25 mai 2011

Il était une fois en Amérique (1984) de Sergio Leone

Titre original : « Once upon a time in America »

Il était une fois en AmériqueLui :
A la fin des années soixante, l’ex-gangster Noodles revient à New York après 35 ans d’éloignement. Il se remémore son passé… Il était une fois en Amérique est librement inspiré du livre autobiographique de Harry Gray. Le projet de Sergio Leone a mis plus de dix ans à éclore et le tournage fut interminable. Après la conquête de l’Ouest et la révolution mexicaine, il s’attaque à une autre grande mythologie américaine, le gangster. Cette vaste fresque est construite en flashbacks allant des années vingt au milieu des années trente, fin de la Prohibition. Le film de Leone est à la fois l’histoire de deux gangsters juifs liés par une forte amitié et une variation sur la représentation/idéalisation du cinéma. Toute cette histoire est d’ailleurs issue d’un cerveau en pleine divagation sous l’emprise de l’opium. Leone use (et abuse parfois) de ses effets, créant la tension par de longs plans d’attente. Son cinéma témoigne ici d’une belle vitalité.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Robert De Niro, James Woods, Elizabeth McGovern, Joe Pesci, Burt Young, Tuesday Weld, Treat Williams
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Remarques :
Il était une fois en Amérique dure 3h40. La version commerciale sortie aux Etats-Unis avait été ramenée à 2h20. Du fait des coupes, elle était, parait-il, très dure à comprendre.

23 mai 2011

Mélodie en sous-sol (1963) de Henri Verneuil

Mélodie en sous-solLui :
Charles, la soixantaine, sort de prison. Il est quelque peu déphasé face au monde qui change, ses anciens comparses se sont rangés. Il décide de faire un dernier grand coup et prend un jeune acolyte qu’il a connu en cellule… Adaptation d’un roman noir de John Trinian, Mélodie en sous-sol est un film policier français d’un grand classicisme. Que ce soit dans l’histoire ou dans la vraie vie, avec le duo Gabin / Delon, ce sont deux mondes qui s’opposent. Gabin est en fin de carrière, blasé, un peu fatigué ; s’il joue sans grand entrain, c’est toujours un plaisir de le voir évoluer. Alain Delon, quant à lui, est pétillant de jeunesse, plein de charme, il montre une formidable envie de jouer (1). L’adaptation, très solide, est signée Albert Simonin. Michel Audiard a écrit 25 répliques dont la verve donne un peu de peps à l’ensemble. La mise en scène est précise, certes sans grand éclat ni grand suspense, avec une scène de braquage montrée en temps réel. Très belle scène finale, très photogénique. Mélodie en sous-sol se regarde toujours avec plaisir, un film de la meilleure veine du cinéma policier français.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Jean Gabin, Alain Delon, Viviane Romance, Maurice Biraud, Henri Virlojeux, Jean Carmet, José Luis de Villalonga
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Remarques :
(1) Alain Delon avait une grande admiration pour Jean Gabin, à tel point qu’il accepta de jouer gratuitement dans Mélodie en sous-sol. Il demanda juste les droits de distribution sur trois pays dont le Japon sur lequel, en se démenant, il gagna énormément d’argent, beaucoup plus que Gabin au final…

22 mai 2011

Mabel’s Strange Predicament (1914) de Mabel Normand

Titre français : « Charlot à l’hôtel »

