24 juillet 2023

Chambre commune (1960) de Wojciech Has

Titre original : « Wspólny pokój »

Chambre commune (Wspólny pokój)A la fin des années 1920, le jeune Lucjan arrive à Varsovie avec l’espoir de se lancer dans une carrière littéraire. Il emménage dans un appartement à pièce unique sous-loué à plusieurs personnes : il y a là un de ses amis, poète et journaliste à ses heures, un poète, deux étudiants et la sœur de l’un d’eux…
Chambre commune est un film polonais réalisé par Wojciech Has, adaptation, d’un roman de Zbigniew Unilkowski, paru en 1932, qui décrivait les membres du groupe littéraire et poétique « Kwadryga » (1). Le film décrit l’état d’esprit de l’époque de l’entre-deux guerres à travers un petit groupe de co-locataires qui passent leur temps entre leur appartement et le café. Leurs discussions sont marquées par un humour constant, qui se présente comme un dérivatif au fort pessimisme ambiant. Le sentiment d’imminence d’une catastrophe transparaît. La mise en scène de Wojciech Has est très maitrisée avec des cadrages précis et, une fois encore, de très beaux gros plans.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Mieczyslaw Gajda, Gustaw Holoubek, Adam Pawlikowski, Anna Lubienska, Beata Tyszkiewicz
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(1) Actif de 1926 à 1933, Kwadryga est un groupe d’amis, membres du Cercle littéraire de l’Université de Varsovie, créé à l’initiative de Stanisław Dobrowolski (1907-1985). Leurs poèmes, très éclectiques, s’articulent autour des postulats de l’art socialisé, de la justice sociale et de la dignité de travail. Le groupe Żagary (1931-1934) réunit les étudiants de la faculté de belles lettres polonaises de l’Université de Vilnius dont Czesław Miłosz (1911-2004), Jerzy Putrament (1910-1986), Jerzy Zagórski (1907-1984) et (pendant un moment) Stanisław Mackiewicz (1896-1966). Ils recherchent un nouveau chemin poétique, en croyant comme les symbolistes et les romantiques avant eux, à la force des symboles. Leur poésie, remplie d’anxiété, est dominée par un pressentiment funeste de la guerre. La poésie de Miłosz est plus intellectuelle, philosophique, pleine d’élan, de métaphores et des visions de l’apocalypse, tandis que le radicalisme de Putrament le conduit droit au communisme. (extrait de Wikipédia)

Chambre commune (Wspólny pokój)Mieczyslaw Gajda et Gustaw Holoubek dans Chambre commune (Wspólny pokój) de Wojciech Has.

Chambre commune (Wspólny pokój)Adam Pawlikowski et Zdzislaw Maklakiewicz dans Chambre commune (Wspólny pokój) de Wojciech Has.

Chambre commune (Wspólny pokój)Beata Tyszkiewicz et Adam Pawlikowski dans Chambre commune (Wspólny pokój) de Wojciech Has.

21 juillet 2021

Hotel by the River (2018) de Hong Sang-soo

Titre original : « Gangbyeon hotel »

Hotel by the River (Gangbyeon hotel)Dans un hôtel situé au bord du fleuve Han, près de Séoul, un poète sexagénaire fait venir ses deux fils. Il désire renouer des liens distendus car il affirme sentir qu’il va mourir. Dans le même hôtel, une jeune femme reçoit une amie qui tente de la consoler d’une rupture amoureuse…
Hotel by the River est écrit et réalisé par le sud-coréen Hong Sang-soo. C’est un film assez surprenant par son cheminement et sa forme. Les personnages sont assez désorientés et le cinéaste calque sa mise en scène et sa photographie sur leur état d’esprit avec des mouvements ou des mises au point en apparence maladroites. Il utilise merveilleusement la neige et une certaine lenteur pour créer une douceur onirique. On a souvent l’impression d’être en dehors du monde, entre le ciel et la terre. Les personnages sont en questionnement existentiel, résultat de difficultés de rapport aux autres dans le cadre d’une relation amoureuse ou simplement filiale. Sous une forme de fable poétique, le fond du propos est tout de même assez noir mais Hotel by the River est un beau film.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Ki Joo-bong, Kwon Hae-hyo, Kim Min-hee, Song Seon-mi, Yoo Joon-Sang
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Remarque :
* Très modestement, Hong Sang-soo se définit comme « un cinéaste qui n’est ni grand public, ni auteur mais qui fait ce qu’il peut » (définition qu’il met dans la bouche d’un de ses personnages à propos du fils cinéaste.

