17 mars 2012

Meurtre à Yoshiwara (1960) de Tomu Uchida

Titre original : « Yoto monogatari: Hana no Yoshiwara hyaku-nin giri »

Meurtre à YoshiwaraPatron d’un atelier de tissage prospère, Jirozaemon voudrait se marier mais une vilaine tâche de naissance sur le côté droit de son visage effraie toutes les femmes rencontrées. Pour lui changer les idées, son plus gros client l’emmène à Yoshiwara, quartier de Edo (aujourd’hui Tokyo), dans une maison de plaisirs. Toutes les geishas refusent sa compagnie sauf Tsuru, une ancienne taularde. Il va dépenser sans compter pour son apprentissage de courtisane… Tomu Uchida adapte ici une pièce du théâtre traditionnel japonais qui oppose la bonté à la cupidité et à l’égoïsme. C’est un mélodrame rendu puissant par le traitement du réalisateur et une interprétation très juste. L’image est étonnamment belle, un superbe cinémascope en couleurs, le format large étant particulièrement bien exploité par le réalisateur : beaucoup de plans sont de toute beauté. Le film a aussi un côté presque documentaire car il nous montre à la fois certains rites sociaux dans le commerce et surtout le fonctionnement du quartier des geishas, avec ses codes et ses tensions. Meurtre à Yoshiwara est un très beau film doté d’un final superbe.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Chiezo Kataoka, Yaeko Mizutani, Isao Kimura
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13 mars 2012

Ponyo sur la falaise (2008) de Hayao Miyazaki

Titre original : « Gake no ue no Ponyo »

Ponyo sur la falaiseUn petit garçon, qui vit avec sa mère dans une maison sur la falaise, recueille un poisson rouge coincé dans un bocal. Il le délivre et l’adopte mais ce n’est pas n’importe quel poisson rouge. C’est la fille d’un magicien et de la déesse des mers… Hayao Miyazaki présente Ponyo sur la falaise comme une transposition du conte d’Andersen La petite sirène dans le Japon d’aujourd’hui. Il est assez différent de ses films précédents, plus proche de l’univers des enfants. Le graphisme est plus stylisé mais toujours aussi travaillé, l’animation est dotée d’une énergie, d’une vitalité peu commune. Les mouvements de la mer sont superbes. L’histoire est un conte doté d’un certain lyrisme qui parvient à émerveiller autant les adultes que les enfants. Ponyo sur la falaise n’est pas loin d’être le meilleur film de Hayao Miyazaki.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs:
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6 mars 2012

Dodes’ka-den (1970) de Akira Kurosawa

Titre original : « Dodesukaden »

DodeskadenAlors que le Japon est en plein boom économique, Akira Kurosawa adapte un roman de Shûgorô Yamamoto qui met en scène les habitants d’un petit bidonville en bordure d’une grande métropole japonaise. Kurosawa pense que « le miracle économique ne durera pas car il prend appui sur la misère morale et l’injustice ». Loin d’être un film rebutant ou misérabiliste, Dodes’Ka-den est un très beau film, d’une humanité rare. Dodes’Ka-den est une onomatopée que les enfants japonais utilisent pour imiter le bruit du train sur les rails. C’est le bruit que fait l’adolescent Rokuchan en conduisant son tramway imaginaire. Dodeskaden Il ouvre et clôt le film qui est centré sur une douzaine de personnages. Il y a beaucoup de choses dans Dodes’Ka-den : des drames, de l’humour, du rêve, de la poésie, de la beauté. Le film est d’ailleurs très beau plastiquement parlant : pour son premier film tourné en couleurs, Kurosawa a repeint tous les objets, même les plus anodins et a tout filmé en studio. Même le ciel est peint. Cela accroit ce sentiment d’être à côté du monde réel. Le dénuement des personnages permet à Kurosawa de mieux pénétrer les profondeurs de l’âme humaine. Il ne faut surtout pas se laisser effrayer par le sujet, Dodes’Ka-den est un film superbe, d’une très grande humanité.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Yoshitaka Zushi, Tomoko Yamazaki, Yûko Kusunoki, Kunie Tanaka
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Remarques :
Entre Barberousse (également adapté d’un roman de Shûgorô Yamamoto) et Dodes’Ka-den, Kurosawa a été pressenti dans le cadre de plusieurs projets à Hollywood mais aucun n’a abouti.