Mabel's Strange PredicamentLui :
(Court métrage de 12 minutes) Mabel’s Strange Predicament (littéralement : l’étrange et fâcheuse situation de Mabel) est le second film tourné par Chaplin, alors intégré à l’équipe de Mack Sennett. Le film a pour star Mabel Normand et il était prévu que Chaplin fasse juste un ou deux gags improvisés en ouverture dans un rôle de séducteur un peu ivre. « Trouve un costume comique, n’importe lequel » lui a dit Mack Sennett… Chaplin détestait le costume guindé avec haut de forme qui lui avait été imposé dans son premier film Making a Living. Il choisit un accoutrement où tout est en contradiction : un pantalon trop large, une veste très serrée, un chapeau melon trop petit, des chaussures trop grandes. Il ajoute une moustache pour ne pas faire trop jeune (il avait à peine 25 ans) et il garde son accessoire fétiche, sa canne. Mabel's Strange Predicament Il avait ainsi créé son célèbre « costume du vagabond ». La scène d’ouverture fonctionne si bien qu’elle est prolongée. Mieux encore, il est décidé de faire apparaître Chaplin dans le restant du film. Le résultat est étonnant car beaucoup de la gestuelle et de l’apparence du personnage est déjà là. Et bien que ce personnage soit ici plutôt mal intentionné, cherchant toujours à profiter de la situation, il est tout de même attachant. Il vole presque la vedette à Mabel Normand qui passe la plus grande partie du film en pyjama Mabel's Strange Predicament(ce qui, rappelons-le, était extrêmement choquant à l’époque). Le costume du vagabond sera réutilisé dans un film tourné rapidement et qui sortira deux jours avant Mabel’s Strange Predicament ; c’est donc techniquement parlant le premier film sorti avec le costume du vagabond : Kid Auto Races at Venice.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Mabel Normand, Charles Chaplin
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Remarques:
Pendant toute la période où il tourne pour Keystone, dans l’équipe de Mack Sennett, Chaplin utilisera souvent ce costume du vagabond mais pas toujours : il faudra attendre la période Essanay, l’année suivante, pour le voir n’utiliser que ce costume.

Chaplin at Keystone Tous les films de Chaplin à la Keystone,
tournés entre janvier 1914 et octobre 1914 :
1) Making a living (Pour gagner sa vie) (a)
2) Kid auto races at Venice, Cal (Charlot est content de lui) (b)
3) Mabel’s strange predicament (Charlot à l’hôtel) (b)
4) Between showers (Charlot et le parapluie) (b)
5) A film johnnie (Charlot fait du cinéma) (b)
6) Tango tangles (Charlot danseur) (c)
7) His favorite pastime (Charlot est trop galant) (b)
8) Cruel, cruel love (Charlot marquis) (a)
Chaplin at Keystone9) The star boarder (Charlot aime la patronne) (b)
10) Mabel at the wheel (Mabel au volant) (a)
11) Twenty minutes of love (Charlot et le chronomètre) (b)
12) Caught in a cabaret (Charlot garçon de café)  (b)
13) Caught in the rain (Charlot et la somnambule) (b)
14) A busy day (Madame Charlot) (d)
15) The fatal mallet (Le maillet de Charlot) (b)
16) Her friend the bandit (** film perdu **)
17) The knockout (Charlot et Fatty sur le ring) (b)
18) Mabel’s busy day (Charlot et les saucisses) (e)
19) Mabel’s married life (Charlot et le mannequin) (f)
20) Laughing gas (Charlot dentiste) (b)
21) The property man (Charlot et le garçon de théâtre) (b)
22) The face on the bar room floor (Charlot artiste peintre) (b)(g)
23) Recreation (Fièvre printanière) (b)
24) The masquerader (Charlot grande coquette) (h)(e)(d)
25) His new profession (Charlot garde-malade) (e)
26) The rounders (Charlot et Fatty en bombe) (g)
27) The new janitor (Charlot concierge) (b)
28) Those love pangs (Charlot rival d’amour) (b)
29) Dough and dynamite (Charlot mitron) (b)
30) Gentleman of nerve (Charlot et Mabel aux courses) (b)
31) His musical career (Charlot déménageur) (b)
32) His trysting places (Charlot papa) (b)
33) Getting acquainted (Charlot et Mabel en promenade) (b)
34) His prehistoric past (Charlot nudiste) (i)
+ 1 long métrage :
Tillie’s punctured romance (Le roman comique de Charlot et Lolotte)

(a) costume de lord anglais avec haut de forme, grandes moutaches
(b) costume du vagabond, petite moustache, avec ou sans chapeau melon
(c) costume avec noeud papillon et pas de moustache
(d) charlot déguisé en femme
(e) costume bien taillé, chapeau melon, petite moustache
(f) costume du vagabond, chapeau haut de forme, petite moustache
(g) smoking, noeud papillon (avec ou sans haut de forme)
(h) Chaplin en costume de ville
(i) Chaplin en homme préhistorique

