2 janvier 2024

Hostiles (2017) de Scott Cooper

HostilesEn 1892, le capitaine Joseph J. Blocker, légende de l’armée américaine, est chargé d’une mission qu’il n’accepte qu’à contrecœur : malgré sa grande haine envers les indiens qu’il a combattu pendant presque vingt ans, il doit escorter Yellow Hawk, un chef de guerre cheyenne mourant, ainsi que sa famille, pour retourner sur leurs terres tribales…
Hostiles est un western américain coécrit, coproduit et réalisé par Scott Cooper. Le scénario a pour base une histoire de Donald E. Stewart (scénariste oscarisé pour Missing). C’est l’apanage des plus grands westerns d’offrir une réflexion sur l’âme humaine et Hostiles en fait partie. Comme nous l’annoncent le titre et la citation en exergue (1), le propos en effet interroge les fondements de l’hostilité et expose certaines des façons dont l’homme y réagit. Il expose plus qu’il ne professe, et il le fait sans manichéisme. Il est assez rare de constater une telle profondeur dans un film, une approche si philosophique. Et la forme est loin d’être austère : s’il n’y a que peu de dialogues et un rythme lent et posé, on ne s’ennuie pas une seconde pendant les 2h10 du film. L’image est magnifique, avec même des plans de toute beauté, nous sommes comme envoutés par son atmosphère. Le personnage principal interprété par Christian Bale exprime une grande force paisible et sa superbe voix grave et posée (en VO du moins) participe à cette impression. Il fait montre aussi d’une grande délicatesse et de justesse dans ses rapports humains. Malgré son passé de soldat chargé de nombreux morts, il reste doté d’une grande humanité. Un film vraiment superbe.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Christian Bale, Rosamund Pike, Wes Studi, Jesse Plemons, Adam Beach, Ben Foster
Voir la fiche du film et la filmographie de Scott Cooper sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

(1) « The essential American soul is hard, isolate, stoic, and a killer. It has never yet melted. » D. H. Lawrence, Studies in Classic American Literature (publié en 1923),
« L’âme fondamentale de l’Amérique est dure, isolée, stoïque et meurtrière. Elle ne s’est encore jamais adoucie. »

Comme on ne le sait que trop, hélas, cette citation s’applique aussi à l’Homme en général et elle reste pertinente aujourd’hui, un siècle après avoir été écrite.

Wes Studi et Christian Bale dans Hostiles de Scott Cooper.
Hostiles de Scott Cooper.
Christian Bale et Rosamund Pike dans Hostiles de Scott Cooper.
Hostiles
Hostiles de Scott Cooper.

6 juin 2013

Major Dundee (1965) de Sam Peckinpah

Major DundeeAlors que la guerre de Sécession touche à sa fin, une quarantaine de guerriers indiens menés par un chef belliqueux font régner la terreur au Texas et au Nouveau Mexique. Le Major Dundee, commandant d’un fort qui sert de camp de prisonniers de soldats sudistes, décide d’aller traquer ces indiens qui se sont réfugiés au Mexique pour l’hiver. N’ayant pas assez d’hommes, il est contraint d’enrôler des voleurs et des sudistes… Basé sur un livre de Harry Julian Fink, Major Dundee est un film assez étonnant où Sam Peckinpah bouleverse les codes du genre. Les motivations de son héros ne sont guère nobles, elles sont plutôt à chercher du côté de la rancoeur et de la haine. A l’instar de sa troupe hétéroclite, sa stratégie n’a guère d’unité ; confuse, elle évolue au gré des évènements. Le film est dominé par la haine et les conflits entre les personnes, nord/sud, blancs/noirs, blancs/indiens, sur lesquels vient se greffer la guerre au Mexique. Le film pêche surtout par le déroulement de son scénario, faiblesses longtemps attribuées aux coupes sauvages faites par les studios, mais force est de constater que le visionnage de la version longue récemment restaurée ne fait que renforcer cette sensation de longueurs et de scènes inutiles. En fait, ce sont les scènes d’action qui ponctuent le film, scènes assez violentes comme toujours avec Peckinpah. Film assez confus, Major Dundee fut un échec commercial.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Charlton Heston, Richard Harris, James Coburn, Senta Berger
Voir la fiche du film et la filmographie de Sam Peckinpah sur le site IMDB.

