4 mai 2013

La Flèche et le Flambeau (1950) de Jacques Tourneur

Titre original : « The Flame and the Arrow »

La flèche et le flambeauAu XIIe siècle, en Lombardie dans le nord de la future Italie, la population d’un petit village des montagnes vit sous la terreur d’un seigneur allemand plutôt cruel. Lorsque ce dernier lui ravit son jeune fils, Dardo, un homme des forêts agile et expert au tir à l’arc, se dresse contre lui… Par sa gaité et ses couleurs, The Flame and the Arrow est assez à part dans la filmographie de Jacques Tourneur dont les films sont généralement plus sombres (1). L’histoire est assez proche de celle de Robin des Bois. Le film est ainsi un joyeux divertissement qui met en valeur les qualités physiques de Burt Lancaster qui est ici en tandem avec son ancien partenaire de cirque, Nick Cravat. Les acrobaties qu’ils accomplissent tous deux font une bonne partie du spectacle et donnent un caractère très enlevé à ce plaisant film d’aventures historique, généreux en couleurs. De son côté, Virginia Mayo apporte un peu de charme dans ce monde très masculin. C’est très gai et vivant, on ne s’ennuie guère.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Burt Lancaster, Virginia Mayo, Robert Douglas, Nick Cravat
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Remarques :
* Nick Cravat interprète un muet car, en réalité, l’acteur-acrobate parle avec un accent de Brooklyn très marqué qui aurait paru plutôt déplacé dans la Lombardie du XIIe siècle !
* On pourra remarquer que le côté plus sombre de Jacques Tourneur est tout de même présent dans cette étrange scène où Dardo combat le marquis qui l’a trahi : Jacques Tourneur éteint la lumière et le combat se déroule dans le noir, nous laissant deviner plus qu’il ne montre. Assez étonnant dans ce film par ailleurs très éclairé.

(1) Flame and the Arrow (1950) et Anne of the Indies (1951) sont les deux seuls films dans la filmographie de Jacques Tourneur à être si pétulants, généreusement coloriés et légers.
(2) Avant d’être comédien, Burt Lancaster était acrobate dans un cirque, carrière interrompue par une blessure.

16 avril 2013

La chatte sur un toit brûlant (1958) de Richard Brooks

Titre original : « Cat on a Hot Tin Roof »

La chatte sur un toit brûlantDans une prospère plantation du Mississippi, on fête le soixante-cinquième anniversaire du patriarche, Big Daddy, qui est sur le point de mourir d’un cancer. Le couple de son fils, Brick, est en pleine crise. Il repousse constamment sa jolie femme Maggie et tente de noyer son dégoût dans l’alcool… La chatte sur un toit brûlant est une pièce de Tennessee Williams qui remporta un grand succès à Broadway sous la direction d’Elia Kazan. Mais c’est pourtant Richard Brooks qui l’adaptera au grand écran (1) avec un couple d’acteurs très photogéniques : Elizabeth Taylor et Paul Newman. Hollywood oblige, toute référence à l’homosexualité de Brick a été gommée mais il reste toute la puissance et l’intensité qui sont propres aux pièces de Tennessee Williams. La frustration, la cupidité, le mensonge, la culpabilité nourrissent l’atmosphère surchauffée de ce drame familial qui débouche sur des réflexions plus profondes sur la vie ou la mort. La chatte sur un toit brûlantTous les rôles sont magnifiquement tenus à commencer bien entendu par le tout jeune (et très beau) Paul Newman et une Elizabeth Taylor dont la sensualité a de quoi réveiller un mort (2). Burl Ives, de son côté, exprime une force peu commune. Oui, finalement, malgré toutes les concessions faites lors de l’adaptation, La chatte sur un toit brûlant conserve bien toute sa puissance.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Elizabeth Taylor, Paul Newman, Burl Ives, Jack Carson, Judith Anderson, Madeleine Sherwood
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Remarques :
* Burl Ives (Big Daddy) et Madeleine Sherwood (Mae) tenaient déjà le même rôle dans la pièce jouée à Broadway sous la direction d’Elia Kazan ; Ben Gazzara interprétait Brick et Barbara Bel Geddes était Maggie.
* Le film était prévu pour être tourné en noir et blanc mais Richard Brooks insista pour tourner en couleurs afin de profiter des yeux bleus de Paul Newman et ceux d’Elizabeth Taylor, couleur violette. Les couleurs sont d’ailleurs superbes.

