11 novembre 2022

Tout s’est bien passé (2021) de François Ozon

Tout s'est bien passéEmmanuèle, une romancière épanouie, est appelée en urgence : son père, âgé de 85 ans, vient d’être hospitalisé après un accident vasculaire cérébral. Quand il se réveille, diminué et dépendant, cet homme curieux de tout et aimant passionnément la vie, demande à sa fille de l’aider à mourir…
Tout s’est bien passé est un film français écrit et réalisé par François Ozon. Il s’agit de l’adaptation du roman paru en 2013 d’Emmanuèle Bernheim, dans lequel elle narrait sa propre histoire avec son père. La romancière, aujourd’hui décédée, était restée amie avec François Ozon après leur collaboration sur l’écriture de Sous le sable, de Swimming Pool et de 5×2. L’euthanasie est bien entendu un sujet délicat sur lequel chacun aura certainement des convictions.  Tout s’est bien passé n’a toutefois rien d’un film militant, il ne cherche pas à convaincre. C’est le récit du trajet personnel de la romancière qui, au départ fortement opposée à l’idée, doit peu à peu se résoudre à accepter la volonté de son père. La gravité du sujet est légèrement  contrebalancée par de petites touches d’humour ici et là. Très belle distribution. La transformation d’André Dussollier est stupéfiante, on ne le reconnaît qu’à grand-peine, et son jeu est remarquable. Sophie Marceau est tout autant admirable dans l’interprétation de son personnage qu’elle donne l’impression de vivre vraiment. Un film assez frappant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Sophie Marceau, André Dussollier, Géraldine Pailhas, Charlotte Rampling, Éric Caravaca, Hanna Schygulla, Grégory Gadebois
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Remarque :
* Dans la vraie vie, le compagnon d’Emmanuèle Bernheim (interprété par Eric Caravaca) n’est autre que Serge Toubiana, bien connu des cinéphiles, directeur de la Cinémathèque française de 2003 à 2016 (ce qui explique ses propos sur le cinéma).

Tout s'est bien passéSophie Marceau, Géraldine Pailhas et André Dussollier dans Tout s’est bien passé de François Ozon.

Tout s'est bien passéSophie Marceau et André Dussollier dans Tout s’est bien passé de François Ozon.

6 février 2021

Le Futur est femme (1984) de Marco Ferreri

Titre original : « Il futuro è donna »

Le Futur est femme (Il futuro è donna)Dans une boite de nuit, Anna et Gordon rencontre Malvina, une femme seule et enceinte qui n’a pas d’endroit où dormir. Ils l’hébergent et un lien va peu à peu les unir…
Le Futur est femme est un film franco-germano-italien réalisé par Marco Ferreri. C’est un film assez surprenant, étrange, une variation sur la place de la femme et sur la maternité. Si Ferreri a quelquefois été accusé de misogynie dans ses premiers films, il met ici la femme sur un piédestal : les femmes ont pris le contrôle de leur vie, s’affranchissant totalement des règles sociales. Les hommes n’ont qu’un rôle secondaire, réduits à regarder, souvent grotesques. Ferreri utilise merveilleusement décors et éclairages pour créer un climat un peu surréaliste avec une recherche esthétique de tous les plans. Et parmi les objets, les plus remarquables sont incontestablement ces immenses têtes en cire de Greta Garbo et Marlène Dietrich. Le film repose sur un beau trio d’acteurs, même si hélas deux d’entre eux sont doublés en italien. La grossesse d’Ornella Muti était bien réelle. Le Futur est femme est un film doté d’une belle personnalité.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Ornella Muti, Hanna Schygulla, Niels Arestrup
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Le Futur est femme (Il futuro è donna)Hanna Schygulla et Ornella Muti dans Le Futur est femme (Il futuro è donna) de Marco Ferreri.

19 août 2020

La Prière (2018) de Cédric Kahn

La PrièrePour se libérer de sa dépendance à l’héroïne, le jeune Thomas rejoint une communauté d’anciens jeunes drogués qui lui proposent un changement de vie radical. Privé de tout, isolé du monde extérieur dans un petit village des Alpes, il devra se soigner par la prière et le travail. Dans ce nouveau monde, il découvre l’amour, l’amitié et même la foi…
La Prière est un film vraiment étonnant. Loin de tous les clichés et sans effet de dramatisation, Cedric Kahn réussit à faire un film magnifique et sensible. Le personnage central de son histoire va se reconstruire en découvrant des grandes valeurs humaines, telles l’amitié, la solidarité, l’ouverture aux autres et trouver ainsi une certaine sérénité. La religion n’est pas l’élément majeur de cette renaissance, elle lui offre plutôt un cadre général. Le film a été tourné sans acteur connu (Hanna Schygulla n’a qu’un petit rôle). Anthony Bajon est assez remarquable, il montre une grande présence à l’écran et sait mettre de l’intensité dans son jeu.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Anthony Bajon, Damien Chapelle, Alex Brendemühl, Louise Grinberg, Hanna Schygulla
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 La PrièreAnthony Bajon dans La Prière de Cédric Kahn.

