8 septembre 2022

Et Satan conduit le bal (1962) de Grisha Dabat

Et Satan conduit le balA Collioure, Ivan (Jacques Perrin), beau gosse désinvolte et oisif, a un accident avec la voiture qu’il a « empruntée » à un garage. Pour éviter la prison, il doit trouver l’argent des réparations. Avec sa petite amie (Catherine Deneuve), ils se joignent à deux autres couples dans une luxueuse villa…
Et Satan conduit le bal est un film français de Grisha Dabat, produit et scénarisé par Roger Vadim. Egyptien d’origine, ancien journaliste, co-fondateur du fameux club Objectif 49 (1), Grisha Dabat n’a réalisé qu’un seul long métrage. On ne peut dire qu’il est très réussi. Il s’agit d’un marivaudage entre couples mais le manque d’enjeu et de développement le rend assez insipide. La mise en scène n’est pas plus remarquable, quelques tentatives d’effets de caméra ou de montage font même sourire. Dans ce film très Nouvelle Vague, le plateau d’acteurs est finalement le plus intéressant et la photographie est signée Raoul Coutard.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Françoise Brion, Catherine Deneuve, Bernadette Lafont, Jacques Doniol-Valcroze, Henri-Jacques Huet, Jacques Perrin, Jacques Monod
Voir la fiche du film et la filmographie de Grisha Dabat sur le site IMDB.

Remarque :
* Dans son passionnant livre d’entretiens avec Bernard Bastide, Bernadette Laffont raconte que Catherine Deneuve, qui n’était pas encore connue, était alors en couple avec Vadim qui aimait toujours Annette Stroyberg (Annette Vadim), sa précédente compagne. « Dans le film, elle a sa coiffure et ses vêtements, un aspect très Bardot qui ne lui allait pas du tout… »

(1) Objectif 49 est un ciné-club fondé fin 1948 par André Bazin (avec l’aide d’Astruc, Kast, Doniol-Valcroze et Claude Mauriac) sous l’impulsion de Jean Cocteau pour montrer des films nouveaux et/ou mal distribués au lieu des habituels « grands classiques ». Voir un livre sur Objectif 49

Et Satan conduit le balJacques Perrin et Catherine Deneuve dans Et Satan conduit le bal de Grisha Dabat.

4 septembre 2019

Moderato cantabile (1960) de Peter Brook

Moderato cantabileDans une ville portuaire des bords de la Gironde, Anne Desbaresdes a l’habitude d’assister aux cours de piano de son jeune fils. Pendant l’une d’elle, une femme est assassinée dans un café proche. C’est un crime passionnel. Cherchant à en savoir plus, elle fait la rencontre d’un ancien employé de l’usine de son mari…
Moderato cantabile est adapté du roman du même nom de Marguerite Duras paru en 1958, ouvrage parfois considéré comme faisant partie des œuvres les plus réussies du Nouveau Roman. L’auteure en a coécrit l’adaptation avec Gérard Jarlot. L’anglais Peter Brook reste ainsi très fidèle à l’œuvre et ne suit pas une trame narrative forte mais plutôt s’attache à créer une atmosphère. Les deux personnages cherchent l’amour mais en ont chacun une vision personnelle. Leurs rencontres sont en apparence banales mais elles sont marquées par un désir trouble. Très belle interprétation de Jeanne Moreau et du jeune Belmondo. Un film très sobre.
Elle: 3 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jeanne Moreau, Jean-Paul Belmondo
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Remarques :
* Prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes 1960 pour Jeanne Moreau (ex-aequo avec Mélina Mercouri pour Jamais le dimanche de Jules Dassin).
* Le film est souvent assimilé à la Nouvelle Vague.

Moderato cantabileJean-Paul Belmondo et Jeanne Moreau dans Moderato cantabile de Peter Brook.

23 novembre 2018

Taipei Story (1985) de Edward Yang

Titre original : « Qing mei zhu ma »

