22 mars 2012

Hammett (1982) de Wim Wenders

HammettEn 1928 à San Francisco, un ex-détective privé devenu écrivain d’histoires policières se trouve impliqué dans la recherche d’une jeune fille mystérieusement disparue. Son enquête le mène à Chinatown… Grand admirateur du film noir américain, Wim Wenders lui rend hommage par cette évocation du fondateur du roman noir, Dashiell Hammett (1). L’idée est de plonger l’écrivain dans l’univers de ses écrits ce qui constitue une approche originale. Hammett fait partie de la période américaine du réalisateur allemand Wim Wenders qui dut ici collaborer avec un producteur assez intrusif, Francis Ford Coppola. Les visions des deux cinéastes étaient trop différentes, la production fut donc « longue et difficile ». Une première version, plus centrée sur l’écrivain que sur le détective, fut tournée et refusée par Coppola (2). Le résultat final apparaît comme un compromis où la patte de Wenders se ressent de manière un peu plus diffuse que dans ses autres films : un certain détachement et une façon d’aller chercher l’essence de l’époque. L’atmosphère est particulièrement bien rendue, assez épaisse, intense. Hammett est un beau film noir qui se regarde avec plaisir.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Frederic Forrest, Peter Boyle, Marilu Henner, Roy Kinnear, Elisha Cook Jr.
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Remarque :
Le superbe plan de la machine à écrire vue par le dessous des touches aurait été soufflé à Wenders par Samuel Fuller. Le réalisateur fait d’ailleurs une petite apparition dans une scène, dans la salle de jeux.

(1) C’est Dashiell Hammett qui a donné un ton nouveau aux histoires policières à la fin des années 20 en durcissant ses personnages, créant ainsi le genre des hard-boiled detective stories (« hard-boiled » = dur à cuire). Son détective ne s’en laisse pas conter car il a à faire face à des adversaires pas toujours très tendres. Raymond Chandler est un peu le fils spirituel de Dashiell Hammett. Plusieurs romans de Dashiell Hammett ont été adaptés au cinéma : Le Faucon Maltais (adapté 3 fois), La Clé de Verre et L’introuvable pour ne citer que les plus célèbres.
(2) Dans la première version, l’amie de Hammett était interprétée par Ronee Blakley, alors épouse de Wenders. Ils divorcèrent entre les deux versions et elle fut donc remplacée ! Presque tous les acteurs furent remplacés d’ailleurs mais Frederic Forrest figure dans les deux (entre les deux versions, il a tourné Coup de Cœur de Coppola).

21 mars 2012

En marge de l’enquête (1947) de John Cromwell

Titre original : « Dead Reckoning »

En marge de l'enquêteDe retour de la guerre, deux militaires officiers et frères de combat sont en route pour Washington pour y être décorés de la plus haute distinction. C’est alors que l’un des deux s’enfuit et disparaît sans laisser de traces. Intrigué, son ami tente de le retrouver et découvre une bien sombre affaire… En marge de l’enquête est une tentative de Columbia de reproduire les succès d’Humphrey Bogart à la Warner (1), tel Le Grand Sommeil. Le scénario n’est pas signé Raymond Chandler mais il pourrait l’être tant il est dans le même esprit et la jeune Lizabeth Scott calque son jeu sur celui de Lauren Bacall et reprend même sa voix un peu rauque. Le film est d’un grand classicisme dans le sens où y figurent tous les composants typiques du film noir : femme fatale, histoire embrouillée qui réserve bien des surprises, des sbires cogneurs, du chantage, des meurtres, … En marge de l’enquête n’en est pas moins très bien fait avec un Bogart toujours aussi parfait. Alors il ne faut surtout pas bouder son plaisir.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Humphrey Bogart, Lizabeth Scott, Morris Carnovsky, Charles Cane, William Prince
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(1) Humphrey Bogart avait été prêté à Columbia par la Warner pour un film.

Remarques :
* Le plan le plus remarqué du film a été le plan final, cette très belle symbolisation de la mort avec le parachute. C’est très probablement la première représentation de la mort à la première personne.