5 octobre 2015

Le Mariage de Maria Braun (1979) de R.W. Fassbinder

Titre original : « Die Ehe der Maria Braun »

Le Mariage de Maria BraunMariée à la hâte sous les bombardements, Maria Braun attend le retour de son mari après la fin de la guerre dans un Berlin en ruines où l’on manque de tout. Un ami soldat lui annonce qu’il est mort. Maria doit s’en sortir et trouve un emploi d’entraineuse dans un bar où elle a une liaison avec un soldat américain… Le Mariage de Maria Braun est le premier volet d’une tétralogie consacrée à l’Allemagne nazie et post-nazie au travers de quatre destins de femmes (1). Le Mariage de Maria Braun débute à la fin de guerre et s’achève lors de la victoire de l’Allemagne à la Coupe de football 1954, symbole d’une nation qui tourne la page de la défaite. Splendidement personnifiée par Hanna Schygulla, Maria Braun est une femme à la fois victime et ambitieuse. La dure réalité de l’immédiat Après-guerre l’a métamorphosée en lutteuse hardie qui sait provoquer la chance plutôt que de l’attendre. La mise en scène de Fassbinder est d’une belle précision, parfaitement maitrisée. La prestation d’Hanna Schygulla est vraiment remarquable avec un mélange de distanciation et de sensualité assez unique. Le film connut un succès mérité.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Hanna Schygulla, Klaus Löwitsch, Ivan Desny
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Le Mariage de Maria Braun
Hanna Schygulla (à droite) dans Le Mariage de Maria Braun de Rainer Werner Fassbinder.

Remarques :
* Caméo : Fassbinder apparaît en trafiquant au marché noir. Il propose à Maria une robe noire et, en soldes, les oeuvres complètes du poète Kleist… tout un symbole.
* Les producteurs voulaient Romy Schneider dans le rôle principal mais des propos publics peu amènes de Fassbinder à son propos ont rendu la collaboration impossible…

(1) Le Mariage de Maria Braun (1979), Lili Marleen (1981), Lola, une femme allemande (1981) et Le Secret de Veronika Voss (1982). Fassbinder ne les a pas tournés dans l’ordre chronologique, puisque Lili Marleen traite d’une période se situant avant Le Mariage de Maria Braun et l’histoire de Lola se situe après celle de Veronika Voss.

Le Mariage de Maria Braun
Hanna Schygulla dans Le Mariage de Maria Braun de Rainer Werner Fassbinder.

Le Mariage de Maria Braun
Photo de tournage : Hanna Schygulla, R.W. Fassbinder  et Gottfried John sur le tournage du  Mariage de Maria Braun de Rainer Werner Fassbinder.

7 novembre 2013

La Nuit de Varennes (1982) d’Ettore Scola

La nuit de VarennesEn juin 1791, l’écrivain libertin et chroniqueur de la Révolution Restif de La Bretonne est le témoin involontaire du départ du Palais Royal en pleine nuit d’un carrosse dans lequel a pris place l’une des dames de compagnie de la reine. Intrigué, il décide de le rattraper et découvre que leurs occupants tentent de rejoindre la famille royale en fuite… En s’inspirant d’un roman de Catherine Rihoit, Ettore Scola et son scénariste ont inventé ce trajet de Restif de La Bretonne (Jean-Louis Barrault) de Paris à Varennes en compagnie de l’intellectuel américain Thomas Paine (Harvey Keitel), d’une dame de la cour (Hanna Schygulla), et quelques autres personnages auxquels vient s’adjoindre Casanova (Marcello Mastroianni). C’est un petit microcosme de la société et le temps du trajet est l’occasion de discussions et d’échanges d’idées assez intéressants sur ce monde en pleine transformation. Hélas, le film est gâché par une bande son épouvantable que doublages et bruitages de studio bien trop présents rendent assez agressive. Ettore Scola ne porte pas de jugement tranché même s’il donne l’impression de s’être identifié à ce Casanova vieillissant qui regrette l’insouciance et une certaine douceur de vivre. Très belle fin.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean-Louis Barrault, Marcello Mastroianni, Hanna Schygulla, Harvey Keitel, Jean-Claude Brialy, Andréa Ferréol, Michel Vitold, Laura Betti, Daniel Gélin, Jean-Louis Trintignant
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Remarque :
La version initiale de La Nuit de Varennes dure 150 minutes. Il existe également une version réduite à 135 minutes et une autre à 122 minutes (c’est cette dernière qui était visionnée ici).

