1 août 2012

The Moon and Sixpence (1942) de Albert Lewin

Titre original : « The moon and sixpence »

The Moon and SixpenceCharles Strickland abandonne sa vie bien rangée, sa femme et ses enfants pour s’installer à Paris afin d’assouvir sa passion jusque là secrète, la peinture… The Moon and Sixpence est fidèlement adapté du roman homonyme de William Somerset Maugham. Le personnage du roman évoque Gauguin par certains aspects (1) mais ce n’est en aucun cas une biographie de Paul Gauguin. Non, le sujet est tout autre : il s’agit de la confrontation entre une passion qui élève avec un réalisme qui abaisse (2). Strickland se forge une carapace de cynisme et devient même asocial pour se protéger et éviter de retourner à sa morne vie antérieure. De même, sa méfiance envers les femmes (il refuse l’amour car il sent que c’est un piège) se transforme en profonde misogynie. Le film est élégant dans sa forme et ses dialogues, très anglais, George Sanders apportant cette dose d’intelligence et de raffinement qui empêche son personnage d’être odieux. Cette élégance est certes coutumière à Albert Lewin mais il s’agit ici de son premier film. Le réalisateur américain traite déjà de son sujet favori : la peinture.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: George Sanders, Herbert Marshall, Steven Geray, Eric Blore, Albert Bassermann, Florence Bates
Voir la fiche du film et la filmographie de Albert Lewin sur le site IMDB.
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Remarque :
Le film n’a été restauré dans sa forme originale que très récemment : la partie à Paris est en noir et blanc, la partie à Tahiti est teintée en sépia avec un court passage en couleurs pour nous montrer les peintures murales.

(1) Il y a des similitudes : le changement de vie, Paris, Tahiti. Mais si Charles Strickland rencontre bien un peintre hollandais à Paris, ce dernier est sans talent, il n’a rien à voir avec Van Gogh. Et ensuite, Gauguin n’était pas cynique ou malveillant comme peut l’être Strickland.

(2) La signification du titre The Moon and Sixpence n’est donnée ni dans le roman ni dans le film. On peut la trouver dans une lettre de Somerset Maugham datée de 1956 : « If you look on the ground in search of a sixpence, you don’t look up, and so miss the moon. » (« Si vos yeux sont tournés vers le sol pour chercher une pièce de 6 pences, vous ne pourrez voir la lune. ») Le titre illustre ainsi parfaitement le fond du propos.

6 juillet 2012

Andreï Roublev (1966) de Andreï Tarkovski

Titre original : « Andrey Rublyov »

Andreï RoublevPour évoquer la vie du peintre Andreï Roublev, Tarkovski ne pouvait se baser sur des faits historiques puisque nous ne savons rien de la vie de ce moine russe du XVe siècle. Il s’est donc attaché à retranscrire l’âme du peintre. Il le fait en huit tableaux plus un prologue (1) et un épilogue où le film passe en couleurs pour nous montrer son œuvre (2). Il nous dépeint un Andreï Roublev tourmenté par l’idée de la vengeance du Jugement dernier, refusant ainsi l’image d’un Dieu implacable et même cruel, une idée qui aidait les seigneurs de cette époque à garder les paysans en semi-esclavage. En filigrane, Tarkovski nous fait partager ses propres interrogations sur le rôle de l’artiste sous un régime totalitaire, une lecture qui n’a pas échappé aux autorités et lui valu blocages et interdictions. Pour Andreï Roublev, Dieu ne peut qu’insuffler l’amour et ne peut que s’opposer à la cruauté omniprésente dans cette société du XVe siècle. Le film est superbe aussi dans sa forme, assez proche du cinéma d’Eisenstein. Certaines scènes sont d’une rare ampleur ; de nombreux plans sont superbes. Empreint d’un grand mysticisme, Andreï Roublev est un très beau film, puissant, profond et doté d’une grande énergie. (Film de 3h03)
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Anatoliy Solonitsyn, Ivan Lapikov, Nikolay Grinko, Nikolai Sergeyev
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Remarque :
Andreï Roublev Le scénario a été cosigné par Andreï Tarkovski et Andreï Konchalovsky.

