11 mai 2016

Les Poupées du diable (1936) de Tod Browning

Titre original : « The Devil-Doll »

Les poupées du diableDix-sept ans après avoir mis injustement en prison par des associés malveillants, un ex-banquier parisien parvient à s’évader avec son compagnon de cellule, un savant qui travaillait sur un procédé permettant de miniaturiser un être vivant et de le faire obéir à sa volonté. Ils se réfugient chez sa femme qui a continué les recherches… Pour son avant-dernier film, Tod Browning laisse l’horreur de côté pour cette histoire qui mêle mystère et fantastique, une variation très originale sur le thème du crime parfait. Adapté d’un roman d’Abraham Merritt, le scénario a été écrit par Garrett Fort (qui avait travaillé sur Frankenstein et Dracula), Guy Endore et Erich von Stroheim. La mise en place est assez rapide et le film se déroule ensuite assez rapidement. Les effets spéciaux sont très bien réalisés, même pour des yeux modernes. L’astuce a été de tourner dans des décors gigantesques et, si des projections ont été utilisées, elles ne sont pas vraiment visibles. Lionel Barrymore passe la plus grande partie du film déguisée en vieille femme et il prend visiblement du plaisir à jouer ; il trouve le ton juste, sans en faire trop. L’histoire est très originale et assez prenante. Dans cette décennie des années trente où beaucoup de réalisateurs n’étaient que des exécutants, Tod Browning prouve, une fois de plus, qu’il est un vrai créateur.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Lionel Barrymore, Maureen O’Sullivan, Frank Lawton, Rafaela Ottiano, Henry B. Walthall
Voir la fiche du film et la filmographie de Tod Browning sur le site IMDB.

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Remarques :
* Le savant est interprété par Henry B. Walthall qui est mort peu avant la sortie du film. L’acteur a tourné dans 327 films, de 1908 à 1936. Il a accompagné la naissance du cinéma de fiction : il est présent dans de nombreux films courts de Griffith et dans Naissance d’une nation. Dans les années 20, il joue principalement dans des films de moindre importance avant que sa carrière ne reprenne de l’allant avec l’avènement du parlant.
* Dans The Unholy Three (Le Club des trois) de Tod Browning (1923), l’un des criminels se déguisait déjà en vieille femme tenant un magasin. A ce sujet, on pourra remarquer que l’un des slogans utilisés par la MGM pour la promotion du film fut « Greater than The Unholy Three ».

The Devil-Doll
Henry B. Walthall et Rafaela Ottiano dans Les poupées du diable de Tod Browning.

The Devil-Doll
Frank Lawton, Maureen O’Sullivan et Lionel Barrymore (déguisé en vieille femme) dans Les poupées du diable de Tod Browning.

4 mai 2016

Vaudou (1943) de Jacques Tourneur

Titre original : « I Walked with a Zombie »

VaudouUne jeune infirmière canadienne est embauchée par un propriétaire de plantation sur une île des Caraïbes pour prendre soin de sa femme qui semble souffrir d’une sorte de paralysie mentale… Vaudou est le deuxième des trois films tournés par Jacques Tourneur en 1942-43 pour le producteur Val Lewton. L’histoire est en réalité une adaptation déguisée de Jane Eyre (de Charlotte Brontë), transposée dans les Antilles. Si le film est empreint d’une très forte atmosphère, ce n’est pas tant pour générer l’angoisse, qui n’est là que par petites touches, mais plutôt pour donner une belle profondeur aux personnages et une indéniable dimension psychologique. Une certaine poésie se dégage même de l’ensemble d’autant plus que la photographie de J. Roy Hunt est superbe, jouant beaucoup avec les ombres. Contre toute attente, les autochtones noirs ne sont pas ridiculisés, ils sont même traités avec respect. Cette volonté de s’éloigner des clichés raciaux traditionnels est assez unique dans le cinéma hollywoodien de l’époque. S’agissant d’un « B-movie », il n’y a pas d’acteur de premier plan mais les rôles sont très bien tenus, Frances Dee a une belle présence et Tom Conway (de son vrai nom Thomas Charles Sanders, il est le frère de George Sanders) offre un beau mélange de solennité et de mystère. Vaudou est un très beau film.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: James Ellison, Frances Dee, Tom Conway
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Remarques :
* Les trois films fantastiques/d’horreur réalisés par Jacques Tourneur pour Val Lewton :
1. La Féline (Cat People) (1942)
2. Vaudou (I Walked with a Zombie) (1943)
3. L’homme-léopard (The Leopard-Man) (1943).
Ces trois films étaient des « B-movies ».

