7 avril 2014

L’Éventail de Lady Windermere (1949) de Otto Preminger

Titre original : « The Fan »

L'éventail de Lady WindermereLord Windermere est un mari très aimant et prévenant. Il compte offrir à sa femme un très bel éventail pour leur premier anniversaire de mariage. C’est alors qu’il fait la connaissance d’une certaine Mrs Erlynne qui désire par-dessus tout s’introduire au sein de la haute société londonienne… L’Éventail de Lady Windermere est une pièce d’Oscar Wilde qui a été portée à l’écran plusieurs fois, une histoire à la fois belle et forte sur l’amour filial et le conformisme victorien. La version muette d’Ernst Lubitsch (1925) est superbe. Otto Preminger vouait au cinéaste une grande admiration : il venait d’ailleurs de terminer le tournage du dernier film de Lubitsch La dame au manteau d’hermine interrompu par sa mort. Hélas, Preminger ne parvient pas à hisser cette nouvelle version au niveau de celle de son maître, malgré le charme de Jeanne Crain qui est ici d’une grande beauté. On ne peut trouver vraiment de défaut, le film est d’ailleurs plaisant, mais reste trop léger et ne parvient à créer une certaine intensité que trop brièvement. On pourra apprécier la mise en scène de Preminger qui montre de beaux mouvements de caméra. Madeleine Carroll fait une belle prestation. L’Éventail de Lady Windermere sera son dernier film.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Jeanne Crain, Madeleine Carroll, George Sanders, Richard Greene
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Remarque :
* L’Éventail de Lady Windermere d’Otto Preminger est resté très longtemps inédit en France.

Précédente version :
L’Éventail de Lady Windermere d’Ernst Lubitsch (1925)

28 mars 2014

Citizen Kane (1941) de Orson Welles

Citizen KaneLe magnat de la presse Charles Foster Kane vient de mourir. Un journaliste enquête sur sa vie pour découvrir le sens de ses dernières paroles : « Rosebud »… Toujours cité parmi les plus grands films de toute l’histoire du cinéma, Citizen Kane est probablement, avec Naissance d’une Nation de Griffith, celui qui a eu le plus d’influence sur les autres réalisateurs. Véritable condensé de créativité, Citizen Kane fait suite à une décennie, celle des années trente, où le cinéma hollywoodien s’est fortement normalisé. Grâce au succès de son émission radiophonique La Guerre des Mondes, une adaptation du roman H.G. Wells tellement bien mise en scène qu’elle jeta la panique dans une partie de l’Amérique, le jeune Orson Welles va bénéficier, à 25 ans et pour son premier film, de ce dont tout réalisateur rêve sans jamais l’obtenir : une carte blanche totale. Entièrement libre, il va bousculer toutes les règles. Il sait toutefois s’entourer de quelques professionnels aguerris, notamment Herman J. Mankiewicz (le frère aîné de Joseph L. Mankiewicz) à l’écriture du scénario et Gregg Toland, talentueux directeur de la photographie.

La construction est totalement inhabituelle : non seulement tout le film est un flashback (1) mais en plus les dix premières minutes nous donnent en quelque sorte le sommaire du film qui se construit ensuite autour de cinq récits précis de la part de cinq personnes différentes (2). L’autre grande innovation de Citizen Kane est dans l’utilisation d’une grande profondeur de champ : Orson Welles désire que tout soit net pour être proche de la vision humaine et, pour ce faire, non seulement il utilise des objectifs grands-angles mais en plus il réalise certains trucages de superposition qui lui permettent par exemple de placer des objets nets au tout premier plan. Le placement de la caméra est aussi très original avec des plongées spectaculaires mais surtout des contre-plongées (la caméra étant parfois placée dans un trou dans le sol). Combinées aux grands- angles, ces contre-plongées nous permettent de voir largement les plafonds alors que l’usage était jusqu’alors de tourner sans plafond (ne serait-ce qu’à cause du système des éclairages). L’utilisation de l’ombre et la lumière est aussi remarquable, un personnage pouvant être totalement en ombre chinoise avant de faire quelques pas pour apparaître en pleine lumière.