Taipei StoryChin et Lung sont très proches depuis le lycée mais n’arrivent pas à franchir le pas et à se marier ou à vivre ensemble. Chin travaille comme assistante d’une femme cadre supérieur et vient d’emménager dans un appartement pour se libérer de l’emprise familiale. Lung, qui connut son heure de gloire en  star locale du baseball, tient une boutique de tissus mais a bon espoir de monter une affaire aux Etats-Unis avec son beau-frère…
Réalisé en 1985, Taipei Story est un film majeur de la nouvelle vague taïwanaise. Il n’est sorti en France qu’en 2017, après restauration. Il décrit les atermoiements de ses deux personnages principaux au moment de prendre des décisions importantes dans leur vie. Taiwan est un monde bruyant où la modernité s’installe très (trop) rapidement sous les influences japonaises et américaines. Le propos n’est pas noir, mais il est bien gris du fait de cette grande difficulté des personnages à se forger un futur. Le film est assez lent avec des plans aux cadrages travaillés, et une économie souvent frustrante de dialogues qui finit, il faut bien l’avouer, par engendrer un certain ennui. Le rôle principal est tenu par le réalisateur Hou Hsiao-hsien.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Tsai Chin, Hou Hsiao-Hsien
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Taipei Story
Lin Hsiu-ling et Tsai Chin dans Taipei Story de Edward Yang.

Taipei Story
Hou Hsiao-Hsien dans Taipei Story de Edward Yang.

11 octobre 2018

Les distractions (1960) de Jacques Dupont

Les distractionsReporter-photographe, Paul Frapier vient en aide à son ancien ami Laurent recherché pour meurtre. Ils furent tous deux parachutistes en Algérie et restent liés par une indéfectible amitié…
Adapté d’un roman de Jean Bassan, Les distractions a été tourné quelques mois seulement après A bout de souffle et force est de constater qu’il présente bien des similitudes avec le film de Godard qui a manifestement servi de modèle. Jean-Paul Belmondo y interprète de nouveau un jeune type amoral et blasé, très égocentrique dans ses rapports avec les personnes qui l’entourent, notamment les femmes. Le film est centré sur ce portrait, l’intrigue policière passant au second plan ce qui ne laisse à Claude Brasseur que bien peu de place. Jacques Dupont, se laissant porter par la Nouvelle Vague, ne montre pas une grande originalité dans sa réalisation et se perd un peu dans les méandres des misères sentimentales que son personnage occasionne. On retrouve toutefois avec plaisir l’atmosphère du Paris de 1960 avec quelques images nocturnes du meilleur effet.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jean-Paul Belmondo, Alexandra Stewart, Sylva Koscina, Claude Brasseur, Mireille Darc
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Remarque :
* Les Distractions est le second (et ultime) long métrage de Jacques Dupont, auparavant spécialisé dans les courts métrages ethnographiques sur l’Afrique.

Les distractions
Jean-Paul Belmondo et Alexandra Stewart dans Les distractions de Jacques Dupont.

Les distractions
Alexandra Stewart et Mireille Darc (son premier rôle au cinéma) dans Les distractions de Jacques Dupont.

13 mars 2018

Quarante tueurs (1957) de Samuel Fuller

Titre original : « Forty Guns »

Quarante tueursGriff Bonnel, accompagné de ses frères Wes et Chico, arrive à Tombstone où la puissante propriétaire terrienne Jessica Drummond fait la loi à la tête d’une petite troupe de quarante hommes. Elle a aussi un jeune frère qui estropie par jeu un adjoint du shérif. Griff le maitrise et le met sous les verrous…
A sa sortie, Forty Guns était un western unique en son genre et soixante ans plus tard il l’est tout autant. Tourné rapidement avec un budget très faible, c’est un film d’auteur qui privilégie le style sur le déroulement du récit. L’histoire est surtout celle d’un amour impossible : il ne faut pas attendre un film d’action. Samuel Fuller réussit de nombreux plans mémorables, à commencer par une scène d’introduction pleine de furie qui nous laisse abasourdi. Il traite les scènes classiques du western (duels, chevauchées, etc.) de façon franchement inédite : le duel final est ainsi dans toutes les mémoires (de ceux qui l’ont vu…) Le plus remarquable est dans la simplicité de ses solutions qui nécessitent toutefois une grande maitrise technique. Inévitablement, certains spectateurs seront certainement déroutés par Forty Guns mais son style et son atmosphère le rendent assez enthousiasmant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Barbara Stanwyck, Barry Sullivan, Dean Jagger, John Ericson, Gene Barry
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Forty Guns
Barry Sullivan et Barbara Stanwyck dans Quarante tueurs de Samuel Fuller.

Remarques :
* Dans son encyclopédie sur le western, l’américain Phil Hardy qualifie Forty Guns d’ « exemple typique des différences entre les Etats-Unis et l’Europe dans le regard porté sur les productions hollywoodiennes : les américains considèrent le film comme étant franchement raté alors que les européens l’admirent pour son style et sa vigueur. »
(Ceci dit, il n’a pas fait l’unanimité en Europe : sur ce film, on retrouve globalement le clivage pro-/con- Nouvelle Vague).

