10 avril 2013

Comment l’esprit vient aux femmes (1950) de George Cukor

Titre original : « Born Yesterday »

Comment l'esprit vient aux femmesUn magnat de la ferraille aux manières rustaudes arrive à Washington avec son avocat pour soudoyer un membre du Congrès. Il est accompagné de sa maitresse, une ancienne danseuse pas très futée qu’il utilise comme prête-nom dans ses « affaires ». Désireux de la voir faire bonne figure, il engage un journaliste pour lui faire un brin d’éducation… Born Yesterday était au départ une pièce de Garson Kanin (bien connu des cinéphiles pour ses livres sur Hollywod) qui eut un très grand succès à Broadway. Judy Holliday y tenait le rôle principal et le reprend ici brillamment à l’écran. Pour ce personnage de ravissante idiote, l’actrice a un jeu très expressif, parfois à la limite de surjouer mais sans jamais franchir la ligne. Ses expressions et intonations sont riches et démonstratives et sa gestuelle est parfaitement maitrisée (lors de la partie de gin rami, elle est stupéfiante). Face à elle, Broderick Crawford est merveilleux, un véritable bull-dog. Le scénario est assez brillant, très simple à la base mais richement développé avec de très bons dialogues. Born Yesterday est un beau spécimen de comédie américaine, dans ce qu’elle a de meilleur.
Elle:
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Judy Holliday, Broderick Crawford, William Holden
Voir la fiche du film et la filmographie de George Cukor sur le site IMDB.

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Remarque :
Judy Holliday a été récompensée par l’Oscar 1951 de la meilleure actrice  pour sa prestation dans Born Yesterday.

Remake :
Quand l’esprit vient aux femmes (Born Yesterday) de Luis Mandoki (1993) avec Melanie Griffith et John Goodman, un remake aussi mauvais qu’inutile.

5 avril 2013

Les Infidèles (2012) de Jean Dujardin & 7 réalisateurs

Les infidèlesSur une idée de départ de Jean Dujardin et Gilles Lellouche, Les Infidèles est composé d’une petite dizaine de sketches ayant tous pour personnages principaux deux quadras immatures et dragueurs. De façon surprenante pour une comédie, le ton général n’est pas si enjoué que cela, certaines histoires étant même assez déprimantes. Nous sommes donc loin des films à sketches italiens qui étaient, eux, si réjouissants. Les histoires sont assez prévisibles et manquent souvent d’originalité, le meilleur sketch, et le plus amusant, étant à mes yeux celui de la réunion des « Infidèles Anonymes » où Sandrine Kiberlain tente de mener une thérapie de groupe. L’ensemble donne l’impression d’avoir été écrit à la hâte. Le marketing d’un tel film est facile…
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Jean Dujardin, Gilles Lellouche, Sandrine Kiberlain, Alexandra Lamy, Manu Payet
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Les sketches :
Le Prologue réalisé par Fred Cavayé
Bernard réalisé par Alexandre Courtes
La Bonne Conscience réalisé par Michel Hazanavicius
Lolita réalisé par Éric Lartigau
Thibault réalisé par Alexandre Courtes
La Question réalisé par Emmanuelle Bercot
Simon réalisé par Alexandre Courtes
Les Infidèles Anonymes réalisé par Alexandre Courtes
Las Vegas réalisé par Jean Dujardin et Gilles Lellouche

1 avril 2013

L’Arnacoeur (2010) de Pascal Chaumeil

L'arnacoeurAlex est briseur de couples professionnel. Un de ses riches clients lui donne pour mission d’empêcher le mariage de sa fille qui a lieu dans une semaine… L’Arnacoeur est une comédie qui a rencontré un franc succès, tant auprès des critiques que du public. Il s’agit du premier film de Pascal Chaumeil. Le scénario est savamment dosé avec une pointe d’impertinence, une pointe de vulgarité et une bonne dose de charme. Le film repose sur un duo d’acteurs, chacun restant conforme à son image. Le meilleur est certainement à chercher du côté des seconds rôles où l’inventivité est bien plus grande. Il faut sans doute que le cinéma français soit capable de faire de tels films à recette (dans les deux sens du terme) mais on a le droit de trouver le résultat ennuyeux…
Elle:
Lui : 1 étoile

Acteurs: Romain Duris, Vanessa Paradis, Julie Ferrier, François Damiens
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24 mars 2013