Harry Truman et Lauren Bacall * En dehors de la voix de Lizabeth Scott, il y a une autre allusion à Lauren Bacall dans Dead Reckoning : dans le train, quand les deux amis réalisent qu’ils vont être décorés par le Président, l’un d’eux dit à l’autre « Peut-être qu’il te laissera t’asseoir sur son piano ». C’est une allusion à une photo qui avait fait grand scandale en 1945 où l’on voyait Harry Truman (alors vice-président) assis devant un piano au sommet duquel est assise Lauren Bacall. La photo a été prise au National Press Club lors d’un cocktail où Charles Enfield, du service de la publicité de Warner Bros, avait poussé l’actrice à s’asseoir sur le piano.

16 mars 2012

Le facteur sonne toujours deux fois (1981) de Bob Rafelson

Titre original : « The postman always rings twice »

Le facteur sonne toujours deux foisEn chemin vers l’Ouest, Frank Chambers s’arrête dans un café-station service. Il accepte de faire embaucher comme mécanicien après avoir vu Cora, la jolie femme du patron… Lorsque Tay Garnett a tourné Le facteur sonne toujours deux fois en 1946, il dut user de beaucoup de subtilité pour éviter le couperet de la censure. Ce n’est bien entendu plus le cas en 1981 et Bob Rafelson peut librement exprimer toute la sexualité animale du roman de James Cain, replacé ici dans son époque d’origine, la Grande Dépression. Rafelson fait appel à un auteur dramatique, David Mamet, dont c’est ici le premier scénario. Ils gomment la narration au maximum : rien n’est expliqué, on saute d’une scène à l’autre sans transition, à tel point que le film doit être délicat à comprendre pour le spectateur qui ne connait pas l’histoire à l’avance. En revanche, ils montrent beaucoup, souvent assez crûment. Le film est d’ailleurs surtout célèbre par sa scène de la cuisine, scène qui commence comme un viol et qui finit en étreinte torride. Comme on peut le pressentir en voyant l’affiche, nous sommes bien loin de la subtilité et de la suggestion de la version de Tay Garnett. Certains commentateurs ont souligné le réalisme social du film mais, sur ce point, la version de Rafelson paraît bien en deçà de la version de Visconti.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jack Nicholson, Jessica Lange, John Colicos
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Le roman de James Cain a été porté 4 fois à l’écran :
Le dernier tournant de Pierre Chenal (1939) avce Michel Simon et Fernand Gravey
Ossessione (Les amants diaboliques) de Visconti en 1943.
The postman always ring twice (Le facteur sonne toujours deux fois) célèbre film noir de Tay Garnett (1946) avec le couple Lana Turner / John Garfield,
The postman always ring twice (Le facteur sonne toujours deux fois) de Bob Rafelson en 1981 avec Jessica Lange et Jack Nicholson.
En outre, Chair de Poule de Julien Duvivier (1963) avec Robert Hossein et Catherine Rouvel présente de grandes analogies avec le roman de James Cain.

15 mars 2012

Le facteur sonne toujours deux fois (1946) de Tay Garnett

Titre original : « The postman always rings twice »

