29 septembre 2014

Chicago (1931) de Tay Garnett

Titre original : « Bad Company »

ChicagoUn jeune avocat qui travaille pour la pègre désire se retirer pour pouvoir se marier avec une jeune femme sans savoir qu’elle n’est autre que la soeur du concurrent de son patron. Le mariage est toutefois autorisé afin de faire cesser la lutte entre les deux gangs… Si Bad Company est un film qui a été plutôt mal perçu à sa sortie, il est considéré aujourd’hui comme l’un des plus particuliers des gangster films du début des années trente. En un sens, on peut trouver qu’il préfigure Le Parrain car il se focalise plus les relations humaines à l’intérieur d’une famille de la pègre et les implications psychologiques des crimes commis que sur l’action et les coups d’éclats. Comme pour compenser ce fait, Tay Garnett a concocté une scène finale qui a marqué les esprits : un duel furieux à la mitraillette de plusieurs minutes. Chicago Mais le plus intéressant est certainement le portrait du caïd Goldie, psychopathe au comportement névrotique, et aussi celui de cette jeune femme qui découvre avec effroi que non seulement elle a épousé un gangster mais aussi qu’elle vient elle-même de ce milieu. On pourra noter l’influence des expressionnistes notamment dans cette scène où l’ombre d’une main géante se profile au-dessus du personnage principal sur le point de tomber dans un piège.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Helen Twelvetrees, Ricardo Cortez, John Garrick, Frank Conroy
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Chicago (Bad Company)Helen Twelvetrees et Ricardo Cortez dans Chicago (Bad Company) de Tay Garnett.

Homonymes :
Chicago de Franck Urson (1927) avec Phyllis Haver
Chicago de Rob Marshall (2002) avec Catherine Zeta-Jones et Renée Zellweger
Bad Company de Robert Benton (1972) avec Jeff Bridges
Bad Company (Duo mortel) de Damian Harris (1995) avec Laurence Fishburne
Bad Company de Joel Schumacher (2002) avec Anthony Hopkins

24 septembre 2014

Meurtre d’un bookmaker chinois (1976) de John Cassavetes

Titre original : « The Killing of a Chinese Bookie »

Meurtre d'un bookmaker chinoisCosmo est le propriétaire d’une boite de striptease un peu minable en Californie. Pour payer une dette de jeu à la Mafia, il se voit proposer d’aller tuer un riche bookmaker chinois bien protégé…
A l’énoncé du début de l’histoire de Meurtre d’un bookmaker chinois, on peut s’attendre à un film noir assez classique. Le film de John Cassavetes n’a toutefois rien de conventionnel. L’intrigue et le suspense ne sont ici qu’une toile de fond, ce qui intéresse Cassavetes est de dresser le portrait de son personnage principal, un portrait finalement assez complexe. Cosmo est à la fois lucide et naïf, un hédoniste nageant dans le mauvais goût, paternaliste avec ses girls avec lesquelles il entretient des rapports d’amitié voire plus ; il veut jouir de la vie. Ce type de personnage est tout à fait à l’opposé de ceux que l’on rencontre traditionnellement dans les films noirs. Les truands le sont sans doute un peu moins mais Cassavetes les montre plus vrais que nature, sans édulcoration. John Cassavetes a une fois de plus une approche très personnelle qui rend son film assez unique.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Ben Gazzara, Timothy Carey, Seymour Cassel
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Meurtre d'un bookmaker chinois (The Killing of a Chinese Bookie)Ben Gazzara dans Meurtre d’un bookmaker chinois (The Killing of a Chinese Bookie) de John Cassavetes.

