7 avril 2018

Macbeth (2015) de Justin Kurzel

MacbethEcosse, XIe siècle. De retour d’une dure bataille où ils se sont battus pour leur roi Duncan, Macbeth et son fidèle ami Banquo rencontrent les trois sorcières : elles prédisent à Macbeth qu’il sera roi, et à Banquo qu’il ne sera pas roi mais que ses enfants le seront…
Ce Macbeth version 2015 est un film britannico-franco-américain réalisé par l’australien Justin Kurzel, avec dans les deux rôles principaux un allemand et une française. Il repose sur la louable intention de moderniser la pièce de Shakespeare tout en respectant le texte original. Pour mieux l’insérer dans notre époque actuelle, le producteur Iain Canning dit avoir cherché à mettre en avant « l’importance du collectif et l’existence d’un vaste monde dans lequel évoluent nos personnages », intention qui peut surprendre car Macbeth est avant tout un personnage plein de fureur, ce que Michael Fassbender restitue fort bien. De son côté, Marion Cotillard fait une prestation honorable bien qu’un peu monolithique. L’adaptation ménage des « temps morts » importants, un étirement de scènes sans texte, en premier lieu des batailles et des combats qui finissent par « diluer » la puissance des personnages et du texte. Après une première partie convaincante, la seconde moitié du film s’étire en longueur et finit par paraître interminable. Graphiquement parlant, il y a une indéniable recherche esthétique dans les couleurs et les espaces écossais sont bien exploités : une belle photographie mais quelques effets, tels les ralentis, sont vraiment de trop.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Michael Fassbender, Marion Cotillard, Paddy Considine, David Thewlis, Jack Reynor, Sean Harris
Voir la fiche du film et la filmographie de Justin Kurzel sur le site IMDB.
Voir la fiche du film sur AlloCiné.

Macbeth
Michael Fassbender dans Macbeth de Justin Kurzel.

Remarques :
* Le tournage en extérieurs a eu lieu essentiellement sur l’île de Skye (Ecosse) et le château si remarquablement situé en bord de plage est celui de Bamburgh, au nord-est de l’Angleterre (proche de l’Ecosse).

* Il est difficile de lister les autres adaptations de Macbeth au cinéma (et plus encore à la télévision) tant elles sont nombreuses.
La plus remarquable est sans aucun doute  le Macbeth d’Orson Welles (1948), difficile à égaler (à noter que Laurence Olivier n’a pas tourné « son » Macbeth).
Viennent ensuite le très beau Kumonosu jô (Le Château de l’Araignée) d’Akira Kurosawa (1957) et le remarqué  Macbeth de Roman Polanski (1971) qui a ses adeptes.

Macbeth
Michael Fassbender et Marion Cotillard dans Macbeth de Justin Kurzel.

2 avril 2018

Aux postes de combat (1965) de James B. Harris

Titre original : « The Bedford Incident »

Aux postes de combatEn pleine Guerre froide, un journaliste (Sidney Poitier) est héliporté à bord d’un destroyer de Marine américaine au large du Groenland pour un reportage. Son capitaine (Richard Widmark) traque un insaisissable sous-marin soviétique qu’il soupçonne de violer les eaux territoriales de l’OTAN…
Producteur de films de Stanley Kubrick, l’américain James B. Harris n’a que peu tourné lui-même. The Bedford Incident est sa première réalisation. Il s’agit de l’adaptation d’un roman de Mark Rascovich, un suspense basé sur le jeu du chat et de la souris, mêlé d’un zeste de folie obsessionnelle qui pourrait le rapprocher de Dr Folamour. On retrouve en effet cette crainte de l’emballement dans l’équilibre de la terreur où le moindre faux-pas peut provoquer un cataclysme nucléaire. La tension monte constamment, bien entretenue par le personnage du commandant jusqu’au-boutiste auquel Richard Widmark (qui est aussi producteur) donne chair. Il s’agit d’une production britannique, avec des capitaux américains : les moyens sont visiblement limités, on le ressent dans les scènes d’extérieur (icebergs et maquettes) sans que cela n’entrave sa force. The Bedford Incident n’eut que peu de succès et reste assez méconnu aujourd’hui. Il mérite mieux que cela.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Richard Widmark, Sidney Poitier, James MacArthur, Martin Balsam, Eric Portman
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The Bedford Incident
Richard Widmark dans Aux postes de combat de James B. Harris.