Voir les autres films de Sam Peckinpah chroniqués sur ce blog…

17 janvier 2013

La Belle Aventurière (1949) de Frederick De Cordova

Titre original : « The gal who took the West »

La belle aventurièreUn journaliste enquête sur l’histoire d’une riche famille de l’Ouest américain. On lui raconte comment deux cousins qui se haïssaient depuis toujours tombèrent amoureux de la même femme, une chanteuse venue de l’est… La belle aventurière est une comédie en Technicolor qui n’a d’autres prétentions que de nous divertir. Effectivement, elle ne fait que cela, rien de plus. L’histoire est très simple, elle permet de mettre en valeur la belle Yvonne De Carlo qu’Universal aimait présenter alors comme étant la plus belle femme du monde. Le point le plus original du film est sa construction, peu courante à l’époque, en quatre flashbacks : quatre personnes vont en effet successivement raconter les mêmes évènements, chaque version venant enrichir la précédente en ajoutant certains aspects et nous amènant à tout reconsidérer d’un œil nouveau. Mais cela ne suffit pas pour éveiller vraiment notre intérêt.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Yvonne De Carlo, Charles Coburn, Scott Brady, John Russell
Voir la fiche du film et la filmographie de Frederick De Cordova sur le site IMDB.

22 avril 2012

Shotgun Stories (2007) de Jeff Nichols

Shotgun StoriesDans une petite ville du sud des Etats-Unis, trois frères apprennent la mort de leur père alcoolique et violent qui les avait abandonnés pour refaire une toute autre vie, plus vertueuse. A l’enterrement, ils font face aux enfants du second mariage qui vénèrent leur père. Les haines enfouies ressurgissent… Pour son premier film, Jeff Nichols (29 ans) prend le contrepied de plusieurs stéréotypes, sur son Sud natal d’abord qu’il nous montre sous son vrai visage, loin de tout cliché, et aussi sur la violence qui, malgré le titre racoleur, n’est ici que peu montrée. Le propos est même de démontrer qu’elle n’offre pas d’issue. Le rythme assez lent contraste avec le bouillonnement des tensions intérieures, l’atmosphère du film nous enveloppe. Michael Shannon a beaucoup de présence à l’écran. Shotgun Stories a été tourné avec très peu de moyens en vingt et un  jours. Le cinéma indépendant américain nous réserve ainsi toujours de bonnes surprises.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Michael Shannon, Douglas Ligon, Barlow Jacobs, Natalie Canerday, Glenda Pannell
Voir la fiche du film et la filmographie de Jeff Nichols sur le site IMDB.

3 février 2012

La poison (1951) de Sacha Guitry

La poisonDans un petit village de Normandie, Paul Braconnier ne peut plus supporter sa femme, alcoolique et odieuse qui le lui rend bien. Chacun projette de tuer l’autre… La poison est d’abord une petite merveille d’écriture : le scénario est simple, reposant une idée brillante et même plausible. Sacha Guitry a écrit là une superbe variation du crime parfait. C’est aussi une petite merveille d’interprétation : Michel Simon joue avec un naturel et une expressivité rare. Quand on sait que le film a été tourné en onze (oui, onze!) jours, Michel Simon ayant demandé à Guitry de faire le moins possible de deuxièmes prises(!), on n’en est que plus admiratif. Enfin, c’est aussi une petite merveille d’humour noir qui s’amplifie au fur et à mesure que le film avance et dont l’apothéose est le procès final, jubilatoire. Sacha Guitry profite de ce drame de la guerre conjugale pour régler ses comptes avec la justice (1). La poison a été refait par Jean Becker cinquante ans plus tard.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Michel Simon, Jean Debucourt, Jacques Varennes, Jeanne Fusier-Gir, Pauline Carton, Louis de Funès
Voir la fiche du film et la filmographie de Sacha Guitry sur le site IMDB.
Voir les autres films de Sacha Guitry chroniqués sur ce blog…

(1) A la Libération, on a reproché à Sacha Guitry son attitude pendant la guerre, notamment d’avoir continué à tourner et d’avoir un bon train de vie. Il fut arrêté sur dénonciation anonyme, emprisonné puis relâché avec interdiction de tourner sans qu’il y ait d’accusations portées contre lui. Ce n’est qu’en 1947 qu’il fut blanchi mais beaucoup ont continué à lui manifester une certaine hostilité. La poison a par exemple été plutôt mal reçu par la critique de l’époque.