14 septembre 2014

L’ami américain (1977) de Wim Wenders

Titre original : « Der amerikanische Freund »

L'ami américainArtisan encadreur de Hambourg, Jonathan est atteint d’une maladie grave. Après avoir fait la connaissance d’un américain solitaire, trafiquant de toiles contrefaites, il est contacté par un français qui lui propose une forte somme d’argent pour assurer l’avenir de sa famille. En contrepartie, il doit accomplir un meurtre… Que Wim Wenders, le réalisateur de balades mélancoliques comme Alice dans les villes, adapte un roman policier de Patricia Highsmith a tout d’abord quelque peu surpris. Mais L’ami américain n’a rien d’un film de genre car ce n’est pas tant l’intrigue policière qui a intéressé Wenders. Et si l’amour que le cinéaste allemand porte au cinéma américain est bien là, le résultat porte plus que tout son empreinte. L’ami américain est une errance entre Hambourg, Paris et New York baignée d’une belle atmosphère et merveilleusement photographié par Robby Müller (Wim Wenders dit avoir été inspiré par les toiles d’Edward Hopper). On y retrouve aussi le thème du cowboy solitaire et surtout celui de la mort (sous toutes ses formes : la fausse, la vraie, la supposée, l’attendue). L’ami américain a été diversement reçu à sa sortie car il ne cadrait pas exactement avec ce que l’on attendait de Wenders, il est mieux considéré aujourd’hui : avec le recul, on mesure à quel point il s’inscrit pleinement dans sa filmographie car il en a fait une oeuvre très personnelle.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Dennis Hopper, Bruno Ganz, Lisa Kreuzer, Gérard Blain
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Remarques :
* Pas de moins de 7 réalisateurs apparaissent dans L’ami américain :
1) Nicholas Ray (le peintre, prétendument mort, émigré à New York) qui se déguise en John Ford vers la fin du film. 2) Samuel Fuller (dans le train, l’homme âgé de la Mafia). 3) Jean Eustache (l’homme rencontré dans le bar français qui lui met un pansement). 4) L’allemand Peter Lilienthal (Marcangelo, celui qui présente Dennis Hopper à Bruno Ganz à la salle des ventes). 5) Le suisse Daniel Schmid (l’homme à assassiner dans le métro). 6) L’écossais Alexander (ou Sandy) Whitelaw (le médecin parisien). 7) Gérard Blain (le commanditaire français).
On peut même en ajouter un huitième puisque le blessé tout enrubanné de bandages dans l’ambulance n’est autre que Wim Wenders lui-même !

* Le journal que tient Daniel Schmid, l’homme à assassiner dans le métro, est le numéro de Libération qui annonçait la mort d’Henri Langlois (décédé le 13 janvier 1977). Le film lui est dédié.

* L’ami américain est adapté principalement du roman Ripley s’amuse de Patricia Highsmith mais aussi de Ripley et les ombres. Le premier des deux a été également adapté par Liliana Cavani en 2002 : Ripley’s Game (Ripley s’amuse).

L'ami américain (Der amerikanische Freund)Bruno Ganz et Dennis Hopper dans L’ami américain (Der amerikanische Freund) de Wim Wenders.

27 mai 2014

Mafioso (1962) de Alberto Lattuada

MafiosoAntonio, qui vit et travaille à Milan dans le nord de l’Italie, se fait une fête de profiter de ses vacances pour montrer à sa femme son village natal de Sicile et ses parents. Il y revoit tous ses anciens amis et aussi le respecté Don Vincenzo… Tourné en 1962, en plein âge d’or du cinéma italien, Mafioso est un film assez étonnant par son mélange de peinture sociale et d’intrigue policière. Le scénario est l’oeuvre de quatre scénaristes, dont le fameux tandem Agenore Incrocci / Furio Scarpelli et Marco Ferreri. Le film dresse un portrait haut en couleur de la Sicile, proche de la satire sociale, oscillant entre humour (exubérance des rapports humains, pittoresque qui confine parfois au ridicule) et un certain réalisme (nous sommes en effet loin de la révolution industrielle qui fait la richesse du nord de l’Italie). La bienveillance montre ses limites quand il s’agit de montrer la rigidité des règles sociales et surtout la main mise de la Mafia : la façon dont elle parvient à faire exécuter ses basses besognes par n’importe qui est particulièrement bien en relief, ce qui fait de Mafioso l’un des premiers films à montrer, de l’intérieur, le fonctionnement de cette organisation criminelle. Ce mélange de comédie et de tragique, si caractéristique au cinéma italien, trouve ici l’un de ses plus belles illustrations. La réalisation d’Alberto Lattuada est assez simple, le plus souvent en plan large. Le film doit beaucoup à Alberto Sordi, présent dans pratiquement toutes les scènes ; il excelle dans les différents registres.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Alberto Sordi, Norma Bengell, Gabriella Conti, Ugo Attanasio
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28 janvier 2014