* Barbara Stanwyck, 49 ans au moment du tournage, a toujours été une intrépide cavalière. Lorsque sa doublure a jugé trop dangereux de se laisser trainer au sol par un cheval au galop, l’actrice n’a pas hésité à le faire elle-même. Elle en est sortie indemne, avec tout de même ecchymoses et éraflures.

Forty GunsBarbara Stanwyck et John Ericson dans Quarante tueurs de Samuel Fuller.
Le duel final est unique en son genre. Samuel Fuller a expliqué dans une interview qu’initialement il avait prévu que Barbara Stanwyck soit tuée par Griff. Les studios ayant refusé cette fin, il a alors trouvé un moyen très original de ne pas retourner la scène.

Forty GunsEve Brent dans Quarante tueurs de Samuel Fuller.
Célèbre plan où le frère de Griff regarde la jeune et jolie armurière à travers le canon d’un fusil (démonté). Jean-Luc Godard fera un clin d’oeil à cette scène dans A bout de souffle lorsque Belmondo regarde Jean Seberg à travers un magazine roulé.
Parmi les autres scènes mémorables, il faut citer le long travelling sur Barry Sullivan marchant à travers la ville.

Quarante tueursBarry Sullivan et Barbara Stanwyck dans Quarante tueurs de Samuel Fuller.

1 mars 2018

Monika (1953) de Ingmar Bergman

Titre original : « Sommaren med Monika »
Autres titres français : « Un été avec Monika », « Monika et le désir »

MonikaPeu après s’être rencontrés, Harry, garçon livreur, et Monika, ouvrière dans un magasin d’alimentation, décident de quitter la ville de Stockholm. Ils se rendent sur l’île d’Ornö où ils mènent une vie libre et idyllique…
Ingmar Bergman a tourné Monika avec très peu de moyens alors qu’il traversait une période délicate (qui l’avait contraint à tourner des films publicitaires). L’histoire, adaptée d’un roman de Per Anders Fogelström, est très simple mais ce qui rend le film si remarquable est la façon dont Bergman l’aborde en privilégiant les personnages sur le récit. Sa caméra nous place au milieu d’eux, elle semble vouloir nous placer en troisième personnage comme en témoigne le long et célèbre regard-caméra. Avec le recul, il est étonnant de voir à quel point le film est précurseur de la Nouvelle Vague. Il est si en avance que les « jeunes turcs » des Cahiers du cinéma ne le remarqueront pas tout de suite : Rohmer et Godard ne le verront sous cet angle qu’en 1958, lors d’une rediffusion à la Cinémathèque. Il faut dire qu’à sa sortie ses aspects érotiques avaient pris le dessus et occulté tout le reste (érotisme qui ne saute plus vraiment aux yeux aujourd’hui mais bien réel en 1953). C’est Godard qui pointera sa valeur subversive sur le plan moral, avec une remise en cause du schéma traditionnel de la famille, et le déclarera comme étant une source d’inspiration pour le « jeune cinéma moderne ». Monika a ainsi acquis le statut de mythe…
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Harriet Andersson, Lars Ekborg
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Monika
Harriet Andersson et Lars Ekborg dans Monika de Ingmar Bergman.

Monika
Le célèbre regard-caméra d’Harriet Andersson dans Monika de Ingmar Bergman.
En 1958, Godard dit de ce plan : « Il faut avoir vu Monika rien que pour ces extraordinaires minutes où Harriet Andersson, avant de recoucher avec un type qu’elle avait plaqué, regarde fixement la caméra, ses yeux rieurs embués de désarroi, prenant le spectateur à témoin du mépris qu’elle a d’elle-même d’opter volontairement pour l’enfer contre le ciel. C’est le plan le plus triste de l’histoire du cinéma. »
On peut aussi y voir autre chose, un regard de défi, Bergman nous mettant à la place d’Harry. C’est un regard soutenu pendant de nombreuses secondes, assez inexpressif, comme vidé de tout sentiment. Monika sait ce qu’elle va faire mais ses désillusions la rendent indifférente.
Ces deux façons de voir l’héroïne ont partagé (et partagent toujours) les cinéphiles : Monika est-elle une victime qui se libère d’un cadre trop étroit ou fait-elle preuve d’un égoïsme aussi extrême que blâmable ?

Monika
Lars Ekborg et Harriet Andersson dans Monika de Ingmar Bergman.