Remarques :
* James B. Harris a produit The Killing, Paths of Glory et Lolita mais a cessé son partenariat avec Kubrick avant Dr. Folamour. Certaines sources le créditent d’avoir participé à l’écriture de ce dernier mais rien n’est moins sûr.

* The Bedford Incident n’est pas basé sur des faits réels mais on sait depuis l’ouverture des archives soviétiques qu’un incident presque similaire a eu lieu. En octobre 1962 (donc avant la crise de Cuba), un sous-marin soviétique a été pris en chasse par un destroyer américain. Ce dernier, ignorant la présence d’armes nucléaires dans le sous-marin, a utilisé des charges explosives pour forcer le forcer à faire surface. Pensant qu’une 3e guerre mondiale avait éclaté, le capitaine soviétique voulut répliquer mais, fort heureusement, fut empêché par le commandant de la flotte qui se trouvait exceptionnellement à bord.

The Bedford Incident
Eric Portman, Sidney Poitier et Richard Widmark dans Aux postes de combat de James B. Harris.

The Bedford Incident
L’un des tous premiers rôles de Donald Sutherland : Aux postes de combat de James B. Harris.

30 mars 2018

Tortillard pour Titfield (1953) de Charles Crichton

Titre original : « The Titfield Thunderbolt »

Tortillard pour TitfieldLorsque la compagnie des chemins de fer britanniques annonce la fermeture de la ligne de Titfield, les villageois décident de prendre en main l’exploitation de la ligne. Ils doivent toutefois prouver à la compagnie qu’ils en sont capables. Tout cela n’est pas du goût des frères Crump qui viennent d’acheter un car dans le but d’avoir le monopole du transport dans la région…
Sur un scénario original de T. E. B. Clarke qui a déjà fourni plusieurs scénarios à la Ealing dont Passport to Pimlico, Charles Crichton réalise cette comédie pleine de fraîcheur et d’humour très britannique, tout à fait dans l’esprit des meilleures comédies des studios Ealing. L’humour repose bien entendu sur le nonsense et le saugrenu, sans crainte d’entailler joyeusement la vraisemblance de l’ensemble. C’est un humour bon enfant, certes, mais qui se moque de certains petits travers de la nature humaine : ainsi, si l’on s’engage pour de nobles causes, ce n’est pas toujours pour de bonnes raisons… Tortillard pour Titfield distille une généreuse dose de bonne humeur.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Stanley Holloway, George Relph, Naunton Wayne, John Gregson
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Voir les autres films de Charles Crichton chroniqués sur ce blog…

Remarque :
* Après la nationalisation des chemins de fer britanniques à la fin des années quarante, certaines petites lignes fortement déficitaires furent progressivement fermées durant les décennies cinquante et soixante.

Titfield Thunderbolt
Le car et le train se font concurrence dans Tortillard pour Titfield de Charles Crichton.

Titfield Thunderbolt
Naunton Wayne, Stanley Holloway et Gabrielle Brune dans Tortillard pour Titfield de Charles Crichton.

Titfield Thunderbolt
Le Titfield Thunderbolt reprend du service dans Tortillard pour Titfield de Charles Crichton.

22 mars 2018

Vedettes du pavé (1938) de Tim Whelan

Titre original : « St. Martin’s Lane »
Autre titre (USA) : « Sidewalks of London »

Vedettes du pavéCharles Staggers est un artiste des rues qui se produit devant les files d’attentes des théâtres et des music-halls londoniens. Il se prend d’affection pour Libby, une jeune danseuse de rue et pickpocket à ses heures. Il l’intègre dans son numéro…
Sur un scénario original, l’américain Tim Whelan signe cette production anglaise financée par l’allemand et émigré Erich Pommer. L’histoire est très classique et n’est pas des plus passionnantes : l’ascension d’une jeune fille très pauvre vers la célébrité. L’attrait principal réside sans aucun doute dans l’interprétation, surtout celle de Charles Laughton qui tient un rôle assez complexe. L’entente n’a pas été merveilleuse sur le plateau, Laughton et Vivien Leigh se s’entendaient pas et n’avaient aucune envie de jouer ensemble ; il n’y a donc aucune chimie particulière entre les deux acteurs. Rex Harrison, de son côté, a un rôle plus effacé. Certaines scènes ont été tournées sur les lieux réels à Londres (Cambridge Circus, Shaftesbury Avenue, Piccadilly Circus et, bien entendu, St. Martin’s Lane). Le film est assez rare. Il n’eut que peu de succès, même à sa sortie en 1940 aux Etats-Unis après Gone with the Wind sous le titre Sidewalks of London.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Charles Laughton, Vivien Leigh, Rex Harrison
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St. Martin's Lane
Vivien Leigh et Charles Laughton dans Vedettes du pavé de Tim Whelan.