Gloria (1980) de John Cassavetes

GloriaAlors que les tueurs de la Mafia sont au pied de son immeuble pour le tuer, un comptable de la Mafia qui a « trahi » confie à une voisine son jeune fils de six ans ainsi qu’un livre compromettant…
Gloria est un film assez à part dans la filmographie de John Cassavetes. S’il a bien écrit lui-même cette histoire de Mafia, c’était originellement pour la vendre à Columbia et c’est lorsque le rôle échût à Gena Rowlands que Cassavetes fut intéressé pour la tourner lui-même (1). La lutte d’une personne seule contre la Mafia n’est pas un thème très nouveau au cinéma mais le traitement de Cassavetes est assez remarquable. Le résultat est en effet très différent des normes habituelles et pourtant le film a son lot de scènes d’action, des poussées assez brutales qui sont d’autant plus inattendues qu’elles viennent d’une femme à l’apparence très classique. Gloria est avant tout le portrait d’une femme et des liens qu’elle noue avec ce garçon de six ans qui l’encombre. Son passé quelque peu tumultueux semble la pousser vers une certaine normalité, à recréer un semblant de famille. C’est aussi un film très réaliste, tourné parfois en décors naturels au milieu de la foule, Cassavetes allant jusqu’à faire jouer de vrais truands. Il semble vouloir nous montrer l’envers du décor. La performance de Gena Rowlands est assez spectaculaire, exprimant une force peu commune. Le jeu du jeune garçon n’est pas toujours à la hauteur mais cela a le mérite d’accentuer le côté monolithique de son personnage. La fin est plutôt énigmatique, il est même assez difficile de deviner les intentions de Cassavetes.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gena Rowlands, John Adames
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Remarque :
* L’héroïne se prénomme Gloria Swenson, c’est à dire le nom à une lettre près le nom de la célèbre actrice du cinéma muet Gloria Swanson.
* Le jeune John Adames n’a joué dans aucun autre film après Gloria.

Remake (raté) :
Gloria de Sidney Lumet (1999) avec Sharon Stone

(1) Il faut rappeler que Gena Rowlands et John Cassavetes étaient mari et femme.

16 septembre 2013

Lucia et les gouapes (1974) de Pasquale Squitieri

Titre original : « I guappi »

Lucia et les gouapesDans le Naples de la fin du XIXe siècle, le jeune Nicola Bellizzi revient dans son quartier après un séjour en prison. Il a la ferme intention de changer de vie et d’étudier pour devenir avocat. Rapidement, il se heurte au chef mafieux du quartier avec lequel il va devenir ami… La Camorra est le sujet de prédilection de Pasquale Squitieri qui lui a consacré plusieurs films. La Mafia aurait eu un oeil sur la production de Lucia et les gouapes et, si c’est effectivement le cas, elle avait tout lieu d’être satisfaite du résultat car le portrait est plutôt flatteur : le scénario met l’accent sur le code d’honneur, les chefs mafieux font peu de choses répréhensibles, en revanche la violence des policiers est extrême (scènes de torture). Le fond du propos est d’affirmer que la Camorra n’existe que parce que l’état est défaillant, laissant les gens dans la misère. Le scénario est assez répétitif et prévisible, les personnages mal définis ; la réalisation n’a rien de remarquable, sombrant souvent dans l’excès de lyrisme avec une musique grandiloquente. Claudia Cardinale ne semble pas très présente mais son charme naturel opère pleinement lors de ses trop rares apparitions.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Claudia Cardinale, Franco Nero, Fabio Testi, Raymond Pellegrin
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Remarques :
* Gouape = voyou
* Après le divorce de l’actrice en 1975, Claudia Cardinale et Pasquale Squitieri vivront ensemble. C’est encore le cas aujourd’hui.