3 février 2012

La poison (1951) de Sacha Guitry

La poisonDans un petit village de Normandie, Paul Braconnier ne peut plus supporter sa femme, alcoolique et odieuse qui le lui rend bien. Chacun projette de tuer l’autre… La poison est d’abord une petite merveille d’écriture : le scénario est simple, reposant une idée brillante et même plausible. Sacha Guitry a écrit là une superbe variation du crime parfait. C’est aussi une petite merveille d’interprétation : Michel Simon joue avec un naturel et une expressivité rare. Quand on sait que le film a été tourné en onze (oui, onze!) jours, Michel Simon ayant demandé à Guitry de faire le moins possible de deuxièmes prises(!), on n’en est que plus admiratif. Enfin, c’est aussi une petite merveille d’humour noir qui s’amplifie au fur et à mesure que le film avance et dont l’apothéose est le procès final, jubilatoire. Sacha Guitry profite de ce drame de la guerre conjugale pour régler ses comptes avec la justice (1). La poison a été refait par Jean Becker cinquante ans plus tard.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Michel Simon, Jean Debucourt, Jacques Varennes, Jeanne Fusier-Gir, Pauline Carton, Louis de Funès
Voir la fiche du film et la filmographie de Sacha Guitry sur le site IMDB.
Voir les autres films de Sacha Guitry chroniqués sur ce blog…

(1) A la Libération, on a reproché à Sacha Guitry son attitude pendant la guerre, notamment d’avoir continué à tourner et d’avoir un bon train de vie. Il fut arrêté sur dénonciation anonyme, emprisonné puis relâché avec interdiction de tourner sans qu’il y ait d’accusations portées contre lui. Ce n’est qu’en 1947 qu’il fut blanchi mais beaucoup ont continué à lui manifester une certaine hostilité. La poison a par exemple été plutôt mal reçu par la critique de l’époque.

Remake :
Un crime au Paradis de Jean Becker (2000) avec Jacques Villeret et Josiane Balasko.

Ne pas confondre avec :
Le poison (The Lost Weekend) de Billy Wilder (1945) avec Ray Milland.
Poison de Todd Haynes (1991)

20 janvier 2012

Une femme sans amour (1952) de Luis Buñuel

Titre original : « Una mujer sin amor »
Autre titre français (DVD) : « Pierre et Jean »

Una mujer sin amorMariée à un homme plus âgé qu’elle n’aime pas, une femme a une aventure avec un ingénieur des forêts. Il lui demande de quitter son mari mais elle hésite à abandonner son petit garçon de 5 ans… Une femme sans amour est adapté du roman de Guy de Maupassant « Pierre et Jean » qui avait déjà été porté à l’écran par André Cayatte 8 ans auparavant. Il fut même demandé à Luis Buñuel de reproduire le film de Cayatte plan par plan, ce que Buñuel refusa. Il qualifie lui-même dans ses mémoires le résultat de médiocre et déclare que Une femme sans amour est sans doute son plus mauvais film. C’est un jugement certainement un peu sévère. Certes le film manque d’intensité et paraît bien conventionnel mais la mise en scène est sans défaut et le mélodrame garde un certain attrait.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Rosario Granados, Tito Junco, Julio Villarreal
Voir la fiche du film et la filmographie de Luis Buñuel sur le site IMDB.

Voir les autres films de Luis Buñuel chroniqués sur ce blog…

C’est un remake de :
Pierre et Jean d’André Cayatte (1943) avec Renée Saint-Cyr et Noël Roquevert.

18 janvier 2012

Une femme a tué (1952) de Vittorio Cottafavi

Titre original : « Una donna ha ucciso »

Una donna ha uccisoJuste au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une jeune napolitaine rencontre un capitaine américain qui tente de la séduire. Elle repousse ses avances mais finit par tomber amoureuse… Vittorio Cottafavi est un réalisateur italien surtout connu pour ses péplums. Une femme a tué (Una donna ha ucciso) fait partie de ses premiers films. C’est un mélodrame qui paraît très classique à la fois dans son histoire et dans sa forme. S’il manque de particularité pour le distinguer vraiment, il est toutefois bien réalisé et interprété. Le titre a le défaut de ne laisser aucun doute sur l’issue tragique. A noter que tout le film est un flash back, une histoire que raconte la sœur à une jeune fille sur le point de commettre, elle aussi, l’irréparable.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Frank Latimore, Lianella Carell, Lidia Cirillo
Voir la fiche du film et la filmographie de Vittorio Cottafavi sur le site IMDB.