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21 février 2012

Kiki, la petite sorcière (1989) de Hayao Miyazaki

Titre original : « Majo no takkyûbin »

Kiki, la petite sorcièreKiki est une fillette qui a hérité de talents de sorcière : elle vole sur son balai aussi aisément que d’autres font de la bicyclette. Pour son apprentissage, elle doit aller s’installer dans une ville de son choix et proposer ses services… Kiki, la petite sorcière a été tourné par Hayao Miyazaki avant Porco Rosso, il est dans un registre assez différent. La qualité du dessin est comme toujours avec Miyazaki remarquable, les décors sont assez enchanteurs. Il y a beaucoup de fraîcheur qui se dégage de cet univers enfantin. L’histoire est gentille et décrit les difficultés du passage de l’enfance à l’adolescence.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: (voix) Minami Takayama, Kappei Yamaguchi
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29 janvier 2012

Barberousse (1965) de Akira Kurosawa

Titre original : « Akahige »

BarberousseAux alentours de 1820 à Edo (aujourd’hui Tokyo), un tout jeune médecin est affecté à un dispensaire de quartier pauvre alors qu’il attendait un poste bien plus prestigieux du fait de ses relations. Il se révolte d’abord contre son patron, un docteur entièrement dévoué à sa tâche surnommé Barberousse, avant de s’intéresser peu à peu à certains cas… Barberousse fait partie des grands films humanistes d’Akira Kurosawa. Il s’agit d’une œuvre de grande ampleur à laquelle le cinéaste a consacré deux années. Cette transformation d’un jeune arriviste est admirablement construite puisque plusieurs histoires dans l’histoire nous sont contées. L’idée développée par Kurosawa est de montrer que les maux physiques cachent souvent une tragédie humaine dont la cause profonde est soit la pauvreté, soit la rigidité des codes sociaux. Le docteur Barberousse prouve peu à peu au jeune homme que soigner les maux des autres lui permet aussi de soigner les siens et trouver une paix en lui-même. Kurosawa sait éviter tout misérabilisme et tout sermon, il raconte des histoires qui nous captivent par leur force et qui nous touchent profondément. Barberousse fait partie de ces films qui nous font réfléchir sur notre vision de la vie et nous donnent une sensation d’enrichissement. La mise en scène est parfaite, un grand soin a été porté sur les décors et le format large de l’image est merveilleusement exploité. Barberousse fait partie des plus grands films de Kurosawa.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Toshirô Mifune, Yûzô Kayama, Tsutomu Yamazaki, Reiko Dan, Miyuki Kuwano
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Remarque :
Barberousse marque la fin de la collaboration entre Akira Kurosawa et son acteur fétiche Toshirô Mifune. Ce dernier se lançait alors dans la production, il était aussi courtisé par Hollywood. Immobilisé par le long tournage de Barberousse, il a commencé à entrer en conflit avec Kurosawa sur l’orientation à donner à son personnage : alors que le réalisateur voulait mettre en avant son altruisme, l’acteur voulait accentuer son côté héros prêt à tout, lointain. Kurosawa déclarera par la suite : « Son interprétation héroïque, granitique, austère, a faussé le personnage. Mifune n’a pas voulu m’écouter. Alors j’ai décidé de ne plus travailler avec lui. Quand un acteur commence à jouer son propre personnage, c’est fini. » Nous pouvons voir la conséquence de ces dissensions dans  la scène du combat, une scène qui paraît assez décalée et inutile.