22 mai 2011

Kid Auto Races at Venice (1914) de Henry Lehrman

Titre français : « Charlot est content de lui »

Charlot est content de luiLui :
(Court métrage de 6 minutes) Alors que le tournage de Mabel’s strange predicament n’est pas encore fini, l’équipe de Mack Sennett improvise un film lors d’une course de mini-voitures conduites par des enfants. Cela se passe un dimanche à Venice, juste à côté d’Hollywood donc. Le ressort comique est simple : Chaplin, avec son costume de vagabond, se place constamment devant la caméra pour être filmé et bouche la vue. L’intérêt historique de Kid Auto Races at Venice est double : d’une part, c’est techniquement le premier film sorti avec Chaplin en costume de vagabond et d’autre part, nous pouvons observer les réactions du public à cet étrange personnage, si bizarrement accoutré. Chaplin improvise et il montre déjà sa formidable présence à l’écran.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Charles Chaplin
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21 mai 2011

The Man I Married (1940) de Irving Pichel

The Man I MarriedLui :
Peu avant la Seconde Guerre mondiale, une américaine se rend avec son mari d’origine allemande en vacances en Allemagne. Elle découvre un pays enflammé par la propagande nazie… Produit par Darryl Zanuck, The Man I Married est un film destiné à faire prendre conscience du risque que faisait peser l’Allemagne nazie sur le monde. Tourné au printemps 1940, soit peu après le début de la guerre, le film place son action en 1938 car il se concentre plus sur l’endoctrinement et la fanatisation d’un peuple que sur la guerre proprement-dite. On peut noter quelques images réelles de rassemblements nazis. Le film évoque en outre l’enrôlement de force des autrichiens dans les usines et les camps de concentration. The Man I Married a visiblement été produit rapidement mais il est intelligemment construit et bien fait. L’histoire est simple mais efficace. Le film est facile d’abord et, donc, a du avoir une certaine efficacité. Le discours sous-jacent est étonnamment lucide et clairvoyant.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Joan Bennett, Francis Lederer, Lloyd Nolan, Anna Sten, Otto Kruger
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20 mai 2011

Les grandes manoeuvres (1955) de René Clair

Les grandes manoeuvresLui :
Dans une ville de province, à la veille de la guerre de 14-18, un jeune officier de cavalerie enchaîne les conquêtes féminines tout en regrettant de ne pas connaître l’amour vrai. Avec ses amis, il fait le pari de parvenir à séduire une femme choisie au hasard dans un nombre de jours impartis… Les grandes manoeuvres est l’un des plus beaux films de René Clair, un film très abouti où il parvient à une symbiose parfaite entre comédie et drame. Le film passe du rire à l’émotion avec une subtilité qui trouve sa source dans la très grande maîtrise de la mise en scène. Les grandes manoeuvres est un film d’un grand classicisme, très français dans son esprit. Dans ce marivaudage élégant, tous les personnages, premiers et seconds rôles, sont attachants mais le film est surtout porté par l’un des plus beaux couples du grand écran : Michèle Morgan, fragile et délicate, et le fringuant Gérard Philipe plein de sensibilité et d’une séduction qui semble transpirer de chaque pore de sa peau. Il se dégage d’eux une sorte de grâce, une infinie délicatesse.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Michèle Morgan, Gérard Philipe, Jean Desailly, Yves Robert, Brigitte Bardot, Jacques Fabbri, Jacques François, Magali Noël, Lise Delamare
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19 mai 2011

Le vilain (2009) de Albert Dupontel

Le vilainLui :
Un braqueur de banques se réfugie chez sa mère qu’il n’a pas revue depuis 20 ans. Découvrant la vraie nature de son fils, elle va entreprendre de le remettre dans le droit chemin… Ecrit, joué et réalisé par Albert Dupontel, Le vilain est un film loufoque et déjanté où il s’éloigne des aspects trash de ses films précédents (qui lui ont assuré un bon succès, toutefois) pour atteindre un burlesque plus pur et plus subtil. Là où il excelle, c’est dans les mécanismes, les interactions avec les objets. Catherine Frot semble s’amuser beaucoup à jouer son personnage de vieille dame qui a de la ressource et les seconds rôles (le médecin, le promoteur immobilier) sont très réussis. Le film semble partir dans tous les sens mais il est néanmoins bien structuré. Le rythme est soutenu. Tout en restant bien frappé, l’humour d’Albert Dupontel évolue et s’étoffe.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Catherine Frot, Albert Dupontel, Bouli Lanners, Nicolas Marié
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18 mai 2011

