7 décembre 2016

La Planète des singes (1968) de Franklin J. Schaffner

Titre original : « Planet of the Apes »

La Planète des singesParti en 1972, un vaisseau spatial emporte ses quatre membres d’équipage à une vitesse proche de celle de la lumière. Au terme d’un voyage de 18 mois, équivalent à 2000 années terrestres (selon la théorie de la relativité restreinte), ils atterrissent en catastrophe sur une mystérieuse planète, au cœur d’une région désertique. Ils vont découvrir que ce monde est peuplé d’hommes primitifs dominés par une race de singes très évolués… Adapté du roman de Pierre Boulle, La Planète des singes est l’un des films de science-fiction les plus célèbres. Il est hélas souvent réduit à sa dernière scène, un puissant twist final qui donne un sens différent à tout ce qui le précède, mais le film est en réalité bien plus riche. Procédant par inversion des situations, La Planète des singes est une inépuisable source de réflexions philosophiques. Il aborde un nombre impressionnant de thèmes différents : le racisme, la place de la science, le rôle de la religion, la nature de l’homme, les chasses aux sorcières, la vivisection et il nous alerte sur les dangers de la prolifération des armes (nous sommes alors en pleine Guerre froide). Les studios ne croyaient guère dans le projet et le budget fut donc limité, réduisant la ville des singes à un petit village (inspiré de Gaudí). L’utilisation habile de décors naturels et les maquillages élaborés donnent beaucoup de force au film. Son impact visuel est puissant. Le succès fut important ce qui poussa Hollywood à faire de multiples suites, pas toujours avec bonheur…
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Charlton Heston, Roddy McDowall, Kim Hunter, Maurice Evans, Linda Harrison
Voir la fiche du film et la filmographie de Franklin J. Schaffner sur le site IMDB.

Voir les livres sur la Planète des singes

Remarques :
* L’adaptation du roman de Pierre Boulle a été écrite par Rod Serling, le créateur de La Quatrième Dimension, et Michael Wilson.
* Le scénariste Michael Wilson a été victime du maccarthysme : il est passé devant le House Un-American Activities Committee avnt d’être inscrit en 1951 sur la liste noire de Hollywood. C’est lui qui a eu l’idée d’ajouter la scène de simulacre de procès.

La Planète des singes
Scène de fin de chasse dans La Planète des singes de Franklin J. Schaffner.

La Planète des Singes
Charlton Heston, Linda Harrison, Kim Hunter, Roddy McDowall et Lou Wagner dans La Planète des singes de Franklin J. Schaffner.

La Planète des singes
L’homme en captivité dans La Planète des singes de Franklin J. Schaffner.

Tous les films :
A) Cinq films de 1968 à 1973 :
La Planète des singes (Planet of the Apes) (1968) de Franklin J. Schaffner
Le Secret de la planète des singes (Beneath the Planet of the Apes) (1970) de Ted Post
Les Évadés de la planète des singes (Escape From the Planet of the Apes) (1971) de Don Taylor
La Conquête de la planète des singes (Conquest of the Planet of the Apes) (1972) de J. Lee Thompson
La Bataille de la planète des singes (Battle for the Planet of the Apes) (1973) de J. Lee Thompson.

B) Nouvelle adaptation du roman :
La Planète des singes (Planet of the Apes) (2001) de Tim Burton.

C) Série « Reboot » :
La Planète des singes : Les Origines (Rise of the Planet of the Apes) (2011) de Rupert Wyatt
La Planète des singes : L’Affrontement (Dawn of the Planet of the Apes) (2014) de Matt Reeves
La Planète des singes : Suprématie (War for the Planet of the Apes) (2017) de Matt Reeves.

 

La Planète des Singes : le maquillage
Roddy McDowall en pleine séance de maquillage (4h30 tous les jours) pour La Planète des singes de Franklin J. Schaffner.

La Planète des Singes : Kim Hunter
Kim Hunter, avant et après maquillage pour La Planète des singes de Franklin J. Schaffner.