Voir les autres films de Vittorio Cottafavi chroniqués sur ce blog…

20 décembre 2011

La chance d’être femme (1955) de Alessandro Blasetti

Titre original : « La fortuna di essere donna »

La chance d'être femmePrise en photo à son insu au moment où elle raccrochait ses bas, une jeune vendeuse se retrouve à la première page d’un magazine. Ayant toujours rêvé de devenir mannequin ou vedette de cinéma, elle accepte la proposition du photographe qui se propose de la présenter à des gens influents… La chance d’être femme est le troisième film réunissant Sophia Loren et Marcello Mastroianni, tous deux alors en pleine ascension. Alessandro Blasetti est un cinéaste italien qui a eu un rôle important mais ses films les plus marquants se situent à l’époque de l’Italie fasciste des années trente. Il paraît ici moins inspiré dans cette histoire qui est bien conventionnelle et sans surprise. Néanmoins, grâce à ses deux acteurs principaux, le film est loin d’être désagréable, la plastique de l’actrice étant bien entendu largement utilisée. Il y a aussi quelques bons dialogues et une scène très amusante au restaurant où la femme légitime prépare longuement une salade bien particulière… La chance d’être femme n’est pas un mauvais film mais on peut lui reprocher son caractère anodin.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Sophia Loren, Marcello Mastroianni, Charles Boyer
Voir la fiche du film et la filmographie de Alessandro Blasetti sur le site IMDB.

Les films réunissant Sophia Loren / Marcello Mastroianni :
Dommage que tu sois une canaille (1954) d’Alessandro Blasetti
La bella mugnaia (1955) de Mario Camerini
La chance d’être femme (1955) d’Alessandro Blasetti
Hier, aujourd’hui et demain (1963) de Vittorio de Sica
Mariage à l’italienne (1964)  de Vittorio de Sica
Les fleurs du soleil (1970) de Vittorio de Sica
La femme du prêtre (1971) de Dino Risi
La pépée du gangster (1975) de Giorgio Capitani
Une journée particulière (1977) d’Ettore Scola
D’amour et de sang (1978) de Lina Wertmüller
Prêt-à-porter (1994) de Robert Altman

18 décembre 2011

Lola Montès (1955) de Max Ophüls

Lola MontèsSous un chapiteau géant, un cirque reconstitue la vie scandaleuse de Lola Montès avec la présence de la comtesse en personne, en pleine déchéance, livrée en pâture au public… Le dernier film de Max Ophuls a divisé dès sa sortie et continue de diviser aujourd’hui. Max Ophuls a fait des choix audacieux : désirant dénoncer la glorification du spectacle dans notre société, il donne à son film une structure étonnante en le construisant autour d’un spectacle de cirque méprisable et odieux. Sur ce plan, il a réussi puisque c’est effectivement absolument insupportable. Il nous reste donc les flashbacks sur la vie de Lola Montès où le réalisateur nous livre une image parfaite, rehaussée de couleurs superbes avec une maîtrise remarquable de la caméra. Hélas, l’histoire ne captive guère, Martine Carol n’est à aucun moment le personnage de grande courtisane qu’elle devrait être, sensation accentuée par un doublage / postsynchronisation qui nivelle son jeu et celui des autres acteurs (défaut inhérent aux superproductions européennes). Après une sortie catastrophique, le film avait été mutilé par les producteurs. Il faut saluer le travail de la Cinémathèque Française qui a restauré magnifiquement ce film pour le ressortir fin 2008 dans une version la plus proche possible de celle que désirait le réalisateur.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Martine Carol, Peter Ustinov, Anton Walbrook, Paulette Dubost, Oskar Werner, Will Quadflieg
Voir la fiche du film et la filmographie de Max Ophüls sur le site IMDB.
Voir les autres films de Max Ophüls chroniqués sur ce blog…

Remarques :
>> Voir le site particulièrement intéressant créé par la Cinémathèque Française pour la ressortie de Lola Montès : http://lolamontes.cinematheque.fr/