(1) Elia Kazan était en désaccord avec Tennessee Williams à propos de certaines modifications nécessaires selon lui. La situation se reproduira avec Doux oiseau de jeunesse (Sweet Bird of Youth) dont la pièce sera montée à Broadway par Elia Kazan pour être ensuite portée à l’écran en 1962 par Richard Brooks (avec… Paul Newman dans le rôle principal).
(2) On pourra remarquer que toute cette sensualité dégagée par l’actrice, loin de nous détourner de l’action, intensifie le drame car elle amplifie l’importance du refus de Brick.

10 avril 2013

Comment l’esprit vient aux femmes (1950) de George Cukor

Titre original : « Born Yesterday »

Comment l'esprit vient aux femmesUn magnat de la ferraille aux manières rustaudes arrive à Washington avec son avocat pour soudoyer un membre du Congrès. Il est accompagné de sa maitresse, une ancienne danseuse pas très futée qu’il utilise comme prête-nom dans ses « affaires ». Désireux de la voir faire bonne figure, il engage un journaliste pour lui faire un brin d’éducation… Born Yesterday était au départ une pièce de Garson Kanin (bien connu des cinéphiles pour ses livres sur Hollywod) qui eut un très grand succès à Broadway. Judy Holliday y tenait le rôle principal et le reprend ici brillamment à l’écran. Pour ce personnage de ravissante idiote, l’actrice a un jeu très expressif, parfois à la limite de surjouer mais sans jamais franchir la ligne. Ses expressions et intonations sont riches et démonstratives et sa gestuelle est parfaitement maitrisée (lors de la partie de gin rami, elle est stupéfiante). Face à elle, Broderick Crawford est merveilleux, un véritable bull-dog. Le scénario est assez brillant, très simple à la base mais richement développé avec de très bons dialogues. Born Yesterday est un beau spécimen de comédie américaine, dans ce qu’elle a de meilleur.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Judy Holliday, Broderick Crawford, William Holden
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Remarque :
Judy Holliday a été récompensée par l’Oscar 1951 de la meilleure actrice  pour sa prestation dans Born Yesterday.

Remake :
Quand l’esprit vient aux femmes (Born Yesterday) de Luis Mandoki (1993) avec Melanie Griffith et John Goodman, un remake aussi mauvais qu’inutile.

9 avril 2013

La blonde ou la rousse (1957) de George Sidney

Titre original : « Pal Joey »

La blonde ou la rousseUn crooner sans le sou, réputé pour ses nombreuses aventures, va hésiter entre deux femmes. L’une est jeune et ingénue, l’autre est richissime, délurée et exigeante… L’adaptation de ce musical de Broadway signé Roger & Hart avait déjà fait l’objet d’un projet en 1944 (1). Initialement prévu pour la danse, il est ici adapté et modifié pour mettre Frank Sinatra en valeur. La danse cède donc le pas aux morceaux chantés. Rita Hayworth, qui a alors près de quarante ans, n’est plus le sex-symbol qu’elle était en 1944 et laisse ce rôle à la jeune Kim Novak, étoile montante de la Columbia. L’histoire en elle-même n’est guère étoffée et l’ensemble paraît bien vide. Frank Sinatra fait son numéro de charme. Kim Novak est très belle.  La meilleure scène du film est celle où Sinatra chante The Lady is a Tramp à une Rita Hayworth faussement outrée. Pal Joey fut un énorme succès.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Rita Hayworth, Frank Sinatra, Kim Novak
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(1) Après le grand succès de Cover Girl en 1944, Harry Cohn de la Columbia voulait refaire un film avec le tandem formé par son nouveau sex symbol, Rita Hayworth, et Gene Kelly. Dans ce but, Harry Cohn avait acheté les droits de la comédie musicale à succès Pal Joey où Gene Kelly avait tenu la vedette en 1941-42. Gene Kelly était sous contrat à la MGM et, du fait de la somme exorbitante que la MGM demandait pour prêter Gene Kelly une seconde fois, le projet fut abandonné. Il ne refit surface que treize ans plus tard.

