête de l’espace (1955) de Byron Haskin

Titre original : « Conquest of Space »

La Conquête de l'espace (Conquest of Space)Dans le futur proche (années 1980), une station orbitale, La Roue, abrite une équipe technique composée de militaires. Un vaisseau spatial est en construction à ses côtés dans le but d’aller sur la lune. Mais c’est en réalité à destination de Mars qu’une petite équipe appareille finalement…
Conquest of Space est un film américain de science-fiction réalisé par Byron Haskin et produit par George Pal qui le voyait comme une suite à son Destination Moon (1950). Il est basé sur le livre homonyme de l’écrivain de vulgarisation scientifique Willy Rey, livre qui était illustré par Chesley Bonestell. L’adaptation est signée Barré Lyndon, auteur de l’adaptation de La Guerre des mondes (1953) de H.G. Wells. Le projet initial de George Pal incluait un voyage vers trois planètes (Venus, Mars et Jupiter) mais Paramount, effrayé par le coût potentiel, le força à se limiter à une seule et à inclure une affligeante intrigue sur une dissension père-fils. Cette tension est alimentée par des questionnements religieux qui, s’ils sont pesants et pénibles, ont un petit intérêt historique : il y a avait effectivement à l’époque de nombreuses voix pour affirmer que l’homme n’avait pas à aller dans l’espace, le domaine réservé à Dieu (1).
Mais l’intérêt de Conquest of Space est ailleurs, il est dans cette tentative de créer une anticipation réaliste des programmes spatiaux (2). Wernher von Braun, qui sera l’ingénieur en chef de la future NASA, était conseiller technique sur le plateau et son livre Mars Project a servi de base pour de nombreux points précis, notamment la forme de la station orbitale. Chesley Bonestell a dessiné certains décors, sa planète Mars vue de haut est superbe. Bien entendu, il est aisé de déceler plusieurs aberrations, même en tenant compte des connaissances de l’époque, ou de sourire à certains moments mais l’ensemble se tient. La réalisation n’est pas parfaite, les incrustations sont notamment très visibles (cette technique n’était encore pas bien maitrisée), mais elle se situe plutôt parmi les meilleures de cette époque. Bref, c’est un film intéressant à regarder, à condition de garder une certaine indulgence. Conquest of Space fut un cuisant échec commercial et financier qui scella la fin des films réalistes sur l’espace. Il faudra attendre 2001, l’odyssée de l’espace en 1968 pour les voir renaître. Entre deux, l’espace restera le domaine des monstres et des envahisseurs.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Walter Brooke, Eric Fleming, Mickey Shaughnessy, William Hopper, Ross Martin
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Remarque :
* Willie Ley (Willy Otto Oskar Ley) est d’origine allemande. Ses premiers livres sur les fusées datent de 1927. Il était conseiller technique sur Frau Im Mond de Fritz Lang (1929). Il a fui l’Allemagne nazie en 1935 pour s’établir aux Etats-Unis, où il a continué à publier des livres sur l’espace et les fusées. Il a co-signé un livre avec Wernher von Braun en 1953, The Conquest of the Moon.

(1) Cette intrusion de la religion était déjà présente dans La Guerre des mondes mais de façon bien plus subtile qu’ici.
(2) Le slogan sur l’affiche ci-dessus proclame : « Venez voir comment cela va arriver… de votre vivant »

La Conquête de l'espace (Conquest of Space)La Conquête de l’espace (Conquest of Space) de Byron Haskin.

La Conquête de l'espace (Conquest of Space)Phil Foster et Eric Fleming dans La Conquête de l’espace (Conquest of Space) de Byron Haskin.