* Le scenario a été écrit successivement par Curt Siodmak (le frère de Robert Siodmak) et Ardel Wray en partant d’une histoire écrite par Inez Wallace parue dans American Weekly. C’est Val Lewton qui orienta l’histoire pour la rendre plus proche de celle de Jane Eyre.

* Il est bien rare que le titre français d’un film américain soit plus approprié que le titre original. C’est le cas ici. Le titre original, franchement ridicule, aurait été imposé à Val Lewton par la RKO. C’était le titre de l’histoire originale écrite par Inez Wallace.

* La chanson « Shame and Scandal in the Family » a été écrite par Sir Lancelot (qui l’interprète dans le film) et Ardel Wray. Cette chanson a par la suite été reprise par The Kingston Trio, Odetta, Peter Tosh and The Wailers…

Vaudou
Frances Dee et Tom Conway dans Vaudou de Jacques Tourneur.

Vaudou

Vaudou
Christine Gordon, Frances Dee et Tom Conway dans Vaudou de Jacques Tourneur (photo publicitaire).

26 avril 2016

Coups de feu dans la Sierra (1962) de Sam Peckinpah

Titre original : « Ride the High Country »

Coups de feu dans la SierraAu début du XXe siècle, un ex-shérif et ex-aventurier vieillissant accepte de convoyer un chargement d’or d’une petite bourgade minière jusqu’à la banque de la ville. Pour cela, il s’adjoint les services de l’un des ses anciens partenaires et ami sans savoir que celui-ci a l’intention de s’emparer de l’or… Coups de feu dans la Sierra est le deuxième long métrage de Sam Peckinpah. C’est un film qui est, assez unanimement, tenu en très haute estime : il est alors décrit comme se situant à une période charnière pour le western, celle où le western classique va céder la place à un western plus iconoclaste et violent, parfois appelé « western crépusculaire ». La violence n’est toutefois pas trop présente ici mais j’avoue avoir eu bien du mal à m’intéresser à cette histoire, les personnages manquant d’épaisseur à mes yeux. Les héros sont fatigués et les grandes valeurs morales ont laissé la place à un pragmatisme désabusé. Peckinpah s’attache à nous montrer l’Ouest sous son vrai jour et comme on ne l’a jamais vu, ce qui donne des scènes baroques du plus bel effet, telle toute la scène d’introduction ou cette tout aussi surprenante vision d’un cortège nuptial à cheval.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Randolph Scott, Joel McCrea, Mariette Hartley
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Pour une présentation plus enthousiaste, lire l’article sur DVDClassiks

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Ride the High Country
Randolph Scott et Joel McCrea dans Coups de feu dans la Sierra de Sam Peckinpah (à l’arrière plan : Ron Starr).

