22 septembre 2013

Faust (1926) de F.W. Murnau

Titre original : « Faust – Eine deutsche Volkssage »

FaustLe démon Méphistophélès se targue auprès de l’archange Gabriel de pouvoir corrompre l’esprit du vieux docteur Faust et l’asservir. Pour le prouver, il descend lui-même sur terre et va proposer à Faust de retrouver sa jeunesse… Le Faust de Murnau est l’adaptation la plus remarquable de cette légende créée par Goethe. C’est le dernier film allemand de Murnau (1), pour lequel il a bénéficié de moyens colossaux de la part de l’UFA qui désirait frapper un grand coup sur le marché américain. Le perfectionnisme du réalisateur se ressent à tous les niveaux. L’image est assez remarquable, avec de superbes scènes en clair-obscur et de très beaux effets de brumes qui créent une atmosphère forte. Les effets spéciaux montrent aussi une certaine perfection (pour l’époque, bien entendu) ; certaines scènes sont particulièrement saisissantes, telle celle où Méphistophélès étend sa grande cape noire sur la ville de Faust ; Faust la scène de vol (réalisée avec des maquettes) est, quant à elle, magique. L’histoire est un peu réduite, sans doute un peu trop centrée sur l’histoire d’amour entre Faust et Gretchen. On peut aussi regretter le jeu parfois excessif d’Emil Jannings (2) et se demander si le personnage de la tante était bien nécessaire (3). Mais cela n’altère en rien sa valeur : Faust est, par la puissance évocatrice de son atmosphère fantastique, l’un des films les plus importants du cinéma muet.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gösta Ekman, Emil Jannings, Camilla Horn, Wilhelm Dieterle, Yvette Guilbert
Voir la fiche du film et la filmographie de F.W. Murnau sur le site IMDB.

Voir les autres films de F.W. Murnau chroniqués sur ce blog…

Remarque :
Lorsque Wilhelm Dieterle (qui interprète ici le frère de Gretchen) émigrera aux Etats Unis en 1930, il prendra le nom de William Dieterle pour faire une belle carrière de réalisateur (voir les films de William Dieterle chroniqués sur ce blog).

(1) Murnau ira s’installer aux Etats Unis avant même la sortie du film.
(2) A noter que Emil Jannings avait déjà interprété le rôle de Méphistophélès au théâtre.
(3) Le personnage de la tante de Gretchen est interprété par l’actrice française Yvette Guilbert et son inclusion était surtout destinée au public français. L’UFA voulait vraiment faire de Faust un succès international.

Principales autres adaptations du mythe de Faust :
Faust et Marguerite de Georges Méliès (1897)
La Damnation du Docteur Faust de Georges Méliès (1904)
La beauté du diable de René Clair (1950) avec Gérard Philipe et Michel Simon
Doctor Faustus de Richard Burton et Nevill Coghill (1967) avec Richard Burton et Elizabeth Taylor
Faust d’Alexandre Sokurov (2011)

10 juillet 2013

Je suis curieuse (1967) de Vilgot Sjöman

Titre original : « Jag är nyfiken »

1e partie : « Je suis curieuse – Version jaune (Jag är nyfiken – en film i gult) »
2e partie : « Je suis curieuse – Version bleue (Jag är nyfiken – en film i blått) »
Titre français de la 2e partie « Elle veut tout savoir »