18 mars 2018

Goldfinger (1964) de Guy Hamilton

GoldfingerJames Bond est chargé d’enquêter sur un certain Goldfinger, un milliardaire obsédé par l’or. L’homme va se révéler être bien plus dangereux qu’escompté…
C’est avec ce troisième volet de ses aventures que le mythe James Bond  prend une ampleur inégalée. Les producteurs réalisent un sans-faute commercial par une habile campagne de préparation et en plaçant la majorité de l’intrigue aux Etats-Unis afin de gagner définitivement le public américain. Cet épisode ancre définitivement les ingrédients et le style de la série.  L’histoire est bien équilibrée et les innombrables invraisemblances n’ont aucune importance car elles nourrissent le « rêve ». Le détachement, très empreint de flegme britannique, est toujours de mise : le méchant a des rapports très courtois avec l’agent secret tout en ayant la ferme intention de le tuer. Le modernisme est encore plus poussé avec l’utilisation d’un laser (peu connu à cette époque) et l’introduction de l’Aston Martin aux multiples gadgets. Guy Hamilton a une approche sans doute moins esthétique que Terence Young mais se montre efficace dans sa réalisation : il sait indéniablement créer des scènes fortes qui restent dans les esprits. Goldfinger est sans doute le premier blockbuster du cinéma moderne : le succès fut en effet fulgurant et planétaire, James Bond devint un phénomène de société. Pour un film britannique (c’est à dire non américain), c’est vraiment assez unique.
Elle: 3 étoiles
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Sean Connery, Gert Fröbe, Honor Blackman, Shirley Eaton, Tania Mallet, Harold Sakata, Bernard Lee
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Remarques :
* Quelques semaines avant la sortie du film, Ian Fleming décédera d’une crise cardiaque durant une partie de golf.
* Gert Fröbe est doublé (par Michael Collins) car l’acteur allemand ne parle pas anglais (contrairement à ce qu’on avait affirmé à Guy Hamilton).
* La majorité du tournage s’est déroulé en Angleterre. Sean Connery n’a même pas mis les pieds aux Etats-Unis pour le tournage.

GoldfingerDean Connery dans Goldfinger de Guy Hamilton.

GoldfingerGert Fröbe dans Goldfinger de Guy Hamilton.

GoldfingerHonor Blackman (ex-Avengers) dans Goldfinger de Guy Hamilton.

GoldfingerHarold Sakata dans Goldfinger de Guy Hamilton.

GoldfingerL’Aston Martin DB5  de James Bond dans Goldfinger de Guy Hamilton.
(Le modèle réduit Corgi Toys de cette Aston Martin allait faire la joie de toute une génération de jeunes bambins.)

 

5 mars 2018

Carol (2015) de Todd Haynes

CarolÀ New York en 1952, la jeune et timide Thérèse, passionnée de photo et vendeuse dans un grand magasin, fait la connaissance d’une riche et séduisante cliente, Carol, mère d’une petite fille et en instance de divorce. Une amitié se noue entre les deux femmes et elles passent de plus en plus de temps ensemble…
Carol est adapté du roman semi-autobiographique The Price of Salt que Patricia Highsmith publia en 1952 sous le pseudonyme Claire Morgan. L’auteure a pris un pseudonyme à la fois pour se protéger et parce qu’il s’agit d’un mélodrame et non d’un roman policier (1). Soixante ans plus tard, l’adaptation a été écrite par son amie Phyllis Nagy. Todd Haynes met en scène cette histoire de façon délicate, élégante, évitant les clichés et sans victimisation excessive. Au delà de la mise en évidence des pesanteurs de la société vis-à-vis de l’homosexualité féminine, il parvient à donner à cette histoire simple une dimension atemporelle et une indéniable beauté. Pour mieux restituer l’atmosphère du début des années cinquante, le film a été tourné en 16 mm. La recherche esthétique est sans doute parfois un peu voyante mais elle est réussie ; les couleurs, notamment, sont très belles. Le film est d’un très beau classicisme.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Cate Blanchett, Rooney Mara, Kyle Chandler, Sarah Paulson
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Carol
Cate Blanchett dans Carol de Todd Haynes.