Pour le pire et pour le meilleur (1997) de James L. Brooks

Titre original : « As Good as It Gets »

Pour le pire et pour le meilleurMelvin est un écrivain new yorkais, solitaire, souffrant de troubles obsessionnels compulsifs. Sa vie va être bouleversée par son voisin, un artiste homosexuel, et par la serveuse du restaurant où il a ses habitudes… Pour le pire et pour le meilleur est surtout un film d’acteur : Jack Nicholson y est magnifique, toujours proche du cabotinage mais sans jamais franchir la ligne jaune. Il crée ainsi un personnage totalement hors du commun, à la limite de l’asociabilité, difficile à cerner. C’est du grand art et quand les dialogues sont à la hauteur, comme c’est le cas dans la première moitié du film, le résultat est un régal. Face à lui, Helen Hunt est assez remarquable, parvenant par moment à faire jeu égal avec Nicholson. Hélas, comme c’est souvent le cas avec les films qui reposent sur des numéros d’acteurs, il est difficile de tenir la longueur : la première heure passée, le film s’enlise dans le conventionnel, devient très long et même ennuyeux.
Elle: 2 étoiles
Lui : 2 étoiles

Acteurs: Jack Nicholson, Helen Hunt, Greg Kinnear, Cuba Gooding Jr, Skeet Ulrich, Shirley Knight
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Remarque :
Jack Nicholson et Helen Hunt ont reçu tous deux un Oscar pour leur rôle dans As Good as It Gets.

1 mars 2013

Le Cochon de Gaza (2011) de Sylvain Estibal

Titre anglais : « When Pigs Have Wings »

Le cochon de GazaLe lendemain d’une tempête, Jafaar, un pêcheur palestinien de Gaza, trouve dans ses filets un cochon vivant. Il ne sait comment faire pour se débarrasser de cet animal impur. Il tente tout d’abord de le proposer discrètement aux observateurs des Nations-Unies mais sans succès… Cette comédie qui se déroule à Gaza est le premier long métrage d’un journaliste et romancier français né en Uruguay, Sylvain Estibal. Il en a écrit lui-même le scénario. Le sujet a beau être délicat, surtout quand il s’agit de faire de l’humour, il sait trouver le ton juste. Son humour n’est jamais méchant ni même trop caustique et il est difficile de ne pas adhérer au fond du propos qui prône le rapprochement des peuples. Sylvain Estibal joue beaucoup avec le côté saugrenu et même ubuesque de certaines situations. Il y a vraiment de belles trouvailles d’humour et de belles réparties. Le Cochon de Gaza est une réussite.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Sasson Gabai, Baya Belal, Myriam Tekaïa, Khalifa Natour, Ulrich Tukur
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17 février 2013

Notre agent à La Havane (1959) de Carol Reed

Titre original : « Our Man in Havana »

Notre agent à La HavaneDans le Cuba d’avant la Révolution, l’anglais Jim Wormold tient une petite boutique d’aspirateurs. Il a une grande fille qu’il élève seul et désire envoyer finir sa scolarité en Suisse. Il est approché par un homme, anglais lui-aussi, qui lui propose de travailler pour les services secrets britanniques…… C’est Graham Greene qui a écrit lui-même l’adaptation de son livre Notre agent à La Havane. Il a accentué la satire du monde de l’espionnage et gommé les aspects les plus noirs du roman. Le film de Carol Reed est ainsi franchement une comédie et il en résulte un certain manque de tension malgré la très grande qualité de l’histoire. On peut par moments sentir l’ombre du Troisième Homme, par exemple dans l’atmosphère des ruelles sombres et vides et aussi dans le jeu de l’excellent Burl Ives qui évoque Orson Welles. Carol Reed et Alec Guinness auraient été en désaccord sur le style d’interprétation du personnage principal mais cela ne sent guère à l’écran. C’est toujours un grand plaisir de voir Alec Guinness avec son jeu subtil et nonchalant, un style qui n’est pas toujours parfaitement compris du fait de sa retenue très britannique (1). Notre agent à La Havane repose beaucoup sur son excellente prestation.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Alec Guinness, Burl Ives, Maureen O’Hara, Ernie Kovacs, Jo Morrow, Ralph Richardson
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Remarque :
Notre agent à La Havane a été tourné trois mois après la Révolution cubaine de janvier 1959. Fidel Castro a autorisé le film car il montre que la police de Fulgencio Batista pratiquait la torture et que les services secrets étrangers étaient bien présents.