2 juillet 2017

Bande à part (1964) de Jean-Luc Godard

Bande à partOdile raconte à Franz et Arthur que, dans la maison de sa tante où elle habite, se trouve une grosse somme d’argent appartenant semble t-il à un locataire. Les deux compères veulent cambrioler la maison pour s’en emparer… Comparé au Mépris, tourné juste avant par Jean-Luc Godard, Bande à part paraît bien plus mineur. Tournée rapidement, en noir et blanc, avec un budget réduit, cette histoire est très librement basée sur un roman de la Série Noire écrit par Dolores Hitchens. Mais l’histoire n’a que peu d’importance, c’est plutôt l’impression de liberté et d’insouciance que Godard a voulu insuffler qui tient le film. Les deux scènes les plus célèbres sont à ce titre assez emblématiques du propos : l’iconoclaste visite-éclair au Louvre et la danse du Madison improvisé. Ceci mis à part, ses personnages n’ont pas de choses très intéressantes à dire, ils revendiquent plutôt le fait de ne s’intéresser à rien et donc certaines scènes paraissent bien longues (le cours d’anglais bat tous les records). Cette liberté s’applique donc autant à Godard qu’à ses personnages, il considère qu’il n’a pas obligatoirement à intéresser le spectateur. Le film fut accueilli très fraîchement à sa sortie. En revanche, aujourd’hui, il est le plus souvent tenu en haute estime.
Elle: 1 étoile
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Anna Karina, Sami Frey, Claude Brasseur
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Remarques :
* A l’époque Jean-Luc Godard et Anna Karina sont mariés mais leur couple va mal. Anna Karina est dépressive et avec Bande à part Godard veut lui « offrir un cadeau » pour qu’elle retrouve la joie de vivre. Il lui place même une scène où elle peut chanter car elle adore cela.

* Quentin Tarantino a appelé sa maison de production A Band Apart en référence à ce film dont il est grand fan.

Bande à part
Madison : Claude Brasseur, Anna Karina et Sami Frey dans Bande à part de Jean-Luc Godard.

Bande à Part
Visiter le Louvre en moins de 45 secondes ? C’est possible. Claude Brasseur, Sami Frey et Anna Karina dans Bande à part de Jean-Luc Godard.

25 janvier 2016

Ça s’est passé à Rome (1960) de Mauro Bolognini

Titre original : « La giornata balorda »

Ça s'est passé à RomeDavid Saraceno est un jeune chômeur d’un quartier populaire qui cherche un emploi stable pour pouvoir épouser une jeune fille avec laquelle il vient d’avoir un enfant. Il se rend dans le centre de Rome et va rencontrer des personnes de divers milieux au cours d’une journée particulièrement chargée… Ça s’est passé à Rome est un film assez rare de Mauro Bolognini. Tiré des Nouvelles Romaines d’Alberto Moravia, le scénario a été écrit par Pier Paolo Pasolini (*). Ça s’est passé à Rome est ainsi dans le même esprit que Les Garçons (1959) : le film est ancré dans le néo-réalisme mais avec une certaine recherche esthétique et une approche similaire à celle de la Nouvelle Vague. La caméra est mobile, tournant le plus souvent en décors naturels, et nous suivons les déambulations de ce jeune romain, avec pour accompagnement la musique jazz de Piero Piccioni. A la différence des héros du film Les Garçons, le jeune David désire trouver un vrai travail honnête et durable mais, balloté entre les bureaux et les vagues promesses, il va découvrir la corruption de la société et même une certaine injustice. Lui-même oscille encore entre l’insouciance de la jeunesse avec ses quêtes amoureuses et le sentiment de responsabilité de père d’un nouveau-né. C’est le français Jean Sorel qui incarne avec une belle présence ce jeune aspirant à une vie meilleure. Le film fut mutilé et interdit en Italie, officiellement pour « amoralité » mais surtout parce qu’il était contraire aux valeurs que le gouvernement italien cherchait à insuffler.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Jean Sorel, Lea Massari, Jeanne Valérie
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Remarque :
* La scène d’ouverture du film est absolument superbe : il s’agit un lent traveling-avant en contre-plongée (quasi-verticale) entre deux rangées d’immeubles populaires reliées par des passerelles à chaque étage et le linge à sécher, avec les gens qui s’interpellent, certains habitants regardant la caméra depuis les passerelles, le tout sur la musique de Piero Piccioni. L’image est à la fois imposante et fascinante… un spectacle impressionnant. Magistral.