Ride the high country

22 avril 2016

New York 1997 (1981) de John Carpenter

Titre original : « Escape from New York »

New York 1997Dans un monde situé juste après une troisième guerre mondiale, la ville de New York a été transformée en une gigantesque prison à ciel ouvert où les prisonniers sont livrés à eux-mêmes. Le légendaire fugitif et ancien soldat Snake Plissken a 24 heures pour y retrouver le président des États-Unis qui a été capturé par les détenus après le détournement de son avion… Ecrit dès 1976, dans la foulée du Watergate, par John Carpenter qui eut bien du mal à trouver un financement, New York 1997 est un film de science-fiction, de type post-apocalyptique. Il a toutefois toutes les apparences d’un film d’action. Avec un budget limité, John Carpenter est parvenu à créer un univers très crédible et à donner beaucoup de force et de présence à son anti-héro au bandeau sur l’oeil au point que se développa un culte autour de son personnage. L’ensemble est fort bien ficelé et plaisant, malgré l’absence de profondeur du scénario. Le film a été maintes fois copié, rarement avec bonheur…
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Kurt Russell, Lee Van Cleef, Ernest Borgnine, Donald Pleasence, Isaac Hayes, Harry Dean Stanton
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Remarques :
* Le film a été tourné à East St. Louis (Illinois), ville qui est sur la rive opposée du Mississippi à St. Louis (Missouri) et qui avait été en partie détruite par un gigantesque incendie en 1976, laissant des quartiers délabrés. La production a obtenu d’y faire couper le courant par périodes. Rappelons qu’en 1980, les images créées par ordinateurs n’étaient pas encore vraiment accessibles, du moins à une production moyenne. Même la vue de New York en wire-frame (fil de fer) dans le cockpit du planeur n’est pas issue d’un ordinateur : c’est une maquette avec du ruban adhésif phosphorescent…
* James Cameron est au générique, crédité pour les effets visuels à base de matte paintings.
* Suite : Los Angeles 2013 (Escape from L.A.) de John Carpenter (1996) avec Kurt Russell, Steve Buscemi et Peter Fonda, film d’un intérêt plus limité.
* Un remake est en préparation à la Fox…

New York 1997
Kurt Russell dans New York 1997 de John Carpenter.

21 avril 2016

Le Prince de New York (1981) de Sidney Lumet

Titre original : « Prince of the City »

Le Prince de New YorkUn policier new-yorkais de la brigade des stups accepte de témoigner dans le cadre d’une enquête sur la corruption à l’intérieur de la police… Huit ans après Serpico, Sidney Lumet replonge à nouveau dans le monde complexe de la police new-yorkaise. Il s’est une fois encore basé sur une histoire vraie, racontée dans un livre de Robert Daley. Le policier de Prince of the City est écartelé entre le remords, la fidélité envers ses partenaires et le sens moral dans un monde où les rapports entre la police et la pègre sont complexes, faits de manoeuvres et de sordides tractations. Il est pris dans un engrenage qui peut lui être fatal. Lumet a tenu à tourner cette histoire sans acteurs connus (c’est le premier grand rôle de Treat Williams) ce qui augmente l’impression d’authenticité. Tous les rôles sont remarquablement bien tenus. Le déroulement du scénario peut paraître un peu chaotique, une succession de scènes qui forment finalement un ensemble très cohérent. Malgré les quelque 2h45, il n’y a aucune longueur. La photographie, volontairement un peu sale et peu éclairée, évoque les films de la nouvelle génération, plus particulièrement Taxi Driver de Scorsese. Finalement, Prince of the City est un film bien plus intense et complexe que ne l’était Serpico.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Treat Williams, Jerry Orbach, Bob Balaban
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Le Prince de New York
Treat Williams dans Le Prince de New York de Sidney Lumet.

Ne pas confondre avec :
Un prince à New York (Coming to America) qui est une comédie de John Landis (1988) avec Eddie Murphy.