8 avril 2013

Une vie (1958) de Alexandre Astruc

Une vieDans la seconde moitié du XIXe siècle, Jeanne vit avec ses parents dans une grande maison en Normandie. Elle fait la connaissance de Julien, revenu d’un long séjour à Paris, taciturne et un peu bourru. Elle l’épouse mais le bonheur qui suit ne sera que de courte durée… Adaptation de la première partie du roman de Guy de Maupassant Une vie, le film d’Alexandre Astruc ne parvient pas à en restituer toute la sensibilité. L’ensemble est très froid, le jeu des acteurs très rigide, la voix off ajoutant encore un degré à la distanciation. Le film peine à émouvoir. Il nous reste à profiter de la splendide photographie de Claude Renoir (neveu de Jean Renoir) avec une superbe utilisation de la couleur (Eastmancolor) qui restitue toute la beauté de Maria Schell et des paysages du nord-Cotentin.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Maria Schell, Christian Marquand, Pascale Petit
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22 mars 2013

Les Feux de la rampe (1952) de Charles Chaplin

Titre original : « Limelight »

Les feux de la rampeA Londres, en 1914, Calvero est un clown autrefois célèbre mais aujourd’hui sans contrat. Il sauve et recueille une jeune fille qui avait tenté de se suicider. Il l’aide à reprendre goût à la vie… Il est bien entendu difficile de ne pas voir dans Les Feux de la rampe le testament artistique de Chaplin. Il l’avait d’ailleurs conçu pour être son ultime réalisation (1). Chaplin avait été très affecté par l’échec de Mr Verdoux et était en outre la cible d’une campagne de dénigrement, l’Amérique étant alors en plein maccarthisme (2). L’histoire en elle-même aurait pu donner un mélodrame très classique mais Chaplin lui donne une profondeur étonnante, Les feux de la rampe exposant ses réflexions sur la vie, l’avancée en âge, le caractère éphémère et fragile du succès, le désamour du public. Il sous-tend toutefois l’ensemble d’une note positive : le passage de témoin à la jeune génération, pleine de vie et d’avenir. Il mêle le spectacle de music-hall, numéros comiques et danse, à son propos. Le final est particulièrement brillant : le numéro qu’il fait en duo avec Buster Keaton est une merveille d’humour et le dénouement est particulièrement intense. Les Feux de la rampe est un film très complet.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Charles Chaplin, Claire Bloom, Nigel Bruce, Buster Keaton, Sydney Chaplin, Norman Lloyd
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Remarques :
* Chaplin situe l’action à Londres en 1914, soit exactement l’époque où il a quitté la capitale de l’Angleterre pour aller aux Etats-Unis. La boucle est en quelque sorte bouclée…
* En 1952, Buster Keaton est hélas un comique oublié. Ce n’est que quelques années plus tard, vers la fin des années cinquante,  qu’il sera vraiment redécouvert.
* Edna Purviance, qui a tourné tant de films avec Chaplin à l’époque du muet, fait partie des extras mais ce n’est pas certain qu’elle apparaisse dans le film car Chaplin avait pour habitude de lui verser systématiquement un salaire qu’elle tienne un rôle ou pas. Le site IMDB lui attribue le rôle d’une certaine Mrs Parker.
* Les enfants que l’on voit dans la toute première scène (qui disent à Calvero que la logeuse est sortie) sont les propres enfants de Chaplin : Josephine (3 ans), Michael (6 ans) et Geraldine Chaplin (8 ans).
* L’un des trois musiciens de rue est Snub Pollard, comique du cinéma muet qui a tourné notamment avec Harold Lloyd avant de tenter une carrière en solo.

(1) Chaplin réalisera encore deux autres films après Les Feux de la rampe : Un roi à New York (1957) et La Comtesse de Hong Kong (1967).
(2) La campagne de dénigrement était si importante que Chaplin décida que la première de son film se ferait à Londres. C’est en cours de traversée qu’il apprit que son visa de retour lui serait refusé (Chaplin était toujours officiellement de nationalité anglaise). C’est ainsi que les Etats-Unis ont mis l’un de leurs plus grands artistes à la porte.

18 mars 2013

L’Équipée sauvage (1953) de Laslo Benedek

Titre original : « The Wild One »
Autre titre (Belgique) : « Le gang descend sur la ville »