Je suis curieuse Je suis curieuseInitialement prévu pour être un film de 3 h30, Je suis curieuse du suédois Vilgot Sjöman est sorti sur les écrans en deux parties : Version jaune et Version bleue. C’est un film à fort contenu politique qui reflète bien les remises en cause et les questionnements en cette fin des années soixante. Le film est très libre dans son contenu mais aussi dans sa forme puisque, si le thème général est l’éveil politique de Lena, une jeune femme de 22 ans, le film mêle réalité et fiction : Vilgot Sjöman peut ainsi apparaître en train de préparer ou de monter son film ou encore les acteurs peuvent prolonger leur relation dans la vie réelle. La première partie, Version jaune, est la plus complète et la mieux équilibrée. Elle aborde plusieurs thèmes politiques, les inégalités de salaires, la non-violence, l’égalité des sexes, la libération sexuelle. En parallèle, nous voyons Lena vivre une aventure avec un homme (qui vote à droite) qui lui cache qu’il a déjà un enfant et qu’il vit en couple. La seconde partie, Version bleue, est plus axée sur la libération dans un sens large, notamment sexuelle, mais aussi sur le plan des religions et des prisons. Le film doit beaucoup à son actrice principale, Lena Nyman. Il faut la voir avec son micro arpenter les rues de Stockholm pour demander avec candeur aux passants : « La société suédoise est-elle une société de classes ? »… ou encore interroger à l’aéroport les voyageurs de retour d’Espagne pour leur demander si cela les avait dérangé de passer leurs vacances dans un pays dirigé par un dictateur… Je suis curieuseJamais agressive mais tout de même obstinée, elle parvient par son naturel et sa candeur à toujours obtenir des réponses ou, au moins, des tentatives de réponse. Sur le plan de la sexualité, le film a pu paraître impudique, abordant largement la question sans tabou, avec liberté et naturel. Vu un demi-siècle plus tard, Je suis curieuse reste un film très intéressant, non seulement (et de façon évidente) sur le plan historique et sociologique, mais aussi pour mesurer à quel niveau ces questionnements restent actuels ou pas, ouvrant ainsi la voie à une réflexion philosophique plus large.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lena Nyman, Vilgot Sjöman, Börje Ahlstedt, Peter Lindgren
Voir la fiche du film et la filmographie de Vilgot Sjöman sur le site IMDB.

Remarques :
* Le jaune et le bleu sont les deux couleurs du drapeau suédois.

* Assez étrangement, en France, le film ne fit que peu d’effet quand il est sorti, en janvier 1968 (pour la première partie) et en septembre 1968 (pour la seconde). Il n’en fut pas de même aux Etats-Unis où il rencontra un vif succès mais ce sont les scènes de nudité (totale ce qui était alors extrêmement rare en dehors des films pornographiques) qui alimentèrent le bouche à oreille : c’est un film que l’on allait voir ostensiblement pour montrer son ouverture d’esprit. En outre, Vilgot Sjöman ne fait à aucun moment montre d’anti-américanisme (mis à part, quelques mentions très rapides de la guerre au Vietnam).

* Olaf Palme apparaît dans le film, il est interviewé (par le réalisateur) sur l’inégalité des salaires et la non-violence. Il était alors ministre des transports. Martin Luther King et le poète russe Evgueni Evtouchenko sont vus dans des documents d’époque.

* La Suède de 1967 est dirigée par les sociaux-démocrates (socialistes modérés) depuis les années trente. Tage Erlander était alors chef du gouvernement depuis 1946. Olaf Palme lui succédera en 1969. Le gouvernement social-démocrate avait pris un certain nombre de mesures dans les années cinquante et soixante pour réduire les inégalités sociales et accroitre la protection sociale. Le pays était considéré comme l’un des plus avancés en ce domaine.

* Vilgot Sjöman a beaucoup travaillé au théâtre avec Bergman, ce qui laisse supposer qu’il a su parfaitement diriger Lena Nyman. En Suède, l’actrice a reçu le prix de la meilleure actrice aux Guldbagge Awards en 1968 pour cette interprétation.

5 juillet 2013

Bruegel, le moulin et la croix (2011) de Lech Majewski

Titre original : « The Mill and the Cross »

Bruegel, le moulin et la croixCe film du polonais  Lech Majewski nous permet de plonger littéralement dans l’univers d’un tableau peint par Bruegel en 1564. Il s’agit du tableau Le Portement de la croix, un tableau qui, avec ses quelque 500 personnages, reste difficile à interpréter sur le plan du symbolisme. Adapté d’un livre du critique d’art Michael Francis Gibson, le film Bruegel, le moulin et la croix met en scène une journée d’une douzaine de personnages du tableau Bruegel, Le Portement de la croix en utilisant habilement différentes techniques : images réelles, images de synthèse, personnages filmés sur fond vert puis incrustés. Le travail sur les costumes est remarquable. Le film comporte très peu de paroles, les personnages agissant généralement dans un mutisme plutôt grave. Le résultat est réussi, l’ensemble est très beau, prolongement de l’esthétisme du tableau. C’est une façon séduisante d’étudier un tableau, de nous faire pénétrer son univers étonnant et d’essayer de mieux le comprendre.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Rutger Hauer, Michael York, Charlotte Rampling
Voir la fiche du film et la filmographie de Lech Majewski sur le site IMDB.