C’est sans doute sur le fond que le film paraît le plus faible : si le personnage de Kane est inspiré du magnat de la presse Randolf Hearst et si le propos est de montrer la puissance de l’argent et la faiblesse des hommes ainsi que le caractère multiforme d’une vérité qui serait dès lors inatteignable, la démonstration manque parfois de fil directeur en semblant s’égarer dans ses ramifications multiples. Le propos reste toutefois fort et marquant, suffisamment en tous cas pour que Randolph Hearst fasse tout pour saborder la carrière du film et qu’il y parvienne. Citizen Kane a en effet été un échec commercial malgré un accueil enthousiaste du public et de la critique, les exploitants de salle préférant éviter de se mettre à dos les journaux de Hearst. Avec le recul, Citizen Kane apparaît comme un tournant dans l’histoire du cinéma, Orson Welles apportant un souffle nouveau de créativité et remettant au premier plan la notion d’auteur-réalisateur.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Orson Welles, Joseph Cotten, Dorothy Comingore, Agnes Moorehead, Everett Sloane
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(1) Comme pour toutes les autres innovations de Citizen Kane, Orson Welles n’a pas inventé le flashback. The Power and the Glory de Preston Sturgess (1933) entre autres avait déjà l’ensemble du récit encapsulé dans un flashback. Il en est de même pour les fameux plafonds… Orson Welles n’a d’ailleurs jamais prétendu avoir tout inventé. Ce qui est remarquable, c’est d’avoir tant d’innovations dans un seul et même film.

(2) Au départ du projet, les récits devaient porter sur les mêmes évènements, chacun nous donnant une version différente, ce qui aurait été encore plus novateur. Ce procédé narratif sera celui de Rashômon de Kurosawa quelque dix ans plus tard. L’idée a toutefois été gardée en partie car certains évènements sont racontés plusieurs fois.

20 mars 2014

Hollywood Parade (1944) de A. Edward Sutherland

Titre original : « Follow the Boys »

Hollywood ParadeUn ex-comédien de vaudeville qui a percé à Hollywood (George Raft) organise des tournées avec des stars de cinéma pour soutenir les soldats américains en Europe et dans le Pacifique… Follow the Boys se présente comme un film d’effort de guerre, réunissant toutes les têtes d’affiche des studios Universal. Il y a bien une petite intrigue mais elle est simplette et sans grande importance. Le film se charge surtout de nous montrer un bon nombre de numéros de stars. Follow the Boys est ainsi une des toutes dernières apparitions de W.C. Fields à l’écran, il nous fait son célèbre numéro du billard, toujours aussi amusant mais on le sent fatigué. La séquence la plus marquante est certainement celle d’Orson Welles qui nous refait une partie de son show de magie, The Wonder Show, où il coupe à la scie Marlene Dietrich en deux, après divers petits tours rapides mais spectaculaires. Sur le plan musical, il y a un peu de tout. Le meilleur à mes yeux (et à mes oreilles) réside dans les deux passages avec les Andrews Sisters (c’est une occasion de voir leur étonnant jeu de scène) qui font un long medley puis plus tard Shoo-Shoo Baby et aussi dans les deux morceaux joués par Louis Jordan (Is You Is or Is You Ain’t Ma’ Baby suivi de Sweet Georgia Brown). Toujours en jazz, Charlie Spivak et son big band joue également quelques morceaux. Enfin, le numéro de danse endiablée de Donald O’Connor et Peggy Ryan est assez étonnant et on notera la présence, assez inattendue, d’Arthur Rubinstein. La mise en scène mêle des images réelles (surtout des plans de foule) à des plans reconstitués en studio. Le film n’a rien de remarquable sur le plan cinématographique, il a plutôt un intérêt historique.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: George Raft, Jeanette MacDonald, Orson Welles, Marlene Dietrich, Donald O’Connor, W.C. Fields
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Remarques :
* En l’absence d’Eddie Sutherland, John Rawlins a dirigé certains plans.
* Dans son livre d’entretiens avec Peter Bogdanovich (This is Orson Welles, ou Moi Orson Welles en français), Welles a des mots très durs sur ce film : « En fait d’effort de guerre, il s’agissait surtout d’un effort de Charlie Feldman pour faire de l’argent – et il en a gagné un bon paquet (…) C’est moralement répugnant. » (Note : Charlie Feldman est le producteur du film).
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17 mars 2014