5 août 2010

Kill, la forteresse des samouraïs (1968) de Kihachi Okamoto

Titre original : « Kiru »

KiruLui :
Dans le Japon du XIXe siècle, un jeune paysan arrive à bout de force dans un village pour se faire embaucher comme élève-samouraï. Il fait la rencontre d’un vagabond. Tous deux vont se trouver rapidement mêlé dans les complots et intrigues des seigneurs du village. Dans le genre des films de samouraï (genre aussi appelé « chambara » par les amateurs), Kill – La forteresse des samouraïs est assez méconnu ce qui semble assez injuste, au vu de sa qualité. Le film de Kihachi Okamoto est assez remarquable par le subtil équilibre entre dramatique et comique, s’appuyant sur ses deux personnages de premier plan, aux caractères et tempéraments franchement opposés. L’histoire est assez prenante. Il faut ajouter à cela une très belle photographie en noir et blanc et une mise en scène parfaitement maitrisée. De façon un peu surprenante, certains plans et effets, ou encore la musique, peuvent évoquer les westerns italiens de la même époque.
Note : 4 étoiles

Acteurs: Tatsuya Nakadai, Etsushi Takahashi, Yuriko Hoshi, Naoko Kubo, Tadao Nakamaru
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Remarques :
Kill la forteresse des samouraïs est adapté d’un livre de Shûgorô Yamamoto que Kurosawa avait déjà porté à l’écran avec son Sanjuro (1962).

21 juin 2010

Le château ambulant (2004) de Hayao Miyazaki

Titre original : « Hauru no ugoku shiro »

Le château ambulantLui :
(Film d’animation) En adaptant ce roman de Diana Wynne Jones, Hayao Miyazaki va toujours plus loin dans l’imaginaire visuel. L’histoire du Château Ambulant est assez belle en soi et joliment complexe. L’histoire démarre très rapidement et semble se développer en étoile à l’instar de son château ambulant, objet et lieu fantasmagorique au-delà de toute probabilité. Miyazaki explore plusieurs fils narratifs, exploitant ainsi une vraie richesse de récit qu’il met en images avec force trouvailles visuelles. Spectacle féérique, Le Château Ambulant nous charme, nous émerveille et nous captive.
Note : 5 étoiles

Acteurs: Chieko Baisho, Takuya Kimura
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19 septembre 2009

La forêt de Mogari (2007) de Naomi Kawase

Titre original : « Mogari no mori »

La forêt de MogariElle :
(pas vu)

Lui :
Dans une petite maison de retraite champêtre japonaise, un pensionnaire et une aide-soignante vont se rapprocher car ils portent tous deux un lourd fardeau. Une errance dans la forêt de Mogari va jouer le rôle d’un parcours initiatique vers une certaine sérénité. La réalisatrice japonaise Naomi Kawase traite de la disparition d’un être cher, de la difficulté du deuil : ces deux personnages principaux semblent inconsolables, ils semblent survivre plutôt que vivre, et ne trouveront que très difficilement le chemin pour dépasser le silence et la douleur. Le film est très lent, à l’image du parcours de ses deux personnages principaux, et la seconde partie nous fait pénétrer, caméra à l’épaule, cette dense forêt qui semble vouloir nous envelopper. On pourra reprocher une relative simplicité dans le propos qui repose beaucoup sur un certain rapport avec la Nature qui en devient salvatrice. Remarqué et récompensé à Cannes, La Forêt de Magori est un film qui mérite l’attention.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Machiko Ono, Shigeki Uda, Makiko Watanabe
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18 avril 2009

Lily la tigresse (1966) de Woody Allen et Senkichi Taniguchi

Titre original : « What’s Up, Tiger Lily? »

Lily la tigresse Elle :
(pas (re)vu)

Lui :
S’il y a un sujet qui a alimenté de nombreuses discussions parmi les amateurs, c’est bien « doit-on considérer Lily La Tigresse comme le premier film de Woody Allen ? ». L’idée de départ vient en fait non pas de lui-même mais d’un producteur qui avait acheté les droits d’un film japonais d’espionnage : trouvant après coup l’histoire trop confuse pour le public américain, il demanda à Woody Allen de mettre d’autres dialogues par dessus pour en faire une comédie. Woody Allen qualifie aujourd’hui le projet comme étant « complètement débile et puéril ». Woody Allen a néanmoins réuni quelques amis dans un studio et ils ont fait vite fait bien fait quelque chose qu’il faut regarder aujourd’hui avec beaucoup de mansuétude… parce qu’il faut bien avouer que le résultat est très moyen, probablement parce qu’il reste trop près du film initial. Au lieu de rechercher un microfilm, le héros se retrouve bien à chercher la recette de la salade aux œufs mais le délire s’arrête là. Lily la tigresse On peut toutefois noter déjà la capacité de Woody Allen à détourner des scènes, ou à en retourner la tension, par des dialogues décalés. Signalons la musique de Lovin’ Spoonful (avec John Sebastian) et deux passages rajoutés où on les voit jouer. Lily La Tigresse est donc à regarder par curiosité uniquement.
Note : 2 étoiles