17 avril 2016

La Ville abandonnée (1948) de William A. Wellman

Titre original : « Yellow Sky »
Autre titre français : « Nevada »

La Ville abandonnéePoursuivi par une escouade de cavalerie après avoir dévalisé une banque, un petit groupe de hors-la-loi se réfugient dans un désert de sel et tentent de le traverser. A bout de forces, ils arrivent à une ville abandonnée de tous ses habitants sauf une jeune femme et son grand-père… Yellow Sky est adapté d’une histoire écrite par le grand scénariste W.R. Burnett qui dit s’être très librement inspiré de La Tempête de William Shakespeare. C’est un western assez âpre où Wellman semble avoir privilégié plus l’esthétisme et l’atmosphère que la psychologie des personnages. La tension est forte et constante, culminant lors de certaines scènes sans jamais retomber vraiment. Face au chef de bande Gregory Peck, Richard Widmark, ici dans l’un des tous premiers rôles, fait une belle prestation, rendant son personnage particulièrement inquiétant. La photographie, signée Joseph MacDonald, est assez belle avec de trouvailles remarquées comme ce plan en vue subjective montrant Gregory Peck de l’intérieur du fusil tenu par Anne Baxter. Yellow Sky est un beau et puissant western.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gregory Peck, Anne Baxter, Richard Widmark, John Russell, Harry Morgan
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Lire la critique du site DVDClassiks

Remake :
The Jackals (1967) de Robert D. Webb avec Vincent Price.

Yellow Sky
Anne Baxter et Gregory Peck dans La Ville abandonnée de William A. Wellman.

Yellow Sky
Richard Widmark (au centre) dans La Ville abandonnée de William A. Wellman.

16 avril 2016

Le Procès Paradine (1947) de Alfred Hitchcock

Titre original : « The Paradine Case »

Le Procès ParadineUn brillant avocat londonien accepte de défendre Maddalena Paradine, une femme en vue de la haute société qui est accusée d’avoir empoisonné son mari, un ex-officier militaire aveugle… Le Procès Paradine est assez généralement considéré comme l’un des films les moins notables de la filmographie d’Alfred Hitchcock. A juste titre. Le défaut le plus criant du film est dans son casting. Penser que le très américain Gregory Peck puisse être crédible une seule seconde en avocat britannique paraît assez surréaliste. Hitchcock a toujours imputé ce défaut et tous les autres au producteur David O. Selznick qui, il est vrai, avait l’habitude de s’impliquer dans le tournage des films qui lui tenaient à coeur : il a choisi certains acteurs, réécrit de nombreuses scènes arguant que Ben Hecht n’avait pas terminé sa tâche, ordonné de retourner de nombreuses scènes, supervisé le montage et l’insertion de la musique. Même si Le Procès Paradine n’est pas un grand Hitchcock, il comporte néanmoins de belles scènes, à commencer par la toute première du film où la caméra « enveloppe » Maddalena Paradine (cette belle et très juste formule est de Patrick Brion…), et aussi les scènes de procès filmées par trois ou quatre caméras, dont une placée très haut pour des plongées vertigineuses. La scène la plus étonnante, et la plus difficile à réaliser techniquement, est celle de l’arrivée de Louis Jourdan : par un habile mouvement tournant, on le voit passer derrière le box de l’accusée qui est au premier plan, n’osant se retourner pour le regarder.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Gregory Peck, Ann Todd, Charles Laughton, Charles Coburn, Ethel Barrymore, Louis Jourdan, Alida Valli
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Remarques :
* Caméo : Alfred Hitchcock est bien visible à l’arrivée du train dans le Cumberland. On le voit juste derrière Gregory Peck, portant une contrebasse.
* Selznick a acheté les droits du roman de Robert Smythe Hichens en 1933 avant même qu’il ne paraisse en librairie.
* Les scènes montrant la campagne du Cumberland ont réellement été tournées dans le Cumberland (qui, rappelons-le, est la très belle région au nord-ouest de l’Angleterre située juste sous l’Ecosse).
* Le conducteur de la petite calèche dans le Cumberland est interprété par Snub Pollard, acteur comique de l’époque du muet qui a joué avec Harold Lloyd. L’acteur a beaucoup tourné de petits rôles par la suite : IMDB le crédite de 584 films !