Ma soeur est capricieuse (1942) de Alexander Hall

Titre original : « My Sister Eileen »

Ma soeur est capricieuseRuth et Eileen quitte leur Ohio natal pour aller tenter leurs chances à New York. Ruth a bien la tête sur les épaules et sait ce qu’elle veut : devenir écrivain. Eileen est plus jolie et plus naïve, elle attire les hommes ; elle aspire à devenir actrice. Elles échouent dans un appartement en sous-sol à Greenwich Village… Au départ, Ruth McKenney avait écrit pour un quotidien une série d’histoires semi-autobiographiques qui étaient devenues un livre puis une pièce jouée avec succès à Broadway, My Sister Eileen. Le film est l’adaptation fidèle de la pièce, les deux étant produit par la même personne, Max Gordon. Cette origine explique pourquoi l’essentiel de l’action se déroule dans un seul et même lieu, l’appartement des deux soeurs, ce qui donne une petite impression de manque d’ampleur à cette comédie screwball. On y voit toutefois défiler un nombre impressionnant de personnages hauts en couleur et plus inattendus les uns que les autres. Ce côté loufoque est l’attrait majeur de cette comédie qui se déroule à un rythme assez endiablé. My Sister Eileen sera reprise en comédie musicale quelque dix ans plus tard, d’abord à Broadway puis en film dirigé par Richard Quine qui a ici un petit rôle (l’homme du drugstore).
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Rosalind Russell, Brian Aherne, Janet Blair, George Tobias, Grant Mitchell
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Remarques :
* Dans la vraie vie, Eileen McKenney, la soeur de Ruth McKenney, n’a pas fait une grande carrière en tant qu’actrice mais a fini par épouser Nathanael West, fils d’un riche entrepreneur newyorkais qui a écrit quelques scénarios pour Hollywood (il a également écrit le roman The Day of the Locust qui sera adapté en 1975 par John Schlesinger). Ils se sont tués tous les deux en décembre 1940, quelques mois après leur mariage, dans un accident automobile. Ils devaient assister quatre jours plus tard à la première de My Sister Eileen à Broadway.
* Lorsque le film est sorti sur les écrans, la pièce était toujours jouée à Broadway, ce qui est plutôt inhabituel.
* Lors du gag final, ce sont les Trois Stooges que l’on voit apparaitre, trio comique qui était alors extrêmement populaire.

Remake :
Ma soeur est du tonnerre (My Sister Eileen) de Richard Quine (1955), une comédie musicale avec Janet Leigh et Jack Lemmon.

15 mars 2014

Péché mortel (1945) de John M. Stahl

Titre original : « Leave Her to Heaven »