L'equipée sauvageUne bande de jeunes motards roule à toute allure sur les routes, perturbent une compétition de course de motos et arrivent dans une petite ville où l’un d’entre eux est renversé par un vieil homme en voiture. Ils restent sur place et la tension monte… A défaut d’être un grand film, L’Équipée sauvage est un film qui eut une grande influence sociétale. Il a établi durablement l’image du blouson noir et celle du rebelle. L’histoire est adaptée d’un roman de Frank Rooney qui est basé sur un fait réel (1). Le film oppose assez maladroitement le mal de vivre de la jeunesse à une population locale rétrograde pour ensuite développer un aspect mélodramatique trop appuyé et finir sur une note de tolérance bienveillante. C’est vraiment Marlon Brando qui donne au film toute sa force, absolument superbe dans ce personnage de rebelle, placide et déterminé, avec cette façon de laisser poindre sous la carapace une certaine fragilité. Plus qu’un personnage, Brando a créé un icone.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Marlon Brando, Mary Murphy, Robert Keith, Lee Marvin, Jay C. Flippen
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Remarques :
L'equipée sauvage* Une légende voudrait que John Lennon ait choisi le nom de son groupe d’après le nom de la bande adverse dans L’Équipée sauvage : the Beetles. Cette légende a toutefois toutes les chances d’être fausse. Le film a d’ailleurs été interdit pendant 13 ans au Royaume Uni où il n’est sorti qu’en 1967.
* En dehors de L’Équipée sauvage et de La Mort d’un commis voyageur (1951) (d’après Arthur Miller), Laslo Benedek, scénariste et monteur d’origine hongroise, n’a pas vraiment réalisé de films notables.

(1) The Cyclists Raid, court roman de Frank Rooney, est basé sur des incidents qui eurent lieu le 4 juillet 1947 à Hollister en Californie. Les festivités et les courses organisées ce jour-là attirèrent près de 4000 motards dans une petite ville qui ne comptaient guère plus d’habitants. Les quelques bars furent envahis, les motards éméchés parcourant bruyamment la ville sans qu’il y ait toutefois de réelles violences. Assez mineurs, ces incidents furent montés en épingle par la presse (locale et nationale) mais furent bien moins dramatiques que ceux du film de Laslo Benedek.

21 février 2013

Convoi de femmes (1951) de William A. Wellman

Titre original : « Westward the Women »

Convoi de femmesA l’époque des pionniers, en 1851, le propriétaire d’un vaste domaine qui occupe toute une vallée californienne décide d’aller chercher des femmes pour ses cent employés, tous célibataires. Avec un des ses hommes, il va les recruter à Chicago et entreprend de les conduire jusqu’à sa vallée… Westward the Women est un film assez étonnant et à plus d’un titre. D’abord, c’est Frank Capra qui en a écrit le scénario et qui l’aurait lui-même réalisé si la Columbia n’avait mis son veto au projet. Ensuite, l’histoire en elle-même paraît assez incroyable ; elle est pourtant basée sur une histoire vraie. Enfin, le film est étonnant par sa qualité, William Wellman réussissant à faire un film puissant, tout en n’ayant pas de personnage principal vraiment mis en avant et sans aucune recherche du spectaculaire. C’est le groupe de femmes de Westward the Women qui en est le héros, un groupe certes mais dont les individualités qui le forment restent assez marquées. Les scènes fortes qui émaillent le périlleux périple sont nombreuses. Le film est très complet, tour à tour vibrant, enthousiasmant, émouvant, tragique. Comme toujours, le jeu de Robert Taylor est assez sobre et contribue ainsi à l’homogénéité de l’ensemble. Western sans équivalent, Westward the Women est un film admirable.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Robert Taylor, Denise Darcel, Hope Emerson, John McIntire, Julie Bishop
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Remarque :
L’actrice Denise Darcel qui interprète une française émigrée est réellement française. Venue aux Etats-Unis à la Libération après avoir épousé un capitaine de l’armée américaine, elle eut une carrière assez courte à Hollywood, principalement entre 1948 et 1954.

17 février 2013

Notre agent à La Havane (1959) de Carol Reed

Titre original : « Our Man in Havana »