Le facteur sonne toujours deux foisVoyageant là où ses pas le portent, Frank Chambers se laisse engager dans un restaurant-station service au bord d’une route. Le propriétaire affable a une femme bien plus jeune que lui, Cora. Frank est immédiatement attiré par Cora… La M.G.M. a acheté dès 1935 les droits du livre de James Cain Le facteur sonne toujours deux fois mais le Code Hays interdisait de porter à l’écran cette histoire d’attirance sexuelle poussant au crime. Plutôt que de montrer, Tay Garnett dut utiliser la suggestion ; le film est ainsi assez représentatif de la forme de l’érotisme dans le cinéma américain des années quarante. Tay Garnett accentue l’un des éléments qui font toute l’originalité du roman : la femme du Facteur sonne toujours deux fois n’a rien d’une femme fatale à la sensualité perfide et qui fréquente des lieux interlopes. Le facteur sonne toujours deux fois Lana Turner ressemble à une américaine moyenne, sportive et gaie, avec des désirs simples en dehors de toute extravagance. Elle est aussi terriblement belle, toute habillée de blanc. Comme le font remarquer Borde et Chaumeton (1), le slogan du film aurait pu être : «Si l’aviez connue, vous auriez fait comme lui !» Cette histoire se déroule dans l’Amérique ordinaire et c’est bien cela qui avait de quoi affoler la censure. Le film fut un grand succès. Bien que situé à la lisière du genre, Le facteur sonne toujours deux fois est l’un des plus beaux films noirs des années quarante.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Lana Turner, John Garfield, Cecil Kellaway, Hume Cronyn, Leon Ames, Audrey Totter
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Remarques :
Le facteur sonne toujours deux foisLe sens du titre Le facteur sonne toujours deux fois n’est pas d’une grande évidence. Il n’y a bien entendu aucun facteur, réel ou symbolique, dans cette histoire. James Cain a donné plus tard l’explication : il a soumis son manuscrit à treize éditeurs avant d’être accepté par le quatorzième et il avait la hantise de son facteur qui lui apportait les manuscrits retournés. Même s’il allait au fond de son jardin pour ne pas l’entendre, il l’entendait toujours car il sonnait toujours deux fois !
Le facteur sonne toujours deux foisLe film de Tay Garnett en donne une autre explication, un peu vaseuse, il faut bien le reconnaître : le facteur est Dieu qui, s’il ne punit pas pour le premier crime, punira pour le second. Il reprend aussi l’image du second coup de sonnette que l’on entend jusqu’au fond de son jardin.

(1) Borde et Chaumeton « Panorama du film noir américain 1941-1953 », remarquable étude parue en 1955.

Le roman de James Cain a été porté 4 fois à l’écran :
Le dernier tournant de Pierre Chenal (1939) avec Michel Simon et Fernand Gravey
Ossessione (Les amants diaboliques) de Visconti en 1943.
The postman always ring twice (Le facteur sonne toujours deux fois) célèbre film noir de Tay Garnett (1946) avec le couple Lana Turner / John Garfield,
The postman always ring twice (Le facteur sonne toujours deux fois) de Bob Rafelson en 1981, version plus racoleuse avec Jessica Lange et Jack Nicholson.
En outre, Chair de Poule de Julien Duvivier (1963) avec Robert Hossein et Catherine Rouvel présente de grandes analogies avec le roman de James Cain.

14 mars 2012

Le train sifflera 3 fois (1952) de Fred Zinnemann

Titre original : « High Noon »

Le train sifflera 3 foisAlors qu’il vient de se marier le matin même et qu’il s’apprête à rendre son étoile de shérif, Will Kane apprend qu’un truand qu’il a fait enfermer quelques années auparavant sera de retour par le train de midi. Tout le monde sait qu’il revient pour régler ses comptes. Ses sbires l’attendent déjà sur le quai. Le shérif Kane tente de convaincre la population de l’aider à affronter le hors-la-loi… Le train sifflera 3 fois est l’un des westerns les plus connus et appréciés du grand public. Sa construction est remarquable puisque le film se déroule en temps réel sur 85 minutes, le temps étant ponctué par des plans d’horloge régulièrement espacés et appuyés par une musique évoquant un tic-tac (1). Les scènes d’action sont donc ainsi regroupées à la fin, après midi. Le train sifflera 3 fois Le film est aussi une fable politique déguisée puisque cette histoire de shérif abandonné lâchement par sa population permettait de décrire la chasse aux sorcières et le maccarthysme (2). L’image est en noir et blanc, lumineux et sans ombre, ce qui est original. Le train sifflera 3 fois divise les cinéphiles, certains fustigent sa simplicité. Si le film n’est pas parfait, si l’on peut regretter le statisme de certaines scènes, l’ensemble fonctionne parfaitement et se révèle être particulièrement intense. Gary Cooper est admirable en shérif fatigué et déçu.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Gary Cooper, Thomas Mitchell, Lloyd Bridges, Katy Jurado, Grace Kelly, Otto Kruger, Lon Chaney Jr., Harry Morgan, Lee Van Cleef
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(1) Le producteur Stanley Kramer a affirmé par la suite que cette construction avait en réalité été faite au montage, affirmation qui avait probablement pour unique but de discréditer le scénariste et producteur associé Carl Foreman. Cette version des faits a toujours été formellement contestée par Zinnemann, montrant le scénario original et le plan de travail comme preuves.
(2) Pendant la production de High Noon, le scénariste (et producteur) Carl Foreman fut convoqué devant la commission HUAC (House Un-American Activities Committee) pour avoir brièvement été membre du parti communiste dix ans plus tôt. Il fut ensuite placé sur liste noire après avoir refusé de donner des noms. Ne pouvant plus travailler, il émigra en Angleterre pour continuer d’écrire sous un pseudonyme.