Carol
Rooney Mara dans Carol de Todd Haynes. L’appareil-photo est un Argus C3 (marque américaine peu connue en Europe), un appareil assez bon marché à mise au point télémétrique (séparée de l’objectif, ajusté avec les grosses molettes) commercialisé entre 1939 et 1966.

Carol
Cate Blanchett et Rooney Mara dans Carol de Todd Haynes.

(1) Le roman connu un grand succès, notamment lors de son édition en livre de poche à la fin des années soixante : près d’un million d’exemplaires furent au final vendus. Patricia Highsmith a nié en être l’auteur pendant 38 ans avant de donner la permission pour une réédition sous son nom avec le titre Carol en 1990.

15 février 2018

Bons baisers de Russie (1963) de Terence Young

Titre original : « From Russia with Love »

Bons baisers de RussieL’organisation criminelle Spectre projette de mettre la main sur une machine de déchiffrement soviétique. Pour ce faire, elle entend se servir des services secrets britanniques en leur faisant croire qu’une employée de l’ambassade soviétique à Istanbul est prête à leur livrer la machine…
Dès les premiers signes de succès de Dr. No, la décision est prise de mettre en chantier un second film avec l’agent secret 007. Le choix se porte naturellement sur le roman le plus vendu de la série écrite par Ian Fleming, Bons baisers de Russie, l’un des dix livres préférés du président Kennedy (!) Le film est incontestablement plus abouti, avec moins de maladresses mais a perdu son côté « diamant brut ». Les péripéties sont nombreuses et mouvementées, avec beaucoup de lieux différents, ce qui bizarrement n’empêche pas certaines longueurs. Après l’exotisme des tropiques, c’est l’exotisme oriental qui sert d’attrait (nous avons même droit à une (interminable) danse du ventre). Les gadgets commencent à apparaitre. L’ensemble semble pencher vers le style Hitchcock, à la fois par le suspense de la poursuite et aussi par le style « beauté froide » de la James Bond girl Daniela Bianchi. Bons baisers de Russie est considéré comme l’un des meilleurs de la série par certains amateurs.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Sean Connery, Daniela Bianchi, Pedro Armendáriz, Robert Shaw, Bernard Lee, Eunice Gayson
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Bons baisers de Russie
Sean Connery et Daniela Bianchi dans Bons baisers de Russie de Terence Young.

Bons Baisers de Russie
Sean Connery pénétrant dans votre chambre vêtu d’une seule serviette de bain… L’image avait de quoi affoler la gent féminine de l’époque et promût Sean Connery au rang des sex-symbols.  Sean Connery et Daniela Bianchi dans Bons baisers de Russie de Terence Young.

Bons Baisers de Russie
Robert Shaw est un méchant difficile à vaincre dans Bons baisers de Russie de Terence Young.

9 février 2018

James Bond 007 contre Dr. No (1962) de Terence Young

Titre original : « Dr. No »

