2 juin 2024

La Victime (1961) de Basil Dearden

Titre original : « Victim »

La Victime (Victim)Grand avocat londonien et père de famille, Melville Farr est sur le point d’embrasser une carrière de juge. Lorsque Jack « Boy » Barrett, son ancien amant victime de chantage, l’appelle à l’aide, Farr refuse de l’écouter, craignant pour sa carrière. Peu de temps après, Barrett est retrouvé pendu dans sa cellule. Bouleversé par cette nouvelle, l’avocat décide alors de retrouver la trace des maîtres-chanteurs…
La Victime est un film britannique réalisé et coproduit par Basil Dearden. Le film a une indéniable valeur sociologique car il dresse un portrait de la situation de la pénalisation de l’homosexualité en Angleterre au début des années soixante : si après 1957, les homosexuels (alors passibles d’une peine de 10 ans de prison) étaient un peu moins poursuivis par la police, ils étaient couramment à la merci de maîtres-chanteurs sans scrupule. Le plus remarquable dans ce film est la façon dont il traite ce sujet très délicat à l’époque : le récit est très équilibré, sans militantisme, il met l’accent sur l’amour et sur l’attachement. Son succès relatif aurait joué un rôle déterminant dans la libéralisation des mentalités et de la loi britannique (1). C’est le premier film britannique qui utilise le terme « homosexualité ». Beaucoup d’acteurs ont refusé le rôle mais Dick Bogarde n’a pas hésité à prendre de gros risques : à l’instar de son personnage, il risquait d’y sacrifier sa carrière. Il était alors un acteur très connu, mais dans des rôles plutôt légers. Il montre ici une belle intensité. Ce film (et bien entendu, peu après, The Servant de Losey) sera finalement pour lui un tournant. L’accueil de la critique anglaise sera plutôt bonne… alors que, bizarrement, la critique française a méprisé le film.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Dirk Bogarde, Sylvia Syms, Dennis Price, Anthony Nicholls, Peter McEnery, Donald Churchill, Derren Nesbitt
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(1) La dépénalisation des relations homosexuelles pour les plus de 21 ans se fera en 1967 (Angleterre et Pays de Galles), en 1980 (Ecosse) et en 1982 (Irlande du Nord). En 2000, la limite d’âge sera minorée à 16 ans.

Sylvia Syms et Dirk Bogarde dans La Victime (Victim) de Basil Dearden.

13 mai 2024

Des filles pour l’armée (1965) de Valerio Zurlini

Titre original : « Le soldatesse »

Des filles pour l'armée (Le soldatesse)Grèce, 1941. Les italiens occupent le pays gagné par les allemands. Un lieutenant a pour mission d’escorter un groupe de douze prostituées qui doivent être réparties dans divers campements de soldats. Ces filles ont accepté pour survivre et échapper à la faim…
Des filles pour l’armée est un film italien réalisé par Valerio Zurlini, adapté d’un roman de Ugo Pirro paru en 1956. C’est une sorte de road-movie, un voyage en camion constamment en butte à des évènements contraires pendant lequel nous voyons évoluer le regard de ce lieutenant sur ces femmes qu’il comprend de mieux en mieux. Son caractère intègre contraste avec ceux des deux autres militaires, plus opportunistes, qui l’accompagnent. Le portrait de trois ou quatre femmes acquiert peu à peu une belle profondeur. Zurlini est le cinéaste des sentiments et il le prouve une fois encore par son approche délicate. Mais si le film assez unique en son genre, c’est aussi parce qu’il ne cache rien de l’histoire de l’Italie, d’abord sur les circonstances de l’invasion de la Grèce (une bravade inutile de Mussolini) et surtout sur les exactions des forces italiennes d’occupation (sans chercher à se défausser sur les soldats allemands). Le film ne fut pas bien considéré par la critique qui, assez bizarrement, considérait que la charge contre le fascisme n’était pas assez forte (ce sont des soldats italiens ordinaires qui commettent ces exactions et non les chemises noires ouvertement fascistes). Des filles pour l’armée est cependant un film très complet, étonnamment féministe, parfaitement équilibré. L’interprétation est en outre excellente.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Tomas Milian, Mario Adorf, Anna Karina, Marie Laforêt, Lea Massari
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Tomas Milian et Marie Laforêt dans Des filles pour l’armée (Le soldatesse) de Valerio Zurlini.