Remarques :
* La chanson Do Not Forsake Me, Oh, My Darlin’ est chantée par Tex Ritter. Elle a été reprise en français par John Williams sous le titre Si toi aussi tu m’abandonnes.
* Le train sifflera 3 fois marque les débuts de Lee Van Cleef au cinéma. C’est aussi le premier grand rôle pour Grace Kelly.
* Le (superbe) film Rio Bravo (1959) est souvent présenté comme la réponse d’Howard Hawks et de John Wayne à High Noon. John Wayne a d’ailleurs décrit le film High Noon comme étant « un-american » (littéralement « qui ne porte pas les valeurs de l’Amérique » mais le terme a été souvent employé, notamment lors du maccarthysme, pour désigner les communistes… c’est tout à fait du John Wayne de faire une telle déclaration!)

12 mars 2012

Allez coucher ailleurs (1949) de Howard Hawks

Titre original : « I was a male war bride »

Allez coucher ailleursAu lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en Allemagne, un officier français (Cary Grant) doit faire équipe avec une femme-officier américaine (Ann Sheridan) pour mener à bien une mission. Leurs rapports sont d’abord épineux… Allez coucher ailleurs fait partie des meilleures comédies d’Howard Hawks. Elle bénéficie d’une écriture quasiment parfaite et fait montre de beaucoup d’inventivité dans les situations. La guerre des sexes et l’inversion des genres est l’un des piliers de la comédie américaine et Howard Hawks va ici jusqu’au bout puisqu’il travestit Cary Grant en femme, l’acteur n’hésitant pas à jouer largement de cette ambivalence. Si le mariage est l’heureux dénouement de beaucoup de comédies, c’est ici le pivot central, un générateur de nouvelles situations de plus en plus saugrenues où Howard Hawks se moque (gentiment) de la rigidité de la bureaucratie militaire. Le rythme est enlevé avec des dialogues toujours très vifs. Allez coucher ailleurs eut un très grand succès populaire à l’époque. Si on peut trouver qu’elle a peu plus vieilli que L’impossible Monsieur Bébé, La dame du vendredi ou encore Les hommes préfèrent les blondes, cette comédie reste très plaisante aujourd’hui.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Cary Grant, Ann Sheridan, Marion Marshall, Randy Stuart
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9 mars 2012

Le rôdeur (1951) de Joseph Losey

Titre original : « The Prowler »

Le rôdeurAyant aperçu un rôdeur par sa fenêtre, une femme seule dans une grande maison appelle la police qui ne trouve sur place nulle trace suspecte. L’un des deux policiers revient un peu plus tard pour chercher à nouer une relation… Le Rôdeur est le troisième long métrage de Joseph Losey, réalisé aux Etats-Unis donc, peu avant qu’il ne quitte définitivement son pays sous la pression du maccarthisme. C’est un film noir tourné avec peu de moyens mais qui montre une belle maitrise technique, que ce soit sur le plan de l’image ou du déroulement du scénario. L’image est d’un très beau noir et blanc, au contraste assez poussé. Le scénario est remarquable par la profondeur des deux personnages principaux qui nous apparaissent sous de multiples facettes avec une belle complexité. Joseph Losey met à mal l’idéal américain : ce policier désire lui aussi pouvoir en profiter, quels que soient les moyens à utiliser pour y parvenir. Le rôdeur est ainsi, non seulement un film noir prenant, mais aussi une fine analyse sociale.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Van Heflin, Evelyn Keyes
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Remarques :
Les producteurs du film sont Sam Spiegel (sous le nom de S.P. Eagle) et John Huston (non crédité) qui était à l’époque marié à Evelyn Keyes.