A fool there was (1915) de Frank Powell

Titre français : « Embrasse-moi, idiot »

A Fool There WasLui :
(Film muet) Une intrigante sans scrupules jette son dévolu sur un riche diplomate, temporairement éloigné de sa famille. Telle un vampire, elle profite des hommes en véritable prédatrice et scelle leur perte… A Fool There Was est le film qui a lancé Theda Bara, la première grande vamp de l’histoire du cinéma. Theda Bara est aussi la première star fabriquée de toutes pièces (1), en l’occurrence par William Fox qui, alors au bord de la ruine, renaîtra ainsi de ses cendres. Theda Bara sera une star immensément populaire, jouant à la fois le rôle de sex-symbol et de moteur à la libération des femmes. Theda Bara Hélas, la quasi-totalité de ses films sont perdus y compris les immenses succès (souvent avec un parfum de scandale) que furent Carmen, Salomé ou Cléopâtre. Ici, dans cette histoire de femme fatale inspirée d’un poème de Kipling « The vampires » dont certains vers sont reproduits dans les intertitres (« A Fool There Was » en est le premier), son personnage particulièrement cynique et cruel (2) crée tous les codes du genre. Très influencé par le théâtre, le jeu de Theda Bara est assez excessif, ce qui était encore assez courant à cette époque. Hélas, l’image des copies existantes est très abimée mais nous voyons aisément comment un tel film a pu bouleverser les esprits dans une société encore très marquée par la morale victorienne.
Note : 3 étoiles

Acteurs: Theda Bara, Edward José, Mabel Frenyear, May Allison, Clifford Bruce
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A Fool There Was (1) Par un jeu subtil de fausses fuites à la presse, William Fox laissera croire que Theda Bara est une actrice arabe. Son nom, trouvé par William Fox ou par Frank Powell, est d’ailleurs une anagramme de « arab death » (son vrai nom est Theodosia Burr Goodman et ses parents sont des émigrés polonais). Le nom de « vamp » aurait également été créé pour elle.
(2) Deux exemples de son cynisme et de sa cruauté :
a) Quand elle arrive au port en taxi, c’est l’une de ses anciennes victimes, devenu clochard, qui lui ouvre la porte pour avoir une pièce et qui l’interpelle. Après lui avoir jeté à peine un regard, elle se contente d’appeler un policier pour qu’il la débarrasse de l’importun… b) Quand l’homme qu’elle quitte après l’avoir ruiné la menace d’un révolver, elle se contente de lui dire le célèbre « Embrasse-moi, idiot » (« kiss me, my fool ») et le laisse ensuite se tirer une balle dans la tête…

Précédentes adaptations de ce poème de Kipling :
The Vampire (1910) de ? avec Margarita Fisher (film perdu)
The Vampire (1913) de Robert Vignola avec Alice Hollister (38 mn)
ainsi Theda Bara n’est pas, techniquement parlant, la première vamp du cinéma… mais, en terme d’impact, elle l’est bel et bien.

Film homonyme :
Embrasse-moi, idiot! (Kiss me, stupid) de Billy Wilder (1964) avec Dean Martin et Kim Novak

17 mai 2011

La femme sur la plage (1947) de Jean Renoir

Titre original : « The Woman on the Beach »