Remake :
Un crime au Paradis de Jean Becker (2000) avec Jacques Villeret et Josiane Balasko.

Ne pas confondre avec :
Le poison (The Lost Weekend) de Billy Wilder (1945) avec Ray Milland.
Poison de Todd Haynes (1991)

26 septembre 2011

Qu’est-il arrivé à Baby Jane? (1962) de Robert Aldrich

Titre original : « What ever happened to Baby Jane? »

Qu'est-il arrivé à Baby Jane?Blanche Hudson et Baby Jane Hudson sont deux sœurs ennemies, ex-stars du cinéma et du music hall. Elles vivent recluses dans une maison de Los Angeles. Blanche est paralysée à la suite d’un accident où sa sœur a tenté de la tuer…
Qu’est-il arrivé à Baby Jane? a quelque peu surpris à sa sortie. Plusieurs critiques paraphrasèrent le titre en écrivant « Qu’est-il arrivé à Robert Aldrich ? ». Cette histoire macabre de rivalité féroce a effectivement des côtés grand-guignolesques et va très loin dans la caricature monstrueuse. Hollywood fabrique des monstres…(1) Aldrich eut la bonne idée de choisir deux actrices qui se vouaient déjà une haine féroce et cela se sent à l’écran (2). Les deux actrices n’hésitent pas à jouer avec leur image et leur âge, c’est surtout vrai pour Bette Davis qui est visuellement monstrueuse. L’actrice réalise un véritable tour de force d’interprétation. Le film est aussi célèbre pour son retournement final, les trois dernières minutes obligent le spectateur à se repasser mentalement tout le film pour le voir d’un nouvel œil, c’est alors que l’on réalise que le regard d’Aldrich sur ses personnages est bien plus subtil qu’il nous semblait. Malgré certaines critiques réservées, le succès fut immense. Qu’est-il arrivé à Baby Jane? a d’ailleurs inauguré une vague de films que l’on pourrait appeler psycho-angoissants. Aldrich lui-même tournera deux ans plus tard Chut, Chut Chère Charlotte sur une trame similaire avec, à nouveau, deux sœurs rivales et, à nouveau, Bette Davis (mais pas Joan Crawford qui se fera porter malade dès le premier jour de tournage).
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Bette Davis, Joan Crawford, Victor Buono, Maidie Norman
Voir la fiche du film et la filmographie de Robert Aldrich sur le site IMDB.
Voir les autres films de Robert Aldrich chroniqués sur ce blog…

(1) Sur ce point, le film fait penser à Sunset Boulevard de Billy Wilder.
(2) Joan Crawford dut être soignée après la scène où Bette Davis lui donne des coups car l’actrice tapait réellement! On raconte aussi que Joan Crawford avait placé de lourds poids dans ses poches pour la scène où Bette Davis la traîne sur le sol. Conséquence : Bette Davis eut un terrible mal de dos.

Remarques :
* L’actrice qui interprète la jeune fille de la voisine n’est autre que Barbara Merrill, la fille de Bette Davis.
* Robert Aldrich a tourné la scène finale, sur la plage, exactement au même endroit que la scène finale de son Kiss me Deadly. La maison que l’on voit en arrière plan lors du dialogue entre les deux sœurs est la maison où la fameuse boîte est ouverte.
* Le « mauvais film » visionné par le producteur mécontent est composé d’extraits de Parachute Jumper (1933) d’Alfred Green avec Bette Davis et Douglas Fairbanks Jr. et de Ex-Lady (1933) de Robert Florey avec Bette Davis et Gene Raymond.
Le film regardé à la télévision par la voisine est Sadie McKee (1934) de Clarence Brown avec Joan Crawford, Gene Raymond et Franchot Tone.