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26 février 2012

Sang pour sang (1984) de Joel Coen et Ethan Coen

Titre original : « Blood Simple. »

Sang pour sangAu fin fond du Texas, un patron de bar n’apprécie guère que sa femme fasse une fugue avec l’un des employés. Il engage un tueur… Premier film des frères Coen, Sang pour sang montre déjà beaucoup d’éléments qui apparaitront ensuite comme constitutifs de leur style. Le film préfigure même étrangement Fargo qu’ils tourneront douze ans plus tard. Le scénario, qu’ils ont bien entendu écrit, met en scène des gens très ordinaires, une sombre histoire qui s’embrouille, où rien ne se déroule aussi simplement que les protagonistes ne l’avaient prévu. Les Frères Coen ont saturé l’ensemble d’un humour noir et les personnages du patron de boîte (Dan Hedaya) et surtout du détective privé (Emmet Walsh) en sont les moteurs. La mise en scène est parfaitement maitrisée, parfois un peu tape-à-l’œil mais jamais racoleuse, avec des transitions parfois amusantes, des plans au ras du sol à la Orson Welles. Sang pour sang est un film très original. Premier film, premier coup de maître pour les frères Coen.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: John Getz, Frances McDormand, Dan Hedaya, M. Emmet Walsh
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Remarques :
* On remarque plusieurs clins d’œil à Hitchcock (le briquet laissé sur place comme dans l’Inconnu du Nord Express et le rideau de douche de Psychose).

* Le titre Blood Simple. est tirée d’une phrase d’un roman de Dashiell Hammett Red Harvest (La Moisson Rouge). L’auteur a inventé ce terme pour décrire l’état d’esprit vide et craintif de personnes qui viennent d’être impliquées dans des situations violentes.

23 février 2012

Je ne suis pas un ange (1933) de Wesley Ruggles

Titre original : « I’m No Angel »

Je ne suis pas un angeLa belle Tira est danseuse et dompteuse de lions dans une foire ambulante. Par besoin d’argent pour se tirer d’un mauvais pas, elle accepte de faire un numéro dangereux où elle met sa tête dans la gueule d’un lion. Se basant sur les prédictions d’un fakir de foire, elle attend de rencontrer un homme riche et, en attendant, multiplie les conquêtes… Troisième film de Mae West, Je ne suis pas un ange cherchait à capitaliser sur le succès de She Done Him Wrong. L’actrice se remet en tandem avec le jeune Cary Grant et, bien entendu, continue à jouer son personnage de femme provocante au déhanchement exagéré, personnage proche de la caricature qui aligne les répliques à double sens sexuel. L’histoire s’enlise un peu pendant la première moitié du film, où Mae West s’amuse à jouer la dompteuse, Je ne suis pas un ange mais tient ses promesses sur la seconde avec une scène de procès absolument jubilatoire : Mae West décide en effet d’interroger elle-même les témoins de l’accusation et c’est un festival de bons mots. Bien entendu, il y a là largement de quoi réveiller la censure et énerver la League of Decency : les films de Mae West ont indéniablement renforcé leur détermination à agir. Je ne suis pas un ange connut un très grand succès, Mae West apportant un succès supplémentaire à Paramount qui était alors mal en point.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Mae West, Cary Grant, Edward Arnold, Ralf Harolde
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Remarques :
C’est Mae West qui écrivait elle-même ses scénarios et ses dialogues.
Exemple-type de réplique :
– Tira, comment avez-vous fait pour avoir une telle quantité d’hommes dans votre vie ?
– Vous savez, ce n’est pas la quantité d’hommes dans votre vie qui est important, c’est la quantité de vie qu’il y a dans vos hommes !
(It’s not the men in your life that matters, it’s the life in your men.)
D’autres sont plus difficiles à traduire sans casser le jeu de mots :
– Tira, you’ve been very good
– When I’m good, I’m very good. When I’m bad, I’m better.