James Bond 007 contre Dr. NoLorsque deux agents britanniques disparaissent mystérieusement en Jamaïque, le chef des services secrets britanniques envoie l’agent spécial 007 James Bond pour enquêter. Dès son arrivée, il est espionné et se retrouve rapidement en grand danger…
Premier d’une longue série, James Bond 007 contre Dr No est adapté du roman Docteur No de Ian Fleming, publié en 1958. Il fut produit avec un budget modeste mais n’en établit pas moins les standards du genre avec un agent secret élégant et détaché personnifié à la perfection par Sean Connery, des James Bond girls  très avenantes, des méchants implacables et le fameux générique. Seuls, les gadgets ne sont pas encore là. Le propos est moderne, utilisant des thématiques comme la radioactivité et la conquête de l’espace. Terence Young donne le ton de la mise en scène avec une belle intégration de scènes d’action réalistes. Le succès fut immédiat, d’une ampleur inattendue. Les acteurs Sean Connery et Ursula Andress, alors quasi-inconnus, devinrent du jour au lendemain des stars mondiales. Terence Young signera encore deux autres films de la série.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Sean Connery, Ursula Andress, Joseph Wiseman, Jack Lord, Bernard Lee, Anthony Dawson, Eunice Gayson
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James Bond contre Dr No
« Bond, James Bond »… Le premier plan de Sean Connery dans James Bond 007 contre Dr. No de Terence Young établit un style qui durera…

James Bond contre Dr No
L’une des scènes les plus célèbres du cinéma : l’apparition d’Ursula Andress dans James Bond 007 contre Dr. No de Terence Young. Ian Fleming avait écrit « elle sort de l’eau et apparaît telle la Vénus de Botticelli ». Terence Young parvient merveilleusement à recréer cet enchantement tout en restant très simple (après tout, comme l’actrice l’a répété, elle ne fait que marcher…) Belle utilisation de la lumière naturelle et des nuages (la même scène sur fond de ciel bleu aurait sans doute été plus anodine).
Du fait de son fort accent (Ursula Andress est originaire de la Suisse alémanique), l’actrice est doublée. Ce sera d’ailleurs le cas de beaucoup de James Bond Girls des années soixante.

James Bond contre Dr No
Le premier « méchant » des James Bond : Joseph Wiseman dans James Bond 007 contre Dr. No de Terence Young.

James Bond contre Dr No
Dans la salle à manger du Dr. No, James Bond remarque la présence d’un portrait du duc de Wellington par Goya. Le vol de ce tableau exposé à la National Portrait Gallery avait fait la une des journaux britanniques en 1961. La décision de faire ce clin d’œil à l’actualité n’a été prise que la veille du tournage de la scène. Le tableau ne sera retrouvé qu’en 1965. L’histoire réelle du vol de ce tableau a fait l’objet d’un film en 2020 : The Duke

19 janvier 2018

Eyes Wide Shut (1999) de Stanley Kubrick

Eyes Wide ShutBill Hartford est un médecin aisé de la haute-société newyorkaise. Avec sa femme Alice, ils se rendent à la fastueuse réception d’un de ses clients. Il n’y connaît personne mais s’aperçoit que le pianiste est un ancien camarade de la faculté de médecine…
Basé sur une nouvelle du viennois Arthur Schnitzler, Traumnovelle (Rien qu’un rêve), datant de 1926 et qu’il suit très fidèlement, Eyes Wide Shut est l’ultime réalisation de Stanley Kubrick qui a hélas trouvé la mort peu après l’avoir achevé. C’est peut-être l’un des ses films les plus sous-estimés, le plus mal compris, assurément. Il a été boudé à sa sortie par les critiques qui attendaient « le film le plus sexy jamais réalisé » et qui furent déconcerté par ce film complexe sur le désir, l’attirance, la place de la sexualité mais aussi sur le couple, la fidélité, la tromperie et même la vérité. Kubrick a depuis longtemps admiré Schnitzler pour sa capacité à appréhender et à comprendre l’âme humaine et il parvient parfaitement à le mettre en images. Kubrick a pris son temps à la fois pour préparer le film et pour le tourner. Il prend aussi son temps pour dérouler cette histoire, une certaine placidité qui donne une grande profondeur à l’ensemble. Le film est aussi d’une grande beauté formelle, la perfection se nichant jusque dans les moindres détails. Eyes Wide Shut est certainement la plus belle interprétation de Tom Cruise et aussi de Nicole Kidman qui étaient alors mari et femme (Kubrick voulait absolument un couple d’acteurs). C’est un film dont on découvre la richesse à chaque nouvelle vision.
Elle: 5 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Tom Cruise, Nicole Kidman, Sydney Pollack, Todd Field
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Eyes Wide Shut
Tom Cruise et Nicole Kidman dans Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick.

Eyes Wide Shut
Aucun projecteur classique n’a été utilisé dans la scène du bal de Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick.