26 avril 2024

Comment voler un million de dollars (1966) de William Wyler

Titre original : « How to Steal a Million »

Comment voler un million de dollars (How to Steal a Million)Le directeur d’un grand musée parisien demande à un collectionneur français réputé, Charles Bonnet, de lui prêter une œuvre, la statuette Vénus du célèbre sculpteur Cellini. Le collectionneur la confie au musée au grand dam de sa fille Nicole, car c’est un faux, jadis exécuté par son grand-père. Elle est seule à savoir que son farfelu de père est, comme son grand-père, un faussaire de génie. Lorsqu’elle apprend que la statue doit être expertisée, elle décide de la voler au musée avec l’aide d’un cambrioleur qu’elle a surpris chez elle en train de voler un Van Gogh, œuvre de son père…
Comment voler un million de dollars est un film américain réalisé par William Wyler, adaptation d’une nouvelle de George Bradshaw, Venus Rising. Il s’agit d’une amusante comédie romantique construite autour d’Audrey Hepburn. C’est le troisième et dernier film de William Wyler avec l’actrice qui l’avait révélée treize ans auparavant avec Vacances romaines (Roman Holiday, 1953). C’est très plaisant, il y a de bonnes trouvailles dans les situations et l’humour est omniprésent. L’histoire est bien entendu totalement improbable. Les décors sont d’Alexandre Trauner. Délicieux, un peu anodin sans doute, mais bien amusant.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Audrey Hepburn, Peter O’Toole, Eli Wallach, Hugh Griffith, Charles Boyer, Fernand Gravey, Marcel Dalio, Jacques Marin
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Fernand Gravey, Peter O’Toole et Audrey Hepburn dans Comment voler un million de dollars (How to Steal a Million) de William Wyler.

13 mars 2024

Don Camillo en Russie (1965) de Luigi Comencini

Titre original : « Il compagno Don Camillo »

Don Camillo en Russie (Il compagno Don Camillo)Rien ne va plus entre Don Camillo et Peppone qui a décidé de jumeler le petit village avec une commune soviétique. Don Camillo réussit à trouver une solution à ce problème en obligeant Peppone à l’emmener avec lui en Russie, déguisé en camarade communiste…
Don Camillo en Russie est un film italien réalisé par Luigi Comencini. Il s’agit du cinquième film de la série des Don Camillo et le dernier tourné avec Fernandel (1). Ce n’est pas vraiment une suite du précédent opus puisque Don Camillo et Peppone sont redevenus respectivement simple curé et maire (alors qu’ils avaient été précédemment promus monseigneur et sénateur). Assez curieusement, si l’idée de les envoyer tous deux en Russie semble prometteuse, elle n’est que très peu exploitée. Il faut attendre la moitié du film pour les voir enfin partir en Russie et il ne s’y passe finalement pas grand-chose : pas de pittoresque anticommunisme primaire à l’horizon, assez peu d’humour. Un seul bon gag (très court) sur les portraits qui disparaissent en une nuit (le remplacement de Khrouchtchev par Brejnev a eu lieu fin 1964). De toute évidence, le filon semble bien épuisé…
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Fernandel, Gino Cervi, Gianni Garko, Graziella Granata, Paul Muller
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(1) En 1970, Fernandel ne pourra achever Don Camillo et ses contestataires sous la direction de Christian-Jaque en raison de sa maladie. L’acteur décédera en février 1971. Le personnage sera repris par Gastone Moschin et le film sortira sous le titre Don Camillo et les contestataires (Don Camillo e i giovani d’oggi) en 1972, réalisé par Mario Camerini.

Fernandel, Gino Cervi et Aldo Vasco
dans Don Camillo en Russie (Il compagno Don Camillo) de Luigi Comencini.