Remarque :
* Bruegel n’avait que 35 ans au moment où il a peint ce tableau. L’acteur Rutger Hauer, qui en a presque le double, est donc très âgé pour le rôle.

26 juin 2013

La Taupe (2011) de Tomas Alfredson

Titre original : « Tinker Tailor Soldier Spy »

La taupe1973, en pleine guerre froide, le chef des services secrets britanniques est mis sur la touche à la suite de l’échec d’une mission en Hongrie. Son plus proche adjoint, lui aussi congédié, est rappelé peu après par le ministère pour enquêter sur la présence d’une taupe, un agent double, au plus haut niveau du MI6… La Taupe est l’adaptation d’un roman de John Le Carré paru en 1974, le premier d’une trilogie consacrée à l’espion George Smiley interprété ici par Gary Oldman. Le film est une production anglo-franco-allemande réalisée par le suédois Tomas Alfredson. Par son style, il est très différent des films actuels qui misent tout sur l’action. La taupe renoue brillamment avec les grands films d’espionnage, reposant sur une intrigue solide et montrant une belle profondeur en insistant sur les rapports humains. Ici, l’important n’est pas tant de savoir qui est la taupe (nous savons dès le début qu’il s’agit de l’un des quatre chefs du MI6 et finalement peu importe que ce soit l’un ou l’autre) mais de savoir comment Smiley va pouvoir l’amener à se démasquer. Car l’écheveau est rendu difficile à démêler par les mises en scène du KGB, les agents doubles et les agents retournés. Gary Oldman compose un personnage très fort, vraiment étonnant, d’un flegme qui frise l’impassibilité, d’une froideur perçante (1). Tout aussi remarquable est l’atmosphère régnant dans l’enceinte du MI6 (surnommé « le Cirque ») : des bureaux vieillots et marqués par une envahissante bureaucratie. Nous sommes loin de l’univers de James Bond ! A l’image de son personnage principal, le rythme du film est très posé ce qui nous permet de bien suivre son cheminement. A l’opposé des films agités et tapageurs, La Taupe est un film remarquable.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Gary Oldman, John Hurt, Colin Firth, Benedict Cumberbatch, Mark Strong, Toby Jones, Ciarán Hinds
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Remarque :
John Le Carré fait une apparition en tant que figurant dans la scène de la fête de Noël.

(1) Gary Oldman dit avoir basé son jeu sur l’une des phrases du livre où Ann, la femme de George, dit de lui : « George est comme un reptile qui baisse sa température pour qu’elle soit la même que celle la pièce dans laquelle il se trouve. » Effectivement, le personnage tel qu’il est joué par Gary Oldman évoque un reptile par certains aspects, extrêmement économe.

15 juin 2013

Barbara (2012) de Christian Petzold

BarbaraDans l’Allemagne de l’Est de 1980, une doctoresse trentenaire est mutée dans un petit hôpital de province après avoir fait un séjour en détention pour avoir cherché à obtenir un visa de sortie. Elle reste distante envers ses collègues, craignant la police secrète et ses informateurs… Christian Petzold est l’un des meilleurs talents de la nouvelle génération de cinéastes allemands, ce film Barbara le démontre magistralement. Il en a écrit lui-même le scénario, une histoire qui mêle habilement le contexte politique de la RDA avec une histoire sentimentale et qui constitue un bel hymne à la vie. Christian Petzold ne théorise pas, le climat de surveillance constante est ici montré dans son expression la plus quotidienne, sans scène spectaculaire, une description assez épurée mais très authentique. Barbara est aussi un portrait de femme, très fermée et froide de prime abord et qui va s’ouvrir très lentement pour parvenir à une autre vision de la vie à laquelle elle aspire. Cette femme est remarquablement incarnée par la belle et longiligne Nina Hoss qui fait montre d’une grande présence à l’écran. Barbara est un film sans artifice. Il y a beaucoup de sensibilité et de délicatesse dans le regard de Christian Petzold.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Nina Hoss, Ronald Zehrfeld, Rainer Bock
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23 avril 2013