C’est dans Je ne suis pas un ange que Mae West dit sa célèbre phrase « Beulah, peel me a grape » (Beulah est le nom de sa femme de chambre). Cette phrase lui aurait été inspirée par l’observation de son singe apprivoisé qui raffolait de raisin et qui pelait tous les grains avant de les engloutir. Cette phrase est devenue ultra-célèbre pour exprimer une certaine langueur luxueuse. Dave Frishberg a écrit une chanson intitulée « Peel me a grape », chantée par Anita O’Day dans les années 60 et reprise plus récemment par Diana Krall qui en fait un grand succès.

19 février 2012

Anna Karenine (1935) de Clarence Brown

Titre original : « Anna Karenina »

Anna KarenineLors d’un voyage à Moscou, Anna Karénine rencontre un jeune officier, le comte Vronsky qui tombe éperdument amoureux d’elle. Il la suit à Saint Petersbourg. Mariée à un membre du gouvernement, Anna a un jeune fils dont elle ne veut se séparer… Pour la seconde fois, Greta Garbo interprète Anna Karenine, l’héroïne du roman de Tolstoï. David O. Selznick, tout comme Cukor qui devait initialement diriger, aurait préféré faire jouer la star dans une histoire moderne, si possible une comédie, plutôt que dans un « film à costumes ». Mais Garbo, suivant les conseils de sa scénariste et amie Salka Viertel, en décida autrement. A cette époque, la puissante Legion of Decency et le Code Hays interdisaient formellement de montrer positivement l’adultère. Le roman de Tolstoï se retrouve donc réduit comme une peau de chagrin, perdant une bonne partie de son âme. Pourtant, le résultat ne manque de charme, en grande partie de par la présence de Greta Garbo qui avait alors atteint un haut niveau de perfection dans son jeu. Anna Karenine Il faut aussi mentionner le talent de Clarence Brown, et de son directeur de la photographie William Daniels, pour créer de très belles scènes : la première apparition après un prologue de 9 minutes) de Greta Garbo à travers un nuage de vapeur est absolument superbe, de même que les scènes du bal ou encore le traveling arrière lorsqu’elle est chassée de chez elle. Face à Garbo, Fredric March ne semble hélas guère à son aise dans le rôle de Vronsky. Anna Karenine ne fut qu’un demi-succès, le public aspirant à cette époque à des films plus actuels et plus gais. Selznick avait vu juste !
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Greta Garbo, Fredric March, Basil Rathbone, Freddie Bartholomew, Maureen O’Sullivan, Reginald Owen
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Remarque :
Freddie BartholomewL’anglais Freddie Bartholomew, ici à l’âge de 11 ans, est probablement l’acteur-enfant le plus célèbre des années trente après Shirley Temple. Il avait été révélé quelques mois auparavant par le film David Copperfield (1935) de George Cukor. Il a surtout tourné jusqu’en 1940, jusqu’à l’âge de 16 ans donc, sans parvenir ensuite à vraiment relancer sa carrière une fois devenu adulte. Il est devenu par la suite producteur de télévision. Ses parents, qui l’avaient abandonné à sa naissance en le confiant à sa tante, refirent surface peu après ses premiers succès pour tenter de s’approprier sa petite fortune.

Adaptations du roman de Tolstoï :
Love de Edmund Goulding (1927) avec Greta Garbo et John Gilbert
Anna Karénine de Clarence Brown (1927) avec Greta Garbo et Fredric March
Anna Karénine de Julien Duvivier  (1948) avec Vivien Leigh
Anna Karénine de Aleksandr Zarkhi (1967) avec Tatyana Samojlova
Anna Karénine de Bernard Rose (1997) avec Sophie Marceau
Anna Karénine de Joe Wright (2012) avec Keira Knightley