17 décembre 2011

Les inconnus dans la ville (1955) de Richard Fleischer

Titre original : « Violent Saturday »
Autre titre français : « Des tueurs dans la ville »

Les inconnus dans la villeTrois gangsters arrivent dans une petite ville minière dans le but de cambrioler la banque… Ce qui est intéressant dans Les inconnus dans la ville, c’est la façon dont Richard Fleischer mêle une intrigue policière (la préparation d’un hold-up) avec le portrait social d’une petite ville. L’osmose n’est pas parfaite sauf dans le dénouement où le hold-up va jouer un rôle de catalyseur et opérer des changements profonds dans la vie de chacun. Les situations sont assez typées mais le scénariste Sydney Boehm a tissé des relations entrecroisées assez complexes entre les différents personnages sur un laps de temps très réduit (24 heures) ce qui donne une vraie richesse au film. Richard Fleischer utilise merveilleusement la couleur et surtout le cadre élargi du Cinémascope. Le fond du propos est cette sempiternelle apologie de la famille américaine, la famille pour laquelle on est prêt à tuer ou à renier sa religion (et bien entendu, les couples sans enfant battent de l’aile et la femme volage, même repentie, sera châtiée…) Les inconnus dans la ville n’en reste pas moins un beau film sur le plan de la forme.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Victor Mature, Richard Egan, Stephen McNally, Virginia Leith, Tommy Noonan, Lee Marvin, Ernest Borgnine
Voir la fiche du film et la filmographie de Richard Fleischer sur le site IMDB.

Voir les autres films de Richard Fleischer chroniqués sur ce blog…

5 décembre 2011

La montée au ciel (1952) de Luis Buñuel

Titre original : « Subida al cielo »

La montée au cielDans un village isolé du Mexique, un jeune homme se voit forcé d’interrompre son voyage de noces pour aller au chevet de sa mère mourante. A sa demande expresse, il doit aller par delà les montagnes quérir un avocat pour enregistrer ses dernières volontés… La montée au ciel (c’est le nom d’un col que le héros doit passer) est un film tourné assez rapidement dans des conditions assez précaires. Le scénario s’inspire d’aventures survenues au producteur du film, le poète espagnol Altolaguirre. Le film est donc le récit d’un voyage en autobus, passablement mouvementé et constamment retardé. Le manque de moyens se sent sur certaines scènes où des maquettes simplettes ont été utilisées. Deux scènes célèbres : la petite fille conduisant les deux bœufs que personne n’arrivait à contrôler et la scène onirique où une démesurément longue épluchure de pomme de terre symbolise le cordon ombilical avec sa mère. Si l’on retrouve l’image de plusieurs sentiments forts, la symbolique et la caricature sont bien mois abouties que dans ses autres films.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Lilia Prado, Esteban Márquez, Luis Aceves Castañeda, Manuel Dondé
Voir la fiche du film et la filmographie de Luis Buñuel sur le site IMDB.

Voir les autres films de Luis Buñuel chroniqués sur ce blog…

2 décembre 2011

La chevauchée des bannis (1959) de André De Toth

Titre original : « Day of the outlaw »

La chevauchée des bannisDans un minuscule village du Wyoming, isolé par la neige, un éleveur de bétail vient pour s’opposer par la force à la pose de clôture par un fermier… La situation de départ de La chevauchée des bannis peut paraître assez conventionnelle mais, alors qu’ils sont prêts à s’entretuer, arrive une bande de bandits en cavale qu’un ex-capitaine de l’armée tient d’une main de fer. La bande prend le contrôle du village avec l’intention de repartir le lendemain matin. Dès lors tout bascule et la situation, que l’on prévoyait banale, devient très originale et intéressante. La neige, omniprésente dans les extérieurs, donne une certaine épure à l’image et permet de très beaux plans, notamment avec les chevaux qui s’y enfoncent. André de Toth soigne ses cadrages, ils sont superbes, et utilise joliment les panoramiques latéraux, parfois à 360 degrés. Il n’hésite pas à placer sa caméra au centre de l’action. C’est étonnant. Les mines patibulaires des malfrats, un assemblage particulièrement hétéroclite de types, ajoute même à la beauté graphique. La chevauchée des bannis est un western très original, d’une beauté austère et froide.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Robert Ryan, Burl Ives, Tina Louise, Jack Lambert
Voir la fiche du film et la filmographie de André De Toth sur le site IMDB.