(1) Le jeu très retenu d’Alec Guinness dans Notre agent à La Havane est indubitablement plus dans le style des productions Ealing que dans celui du Pont de la rivière Kwai. C’est un style de jeu qui a été jugé par certains critiques américains comme fade et sans caractère, alors que cette retenue en fait tout le charme et la subtilité.

9 février 2013

La Chaleur du sein (1938) de Jean Boyer

La chaleur du seinUn jeune homme se retrouve à l’hôpital après avoir tenté de se suicider. Trois mères aimantes se présentent successivement à son chevet mais aucune n’est sa vraie mère. Celle-ci est morte à sa naissance et son père s’est remarié ensuite trois fois. Le père, égyptologue, étant en déplacement, les trois « mères » vont devoir unir leurs efforts pour que le fils puisse retrouver une certaine joie de vivre… La Chaleur du sein est l’adaptation d’une pièce de théâtre à succès écrite par André Birabeau. Sa pièce était une satire sociale, raillant les mœurs modernes et le divorce qui mettent à mal la famille. En portant la pièce à l’écran, Jean Boyer a gardé le même acteur pour interpréter le jeune homme, Jean d’Orgeix, alias Jean Pâqui (1), et l’a entouré de plusieurs excellents acteurs. Comme toutes les comédies qui reposent sur une satire sociale de leur époque, La Chaleur du sein peine un peu à traverser le temps et peut paraître très daté. Néanmoins, les bons dialogues, vifs et intelligents, et l’interprétation parfaite permettent de garder l’intérêt intact. L’humour repose beaucoup sur la juxtaposition des mentalités différentes des trois mères, Arletty, la plus jeune des trois, étant bien entendu la plus moderne et la plus libérée. Il manque toutefois un petit quelque chose pour faire de La Chaleur du sein un très bon film. Il reste néanmoins plaisant.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Michel Simon, Arletty, Gabrielle Dorziat, Pierre Larquey, Jean Pâqui, Jeanne Lion, Marguerite Moreno, François Périer
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Remarques :
* Dans la scène où le jeune Gilbert et son ami se font des confidences sur leur enfance, l’ami est interprété par François Périer ; il s’agit de sa première apparition au cinéma.
* Le film était perdu mais fut heureusement retrouvé dans les années 80.

(1) Jean d‘Orgeix avait alors 17 ans. Il sera ensuite également champion du monde de voltige aérienne, pilote de stock-car, champion olympique d’équitation, guide de chasse en Afrique… Il est décédé en 2006 à l’âge de 85 ans.

7 décembre 2012

Fin d’automne (1960) de Yasujirô Ozu

Titre original : « Akibiyori »

Fin d'automneLa jeune Ayako vit veule avec sa mère depuis la mort de son père. Trois amis de jeunesse du défunt se mettent en charge de lui trouver un mari. Mais Ayako n’a aucune envie de quitter sa mère… Fin d’automne reprend le thème de Printemps Tardif qu’Ozu a tourné onze ans auparavant mais sur un registre totalement différent, plus proche d’une comédie. Ce que le film perd en intensité, notamment dans les rapports entre la fille et sa mère, il le gagne en humour. Et le résultat est tout aussi enthousiasmant. Le ton est donc plus léger : si le mariage est arrangé, c’est ici moins par convenance sociale que par les attentions d’un entourage bien intentionné mais quelque peu maladroit. L’humour est ainsi très souvent présent par l’intermédiaire du trio de quinquagénaires, tous trois amoureux de la même femme (la mère) et qui cherchent d’une certaine manière à assouvir leurs désirs que par personne interposée. Par sa forme, le film est enchanteur avec les superbes plans fixes, très construits (1), caractéristiques du style d’Ozu et une belle utilisation de la couleur. Au delà son apparente légèreté, Fin d’automne est un film vraiment admirable.
Elle: 4 étoiles
Lui : 5 étoiles

Acteurs: Setsuko Hara, Yôko Tsukasa, Mariko Okada, Keiji Sada, Shin Saburi, Nobuo Nakamura, Ryûji Kita, Chishû Ryû
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Remarques :
* Setsuko Hara, qui interprétait le rôle de la fille dans Printemps tardif, interprète le rôle de la mère dans Fin d’automne.
* Fin d’automne est sorti en France en 1979. Ce fut ainsi le troisième film d’Ozu à sortir en salles après Voyage à Tokyo et Le goût du saké. En outre, la même année, le Ciné-club d’Antenne 2 avait diffusé Printemps tardif et Printemps précoce. Cela faisait donc cinq films connus.

