17 novembre 2014

Le Tombeur (1933) de Roy Del Ruth

Titre original : « Lady Killer »

Le tombeurA cause de sa passion pour le jeu, Dan est devenu un gangster recherché par la police. Il fuit en Californie où il se fait engager comme figurant à Hollywood et commence à gravir les échelons vers la célébrité… Au début des années trente, la Warner a décliné le personnage futé et débrouillard de James Cagney en gangster repenti sous de nombreuses formes. Dans Lady Killer (le titre est bien entendu à double sens : « tueur de femme » et « tombeur »), il devient acteur à Hollywood, ce qui nous permet d’assister au tournage d’un film dans quelques scènes. Lady Killer est nettement un pre-Code movie (= film qui précède de peu la généralisation du Code Hays de censure) : l’histoire est franchement amorale et plusieurs scènes n’auraient pu figurer dans un film un ou deux ans plus tard. L’histoire est un peu tirée par les cheveux (si je puis me permettre ce jeu de mots) mais ses accents satiriques la Le tombeur rendent plaisante. Le film offre un beau mélange d’action et de comédie. Et il y a toujours cette combinaison d’éléments presque contradictoires en James Cagney qui le rend si attrayant : dureté et arrogance certes, mais aussi astuce, témérité et droiture qui font toujours pencher la balance du bon côté et emporte l’adhésion des spectateurs.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: James Cagney, Mae Clarke, Margaret Lindsay, Douglass Dumbrille, Henry O’Neill
Voir la fiche du film et la filmographie de Roy Del Ruth sur le site IMDB.

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Remarques :
* Deux ans après Public Enemy, Mae Clarke se retrouve face à James Cagney. Décidément malmenée par les scénaristes, elle ne va pas se faire écraser un pamplemousse sur le visage cette fois, elle va se faire éjecter de façon brutale : Cagney la traîne par les cheveux avant de la jeter littéralement hors de chez lui. Cette scène était certainement incluse dans le but de choquer et de faire parler comme la scène du pamplemousse avait pu le faire.

* Clin d’oeil à Public Enemy : lorsqu’elle consulte le dépliant touristique sur la Californie dans la gare, Mae Clarke est soudainement inquiète lorsqu’elle lit qu’on y cultive des pamplemousses.

* Les premières scènes (discussions avec la marchande de cigares suivie d’une partie clandestine de poker avec des escrocs) rappellent étrangement Smart Money sorti deux ans plus tôt. Un clin d’oeil sans aucun doute.

Mae Clarke et James Cagney dans Lady Killer (1933)
Mae Clarke sévèrement malmenée par James Cagney. A noter le truc d’acteur : Mae Clarke agrippe à deux mains le poignet de James Cagney afin de pouvoir être trainée sans que ses cheveux ne subissent toute la force de traction.

16 novembre 2014

Picture Snatcher (1933) de Lloyd Bacon

Picture SnatcherA sa sortie de prison, le gangster et chef de bande Danny Kean est bien décidé à se ranger : il se fait engager comme reporter-journaliste pour la presse à scandales… Picture Snatcher est un film taillé sur mesure pour James Cagney : une bonne dose d’action sans temps mort, des dialogues qui claquent, l’acteur est ici dans son élément. Malgré le sujet, le film est à ranger dans les films de gangster, il se termine d’ailleurs par une fusillade de plusieurs minutes (figure obligée du genre). L’originalité du film est de dresser un portrait assez sévère de la presse racoleuse et sans aucune éthique, toujours prête à publier une photo volée. Si Cagney est égal à lui-même, la surprise vient de la blonde Alice White dans un petit rôle : elle tient tête à Cagney sur son terrain, pleine de vitalité en exubérante nymphomane à la voix haut-perchée.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: James Cagney, Ralph Bellamy, Patricia Ellis, Alice White
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Remarque :
* Selon les dires de James Cagney dans son autobiographie, le film fut tourné très rapidement en 15 jours (la norme de l’époque pour ce type de films est plutôt 20 jours). Cagney raconte même que Bacon a parfois gardé ce qui n’était qu’une simple répétition.