26 février 2024

Le Père Noël a les yeux bleus (1966) de Jean Eustache

Le Père Noël a les yeux bleusNarbonne, aux environs de Noël. Désoeuvré, Daniel rêve de s’offrir un de ces duffel-coats à la mode qui lui donnerait le courage nécessaire pour aborder les filles. Il accepte la proposition d’un photographe : se déguiser en père Noël pour poser dans la rue avec les passants…
Le Père Noël a les yeux bleus est un film français écrit et réalisé par Jean Eustache, qui avait tout juste 27 ans. Il a pu récupérer les pellicules non-utilisées sur le tournage de Masculin féminin de Jean-Luc Godard qui lui en a fait don. Il réalise ainsi son second moyen métrage mettant en scène un personnage très probablement inspiré de lui-même (il a passé toute son adolescence à Narbonne). Sous une forme bien entendu très Nouvelle vague, il exprime un certain malaise, le sentiment d’être rejeté, avant que son personnage découvre que le regard des autres sur lui change totalement grâce à son déguisement.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jean-Pierre Léaud, Gérard Zimmermann, Henri Martinez, René Gilson
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Jean-Pierre Léaud dans Le Père Noël a les yeux bleus de Jean Eustache.

24 février 2024

Don Camillo… Monseigneur! (1961) de Carmine Gallone

Titre original : « Don Camillo monsignore… ma non troppo »

Don Camillo... Monseigneur! (Don Camillo monsignore... ma non troppo)Près de dix ans ont passé. Don Camillo et Peppone sont devenus respectivement Monsignore (*) et sénateur à Rome. Les anciennes querelles sont oubliées et le climat est officiellement à la « détente ». Toutefois, la perspective d’un nouveau conflit dans leur village opposant la mairie à l’Eglise va les faire revenir à Brescello…
Don Camillo Monseigneur est un film italien réalisé par Carmine Gallone. Il s’agit du quatrième opus de la série des Don Camillo basée sur les personnages créés par l’écrivain Giovannino Guareschi. Les scénaristes jouent bien entendu sur la rivalité entre Peppone et Don Camillo, utilisant des mécanismes maintenant bien rodés mais qui fonctionnent toujours. L’humour est prévisible mais sans exagération, il se déguste comme une madeleine. Comme toujours, l’humour est souvent au détriment des communistes mais c’est sans méchanceté. Fernandel et Gino Cervi ont un jeu un plus calme mais tiennent bien leur rôle. Je dois avouer avoir trouvé le film bien plus plaisant que dans mon souvenir.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Fernandel, Gino Cervi, Gina Rovere, Valeria Ciangottini
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(*) Monsignore = Prélat, haut dignitaire de la cour papale.

Fernandel et Gino Cervi dans Don Camillo… Monseigneur! (Don Camillo monsignore… ma non troppo) de Carmine Gallone.

Remarque :
• A plusieurs reprises, on aperçoit cet étonnant pont provisoire sur le Pô, long de plus de 400 mètres, fait de dizaines de barques alignées sur lesquelles repose la route. Nous sommes pourtant 16 ans après la fin de la guerre.

Scène de Don Camillo… Monseigneur! (Don Camillo monsignore… ma non troppo) de Carmine Gallone.

19 février 2024

L’art d’être aimé (1963) de Wojciech Has

Titre original : « Jak byc kochana »

L'art d'être aimé (Jak byc kochana)Le temps d’un voyage en avion, une célèbre actrice de radio se remémore un amour douloureux pendant l’Occupation. Tout en travaillant comme serveuse pour survivre, elle avait caché un de ses collègues-acteurs dont elle était amoureuse et qui était accusé d’avoir tué un collaborateur. Elle est allé jusqu’à accepter de jouer dans un théâtre allemand pour le protéger…
L’art d’être aimée est un film polonais écrit par Kazimierz Brandys et réalisé par Wojciech Jerzy Has. Si le film se montre d’abord un peu hermétique, il se révèle de plus en puissant par la suite. C’est une histoire vraiment tragique, sur deux plans, celui d’un grand amour non partagé et celui d’une victime de la guerre, une de ces victimes invisibles non seulement pendant l’Occupation mais aussi à la Libération puisque cette femme se laissera accuser de collaboration pour préserver l’homme qu’elle aime. C’est assez terrible car, de toutes ces souffrances, elle ne retirera rien, sinon des désillusions et des espoirs déçus. L’histoire est très forte. Dans sa forme, si le film ne montre pas la perfection esthétique des films suivants du réalisateur, on ne peut que remarquer certains très beaux plans, dûs à sa façon de placer la caméra. Barbara Krafftówna fait une remarquable prestation.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Barbara Krafftówna, Zbigniew Cybulski, Artur Mlodnicki, Wienczyslaw Glinski
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Barbara Krafftówna et Zbigniew Cybulski dans L’art d’être aimé (Jak byc kochana) de Wojciech Has.