Acteurs: Tatsuya Mihashi, Akiko Wakabayashi
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Remarques:
1. Le film original s’appelle Kokusai himitsu keisatsu: Kagi no kagi
Lovin' Spoonful What's up Tiger Lily 2. Le film revu par Woody Allen ne faisant que 60 minutes, les producteurs en ont rajouté 19 dont les scènes où l’on voit Lovin’ Spoonful jouer et certaines scènes avec une voix-off imitant Woody Allen. La dernière phrase que prononce Woody Allen à la fin du générique/strip-tease aurait été aussi modifiée.
3. Dans ses entretiens avec Stig Björkman (1993), Woody Allen parle de Lily la Tigresse : « Ce fut une expérience calamiteuse (…) J’ai attaqué le producteur en justice juste avant la sortie du film, pour l’empêcher de sortir en salle, car il avait fait des modifications supplémentaires qui me semblaient épouvantables. Mais durant l’instruction du procès, le film est néanmoins sorti et a récolté d’excellentes critiques. J’ai donc retiré ma plainte estimant que mon argumentation s’effondrait. Mais je persiste à dire que le film était insipide. C’était une idée de potache. »

16 avril 2009

Ran (1985) de Akira Kurosawa

RanElle :
La force de Ran réside dans sa réflexion sur la guerre et dans sa brillante mise en scène presque onirique. Un seigneur sanguinaire veut partager son fief entre ses trois fils pour vivre une fin de vie heureuse. La soif de pouvoir, les complots et vengeances, les divergences divisent les fils qui n’ont dès lors de cesse de s’entretuer et s’éliminer. Kurosawa se sert avant tout des images pour montrer comment une dynastie familiale peut sombrer dans le chaos et comment le désir de puissance peut pervertir les êtres humains. Le rouge, le jaune et le bleu des troupes de chacun des trois fils parsèment d’immenses paysages perdus. Les décors et la mise en place des batailles sont somptueux tant par leur graphisme que par le mouvement des soldats sur leurs chevaux. Kurosawa se permet d’éliminer les cris de la guerre pour les remplacer parfois par une musique presque contemporaine. La couleur du sang, la fumée et la brume envahissent le champ visuel qui devient baroque et fait penser à certains tableaux de Goya.
Note : 4 étoiles

Lui :
L’intrigue de Ran est directement inspirée du Roi Lear de Shakespeare. Dans le Japon du XVIe siècle, un puissant seigneur qui a bâti son vaste domaine à coups de guerres sanglantes, décide de le léguer à ses trois fils. L’un d’eux refuse ce partage et il est banni…
Kurosawa ne cherche pas à faire une transposition fidèle, il désire plutôt faire une fable sur le pouvoir, la guerre, la culpabilité. A cause de sa folie destructrice, l’homme est ici le principal moteur de sa perte. Ran est un mot qui désigne le chaos. Le déroulement de l’histoire en elle-même est parfois un peu confus, il faut bien suivre pour ne pas s’y perdre. Ran s’inscrit dans la dernière partie de la filmographie de Kurosawa, juste après Kagemusha. Tous deux sont des films grandioses par leur mise en scène, avec notamment des scènes de guerre superbes dans ses mouvements de centaines voire de milliers de cavaliers et fantassins, mouvements et déplacements rendus encore plus majestueux et graphiques par les fanions colorés derrière chaque soldat. Cet aspect monumental est assez spectaculaire, peut-être pourrait-on dire un peu trop, mais dans le grandiose, le cinéma de Kurosawa reste majestueux et peu de cinéastes parviennent ainsi à faire fusionner totalement un propos terriblement sombre, presque apocalyptique avec une beauté quasi picturale des images.
Note : 4 étoiles 16/04/20094 étoiles 24/08/2024

Acteurs: Tatsuya Nakadai, Akira Terao, Jinpachi Nezu, Daisuke Ryu, Mieko Harada
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