6 décembre 2016

La Chaîne (1958) de Stanley Kramer

Titre original : « The Defiant Ones »

La ChaîneDeux prisonniers parviennent à s’évader lors de l’accident du fourgon cellulaire qui les transportait. Ils sont enchainés l’un à l’autre mais ne s’estiment guère : le premier, un blanc du Sud venait de traiter l’autre de « nègre » juste avant l’accident et ils s’apprêtaient à en venir aux mains… Dix ans avant Devine qui vient dîner ?, Stanley Kramer s’attaque déjà au fléau du racisme. Qu’un acteur noir se retrouve en tête d’affiche n’a rien d’extraordinaire aujourd’hui mais, en 1958, c’était plus difficile à faire accepter. C’est ainsi une première pour Sidney Poitier : l’acteur était certes très connu alors, mais c’était toujours pour des seconds rôles. The Defiant Ones est un film puissamment antiraciste et humaniste : les deux hommes vont apprendre à s’estimer. Le film sait éviter tout manichéisme et cela le rend remarquable : par exemple, le shérif qui mène la poursuite est un humaniste qui a bien du mal à contrôler les pulsions sanguinaires de ses troupes, ou encore, l’un des personnages qui semble tout d’abord si compréhensif se révélera être le pire de tous. La présence de Tony Curtis peut surprendre. L’acteur cherchait à briser le carcan qui le cantonnait aux rôles de gentils et beaux garçons. S’il est vrai qu’il a du mal à passer pour un bagnard endurci, il a certainement donné au film une portée plus grande en permettant à beaucoup de s’identifier à lui. Les deux acteurs contribuent ainsi à rendre le film assez unique.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tony Curtis, Sidney Poitier, Theodore Bikel, Charles McGraw, Lon Chaney Jr., Cara Williams
Voir la fiche du film et la filmographie de Stanley Kramer sur le site IMDB.

Remarques :
* La chanson Long Gone (From Bowling Green), un blues de Chris Smith et William C. Handy, est chantée trois fois a cappella par Sidney Poitier lui-même.
* Sydney Poitier et Tony Curtis furent tous deux nominés pour les Oscars. Ni l’un ni l’autre ne l’emportèrent toutefois. Sidney Poitier ne recevra un Oscar qu’en 1964 pour Le Lys des Champs de Ralph Nelson et Tony Curtis n’en recevra jamais.
* The Defiant Ones reçut deux Oscars : l’un pour la photographie de Sam Levitt, l’autre pour l’écriture du scénario, ce dernier revenant à Harold Jacob Smith et à un certain Nathan E. Douglas qui n’était autre que Nedrick Young, alors sur la liste noire d’Hollywood issue du maccarthysme. Son nom ne sera rétabli qu’en… 1993 (soit 25 ans après sa mort).
* Le bruit selon lequel Robert Mitchum aurait refusé le rôle car il ne voulait pas être enchaîné avec un noir est une déformation de la réalité. Robert Mitchum, qui a une expérience personnelle de la vie de bagnard, a refusé le rôle disant qu’il n’était pas crédible qu’un blanc soit enchaîné à un noir dans le Sud ségrégationniste. C’est certainement vrai. D’ailleurs, le scénario utilise une pirouette pour le justifier : lorsque le journaliste demande « Comment un blanc peut-il se retrouver enchaîné avec un noir ? », le shérif répond : « Le directeur de la prison a un sens de l’humour très particulier ».

The Defiant Ones
Tony Curtis et Sidney Poitier dans La Chaîne de Stanley Kramer.

The Defiant Ones
Tony Curtis, Cara Williams et Sidney Poitier dans La Chaîne de Stanley Kramer.