Film visible sur le site de Cinémathèque polonaise (sous-titres en anglais ou en polonais uniquement)

1 janvier 2024

Angélique, marquise des anges (1964) de Bernard Borderie

Angélique, marquise des angesXVIIe siècle. Fille du baron de Sancé de Monteloup, élevée très librement, Angélique assiste à la fomentation d’un complot entre plusieurs grands du royaume, visant à empoisonner le futur Louis XIV. Afin de la protéger de cette dangereuse découverte, elle est envoyée dans un couvent pour y faire ses études. Les années passent, et quand son père l’en fait sortir prématurément, c’est pour lui apprendre qu’elle est promise au richissime comte de Peyrac qu’on dit boiteux et défiguré par une cicatrice…
Angélique, marquise des anges est un film d’aventure français réalisé par Bernard Borderie. Il s’agit de l’adaptation du roman homonyme d’Anne et Serge Golon. La réputation de cette série littéraire est d’être des romans de gare à l’eau de rose, mais ils auraient des qualités. Cette mauvaise réputation est certainement due en bonne partie aux films de Bernard Borderie, qui sont effectivement des films faciles, mêlant aventures et mise en péril d’une charmante personne, avec un petit zeste d’érotisme (pour l’époque). Ce rôle marqua définitivement la carrière de Michèle Mercier en l’enfermant dans des rôles de sex-symbol, façon Brigitte Bardot (qui était d’ailleurs le premier choix des producteurs). Cela se laisse regarder mais sans générer d’enthousiasme. Cet immense succès populaire eut de nombreuses suites.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Michèle Mercier, Robert Hossein, Jean Rochefort, Claude Giraud, Giuliano Gemma
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Remarque :
• Pour l’héroïne, les auteurs des romans se sont inspirés de la marquise du Plessis-Bellière (1617-1705) qui marqua son époque par son esprit et son courage. (lire sur Wikipédia)

Michèle Mercier dans Angélique, marquise des anges de Bernard Borderie.
Robert Hossein et Michèle Mercier dans Angélique, marquise des anges de Bernard Borderie.
Jean Rochefort dans Angélique, marquise des anges de Bernard Borderie.

La série Angélique au cinéma:
Angélique, marquise des anges de Bernard Borderie (1964) avec Michèle Mercier, Robert Hossein
Merveilleuse Angélique de Bernard Borderie (1965) avec Michèle Mercier, Claude Giraud
Angélique et le Roy de Bernard Borderie (1966) avec Michèle Mercier, Jean Rochefort
Indomptable Angélique de Bernard Borderie (1967) avec Michèle Mercier, Robert Hossein
Angélique et le Sultan de Bernard Borderie (1968) avec Michèle Mercier, Robert Hossein

Remake :
Angélique d’Ariel Zeitoun (2013) avec Nora Arnezeder, Gérard Lanvin et Tomer Sisley

15 décembre 2023

Hercule à la conquête de l’Atlantide (1961) de Vittorio Cottafavi

Titre original : « Ercole alla conquista di Atlantide »

Hercule à la conquête de l'Atlantide (Ercole alla conquista di Atlantide)Le devin Tirésias révèle au roi de Thèbes, Androclès, que de terribles malheurs vont s’abattre sur la Grèce à cause d’un ennemi inconnu venu d’au-delà les mers. Hercule et Androclès s’embarquent sur une galère avec Hyllos et le nain Timotéo vers une destination inconnue, qui se révèle être l’Atlantide…
Hercule à la conquête de l’Atlantide est un péplum franco-italien réalisé par Vittorio Cottafavi. Dans la série des Hercule, il passe pour être l’un des plus réussis. Bien entendu, le film paraîtra kitsch à de nombreux spectateurs actuels mais l’ensemble est plaisant. Les situations sont nombreuses, le Technicolor est éclatant et les décors en carton-pâte font bien leur effet. De plus, l’humour et la dérision sont très présents. On se laisse volontiers happer par ces aventures spectaculaires, sans s’offusquer des petites lourdeurs de la mise en scène. Le demi-dieu de la mythologie grecque est interprété pour la première fois par le culturiste anglais Reg Park. À noter, une des premières apparitions de Gian Maria Volonté, dans un petit rôle.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Reg Park, Fay Spain, Ettore Manni, Luciano Marin, Laura Efrikian, Mario Valdemarin, Mimmo Palmara, Salvatore Furnari, Gian Maria Volontè
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Reg Park dans Hercule à la conquête de l’Atlantide (Ercole alla conquista di Atlantide) de Vittorio Cottafavi.
Mimmo Palmara et Fay Spain (la reine Antinéa)
dans Hercule à la conquête de l’Atlantide (Ercole alla conquista di Atlantide) de Vittorio Cottafavi.
Gian Maria Volonté dans Hercule à la conquête de l’Atlantide (Ercole alla conquista di Atlantide) de Vittorio Cottafavi.