6 novembre 2014

Brother Orchid (1940) de Lloyd Bacon

Brother OrchidLorsque le chef de gang Little John Sarto (Edward G. Robinson) revient prendre sa place après avoir tenté de se retirer du racket, il la trouve occupée par son ancien bras droit Jack Buck (Humphrey Bogart). Entre les deux hommes, la guerre est déclarée… Brother Orchid illustre la fin d’un genre :  nous sommes bien à la fin de la décennie des films de gangsters. L’idée est ici à la fois d’adoucir le personnage du truand et d’introduire une bonne dose de comédie : Edward G. Robinson décide ainsi de partir en Europe « pour apprendre à avoir de la classe » et l’histoire le verra même enfiler une robe de bure dans un monastère. Aussi étonnant que cela puisse paraître, le mélange des genres est assez réussi : Brother Orchid est très plaisant, avec un humour bien dosé, les seconds rôles sont très bien tenus. Le film connut un certain succès, à son époque du moins.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Edward G. Robinson, Ann Sothern, Humphrey Bogart, Donald Crisp, Ralph Bellamy
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Remarques :
* Fatigué des rôles de gangster, Edward G. Robinson n’avait pu obtenir son rôle dans Dr. Ehrlich’s Magic Bullet de William Dieterle (retraçant la vie d’un éminent chercheur en biologie) qu’à la condition de faire un film de gangster supplémentaire. Ce sera Brother Orchid.
* Le film n’est jamais sorti en France.

 

Brother Orchid

24 octobre 2014

Prends l’oseille et tire-toi! (1969) de Woody Allen

Titre original : « Take the Money and Run »

Prends l'oseille et tire-toi!Fort de son succès en tant que scénariste et acteur comique, Woody Allen, âgé de 33 ans, passe à la réalisation pour se mettre lui-même en scène. Il utilise un scénario écrit de longue date avec un ami. Prends l’oseille et tire-toi! raconte l’histoire d’un pilleur de banques parfaitement atypique : malchanceux, maladroit, trouillard, le personnage ne correspond en rien à l’image du gangster. Le film a la forme d’un reportage sérieux avec commentaires en voix-off et témoignages à la clef (les parents n’ont accepté de témoigner qu’à la condition de porter des masques!) Cette forme permet à Woody Allen de placer un très grand nombre de gags, parfois très courts, toujours très inventifs et souvent mémorables (tels le joueur de violoncelle qui tente de suivre une fanfare en train de défiler, le caissier qui n’arrive pas à déchiffrer le mot transmis par le pilleur, le pistolet en savon, les forçats attachés, etc. etc.) Cette structure un peu morcelée est caractéristique de ses premiers films, Prends l'oseille et tire-toi!il faudra attendre Sleepers pour qu’il adopte une structure narrative continue. Avec Prends l’oseille et tire-toi!, Woody Allen se situe pleinement dans l’héritage direct de Chaplin et surtout des Marx Brothers (on notera que le masque utilisé par les parents est un masque de Groucho Marx).
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Woody Allen, Janet Margolin
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Prends l'oseille et tire-toi! (Take the Money and Run)Woody Allen et Janet Margolin dans Prends l’oseille et tire-toi! (Take the Money and Run) de Woody Allen.

29 septembre 2014

Chicago (1931) de Tay Garnett

Titre original : « Bad Company »

ChicagoUn jeune avocat qui travaille pour la pègre désire se retirer pour pouvoir se marier avec une jeune femme sans savoir qu’elle n’est autre que la soeur du concurrent de son patron. Le mariage est toutefois autorisé afin de faire cesser la lutte entre les deux gangs… Si Bad Company est un film qui a été plutôt mal perçu à sa sortie, il est considéré aujourd’hui comme l’un des plus particuliers des gangster films du début des années trente. En un sens, on peut trouver qu’il préfigure Le Parrain car il se focalise plus les relations humaines à l’intérieur d’une famille de la pègre et les implications psychologiques des crimes commis que sur l’action et les coups d’éclats. Comme pour compenser ce fait, Tay Garnett a concocté une scène finale qui a marqué les esprits : un duel furieux à la mitraillette de plusieurs minutes. Chicago Mais le plus intéressant est certainement le portrait du caïd Goldie, psychopathe au comportement névrotique, et aussi celui de cette jeune femme qui découvre avec effroi que non seulement elle a épousé un gangster mais aussi qu’elle vient elle-même de ce milieu. On pourra noter l’influence des expressionnistes notamment dans cette scène où l’ombre d’une main géante se profile au-dessus du personnage principal sur le point de tomber dans un piège.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Helen Twelvetrees, Ricardo Cortez, John Garrick, Frank Conroy
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Chicago (Bad Company)Helen Twelvetrees et Ricardo Cortez dans Chicago (Bad Company) de Tay Garnett.