(1) Le prologue reprend l’idée que le ballon à air chaud aurait été inventé en Russie bien avant les frères Montgolfier. Sauf que cette théorie attribue l’invention à Furvin Kryakutnoi en l’an 1731. Tarkovski va donc encore plus loin en créant une invention encore antérieure, au XVe siècle.
(2) Les icones montrées dans l’épilogue ne sont pas toutes d’Andreï Roublev mais datent toutes de son époque.

1 juin 2012

Fantômes à Rome (1961) de Antonio Pietrangeli

Titre original : « Fantasmi a Roma »

Fantômes à RomeA Rome, Don Annibale est très attaché à son palais, certes délabré mais riche de souvenirs. Il se doute même que certains fantômes de ses aïeuls vivent avec lui dans cette grande demeure. Un promoteur immobilier se fait insistant pour racheter l’ensemble et y construire un supermarché… Fantômes à Rome (le titre français à sa sortie était Les joyeux fantômes) est une comédie italienne assez amusante qui utilise, avec beaucoup de liberté, le thème du fantôme qui vient influencer les vivants. Marcello Mastroianni y interprète trois rôles et semble bien s’y amuser ; Eduardo De Filippo campe un excentrique prince vieillissant avec beaucoup de pittoresque. L’humour assez subtil est agrémenté d’une petite satire sociale, avec l’éternel problème des dessous de table et de la corruption dans l’immobilier. Sans faire partie des grandes comédies italiennes, Fantômes à Rome se regarde avec beaucoup de plaisir et nous fait passer un bon moment.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Marcello Mastroianni, Belinda Lee, Sandra Milo, Eduardo De Filippo, Tino Buazzelli, Vittorio Gassman
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Remarque :
A l’écriture du scénario, Ruggero Maccari fut assisté par Ettore Scola, Ennio Flaiano et Ruggero Maccari.
La musique est signée Nino Rota.

16 avril 2012

Ladies of Leisure (1930) de Frank Capra

Ladies of LeisureUne jeune femme, à la recherche d’un beau parti, fait la rencontre d’un fils de la haute bourgeoisie. Il est artiste-peintre et l’engage comme modèle… Ladies of Leisure fait partie des tous premiers films parlants de Frank Capra et c’est son premier film avec Barbara Stanwyck, actrice qu’il propulsera au firmament. Elle y montre déjà ce subtil mélange de force et de vulnérabilité qui sera si spécifique à la plupart de ses rôles ultérieurs. Le scénario est adapté d’une pièce de Milton Herbert Gropper ; l’histoire n’est, il faut bien le reconnaître, guère originale (1). Le début du film, sur le registre de la comédie, est le plus réussi avec des très bons dialogues. La fin, plus mélodramatique, l’est un peu moins. Le jeu rigide de Ralph Graves alourdit l’ensemble mais Barbara Stanwyck montre heureusement beaucoup plus de richesse. Si l’on note, ici et là, quelques imperfections (souvent liées au son), Frank Capra se distingue avec quelques plans de toute beauté, tels ces plans pris de l’extérieur du loft éclairé, sous une pluie battante : absolument superbes ! Ladies of Leisure n’est jamais sorti en France.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Barbara Stanwyck, Ralph Graves, Lowell Sherman, Marie Prevost
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(1) L’histoire de Ladies of Leisure est très proche de celle de That Certain Thing que Capra a tourné en muet quelques années plus tôt (1928) ou encore de La petite vendeuse (1927) de Sam Taylor avec Mary Pickford.

Remake :
Women of glamour de Gordon Wiles (1937) avec Virginia Bruce et Melvyn Douglas

Homonyme (histoire différente) :
Ladies of Leisure de Tom Buckingham (1926)