12 décembre 2023

Caprice à l’italienne (1968) de Mauro Bolognini, Mario Monicelli, Pier Paolo Pasolini, Steno, Pino Zac et Franco Rossi

Titre original : « Capriccio all’italiana »

Caprice à l'italienne (Capriccio all'italiana)Caprice à l’italienne est un film à sketches italien réalisé par Mario Monicelli, Pier Paolo Pasolini, Mauro Bolognini, Steno, Pino Zac et Franco Rossi. Hélas, le résultat n’est pas à la hauteur de ces signatures prestigieuses. Souvent, seule l’idée de départ est amusante. Très moyen, le sketch de Steno n’est sauvé que par les nombreux déguisements de Totò. Celui de Pino Zac/Franco Rossi est mauvais et un poil raciste. Insignifiant, celui de Monicelli est heureusement très court. Les plus intéressants sont les deux sketches signés Bolognini qui s’amuse avec des traits de caractères (mais ils sont tous deux passablement misogynes) et le sketch de Pasolini (« C’est quoi les nuages ? ») qui apparaît un peu hors-classe et d’une indéniable profondeur. Le cinéaste propose une réflexion sur la notion de spectacle : notre vie est un spectacle où nous sommes des marionnettes tirées par des ficelles invisibles, impuissants à comprendre les idéologies que ceux qui les tirent. La vraie vie intervient finalement par une révolte des spectateurs qui changent l’issue de la pièce. L’épilogue est joliment poétique. Le défaut de Pasolini est toutefois de ne pas être toujours facilement accessible (1). Ce court film de Pasolini est la dernière apparition de Totò à l’écran qui décèdera peu après le tournage.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Totò, Silvana Mangano, Ninetto Davoli, Laura Betti, Adriana Asti, Carlo Pisacane, Ira von Fürstenberg, Walter Chiari
Voir la fiche du film sur le site IMDB.

(1) Un exemple : Le générique de son sketch s’inscrit sur une reproduction des « Ménines », le tableau de Velasquez. Or, ce tableau a été analysé en profondeur par Michel Foucault deux ans plus tôt : tous les regards convergent vers le hors champ, vers le spectateur, c’est-à-dire dans le cas de Velasquez, vers le Roi et la Reine. Ainsi, ce n’est pas le spectacle de la cour qui est diégétisé mais celui de la vie dans laquelle nous ne serions que des pantins. (Explication donnée par Martine Boyer et Muriel Tinel dans leur ouvrage « Les films de Pier Paolo Pasolini », Dark Star 2002.)

Ninetto Davoli et Totò dans le sketch de Pasolini de Caprice à l’italienne (Capriccio all’italiana)

Les sketches :
1) Il mostro della domenica (Le monstre du dimanche), réalisé par Steno.
Importuné par les hippies, un riche bourgeois les enlève pour leur raser le crâne.
2) Perchè? (Pourquoi ?), réalisé par Mauro Bolognini.
Dans un embouteillage, une femme pousse son mari à se faufiler entre les voitures.
3) Che cosa sono le nuvole? (C’est quoi les nuages ?) (22 min), réalisé par Pier Paolo Pasolini, assisté de Sergio Citti.
Des marionettes interprètent Othello avant que le public n’intervienne.
4) Viaggio di lavoro (Voyage d’affaires), réalisé par Pino Zac et Franco Rossi.
Lors d’une tournée en Afrique, la reine d’un pays européen se trompe de discours et fait l’éloge du pays ennemi.
5) La bambinaia (La nourrice), réalisé par Mario Monicelli.
Une gouvernante interdit aux enfants les bandes dessinées supposées violentes et leur raconte des contes de Perrault encore plus terrifiants.
6) La gelosa (La jalouse), réalisé par Mauro Bolognini.
Une femme montre une jalousie maladive et suit partout son mari.