Péché mortelUn écrivain fait la rencontre d’une jeune fille de bonne famille dans un train. Elle est fascinée par son visage car l’homme ressemble à son père décédé il y a peu de temps. A leur arrivée, ils s’aperçoivent qu’ils se rendent chez la même personne dans un ranch du Nouveau Mexique. L’attraction réciproque ne fait que grandir et aboutit rapidement à un mariage… Comme le montrent clairement l’affiche et le générique, Leave Her to Heaven est tiré d’un best-seller signé Ben Ames Williams. La Fox en a confié la réalisation à John Stahl, grand spécialiste du mélodrame. Mais, et c’est bien là que réside tout son attrait, Leave Her to Heaven est bien plus qu’un mélodrame puisque, à mesure que l’histoire avance, nous basculons dans le film noir. Très rarement, la symbiose de ces deux genres, mélodrame et film noir, n’a été si réussie. L’histoire est à rapprocher de la vogue des thèmes psychanalytiques à cette époque mais le monumental complexe d’Oedipe non résolu qui en est ici le noeud est toutefois inséré avec une certaine discrétion. L’image, signée Leon Shamroy (1), est absolument superbe avec un Technicolor de toute beauté (des rouges éclatants, une teinte générale brun doré et de belles nuances de bleus, les verts étant judicieusement en retrait). Gene Tierney - Péché mortel Et il y a Gene Tierney… belle et sublime, dont la douceur naturelle rend la noirceur de ses desseins encore plus terrifiante. Elle fait une très belle interprétation de ce personnage complexe sous une façade parfaitement lissée et maitrisée. Face à elle, Cornel Wilde peut paraître un peu fade mais cela correspond à son personnage et la toute jeune (20 ans) Jeanne Crain, alors étoile montante de la Fox, a également un rôle tout en retenue. De nombreuses scènes restent gravées dans nos mémoires : les cendres, la barque et surtout l’escalier… Bien qu’il reste peu connu (pas assez du moins), Leave Her to Heaven est un film vraiment remarquable.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Gene Tierney, Cornel Wilde, Jeanne Crain, Vincent Price, Darryl Hickman
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Remarques :
Péché mortel * La fameuse scène de l’escalier a bien failli être coupée par la Censure mais elle a pu être sauvée in extremis.
* Le titre Leave Her to Heaven est tiré d’une phrase d’Hamlet de Shakespeare : le fantôme du père d’Hamlet lui enjoint de ne rien tenter contre sa mère mais de laisser le Ciel se charger de la punir (ce que les distributeurs français ont exprimé bien maladroitement en traduisant par Péché mortel…)
* Dans son autobiographie, Gene Tierney décrit le tournage comme ayant été assez difficile. Le lieu de tournage au bord du lac (Bass Lake en Californie) était difficilement accessible par la route. Le tournage de la scène de la barque eut lieu en novembre et l’eau était glacée : on lui donnait de petites rasades de whisky entre les prises pour réactiver sa circulation sanguine (d’ailleurs, d’après IMDB, le jeune Darryl Hickman aurait été atteint de pneumonie en tournant la scène).

(1) Le directeur de la photographie Leon Shamroy a été oscarisé pour ce film.

11 mars 2014

Easy Living (1949) de Jacques Tourneur

Easy LivingPete Wilson est le meilleur joueur de football de son équipe, au sommet de la gloire pour le grand plaisir de sa femme Liza qui voit en lui un moyen d’atteindre la réussite sociale. Une grande partie de l’argent qu’il gagne est englouti dans la société de décoration intérieure qu’elle tente de monter… Adapté d’une histoire écrite par Irwin Shaw, Easy Living n’a pas très bonne réputation. Les déclarations de Jacques Tourneur lui-même, exprimant son aversion pour le film, y ont certainement contribué (1). Pourtant, il ne manque pas de qualités. Cette parabole sur le monde du sport est aussi une vision de la société américaine où l’homme n’est qu’un pion sans réel pouvoir sur sa propre vie. Cette vision paraît encore plus désenchantée si l’on considère ce personnage du pseudo-mécène, homme d’une caste supérieure qui s’amuse à regarder se débattre ses congénères. Si le film comporte quelques faiblesses notamment sur le plan du déroulement (sautes brutales) et sur le plan de l’interprétation (Lizabeth Scott n’est pas dans la bonne tonalité), Easy Living n’en reste pas moins fort bien mis en scène et photographié, avec une noirceur élégamment distillée. Il a aussi pour lui d’être assez original comme en témoigne sa fin, un peu expédiée, peut-être, mais surprenante, sans aucun doute.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Victor Mature, Lucille Ball, Lizabeth Scott, Sonny Tufts, Lloyd Nolan
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Remarques :
* Cet Easy Living de Jacques Tourneur (RKO) n’a absolument aucun lien avec le Easy Living de Mitchell Leisen (1937), par ailleurs une excellente comédie de la Paramount.
* La nouvelle d’Irwin Shaw s’intitule An Education of the Heart. L’adaptation a été écrite par Charles Schnee, scénariste qui a travaillé pour Hawks, Wellman, Ray et Minnelli.

(1) Jacques Tourneur avait du accepter le sujet car il devait un dernier film à la RKO. Il a déclaré n’avoir jamais vu un match de football avant de réaliser ce film et qu’il n’avait aucun intérêt envers ce sport.