Remarque :
Le film est basé sur un roman de Lee E. Wells, le scénario est signé Philip Yordan.

14 novembre 2011

Le mur du son (1952) de David Lean

Titre original : « The Sound Barrier »

Le mur du sonAprès s’être illustré pendant la Seconde Guerre mondiale, un brillant pilote épouse la fille d’un industriel de l’aviation. Ce dernier cherche à construire un avion qui dépassera la vitesse du son… Le mur du son fait partie des films les moins connus de David Lean. Il nous replonge dans l’atmosphère des grandes découvertes : personne ne savait alors ce qui pouvait se passer si un avion dépassait le mur du son. Le film n’est en rien historiquement juste, puisqu’il attribue l’exploit à un pilote anglais (1). Malgré ses inexactitudes, le film est toutefois fort bien fait et prenant. David Lean donne une certaine portée à son propos puisqu’il met en balance le dépassement scientifique avec les sacrifices humains induits. Les scènes aériennes sont très réussies avec, en plus, une belle traversée au dessus de l’Europe avec des rares vues aériennes de Paris. On pourra noter une petite pointe de misogynie : les femmes sont soit des briseuses de rêves, soit totalement centrées sur elles-mêmes. Le très bon jeu d’acteurs apporte une contribution non négligeable à l’attrait qu’exerce encore le film, 50 ans après sa sortie.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Ralph Richardson, Ann Todd, Nigel Patrick, John Justin, Joseph Tomelty, Denholm Elliott
Voir la fiche du film et la filmographie de David Lean sur le site IMDB.

Voir les autres films de David Lean chroniqués sur ce blog…

Remarques :
(1) Dans la réalité, le premier pilote à dépasser la vitesse du son fut l’américain Chuck Yeager en 1947, tel que rapporté avec beaucoup plus d’exactitude dans le film L’étoffe des héros de Philip Kaufman (1983).

5 novembre 2011

En cas de malheur (1958) de Claude Autant-Lara

En cas de malheurUn grand avocat parisien accepte de défendre gratuitement une jeune femme âgée de vingt ans. Il réussit à la faire acquitter du hold-up qu’elle a commis et elle devient sa maitresse… En cas de malheur est adapté d’un roman de Georges Simenon qui fait se rencontrer deux êtres que tout oppose : l’un est un grand bourgeois, réfléchi, avec l’assurance que procure la réussite sociale, mais aussi empêtré dans les conventions de son milieu, l’autre est une jeune écervelée, libérée, frivole et délinquante. Le sujet était audacieux dans les années cinquante, il le paraît beaucoup moins aujourd’hui. Le film peut même sembler un peu ennuyeux, d’autant plus que si Gabin est parfait dans ce rôle qui lui va comme un gant, Brigitte Bardot montre ses limites en tant qu’actrice, tout comme Franco Interlenghi d’ailleurs. Claude Autant-Lara n’était peut-être pas très à l’aise pour diriger l’actrice, véritable petite bombe qui bousculait le cinéma français mais qui avait besoin d’être étroitement dirigée. En cas de malheur fut un grand succès populaire, sans doute un peu porté par le propos légèrement sulfureux (il y a même une scène très suggestive de ménage à trois).
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Brigitte Bardot, Edwige Feuillère, Franco Interlenghi, Nicole Berger
Voir la fiche du film et la filmographie de Claude Autant-Lara sur le site IMDB.
Voir les autres films de Claude Autant-Lara chroniqués sur ce blog…

Remarques :
On raconte que Brigitte Bardot déambulait ostensiblement au bras d’un technicien différent chaque jour pour faire enrager Autant-Lara qu’elle savait assez prude. Cette anecdote témoigne du fossé qui séparait l’actrice de son metteur en scène.

Remake :
En plein coeur de Pierre Jolivet (1998) avec Virginie Ledoyen reprenant le rôle de Brigitte Bardot, Gérard Lanvin celui de Gabin et Carole Bouquet celui d’Edwige Feuillère.