Notre agent à La HavaneDans le Cuba d’avant la Révolution, l’anglais Jim Wormold tient une petite boutique d’aspirateurs. Il a une grande fille qu’il élève seul et désire envoyer finir sa scolarité en Suisse. Il est approché par un homme, anglais lui-aussi, qui lui propose de travailler pour les services secrets britanniques…… C’est Graham Greene qui a écrit lui-même l’adaptation de son livre Notre agent à La Havane. Il a accentué la satire du monde de l’espionnage et gommé les aspects les plus noirs du roman. Le film de Carol Reed est ainsi franchement une comédie et il en résulte un certain manque de tension malgré la très grande qualité de l’histoire. On peut par moments sentir l’ombre du Troisième Homme, par exemple dans l’atmosphère des ruelles sombres et vides et aussi dans le jeu de l’excellent Burl Ives qui évoque Orson Welles. Carol Reed et Alec Guinness auraient été en désaccord sur le style d’interprétation du personnage principal mais cela ne sent guère à l’écran. C’est toujours un grand plaisir de voir Alec Guinness avec son jeu subtil et nonchalant, un style qui n’est pas toujours parfaitement compris du fait de sa retenue très britannique (1). Notre agent à La Havane repose beaucoup sur son excellente prestation.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Alec Guinness, Burl Ives, Maureen O’Hara, Ernie Kovacs, Jo Morrow, Ralph Richardson
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Remarque :
Notre agent à La Havane a été tourné trois mois après la Révolution cubaine de janvier 1959. Fidel Castro a autorisé le film car il montre que la police de Fulgencio Batista pratiquait la torture et que les services secrets étrangers étaient bien présents.

(1) Le jeu très retenu d’Alec Guinness dans Notre agent à La Havane est indubitablement plus dans le style des productions Ealing que dans celui du Pont de la rivière Kwai. C’est un style de jeu qui a été jugé par certains critiques américains comme fade et sans caractère, alors que cette retenue en fait tout le charme et la subtilité.

16 février 2013

Si Versailles m’était conté (1954) de Sacha Guitry

Si Versailles m'était contéCe film de 2h45 relate l’histoire du Château de Versailles depuis sa construction sous Louis XIII jusqu’à la Révolution. Il faut préciser d’emblée que Si Versailles m’était conté est plus un divertissement qu’une fresque historique, Sacha Guitry s’intéressant plutôt aux petites histoires et aux secrets d’alcôve qu’à la grande Histoire. On peut donc reprocher au film de ne pas être parfaitement juste historiquement parlant mais il n’est pas non plus totalement faux… disons que Sacha Guitry n’hésite pas à arranger les choses quand il s’agit de placer un bon mot et il escamote ce qui ne l’intéresse pas. Des mots d’esprit, nous en avons beaucoup, Sacha Guitry s’amuse à les mettre dans la bouche de ses personnages, jouant souvent avec le recul du spectateur pour mieux l’amuser. C’est le plus souvent assez réussi, le ton est léger et badin mais Guitry ne va jamais trop loin et sait rester dans le bon goût. Il sait en tous cas ne pas être ennuyeux. Tourné en Eastmancolor (c’est le premier film en couleurs du réalisateur), le film est fastueux par ses décors, ses costumes et sa distribution où l’on retrouve une bonne partie des acteurs majeurs français de l’époque et même deux acteurs américains de premier plan (Claudette Colbert et Orson Welles). La mise en scène est bien maitrisée malgré la rapidité du tournage (1). Le film a été tourné dans le Château de Versailles lui-même et ses jardins ce qui permet de faire revivre les lieux. Si Versailles m’était conté a participé activement à la recherche de fonds pour restaurer le château (2). Son énorme succès populaire a permis également de restaurer le prestige de Sacha Guitry après les accusations qu’il avait subies à la Libération.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean Marais, Claudette Colbert, Micheline Presle, Sacha Guitry, Lana Marconi, Gilbert Bokanowski, Michel Auclair, Jean-Pierre Aumont, Jean-Louis Barrault, Jeanne Boitel, Bourvil, Pauline Carton, Gino Cervi, Jean Chevrier, Aimé Clariond, Nicole Courcel, Danièle Delorme, Yves Deniaud, Jean Desailly, Daniel Gélin, Fernand Gravey, Pierre Larquey, Mary Marquet, Gaby Morlay, Jean Murat, Giselle Pascal, Jean-Claude Pascal, Édith Piaf, Gérard Philipe, Jean Richard, Louis Seigner, Raymond Souplex, Jean Tissier, Charles Vanel, Orson Welles
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On notera également la présence de :
Brigitte Bardot, Annie Cordy, Jacques François, Jeanne Fusier-Gir, Robert Hirsch, Jacqueline Huet, Jacqueline Maillan, Jean Ozenne, Frédéric Rossif, Guy Tréjan, Jacques Varennes.

(1) Cette rapidité de tournage est assez coutumière chez Sacha Guitry. Le tournage ne dura ici que deux mois en juillet et août 1953.
(2) Notons que sur le site internet officiel du Château de Versailles, le film de Sacha Guitry est listé parmi les grandes dates de l’histoire du château, au même titre que, par exemple, le Traité de Versailles. Voir la page…