Le Procès Paradine
Gregory Peck et Ann Todd dans Le Procès Paradine de Alfred Hitchcock.

14 avril 2016

International House (1933) de A. Edward Sutherland

International HouseA l’hôtel International House de la ville chinoise de Wu-Hu, des représentants des grandes puissances arrivent pour tenter d’acquérir l’invention du Professeur Wong : un procédé pour transmettre les images par la voie des airs… L’histoire de cette comédie loufoque et débridée n’est qu’un prétexte pour avoir des personnages très différents. Nous sommes là dans un genre proche des Marx Brothers avec des jeux de mots qui fusent et situations totalement farfelues. Face à un W.C. Fields en pleine forme (il n’apparaît qu’assez tardivement), le premier rôle féminin est tenu par Peggy Hopkins Joyce, une ex-danseuse des Ziegfeld Follies qui faisait alors régulièrement la une des journaux pour ses mariages à répétition avec des millionnaires. Elle joue son propre rôle, jouant avec son image scandaleuse et avec sa mauvaise réputation. On trouve aussi George Burns et Gracie Allen, un duo comique, ici franchement hilarant en docteur affublée d’une assistante un peu dérangée. On remarquera aussi la présence de Bela Lugosi, en agent russe et ex-mari jaloux, l’un de ses rares rôles comiques. Les démonstrations de l’invention du professeur (en fait, c’est ni plus ni moins qu’un mode primitif de télévision) sont l’occasion de petites scènes avec des vedettes de radio de l’époque mais aussi avec le crooner Rudy Vallee ou encore un morceau débridé de Cab Calloway.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Peggy Hopkins Joyce, W.C. Fields, Rudy Vallee, Stuart Erwin, George Burns, Gracie Allen, Bela Lugosi, Franklin Pangborn
Voir la fiche du film et la filmographie de A. Edward Sutherland sur le site IMDB.

Voir les autres films de A. Edward Sutherland chroniqués sur ce blog…

Remarques :
* Dans une scène, Peggy Hopkins Joyce se demande sur quoi elle est assise et W.C.Fields, découvrant qu’il s’agit d’un chat, s’exclame « Oh, it’s just a pussy ». Cette réplique aurait particulièrement irrité le Hays Office dont le code de censure se généralisera l’année suivante. Il faut avouer qu’ils avaient d’autres raisons d’être scandalisés par ce film qui est, de toute évidence, à classer parmi les films « pre-Code ». A noter que la chanson de Cab Calloway « Reefer Man » a été souvent censurée lors des diffusions par les télévisions américaines car il y est fortement question de drogue.

* Peggy Hopkins Joyce a fait l’objet d’un livre : Gold Digger: The Outrageous Life of Peggy Hopkins Joyce de Constance Rosenblum (Metropolitan Books/Henry Holt & Company, 2000). Elle a collectionné les maris millionnaires et les diamants. Chaplin, qui a été l’un de ses amants, se serait inspiré de ses récits pour certaines scènes de A Woman of Paris.

International House
Edmund Breese, Peggy Hopkins Joyce et W.C. Fields dans International House d’Edward Sutherland.