19 septembre 2012

Les Larmes amères de Petra von Kant (1972) de Rainer Werner Fassbinder

Titre original : « Die bitteren Tränen der Petra von Kant »

Les larmes amères de Petra von KantRécemment divorcée, la styliste en vogue Petra von Kant vit et travaille dans son appartement avec une assistante qui lui est entièrement dévouée. Une amie lui présente Karin. Impressionnée par sa beauté, elle lui propose de l’aider à devenir mannequin… Les larmes amères de Petra von Kant est le premier film de Fassbinder à avoir été distribué en France (1). C’est son treizième film, l’adaptation d’une pièce de théâtre qu’il a lui-même écrite et qu’il met en scène sans chercher à en masquer les origines. C’est un film vraiment étonnant venu d’un réalisateur âgé de 27 ans. D’abord par son contenu car les dialogues sont d’une rare profondeur, il suffit de voir avec quelle acuité Petra raconte à Karin l’épanouissement et le déclin de son ancien mariage ou l’évolution de leurs rapports au sein du couple. Il y a aussi une réflexion sur l’amour fou et la dépendance, sur l’admiration et la soumission, sur la possession et le manque. Fassbinder aurait puisé son inspiration dans sa propre vie, ayant lui aussi vécu une séparation douloureuse. Le film est aussi étonnant par la maitrise de la mise en scène, filmé sobrement dans un seul lieu avec quelques mouvements de camera très amples qui tournent autour des actrices comme pour nous en approcher. La structure du récit, quatre actes séparés par de grandes ellipses, met en relief l’évolution de la relation entre Petra et Karin. Le décor est un mélange de kitsch et de classicisme(2) qui, avec les toilettes excentriques, apportent une touche de surréalisme et affirme le caractère atemporel du propos, propre aux grandes tragédies. Seule la fin est un peu faible. Les larmes amères de Petra von Kant est un film intense et riche qui porte l’empreinte du cinéaste.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Margit Carstensen, Hanna Schygulla, Irm Hermann
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Remarque :
Le titre (en anglais : The Bitter Tears of Petra Von Kant) est un hommage à Frank Capra The Bitter Tea of General Yen (1933)

(1) Les larmes amères de Petra von Kant (1972) est sorti en avril 1974 en France, deux ans après sa sortie en Allemagne. Il a été suivi deux mois plus tard par Tous les autres s’appellent Ali (1974) et quelques mois plus tard par Le marchand des quatre saisons (1971). C’est dans cet ordre que le public français a découvert Fassbinder.
(2) Le tableau dont une reproduction occupe tout un mur de la chambre de Petra von Kant est Midas et Bacchus de Poussin.

11 août 2012

Le marchand des quatre saisons (1971) de Rainer Werner Fassbinder

Titre original : « Händler der vier Jahreszeiten »

Le marchand des quatre saisonsDe retour de la Légion étrangère, Hans devient marchand ambulant de fruits et légumes avec sa femme. Se sentant rejeté, il est d’humeur de plus en plus sombre… Le marchand des quatre saisons est le premier succès commercial de Fassbinder ; il fut très bien accueilli en Allemagne aussi bien par le public que par la critique. Inspiré entre autres par les mélodrames de Douglas Sirk, le réalisateur signe ici un film sur le manque d’amour et de considération. La scène d’introduction donne le ton : « Ce sont les meilleurs qui s’en vont, il n’y a que les gens comme toi pour revenir », dit la mère d’Hans à son retour. C’est aussi un film qui questionne sur la société bourgeoise des années cinquante et soixante, une société sans amour et sans bonheur, et aussi sur la réussite allemande, une société où les femmes ont une grande importance, ce sont elles qui sont garantes de l’ordre moral. Hans Hirschmüller fait une belle prestation en ours en quête d’amour, dont les désirs et aspirations restent inassouvis. Le film n’est pas sans maladresse dans sa forme mais Fassbinder montre déjà une indéniable maitrise. Il compense la faiblesse des moyens par une belle densité du contenu. Malgré son style assez simple, Le marchand des quatre saisons est en effet un film très riche.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Hans Hirschmüller, Irm Hermann, Hanna Schygulla
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