Les Trois Lumières (1921) de Fritz Lang

Titre original : « Der müde Tod »

Les trois lumières(Film muet) Au Moyen-âge, un homme tout vêtu de noir, à la silhouette longiligne et au visage émacié, s’installe à la table d’un couple d’amoureux. A l’insu de la jeune fille, le jeune homme et l’homme tout en noir disparaissent peu après. Elle se lance à sa recherche… Der müde Tod (traduction littérale : La Mort lasse) est le premier film important de Fritz Lang, tourné juste avant Docteur Mabuse. Son scénario est signé par sa future femme, Théa von Harbou, qui a puisé son inspiration dans des contes et ballades germaniques. Original et riche, le film montre toute la créativité du couple. Il se compose en trois histoires très différentes encadrées par un prologue et un épilogue. La Mort met en effet la jeune femme à l’épreuve dans trois environnements, Bagdad, Venise et la Chine, où la mort est à chaque fois administrée par un symbole de pouvoir. « L’amour est aussi fort que la mort » lit-elle dans le Cantiques des cantiques mais c’est surtout contre le pouvoir qu’elle doit se battre à chaque fois et si la Mort est lasse, c’est face à la cruauté des hommes. S’inscrivant dans le courant expressionniste, le film est également original dans sa forme, riche de ses références picturales et agrémenté d’effets spéciaux. Malgré la pluralité de ses composantes, Les Trois Lumières forme un ensemble très cohérent, une véritable oeuvre de création d’un grand cinéaste.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lil Dagover, Walter Janssen, Bernhard Goetzke
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Remarque :
Douglas Faibanks a acheté les droits d’exploitation aux Etats Unis de Der müde Tod et en a retardé la sortie. Il s’est inspiré des effets spéciaux de la partie chinoise pour son film Le Voleur de Bagdad. Der müde Tod n’est ainsi sorti aux Etats Unis qu’en 1924 plusieurs mois après le film de Faibanks.

19 avril 2013

Carnage (2011) de Roman Polanski

CarnageDans un square de Brooklyn, un enfant de 11 ans blesse l’un de ses camarades de jeu lors d’une bagarre. Les parents se retrouvent peu après, avec l’intention de régler l’incident de manière civilisée. La rencontre va prendre un tour inattendu… Sa filmographie le prouve, Roman Polanski a une prédilection pour les huis clos, particulièrement ceux où la tension devient si forte qu’elle révèle des traits de la personnalité normalement cachés. Carnage est adapté d’une pièce de Yasmina Reza qui en a coécrit l’adaptation avec le cinéaste. Unité de lieu, un appartement newyorkais, et unité de temps, le film se déroule sans ellipse, en temps réel donc, sur 1h15 de temps. La situation évolue sans cesse, les échanges très urbains du début ne résistent pas à la tension qui s’installe, nous glissons d’une situation à une autre de façon assez subtile, des rapports de force se créent et s’évanouissent tout aussi rapidement. Carnage est assez remarquable par son écriture, d’autant plus que l’humour est assez présent, c’est une comédie. De nombreux passages sont même jubilatoires. Sous le vernis d’une civilité plus ou moins forcée, des sentiments resurgissent, plus triviaux, empreints d’un certain cynisme. Nul doute qu’après son assignation à résidence, l’adaptation de cette pièce qui fustige les bien-pensants d’une fausse largeur d’esprit n’était pas pour déplaire à Roman Polanski. C’est en tout cas très brillant.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Jodie Foster, Kate Winslet, Christoph Waltz, John C. Reilly
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Remarque :
La pièce de Yasmina Reza Le Dieu du Carnage a d’abord été jouée en France en 2008 (avec Isabelle Huppert) puis à Broadway en 2009.