La femme sur la plageLui :
Hanté et fortement perturbé par une tragédie maritime survenue pendant la guerre, un garde-côte peine à retrouver une vie paisible. Il rencontre une femme seule sur la plage battue par les vents. Elle vit non loin de là avec son mari, un peintre qui a perdu la vue et avec lequel elle entretient des rapports mêlés d’amour et de haine… La femme sur la plage est le dernier film de la période américaine de Jean Renoir. Il ne s’est pas fait dans de bonnes conditions : le sujet a été plus ou moins imposé au réalisateur et la RKO imposa que la première version du film soit grandement remaniée après de mauvaises réactions d’un public-test. Et pourtant, malgré le manque de cohérence induit, La femme sur la plage reste un très beau film, centré sur trois personnages très différents, chacun a ses fantômes, ses errements, ses espoirs. Les liens qui se tissent entre eux sont assez étonnants avec une forte tension sexuelle sous-jacente qui semble toujours sur le point d’exploser. Le personnage le plus riche est certainement le mari peintre, très bien interprété par Charles Bickford. Le film est assez inclassable, ce n’est pas vraiment un film noir, il s’inscrirait plutôt dans la veine des films à fort contenu psychologique de ces années quarante. Seule la fin, imposée par les studios, est inconsistante. La femme sur la plage est parfois jugé assez sévèrement et les commentaires que Renoir a faits sur son propre film n’ont probablement rien arrangé. C’est un film qui reste néanmoins assez fascinant.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Joan Bennett, Robert Ryan, Charles Bickford, Nan Leslie
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16 mai 2011

Nana (1926) de Jean Renoir

NanaLui :
(Film muet) Pour sa troisième réalisation, Jean Renoir trouve dans le roman d’Emile Zola Nana un vecteur pour mettre en valeur Catherine Hessling. Le réalisateur a épousé en 1920 cet ancien modèle de son père Auguste Renoir ; il s’est mis au cinéma pour en faire une grande vedette. Il finance lui-même Nana, ce qui lui donne une très grande liberté. Il y engloutit une fortune, vendant des tableaux de son père. On peut ainsi trouver certains points communs entre cette histoire de femme fatale imaginée par Zola et la propre situation de Jean Renoir. Il fait le choix assez étonnant de mettre face à sa protégée un acteur de l’expressionnisme allemand : Werner Krauss. Tout les oppose, le face à face est surprenant. Devant Werner Krauss, véritable roc, rigide, d’une forte présence, au jeu minimaliste, qui passe tout par son visage… Catherine Hessling gesticule, papillonne sans arrêt, froufroute, prend de poses provocantes… un jeu outrancier et frénétique. Le très fort contraste de jeu entre les deux acteurs donne un côté hétéroclite au film mais a toutefois le mérite de souligner, de façon magistrale, le contraste entre les deux personnages principaux de cette histoire. Jean Renoir dit avoir été fortement influencé par Folies de femmes d’Eric von Stroheim. C’est apparent dans le climat équivoque, légèrement décadent et empreint de cruauté, et aussi dans la démesure de certains décors, par exemple l’escalier du palais de Nana. Les autres décors sont parfois minimalistes et donnent un petit côté irréel. La fin a des parfums de fantastique. Le film fut un échec et ruina Jean Renoir. Bien qu’alourdi par le jeu outrancier de Catherine Hessling, Nana ne manque toutefois pas de charme.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Catherine Hessling, Werner Krauss, Jean Angelo, Raymond Guérin-Catelain
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Remarques :
* Jean Renoir (parlant du film dans les années 60) : « Après Nana, comme je n’avais plus d’argent, j’ai dû travailler pour les autres et, en travaillant pour les autres, j’ai dû apprendre la discipline cinématographique. C’est toujours bon de ne pas pouvoir faire tout ce que l’on veut. »
* L’acteur qui joue Fauchery (l’auteur de la pièce de théâtre qui devient l’amant de la comtesse) est Claude Moore d’après le générique. En réalité, il ne s’agit ni plus ni moins que de Claude Autant-Lara, qui a aussi créé les décors. L’acteur Pierre Philippe qui joue Bordenave (le directeur du théâtre) n’est autre que le scénariste Pierre Lestringuez.

Adaptations de Nana, le roman d’Emile Zola :
Nana (1914) de Camillo De Riso (Italie)
A man and a woman (1917) d’Herbert Blaché et Alice Guy
Nana (1926) de Jean Renoir
Nana (1934) de Dorothy Arzner et George Fitzmaurice
Nana (1944) de Roberto Gavaldón et Celestino Gorostiza (Mexique) avec Lupe Velez
Nana (1955) de Christian-Jaque avec Charles Boyer et Martine Carol
Nana (1981) de Maurice Cazeneuve (TV) avec Véronique Genest
Nana (2001) d’Edouard Molinaro (TV) avec Lou Doillon