Hotel by the River (Gangbyeon hotel)Ki Joo-bong, Kim Min-hee et Song Seon-mi dans Hotel by the River (Gangbyeon hotel) de Hong Sang-soo.

Hotel by the River (Gangbyeon hotel)Ki Joo-bong, Yoo Joon-Sang et Kwon Hae-hyo dans Hotel by the River (Gangbyeon hotel) de Hong Sang-soo.

Hotel by the River (Gangbyeon hotel)Kim Min-hee et Song Seon-mi dans Hotel by the River (Gangbyeon hotel) de Hong Sang-soo.

10 février 2021

La Couleur de la grenade (1969) de Sergei Parajanov

Titre original : « Sayat Nova »

La Couleur de la grenade (Sayat Nova)La vie de Sayat-Nova (= roi des chansons), poète arménien du XVIIIe siècle, en huit chapitres…
Sayat Nova est un film soviétique réalisé par Sergueï Paradjanov. En ouverture du film, le réalisateur précise qu’il n’a pas cherché à raconter la vie de Sayat-Nova mais plutôt de recréer l’univers imagé de sa poésie. Son film prend la forme expérimentale d’une suite de tableaux vivants inspirés de miniatures arméniennes et persanes, remplis de symboles et de métaphores. Hélas, la signification de ces tableaux échappe totalement au spectateur non initié à cette civilisation, spectateur qui ne peut alors que se laisser glisser dans cet univers visuel sans en trouver le sens. Certains tableaux sont très beaux. Paradjanov a adopté une représentation sans profondeur à la façon des miniatures de l’époque. Le film est presque muet. Un film qu’il faut certainement étudier bien plus profondément pour pouvoir l’apprécier vraiment.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Sofiko Chiaureli
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Remarques :
* Dans la démarche et les intentions, le film peut être rapproché de l’Andreï Roublev (1966) de Tarkovski mais la forme est bien plus expérimentale et l’ensemble plus difficile d’accès pour le profane.
* Distribué une première fois en 1969, le film Sayat Nova est rapidement retiré des écrans puis, à nouveau, diffusé dans une version remontée et abrégée par le réalisateur Serguei Youtkevitch, sous le titre La Couleur de la grenade en 1971.

* Les huit chapitres :
I : L’enfance du poète.
II : La jeunesse du poète.
III : Le poète à la cour du prince/Prière avant la chasse.
IV : Le poète se retire au monastère/Le sacrifice/La mort du katholikos.
V : Le songe du poète/Le poète retourne à son enfance et pleure la mort de ses parents.
VI : La vieillesse du poète/Il quitte le monastère.
VII : Rencontre avec l’Ange de la Résurrection/Le poète enterre son amour.
VIII : La mort du poète/Il meurt mais sa poésie est immortelle.

La Couleur de la grenade (Sayat Nova)La Couleur de la grenade (Sayat Nova) de Sergei Parajanov.

18 septembre 2020

Neruda (2016) de Pablo Larraín

NerudaChili, 1948. Au Congrès, le sénateur Pablo Neruda, membre du parti communiste, critique ouvertement le gouvernement populiste en place. Le président Videla demande alors sa destitution et confie au redoutable inspecteur Óscar Peluchonneau le soin de procéder son arrestation. Le poète doit alors se cacher…
Contrairement aux apparences, Neruda de Pablo Larrain n’est pas un biopic. Il est en effet bien éloigné du format de ce genre très codifié. Les faits sont globalement réels, Pablo Neruda a été bien été longuement recherché par la police chilienne en 1948-49, mais le déroulement de cette traque est aménagé pour s’inscrire dans l’univers poétique de l’écrivain. Cette approche, bien plus créatrice qu’un biopic classique, nous permet de mieux le connaitre en approchant son imaginaire, son processus de création. Le policier est à la fois inquiétant et apitoyant, cocktail difficile à réaliser ; il est autant fantasmé que réel. Avec Neruda, Pablo Lorrain signe un très beau film, digne de son sujet.
Elle: 4 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Luis Gnecco, Gael García Bernal, Mercedes Morán
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NerudaLuis Gnecco dans Neruda de Pablo Larraín.

Homonyme :
Neruda du chilien Manuel Basoalto (2014) avec José Secall.