Homonymes :
Chicago de Franck Urson (1927) avec Phyllis Haver
Chicago de Rob Marshall (2002) avec Catherine Zeta-Jones et Renée Zellweger
Bad Company de Robert Benton (1972) avec Jeff Bridges
Bad Company (Duo mortel) de Damian Harris (1995) avec Laurence Fishburne
Bad Company de Joel Schumacher (2002) avec Anthony Hopkins

6 juin 2014

Ne nous fâchons pas (1966) de Georges Lautner

Ne nous fâchons pasAncien truand retiré des « affaires », Antoine Beretto dirige paisiblement sa petite entreprise de location de bateaux lorsque son passé ressurgit sous la forme de deux anciens comparses qui lui demandent son aide : il s’agit de récupérer une certaine somme auprès d’un petit escroc minable, Michalon. Cela va l’entraîner beaucoup plus loin qu’il ne le souhaitait… Réalisé deux ans après Les Tontons Flingueurs et Les Barbouzes, Ne nous fâchons pas joue sur le même registre de l’humour avec une partie de la même équipe. Malgré le titre, on se doute que Lino Ventura va avoir beaucoup de mal à garder son calme et le premier à en faire les frais sera Michalon / Jean Lefebvre qui, entre deux claques, prend son air de chien battu qui lui va si bien. Les dialogues sont de Michel Audiard qui distille ses belles réparties tout au long du film. Sans être aussi réussis que les deux films précités, Ne nous fâchons pas est un bon divertissement.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Lino Ventura, Mireille Darc, Jean Lefebvre, Michel Constantin
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Remarques :
* A la fin du film, le morceau qui ressemble comme deux gouttes d’eau au Gloria des Them (à ce niveau de ressemblance, on peut parler de plagiat) est chanté par… Graeme Allright !* La scène incroyable du pont a été tournée au viaduc de Malvan, détruit pendant un bombardement en 1944 et dont seul le pilier central avait résisté. Ce pilier fut détruit par le génie civil au printemps 1966, permettant à Lautner de mettre dans la boîte une scène assez unique en son genre.

14 mai 2014

Impasse des Deux Anges (1948) de Maurice Tourneur

Impasse des Deux AngesActrice de music-hall, Marianne est sur le point d’abandonner sa carrière pour épouser le marquis Antoine de Fontaines qui lui confie un superbe collier de diamants pour la cérémonie. La veille du mariage, elle voit revenir Jean, l’un de ses anciens amours au passé trouble… Ultime réalisation de Maurice Tourneur, Impasse des Deux Anges n’est pas parfaitement représentatif du talent de ce réalisateur. L’histoire, écrite par Jean-Paul Le Chanois, entremêle une histoire d’amour sur une trame policière avec une peinture sociale, mais aucun de ces trois éléments n’est vraiment convaincant et l’ensemble peut paraître bancal. Le plus réussi est encore l’atmosphère, tout à fait dans la veine du réalisme poétique des années trente. Cette atmosphère est soulignée par un joli effet de double exposition dans les flashbacks qui rend les personnages transparents.
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Paul Meurisse, Simone Signoret, Marcel Herrand, Danièle Delorme, Jacques Baumer
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15 janvier 2014

L’Enfer de la corruption (1948) de Abraham Polonsky

Titre original : « Force of Evil »