(1) Hormis la position de la caméra, proche du sol, le style d’Ozu se caractérise par des plans fixes toujours très construits : le sujet principal est généralement centré avec des éléments dans le reste d’image qui servent de repoussoir pour ramener le regard vers le centre. Ainsi, on notera qu’il y a toujours un premier plan, que ce soit des portes coulissantes ouvertes (qui forment un « cadre dans le cadre »), ou une table basse, un objet. Il est d’ailleurs intéressant d’observer la gestion de la profondeur, tous les plans se structurant sur 3, 4 voire 5 niveaux de profondeur.

5 décembre 2012

Bonjour (1959) de Yasujirô Ozu

Titre original : « Ohayô »

BonjourDans un quartier récent de petites maisons serrées les unes contre les autres, deux jeunes garçons envient le poste de télévision d’un de leurs voisins. Face au refus catégorique de leurs parents d’en acheter une, ils entament une grève de la parole… Bonjour est une comédie qui met en scène la vie quotidienne dans un petit quartier moderne où règnent les commérages et les jalousies. Ozu met en relief l’illusion du modernisme, s’amuse avec nos habitudes de communication et nous montre le regard des enfants sur le monde des adultes. Le film est léger, avec beaucoup de fraîcheur et d’humour. Le parallèle a parfois été fait avec les films de Tati. On peut aussi lui trouver un certain caractère atemporel dans le sens où nous assistons aujourd’hui à une survalorisation assez similaire du matériel. Comparé aux autres films d’Ozu, Bonjour est certainement moins profond mais, en contrepartie, il pourra présenter l’avantage d’être facile d’accès.
Elle:
Lui : 4 étoiles

Acteurs: Keiji Sada, Yoshiko Kuga, Chishû Ryû, Kuniko Miyake, Haruko Sugimura
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Remarque :
Ozu avait tourné en 1932 un film sur un thème similaire : Gosses de Tokyo.

8 novembre 2012

Patte de chat (1934) de Sam Taylor

Titre original : « The cat’s paw »

Patte de chatFils de missionnaire et élevé en Chine loin de toute civilisation occidentale, le jeune Ezekiel Cobb se rend aux Etats-Unis pour trouver une mère à ses futurs enfants. D’une grande naïveté, il se voit proposé d’être candidat à la mairie par le maire actuel ; en réalité, de mèche avec la pègre, celui-ci cherche à avoir un opposant facile à battre. Mais contre toute attente, le jeune Ezekiel gagne l’élection… The Cat’s Paw est un film assez à part dans la filmographie d’Harold Lloyd, un véritable tournant : Patte de chat alors qu’il avait pour habitude de concevoir ses films comme une succession de gags, majoritairement visuels, il décide (1) de traiter cette histoire qui fustige la corruption des politiques comme un vrai film parlant avec un récit. Cela reste une comédie mais le propos est plus sérieux. C’est assez réussi, Harold Lloyd est parfaitement crédible dans ce rôle de grand naïf. Il y a de belles scènes très amusantes et la fin est originale et forte, tout en étant comique. The Cat’s Paw peut être rapproché de certaines comédies de Frank Capra à connotation sociale ou politique, telle Meet John Doe.
Elle:
Lui : 3 étoiles

Acteurs: Harold Lloyd, Una Merkel, George Barbier, Nat Pendleton
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Remarque :
L’histoire originale, écrite par Clarence Budington Kelland, est parue dans le Saturday Evening Post en août et septembre 1933. Harold Lloyd en a acheté les droits avant même que l’histoire ne soit entièrement publiée.

(1) Harold Lloyd raconte qu’après avoir acheté l’histoire, Sam Taylor et lui se sont demandés s’ils devaient la traiter de la manière habituelle (gags) ou opter pour une nouvelle façon dictée par le parlant (récit). N’arrivant pas à choisir, ils auraient tiré au sort avec deux bouts de papier dans un chapeau.