12 avril 2016

Hombre (1967) de Martin Ritt

HombreDans une diligence, affrétée à la hâte à la demande d’un riche passager et de sa femme, prennent place des personnes très différentes dont John Russell qui a été élevé dès son plus jeune âge par des indiens Apaches… Hombre est l’adaptation d’un roman d’Elmore Leonard, un scénariste auquel on doit des films aussi différents que 3h10 pour Yuma et Jackie Brown. La situation de départ tel que décrite ci-dessus peut sembler proche de celle de Stagecoach mais le développement en est différent. Le fond du propos est nous faire porter un regard sur « l’homme blanc » à travers les yeux d’un Apache (ou d’un demi-Apache). Ce parti-pris pro-indien et la critique du racisme traduisaient dans les années soixante une évolution déjà bien avancée et, en ce sens, le film se situe à une charnière, préfigurant certains westerns très modernes de la décennie suivante. Aujourd’hui, il est de bon ton de railler ce genre de film en le déclarant « rempli de bons sentiments » … Mais Hombre est un film de fort belle facture et il le doit à son scénario, avec de très bons dialogues et des échanges acérés, à sa superbe photographie de Wong Howe (il suffit de regarder la scène d’ouverture avec les chevaux sauvages pour s’en convaincre) et surtout à la prestation puissante de Paul Newman, qui donne beaucoup de force et de superbe à son personnage taciturne. Il faut aussi mentionner Richard Boone, également d’une remarquable présence et qui apporte une certaine truculence à son imposant personnage. Le dénouement est assez inhabituel.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Paul Newman, Fredric March, Richard Boone, Diane Cilento, Cameron Mitchell, Barbara Rush, Martin Balsam
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Hombre
Paul Newman en Apache dans la scène d’ouverture de Hombre de Martin Ritt.

Hombre
Paul Newman dans Hombre de Martin Ritt.

4 avril 2016

The Lost Moment (1947) de Martin Gabel

Titre français parfois utilisé : « Moments perdus »

Moments perdusPrêt à tout, un éditeur américain se rend à Venise pour tenter de récupérer les lettres d’amour d’un célèbre poète décédé. La destinataire de ces lettres vit toujours, âgée de 105 ans. Sous une fausse identité, l’éditeur parvient à sous-louer une chambre dans la demeure où elle vit avec sa jeune nièce très distante… Produit par Walter Wanger, The Lost Moment est une adaptation de l’une des nouvelles les plus célèbres d’Henry James, Les Papiers d’Aspern. Son point fort n’est pas dans son interprétation : Susan Hayward a sans aucun doute un jeu trop marqué dans son effort de paraître mystérieuse, Robert Cummings est un peu fade et le rôle d’Agnes Moorehead, dont le visage est à peine visible et en tous cas méconnaissable, se réduit à marmonner quelques phrases. Non, si le film est si attirant et même fascinant, c’est grâce à l’atmosphère générale qui se dégage de l’histoire et de ses décors : presque tout le film se déroule au sein d’une mystérieuse et vaste demeure vénitienne donnant sur le canal. Cette atmosphère paraît être en équilibre entre le rêve et fantastique sans franchement tomber dans l’un ou l’autre. C’est assez superbe. Ce film, qui n’eut que peu succès à sa sortie et qui n’est jamais sorti en France, mérite largement d’être découvert.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Robert Cummings, Susan Hayward, Agnes Moorehead, Joan Lorring, Eduardo Ciannelli
Voir la fiche du film et la filmographie de Martin Gabel sur le site IMDB.

Remarques :
* The Lost Moment est l’unique réalisation de Martin Gabel qui fut l’un des compagnons d’Orson Welles dans la Mercury Theatre Company à la fin des années trente. Il a ensuite fait une carrière d’acteur. Ses rôles les plus marquants furent en gangster dans le remake de M par Joseph Losey (1951) et dans Bas les masques de Richard Brooks (1952). On le voit aussi dans Marnie d’Alfred Hitchcock.

* Le poète est supposé être Percy Shelley (1792-1822). Le petit portrait que l’on voit dans le film lui ressemble fortement. Henry James a dit être parti d’une anecdote au sujet d’un admirateur de Shelley.

* L’histoire est simplifiée car, dans la nouvelle de James, la nièce n’est pas une beauté comme peut l’être Susan Hayward, bien au contraire.

The Lost Moment
Robert Cummings et Agnes Moorehead dans The Lost Moment de Martin Gabel.

The Lost Moment
Susan Hayward dans The Lost Moment de Martin Gabel.

The Lost Moment
Robert Cummings dans The Lost Moment de Martin Gabel.