L'enfer de la corruptionL’avocat Joe Morse aide son client, un caïd de la pègre, à donner une façade respectable à une arnaque sur des paris illégaux qui doit mettre à terre leurs « concurrents ». Joe a un frère ainé qui est l’un de ceux qui devraient être ruinés et il tente donc de le faire abandonner… Force of Evil est un film noir tiré d’un roman d’Ira Wolfert. Abraham Polonsky dont c’est ici le premier long métrage, en a écrit l’essentiel de l’adaptation. Tout comme le roman, le film assimile le capitalisme sauvage au gangstérisme et, de façon inhabituelle pour l’époque, Polonsky choisit de ne pas représenter la Loi (même si elle joue un rôle important dans l’histoire) car selon lui « elle n’est qu’une représentation de plus du mal général dans lequel nous vivons ». Tous les personnages à l’écran sont donc impliqués d’une façon ou d’une autre dans ces activités illégales mais fructueuses de paris truqués, il n’y aucun personnage irréprochable. C’est un premier film très réussi mais hélas, quelques mois plus tard, John Garfield et Abraham Polonsky seront victimes de la « chasse aux sorcières », ce qui stoppera net sa carrière de réalisateur qui aurait certainement été remarquable.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: John Garfield, Thomas Gomez, Marie Windsor, Roy Roberts
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Remarque :
Polonsky avait l’année précédente écrit le scénario du brillant Body and Soul de Robert Rossen.

9 janvier 2014

Drive (2011) de Nicolas Winding Refn

DriveLe jour, il est un brillant cascadeur pour le cinéma. La nuit, il conduit avec grande expertise gangsters et autres cambrioleurs. Mais après avoir fait connaissance avec sa jolie voisine, il va être entrainé dans une histoire qui risque de mal se terminer… Les cinq premières minutes de Drive sont particulièrement réussies, un magistral jeu du chat et de la souris, pratiquement sans une parole ce qui renforce son impact. Le reste du film est loin d’être aussi prenant mais il est indéniable que le danois Nicolas Winding Refn possède un style qui lui est propre qui repose sur une mise en scène et un montage particulièrement maitrisés. Sous une apparence extérieure très stylisée et faite pour plaire, le fond de l’histoire est hélas d’un intérêt bien moindre. Nicolas Winding Refn exploite largement le charme et le charisme de son acteur principal, taciturne à l’excès, créant ainsi de très forts contrastes lors de poussées de violence sauvage inattendues. Le film a été très largement louangé par le public et par la presse…
Elle:
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Ryan Gosling, Carey Mulligan, Bryan Cranston, Albert Brooks, Oscar Isaac
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Remarque :
* Le prix de la mise en scène à Cannes a été décerné à Nicolas Winding Refn pour ce film.

28 décembre 2013

Taxi, roulotte et corrida (1958) de André Hunebelle

Taxi, roulotte et corridaC’est l’été. Maurice, chauffeur de taxi parisien, accroche sa caravane et emmène toute la famille en Espagne. Les vacances vont être quelque peu mouvementées… Taxi, roulotte et corrida fait partie de ces innombrables films où De Funès forgeait son personnage de français râleur mais coriace. Bien sûr, on peut regarder avec une nostalgie bienveillante cette France des années cinquante, s’amuser des trésors d’inventivité déployés pour passer la douane, sourire dans les meilleurs passages, mais l’ensemble n’est pas très relevé, le scénario se révélant être assez simplet. Il y a pourtant de nombreux bons acteurs dans les seconds rôles et aussi une courte apparition de Jacques Dufilho et même de Michel Galabru (en douanier, paraît-il, très difficile à repérer). La jeune Véra Valmont, en pseudo-Marilyn, est chargée d’apporter un peu de sensualité à l’ensemble. Taxi, roulotte et corrida est en réalité plus amusant par le regard qu’il nous permet de porter sur la France de cette époque.
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Louis de Funès, Raymond Bussières, Annette Poivre, Guy Bertil, Véra Valmont, Paulette Dubost
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Remarque :
On remarquera, dans la liste des acteurs, Annette Poivre et Sophie Sel… En réalité, Raymond Bussières et Annette Poivre sont mari et femme (comme dans le film donc) et Sophie Sel est leur fille. Poivre et Sel sont bien entendus des noms de scène…