4 avril 2016

The Lost Moment (1947) de Martin Gabel

Titre français parfois utilisé : « Moments perdus »

Moments perdusPrêt à tout, un éditeur américain se rend à Venise pour tenter de récupérer les lettres d’amour d’un célèbre poète décédé. La destinataire de ces lettres vit toujours, âgée de 105 ans. Sous une fausse identité, l’éditeur parvient à sous-louer une chambre dans la demeure où elle vit avec sa jeune nièce très distante… Produit par Walter Wanger, The Lost Moment est une adaptation de l’une des nouvelles les plus célèbres d’Henry James, Les Papiers d’Aspern. Son point fort n’est pas dans son interprétation : Susan Hayward a sans aucun doute un jeu trop marqué dans son effort de paraître mystérieuse, Robert Cummings est un peu fade et le rôle d’Agnes Moorehead, dont le visage est à peine visible et en tous cas méconnaissable, se réduit à marmonner quelques phrases. Non, si le film est si attirant et même fascinant, c’est grâce à l’atmosphère générale qui se dégage de l’histoire et de ses décors : presque tout le film se déroule au sein d’une mystérieuse et vaste demeure vénitienne donnant sur le canal. Cette atmosphère paraît être en équilibre entre le rêve et fantastique sans franchement tomber dans l’un ou l’autre. C’est assez superbe. Ce film, qui n’eut que peu succès à sa sortie et qui n’est jamais sorti en France, mérite largement d’être découvert.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Robert Cummings, Susan Hayward, Agnes Moorehead, Joan Lorring, Eduardo Ciannelli
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Remarques :
* The Lost Moment est l’unique réalisation de Martin Gabel qui fut l’un des compagnons d’Orson Welles dans la Mercury Theatre Company à la fin des années trente. Il a ensuite fait une carrière d’acteur. Ses rôles les plus marquants furent en gangster dans le remake de M par Joseph Losey (1951) et dans Bas les masques de Richard Brooks (1952). On le voit aussi dans Marnie d’Alfred Hitchcock.

* Le poète est supposé être Percy Shelley (1792-1822). Le petit portrait que l’on voit dans le film lui ressemble fortement. Henry James a dit être parti d’une anecdote au sujet d’un admirateur de Shelley.

* L’histoire est simplifiée car, dans la nouvelle de James, la nièce n’est pas une beauté comme peut l’être Susan Hayward, bien au contraire.

The Lost Moment
Robert Cummings et Agnes Moorehead dans The Lost Moment de Martin Gabel.

The Lost Moment
Susan Hayward dans The Lost Moment de Martin Gabel.

The Lost Moment
Robert Cummings dans The Lost Moment de Martin Gabel.

26 avril 2012

La vie de bohème (1945) de Marcel L’Herbier

La vie de bohèmeDans le Quartier Latin des années 1840, quatre jeunes artistes sans le sou vivent difficilement mais gaiment. Ils se nomment « les mousquetaires de la bohème ». Rodolphe, le poète, fait la rencontre de Mimi… La vie de bohème est adapté du roman autobiographique d’Henry Murger (Rodolphe dans le film), roman mis en opéra par Puccini en 1896 (« La Bohème »). Marcel L’Herbier a tourné cette grande production en 1942 sous l’Occupation mais la lenteur du montage ne permettra de ne le sortir qu’en 1945. Malgré toutes les restrictions, le film bénéficie de décors soignés et d’une certaine ampleur. Le film commence de façon tourbillonnante (tonitruante même), sur le registre de la fantaisie et devient de plus en plus grave ensuite. Le déroulement de la narration est loin d’être parfait même si le découpage en quatre saisons est assez séduisant. Louis Jourdan est parfait, Maria Denis sans doute un peu trop âgée pour le rôle. Marcel L’Herbier adopte une réalisation très classique, sans doute un peu trop, et ce grand mélodrame parait hélas un peu désuet aujourd’hui.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: María Denis, Louis Jourdan, Giselle Pascal, Suzy Delair, Alfred Adam, Louis Salou
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Autres adaptations :
La vie de bohème d’Albert Capellani (1916)
La bohème de King Vidor (1926) avec Lilian Gish et John Gilbert
Mimi de Paul L. Stein (1935) avec Douglas Fairbanks Jr
La Bohème de Luigi Comencini (1988) avec Barbara Hendricks (opéra)
La vie de bohème d’Aki Kaurismäki (1992)