9 mars 2014

Trop de maris (1940) de Wesley Ruggles

Titre original : « Too Many Husbands »

Trop de marisQuelques mois après que son mari Bill ait été déclaré mort, perdu en mer, Vicky s’est remariée avec son associé et meilleur ami Henry. Or, un beau matin, Bill réapparaît : il était resté bloqué sur une petite île déserte. Vicky se retrouve alors avec deux maris. Lequel va-t-elle choisir ? … Adapté d’une pièce de Somerset Maugham jouée à Broadway en 1919, Too Many Husbands est une comédie de type screwball qui s’amuse avec le concept de polygamie : après avoir été catastrophée du caractère insoluble de sa situation, Vicky se rend compte qu’elle est au centre de toutes les attentions et décide de profiter de la situation. Si la comédie est plaisante et ne génère pas l’ennui, elle ne s’envole vraiment à aucun moment, l’ensemble restant assez sage. Certes, la censure est passée par là, réduisant sans doute le propos, mais l’écriture manque indéniablement de brillance. Deux mois après ce Too Many Husbands de la Columbia, RKO a sorti le merveilleux My Favorite Wife de Garson Kanin, qui est la situation exactement inverse (un homme avec deux épouses) pour un résultat autrement plus réussi.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jean Arthur, Fred MacMurray, Melvyn Douglas, Harry Davenport
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Remarques :
* Deux fins ont été tournées (Jean Arthur choisissant l’un ou l’autre des deux maris) et plus de 10 000 questionnaires furent distribués à des audiences-tests pour savoir qu’elle était celle qui remportait le plus d’adhésion (un procédé si souvent utilisé à Hollywood mais dont on n’est pas obligé de penser que du bien…)
* L’histoire est une variation du poème Enoch Arden de Lord Tennyson, poème déjà adapté par D.W. Griffith : Enoch Arden Part 1 et Enoch Arden Part 2 (1911), puis une nouvelle fois en moyen métrage, Enoch Arden (1915) avec Lilian Gish et Alfred Paget

Remake :
Tout le plaisir est pour moi (Three for the show) de H.C. Potter (1955) avec Betty Grable et Jack Lemmon.

25 février 2014

La Perla (1947) de Emilio Fernández

Autre titre (USA) : The Pearl

La perlaDu fait de mauvaises conditions maritimes qui durent depuis de nombreux jours, les habitants d’un petit village de la côte mexicaine ne peuvent sortir pêcher les huîtres et n’ont presque plus rien à manger. Aussi, quand le très jeune fils de Quino se fait piquer par un scorpion, le docteur blanc de la ville proche ne veut même pas les recevoir. Peu après, lorsque le temps devient meilleur, Quino pêche une huître avec une superbe et grosse perle… Production mexicaine financée pour moitié par la RKO, La Perla est adapté d’un court roman de John Steinbeck qui intervint comme conseiller sur le tournage (1). Il s’agit d’une fable puissante sur la cupidité. Ce qui frappe en premier est la beauté onirique des images que l’on doit à Gabriel Figueroa (directeur de la photographie qui a également travaillé pour John Ford, John Huston et Luis Buñuel, entre autres). L’image est baignée de lumière, presque surexposée, sans noirs profonds même dans les scènes de nuit. Cette lumière omniprésente apporte une atmosphère céleste à cette fable, la femme de Quino prenant assez souvent l’allure d’une vierge (avec l’enfant c’est encore plus flagrant), et le climat ainsi créé place le récit hors du temps permettant ainsi de mieux mettre en évidence les caractères. L’histoire est simple mais puissante. Outre la peinture très forte de la cupidité et de la perversion, le propos met l’accent sur le clivage social entre les blancs et les indiens et laisse deviner le rôle social de l’espérance. Comme toujours avec Steinbeck, le propos est donc très riche, à la fois social et philosophique. La perla est un superbe exemple de la force du cinéma mexicain de cette période parfois appelée « l’âge d’or du cinéma mexicain ».
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Pedro Armendáriz, María Elena Marqués, Charles Rooner
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Remarques :
* Deux versions ont été tournées : l’une en espagnol et l’autre en anglais. La Perle fut ainsi le premier film mexicain en langue anglaise à être distribué aux Etats-Unis. La version en anglais fut distribuée sous le titre The Pearl.
* Le roman de Steinbeck n’est sorti qu’après la sortie du film.
* Emilio Fernández est l’un des cinéastes mexicains les plus importants. Il a tourné plus de 40 films, essentiellement dans les années quarante et cinquante ; il a également été acteur, notamment dans La Horde sauvage de Sam Peckinpah (1969).