(*) Pasolini a écrit pour Bolognini pour quatre films entre 1958 et 60 : Les Jeunes Maris, Les Garçons, Ça s’est passé à Rome et Le Bel Antonio. Il est ici assisté de Marco Visconti (aucune relation de parenté avec le réalisateur Luchino Visconti).

Ca s'est passé à Rome
Jeanne Valérie et Jean Sorel dans Ça s’est passé à Rome de Mauro Bolognini

Ca s'est passé à Rome
Jean Sorel (ci-dessus) a de quoi troubler Lea Massari (ci-dessous) dans Ça s’est passé à Rome de Mauro Bolognini…
Ca s'est passé à Rome

12 octobre 2015

Contes cruels de la jeunesse (1960) de Nagisa Ôshima

Titre original : « Seishun zankoku monogatari »

Contes cruels de la jeunesseLa jeune Makoto rencontre l’étudiant Kiyoshi lorsqu’il la sauve des griffes d’un homme qui tentait d’abuser d’elle. Kiyoshi en profite pour dépouiller l’homme. L’épisode leur donne l’idée de répéter le scénario pour racketter des hommes d’âge mûr… Découvert très tardivement en France (1), Contes cruels de la jeunesse fait partie des premiers films de la Nouvelle Vague japonaise. Il fut par exemple tourné au moment-même où Godard réalisait A bout de souffle. Nagisa Ôshima n’a alors que 28 ans et sort des sentiers battus et du cinéma codifié non seulement par son sujet, montrer le malaise de sa génération au travers des errances criminelles d’un très jeune couple, mais aussi par sa façon de le traiter : il filme en décors naturels dans la rue en utilisant, chose rarissime pour du format Scope à l’époque, une caméra à l’épaule. Ses parti-pris esthétiques sont assez radicaux, refusant la couleur verte qui « apaise et affadit les sentiments », préférant des couleurs assez saturées, et usant largement de gros plans, de décadrages. Les intérieurs sont assez oppressant et l’atmosphère générale est plutôt dérangeante, traduction du désenchantement de ses deux personnages principaux. Les aspects novateurs de Contes cruels de la jeunesse le rendent vraiment remarquable, même un demi-siècle plus tard.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Miyuki Kuwano, Yûsuke Kawazu
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Contes cruels de la jeunesse
Yûsuke Kawazu et Miyuki Kuwano dans Contes cruels de la jeunesse de Nagisa Ôshima.

Remarque :
Yûsuke Kawazu était également l’un des acteurs principaux du très beau film Bon à rien (Rokudenashi) de Yoshishige Yoshida (1960), film de la Nouvelle Vague qui sortit sur les écrans à quelques semaines d’intervalle.

(1) Le film n’est sorti en France qu’en 1986. Il a été récemment redécouvert à Cannes en 2014 dans une version restaurée.

5 octobre 2014

La Sonate à Kreutzer (1956) de Eric Rohmer

La sonate à Kreutzer(Moyen métrage de 46 mn) Parvenu à une certaine réussite dans son métier, un architecte (Eric Rohmer) considère qu’il doit se marier pour parfaire sa position sociale. Il jette son dévolu sur une jeune fille effacée et plutôt solitaire… Librement adapté d’une nouvelle de Tolstoï, La Sonate à Kreutzer d’Eric Rohmer a longtemps été considéré comme perdu. Fait avec peu de moyens, c’est un film assez sombre sur un homme très conformiste dont le seul souci est la représentation sociale. Eric Rohmer en interprète le rôle principal avec sa longue, et parfois inquiétante, silhouette longiligne. Il n’y a pas de son direct ; la bande sonore est bâtie autour du récit en voix-off du personnage qui se raconte (et s’analyse) sur un fond musical (reprenant la Sonate pour violon et piano nº9 de Beethoven, dite La Sonate à Kreutzer). Outre le fait de nous faire assister à la naissance d’un grand cinéaste, ce film de jeunesse nous plonge dans l’atmosphère de la petite équipe qui marquera tant la Nouvelle Vague.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Eric Rohmer, Jean-Claude Brialy, Françoise Martinelli
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Remarque :
Dans la séquence se déroulant dans les bureaux des Cahiers du cinéma, on peut voir toute l’équipe des Cahiers de cette époque : Bazin, Godard, Rohmer, Chabrol, Truffaut et Charles Bitsch…

La Sonate à KreutzerJean-Claude Brialy et Eric Rohmer dans La Sonate à Kreutzer de Eric Rohmer.