2 décembre 2016

Trois couleurs: Blanc (1994) de Krzysztof Kieslowski

Trois couleurs: BlancPour mariage non consommé, Dominique divorce de son mari Karol, un coiffeur polonais qui se retrouve ainsi seul, sans argent, sans logement dans un pays dont il maitrise mal la langue. Pire encore, elle s’arrange pour qu’il soit recherché par la police pour avoir incendié son salon de coiffure. Il parvient à rentrer clandestinement en Pologne où il va tenter de se refaire… Que Trois couleurs: Blanc, deuxième film de la trilogie de Krzysztof Kieslowski, ait pour thème l’égalité n’est pas évident à première vue. Et pour cause : le propos du cinéaste est plutôt de montrer que l’égalité n’existe pas, que nous en parlons tous mais qu’en réalité personne n’en veut. Mais, même en prenant en compte cette intention, la démonstration ne paraît guère évidente : il démontre plutôt que la cruauté engendre une cruauté encore plus forte et qu’une passion peut prendre la forme d’un long calvaire. Faut-il voir dans la scène finale (qui n’était pas originalement prévue) une certaine forme de rédemption ? Blanc est par certains aspects un film tragi-comique : son personnage principal est attachant par son côté balourd, il fait sourire parfois mais son cynisme finit par écarter toute sympathie/empathie à son égard. Le film est moins flamboyant que Bleu sur le plan esthétique, malgré l’omniprésence de la couleur blanche (il faut bien avouer que le blanc, du fait de sa faible palette de variations, se prête moins aux recherches esthétiques). Blanc est une variation bien étrange sur le thème de l’égalité.
Elle: 2 étoiles
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Zbigniew Zamachowski, Julie Delpy, Janusz Gajos
Voir la fiche du film et la filmographie de Krzysztof Kieslowski sur le site IMDB.

Voir les autres films de Krzysztof Kieslowski chroniqués sur ce blog…

Voir les livres sur Krzysztof Kieslowski

Remarque :
* A l’audience, en début de film, on aperçoit brièvement Juliette Binoche ouvrir par erreur une porte, lien discret avec le film précédent, Bleu.

Blanc
Julie Delpy dans Trois couleurs: Blanc de Krzysztof Kieslowski.

Blanc
Zbigniew Zamachowski dans Trois couleurs: Blanc de Krzysztof Kieslowski.

1 décembre 2016

Trois couleurs: Bleu (1993) de Krzysztof Kieslowski

Trois couleurs: BleuUn accident sur une route de campagne. A son réveil, Julie apprend que son mari, célèbre compositeur, et sa petite fille sont morts dans l’accident. Elle se retrouve donc seule. Elle commence par vendre tous ses biens pour aller vivre une autre vie. Elle ne garde qu’un pendule décoratif composé de perles bleues… Trois couleurs: Bleu est le premier volet de la trilogie tricolore de Krzysztof Kieslowski qui tourne pour la première hors de son pays, la Pologne. Dans ce premier opus, il explore la notion de liberté et sa relation à la mémoire : peut-on effacer sa mémoire pour (re)trouver sa liberté ? C’est la quête que s’est donnée Julie, son personnage. Mais peut-on concevoir la liberté sans mémoire ? Non, semble nous dire Kieslowski appuyant son propos par l’image de la mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer qui le rend comme prisonnière. Julie retrouvera un début d’équilibre en sachant intégrer ses souvenirs douloureux. La forme est assez brillante, Kieslowski réussissant une symbiose parfaite de tous les constituants du film. Il symbolise le deuil, et sa lancinante douleur, par de brusques (et spectaculaires) éclats musicaux. Omniprésent, le bleu est juste un parti-pris esthétique, il ne faut sans doute pas lui chercher une signification autre, la couleur bleue convenant bien au caractère froid et bien entendu à l’eau purificatrice de la piscine. L’interprétation de Juliette Binoche donne une grande intensité à son personnage.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Juliette Binoche, Benoît Régent, Emmanuelle Riva
Voir la fiche du film et la filmographie de Krzysztof Kieslowski sur le site IMDB.
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Remarque :
* Kieslowski laisse comme souvent un peu de place à un thème qui lui est cher, le hasard : un musicien de rue qui a trouvé le même thème que son mari, une rencontre fortuite avec les personnages du second volet, etc. Le thème du hasard peut paraître anodin mais c’est loin d’être le cas : l’acceptation (ou pas) de la notion-même a de fortes répercussions sur la construction de notre philosophie de vie (remarque très personnelle que vous n’êtes bien entendu pas obligé de partager…)

Trois couleurs : Bleu
Juliette Binoche dans Trois couleurs: Bleu de Krzysztof Kieslowski.