(1) Pour plus de détails à ce sujet, lire la fiche de l’American Film Institute

24 février 2014

La danseuse des Folies Ziegfeld (1941) de Robert Z. Leonard et Busby Berkeley

Titre original : « Ziegfeld Girl »

La danseuse des Folies ZiegfeldEtre découvert par le célèbre créateur de spectacles Florenz Ziegfeld est le rêve de nombreuses jeunes femmes. Trois d’entre elles entrent ainsi dans la troupe. L’irruption de cette gloire soudaine dans leur vie va avoir des conséquences bien différentes… Ziegfeld Girl est l’un des nombreux films mettant en scène les célèbres Follies de Ziegfeld (1) qui marquèrent le Broadway des années dix et vingt. Robert Z. Leonard avait déjà réalisé Le Grand Ziegfeld (1936) qui avait connu un énorme succès. Assez logiquement, la M.G.M. lui confie donc la direction de cette superproduction, en tandem avec Busby Berkeley qui dirige les numéros musicaux et ballets. Le scénario est assez lénifiant, énième variation sur le conte de fées du succès, avec ses avantages mais aussi ses dangers. Des trois girls, c’est Lana Turner qui a la plus belle présence ; Hedy Lamarr est peu mise en valeur tout comme Judy Garland, mais cette dernière fait montre comme toujours d’une belle énergie. Même les ballets musicaux ne sont pas à la hauteur des grandes créations de Busby Berkeley : il charge ici beaucoup, mais il est vrai qu’il est ainsi dans la droite ligne de Ziegfeld. Le morceau musical le plus notable est probablement Minnie from Trinidad chanté par Judy Garland.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: James Stewart, Judy Garland, Hedy Lamarr, Lana Turner, Jackie Cooper, Ian Hunter, Charles Winninger, Edward Everett Horton
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Remarques :
* Dans la scène finale, l’un des décors reproduit celui du numéro le plus célèbre de Le Grand Ziegfeld : A Pretty Gil is like a Melody avec son grand gâteau.
* Originellement, le film devait être tourné en 1938 avec Eleanor Powell, Joan Crawford, Virginia Bruce et Walter Pidgeon.

(1) Florenz Ziegfeld Jr. (1867-1932) est sans aucun doute la plus grande personnalité de l’univers de Broadway. A partir de 1909, ses Follies devinrent vite le spectacle le plus célèbre de l’époque. Ses ballets et numéros musicaux alliaient fantaisie et reconstitution et faisaient rêver les spectateurs. Il n’hésitait pas à mêler les influences les plus diverses, pour un résultat d’assez mauvais goût mais toujours grandiose et spectaculaire.

23 janvier 2014

Les Désemparés (1949) de Max Ophüls

Titre original : « The Reckless Moment »

Les désemparésLucia Harper vit avec ses enfants et son beau-père près de Los Angeles, son mari étant détaché pour de longs mois à l’étranger. Elle tente sans résultat d’éloigner un escroc qui a séduit sa fille. Cette dernière finit par comprendre les mauvaises intentions de son petit ami et, lors d’une entrevue houleuse, il est tué accidentellement… Les Désemparés est l’adaptation d’un roman d’Elisabeth Sanxay Holding, un roman qui aurait été l’un des préférés de Raymond Chandler. L’histoire est, il est vrai, plutôt originale, pas forcément toujours très crédible mais ce sont les rapports entre les personnages qui en font tout l’intérêt. Elle mêle ainsi mélodrame et film noir avec une variation très particulière de la notion de famille, où la recherche de protection engendre un fort repli sur soi, la famille devenant un vase clos. Max Ophüls nous place très proche de ses personnages, avec comme toujours une caméra fluide et de beaux mouvements tournants. Les Désemparés n’eut hélas qu’un budget assez réduit mais le résultat n’en est que plus remarquable.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: James Mason, Joan Bennett, Geraldine Brooks, Henry O’Neill, Roy Roberts
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Remarque :
Comme pour ses autres films américains, Max Ophüls signe ici Max Opuls. C’est son dernier film américain, il rentrera en France peu après.