Remarques :
* Eyes Wide Shut a été tourné par Kubrick en format 4:3.
* Une fois le film terminé, Kubrick a déclaré qu’il considérait Eyes Wide Shut comme sa plus belle réalisation.
* La nouvelle d’Arthur Schnitzler, Traumnovelle, avait déjà inspiré le film La Ronde de Max Ophüls en 1950.
* Michel Chion replace très justement Eyes Wide Shut dans la lignée des « comédies du remariage » (comédies screwballs) des années trente. On pourrait dire que c’en est une variante philosophique…
* Seulement quelques plans sans acteur ont été tournés à New York, les rues de la Big Apple ont été reconstitués en studio. Dans quelques plans, Tom Cruise marche sur un tapis roulant.
* Kubrick a utilisé un type très spécial de pellicule Kodak (qui n’était plus fabriqué) dont il fait prolonger les temps de développement : cela lui permet de tourner en basse lumière.
* Caméo : Kubrick apparaît dans la scène du cabaret où joue le pianiste : il est l’un des clients à l’arrière-plan (visible lorsque le serveur apporte la commande).
* Pour éviter d’être classé X, des caches ont été rajoutés aux Etats-Unis dans les scènes d’orgie sous la forme de quelques personnages vus de dos qui masquent « l’action ». Le contrat signé par Kubrick permettait à la Warner de faire cela : il portait sur un film classé R (restricted = interdit aux moins de 17 ans non accompagnés) mais pas X (interdiction totale aux mineurs).

Eyes Wide Shut

Eyes Wide Shut
Tom Cruise dans Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick.

A propos de l’adaptation :
Le scénario du film est très proche de la nouvelle d’Arthur Schnitzler. En fait, seul le personnage de Ziegler (Sydney Pollack) a été ajouté ainsi que la scène du bal au début du film (dans la nouvelle, le bal n’est qu’évoqué par la femme, plus tard). Même, les dialogues sont souvent ceux écrits par le viennois en 1925. La scène de l’orgie reprend le décorum et les habillements décrits dans la nouvelle, ce qui explique son décalage apparent avec notre monde actuel. Certaines scènes ont été tournées mais écartées au montage (notamment une scène heureuse du couple canotant sur un lac, certaines photos de tournage la montrent). L’empreinte de Freud était déjà très présente dans la nouvelle et Kubrick l’a encore renforcée.

Eyes Wide Shut
Tom Cruise dans un superbe plan de  Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick.

Eyes Wide Shot
Sydney Pollack et Nicole Kidman dans Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick.

Eyes Wide Shut
Tom Cruise et Nicole Kidman dans Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick.

17 décembre 2017

Petits meurtres entre amis (1994) de Danny Boyle

Titre original : « Shallow Grave »

Petits meurtres entre amisPour trouver un quatrième colocataire, trois amis font passer de véritables entretiens à une série de postulants et s’amusent à leurs dépens. Ils finissent par accepter un homme plus âgé qu’eux et assez mystérieux. Le lendemain de son emménagement, ils ont une très grosse surprise… Petits meurtres entre amis est le premier long métrage de Danny Boyle, tourné juste avant Trainspotting (1996). Le titre français laisse supposer qu’il s’agit d’une élégante fantaisie policière mais il n’en est rien. Il s’agit d’une histoire qui baigne dans le glauque et le cynisme, le tout enrobé d’un humour noir assez dérangeant (a noter que le titre original « Shallow Grave » signifie « enterré peu profond »). Le film débute pourtant sur un rythme assez enlevé, avec un montage rapide et une atmosphère plutôt légère ; les trois amis apparaissent instantanément très antipathiques, toutefois. Et les choses ne s’arrangent guère ensuite. L’humour passe surtout par les dialogues, une série assez soutenue de punch lines, le revers de la médaille étant que la cohérence globale en souffre un peu. Danny Boyle a tourné Petits meurtres entre amis en trente jours avec un budget assez réduit. Le succès fut immense en Grande Bretagne et aussi en France.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Kerry Fox, Christopher Eccleston, Ewan McGregor
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Shallow Grave
Christopher Eccleston, Ewan McGregor et Kerry Fox dans Petits meurtres entre amis de Danny Boyle.