2 mars 2013

Je veux seulement que vous m’aimiez (1976) de Rainer Fassbinder

Titre original : « Ich will doch nur, daß ihr mich liebt »

Je veux seulement que vous m'aimiezEn prison, le jeune Peter raconte à une psychologue sa relation avec ses parents, son mariage et la vie avec sa femme à Munich… R.W. Fassbinder a réalisé Je veux seulement que vous m’aimiez pour la télévision allemande et c’est pourquoi il n’a pas été visible en France avant 2011. On y retrouve l’un des thèmes forts du cinéaste, les sentiments comme forme d’oppression. Son héros ne recherche qu’à être aimé, de ses parents surtout et aussi de sa femme ; l’amour et la reconnaissance sont les seules choses de valeur à ses yeux mais il vit dans une société où c’est l’argent qui régit les rapports. Cette recherche d’amour ne le mènera à rien sinon au pire. Au-delà de l’histoire de Peter, Fassbinder adresse aussi une critique à la société allemande, devenue froide et sans humanité. Comme toujours avec Fassbinder, le film est très travaillé dans sa forme, ses plans sont remarquablement construits, tout semble avoir une signification. Bien qu’il ait été fait pour la télévision, Je veux seulement que vous m’aimiez se montre au niveau de ses meilleurs films, le réalisateur ayant d’ailleurs toujours considéré ses téléfilms comme nullement inférieurs à sa production pour le cinéma.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Vitus Zeplichal, Elke Aberle, Alexander Allerson, Erni Mangold
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Remarque :
Adaptation d’un livre de Klaus Antes et Christiane Erhardt : « Lebenslaenglich »

14 janvier 2013

Despair (1978) de Rainer Fassbinder

DespairA Berlin en 1930, un dandy d’origine russe dirige une petite entreprise de fabrication de chocolats. Il développe un dédoublement de la personnalité : il s’imagine par exemple assis dans un fauteuil se regardant faire l’amour à sa femme. Ce syndrome va l’entrainer à mettre sur pied une surprenante machination… En 1978, Fassbinder a surpris le monde du cinéma avec Despair : pour son 34e film, le réalisateur a accepté une production internationale, avec un budget conséquent et une tête d’affiche connue. Il tourne un film assez déroutant qui tranche avec ses films précédents. Le scénario de cette adaptation du roman La Méprise de Nabokov est signé Tom Stoppard, écrivain de théâtre anglais d’origine tchèque qui avait notamment écrit pour Losey. Le film déroute car il paraît alourdi par un symbolisme trop appuyé de symboles et une diction des acteurs presque pédante (1). Il reste assez nébuleux dans son développement. Sur le plan de la forme, c’est le jeu avec les vitres et les reflets qui est le plus réussi bien qu’il soit, lui aussi, souvent trop appuyé, semblant se transformer alors en course à la virtuosité. Les références à l’Histoire de l’Allemagne, toujours très fortes chez Fassbinder, sont ici réduites à de la pure figuration. Assez rapidement, on se désintéresse de cette lente glissade vers la folie. Despair est un film bien surprenant de la part de Fassbinder.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Dirk Bogarde, Andréa Ferréol, Klaus Löwitsch, Volker Spengler
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(1) A noter que le film a de plus été tourné en anglais et donc les accents sont assez marqués. Même Dirk Bogarde semble avoir un accent.

20 décembre 2012

La piel que habito (2011) de Pedro Almodóvar

La piel que habitoUne jeune femme est retenue prisonnière dans un grand manoir par un chirurgien qui expérimente sur elle une nouvelle peau transgénique… Pedro Almodovar, lui, expérimente dans le domaine du thriller fantastique à la frontière de l’horreur. Selon ses affinités, on peut trouver l’histoire de La piel que habito totalement extravagante ou cordialement déjantée. Almodovar parvient à installer un climat qui met très mal à l’aise, du moins lorsque l’on n’est pas attiré par les scènes de charcutage (finalement, on ne voit heureusement que très peu). Bien évidemment, on peut s’amuser à retrouver tous les sujets de prédilection du cinéaste dans un tout autre cadre, mais la volonté de déranger et de choquer est bien trop manifeste, la démarche manque de subtilité. Antonio Banderas semble absent.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Antonio Banderas, Elena Anaya, Marisa Paredes, Jan Cornet
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Remarques :
* Le film est adapté du roman de Thierry Jonquet Mygale.
* La piel que habito peut se traduire par « la peau dans laquelle je vis ».